CA Dijon, 1re ch. sect. 2, 6 septembre 1996, n° 1599/95
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
M. Frésard, Mme Bensalem
Défendeur :
Mme Benoit
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bray
Conseillers :
M. Littner, Mme Arnaud
Avoué :
SCP Avril-Hanssen
Avocats :
SCP Andre-Gillis, Me Jaubert-Vedrines, Me Saint-Martin-Crayt3n, Me Georgen
Exposé des faits et de la procédure :
Le 25 mars 1993, Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem ont vendu à Mademoiselle Benoit une pouliche d’un an, moyennant le prix de 12.000 francs. A la même date, Mademoiselle Benoit a placé cet animal en dépôt chez ses vendeurs, moyennant un salaire annuel de 3.600 francs. Il a été victime d’un accident le 29 mars suivant,
Imputant l’entière responsabilité de ses blessures à Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem, soit sur le fondement de l’article 1385 du code civil, pain qu'il a été mordu ou effrayé par leurs chiens, soit sur le fondement de l’article 1928 du même code, en leurs qualités de dépositaires, Mademoiselle Bencit les a assignés en réparation de préjudice. Par jugement du 24 avril 1995, le tribunal de grande instance d‹ Macon a fait droit au second moyen et a condamné Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem in solidum ‹ payer ä Mademoiselle Benoit 25.000 francs à titre de ‹dommages et intérêts ainsi que 2.OOO francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur Fresard et Mademoiselle BeniaLem ont interjeté appel de cette décision. Ils estiment que le tribunal a justement écarté leur responsabilité sur le fondement de l’article 1385 du code civil ‹3ès lors qu’aucun élément ne permet d'établir que les chiens soient à l’origine de l’accident. En revanche, ils souviennent qu’elle a été retenue à tort en considération de leur qualité de dépositaires dans la mesure où ils démontrent n’avoir commis aucune faute.
Subsidiairement, ils prétendent que le préjudice n’excède pas 12.000 francs, somme qu’ils proposent de régler contre restitution de l’animal. Enfin, réclament 10.000 francs en remboursement de leurs frais irrépétibles.
Mademoiselle Benoit réplique que les chiens ont eu un rôle actif dans la survenance de l’accident. Elle considère que la responsabilité des appelants est en toute hypothèse engagée sur le fondement de l’article 1928 du code civil puisque, non seulement, ils ne prouvent pas leur absence de faute, mais au contraire, elle démontre qu’ils en ont commis plusieurs'. Formant appel incident concernant l’indemnisation de son préjudice, elle sollicite leur condamnation à lui payer la somme totale de 91.942,64 francs ainsi que 9.000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
Discussion :
Attendu qu’il résulte d’une sommation interpellative délivrée à Monsieur Chevalier, assureur s:t d'une attestation délivrée par celui-ci, que Monsieur Fresard a fait une déclaration de sinistre dans les jours qui ont suivi l'accident, en indiquant que ses chiens pourraient être à l’origine de la chute de la poulicbe ; que toutefois cet assureur n’est pas inte3-venu, le contrat prévoyant une exclusion des dommages causés aux animaux dont l’assuré a la garde :
Attendu que si Mademoiselle Benoit soutient : que la déclaration de Monsieur Fresard correspond à la vérité, celui-ci affirme qu’elle n’a été faite que dans un but conservatoire, qu’il ignorait en réalité les circonstances de l’accident et que les certificats des vétérinaires démontrent en toute hypothèse qu’il n’y a pas eu morsure ;
Attendu qu’il est certain que Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem avaient intérêt i ce que l’accident soit pris en charge par. Leur assureur ; que les déclarations du premier à celui-ci ne peuvent donc être tenues comme parfaitement sûres ; que l’on doit considérer, comme l’a fait le tribunal, qu’il n’existe aucun témoin des faits et que Mademoiselle Benoit ne démontre pas le rôle causal des chiens des appelants dans la survenance de dommage ;
Attendu que Monsieur Fresard et Mademoiselle BeBsalem font valoir que la pouliche était au pré, qu’ils lui rendaient visite tous les jours°, ce qu’attestent plusieurs témoins, et qu’ils ont parfaitement rempli l’obligation qui pesait sur eux en leur qualité de dépositaires salarié= : que
Mademoiselle Benoit fait observer pour sa part qu'ils l'ont changée de pâture sans l'en aviser, pour la transporter dans un pré situé à plus de trente kilomètres de leur maison et qu’après l'accident, dont ils ne l’ont prévenue que deux mois plus tard, -lls l’ont rapatriée auprès d’eux, sans l'avoir fait visiter par un vétérinaire, ce qui constitue une série do fautes impardonnables ;
Attendu que là encore, on doit retenir que les circonstances de l’accident sont indéterminées et que Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem ne peuvent Mono prouver qu’ils n’ont commis aucune faute pour l’empêcher ; qu'à bon droit, e tribunal a retenu leur responsabilité sur le fondement de l’article 1928 du code civil, observation étant faite qu’il est sans emDorc de relever que mademoiselle Benoit n’avait pas assuré l’animal comme elle s’y était engagés :
Attendu, sur la réparation, que Mademoiselle Benoit sollicite 50.000 francs pour perte de la possibilité d’effectuer des compétitions, 20,000 francs pour perte de produit, 12.000 francs pour perte de valeur. 2.500 francs au titre des frais de rapatriement en Bretagne et 7.442,64 francs pour frais divers, notamment vétérinaires : que Monsieur Fresard et Ma‹1emoiselle Bensalem répliquent que la pouliche était destinée â faire une carrière de cheval d’obstacles eu son de cheval de courses, aléatoire et non rémunératrice, qu’il n’est nullement exclu, compte tenu du siège de sa blessure, qu’elle puisse se reproduire et qu’enfin, le contrat prévoyait que Mademoiselle Benoit supporte les frais de vétérinaire ;
Attendu que Mademoiselle Benoit produit aux débats plusieurs certificats de vétérinaires et notamment une expertise amiable du docteur Messiale, qui n’est contrebattue par aucun avis technique contraire, dont il résulte que l’animal est inapte ä toute utilisation et que sa mise à la reproduction est contre indiquée en ’l'4tat actuel : que paf ’ailleurs, si le contrat prévoyait que les frais de vétérinaire sont ä la charge de Mademoiselle Benoit, il ne Vise que les frais habituelles et non ceux 1iés ä un accident qui incombent nécessairement à son responsable ;
; que néanmoins : seule une perte de chance pouvant être retenue pour les deux premiers postes de préjudice, il convient d’ajouter à Mademoiselle Benoit ” toutes causes de p:préjudice confondues, une indemnité de 25.000 francs ; qu’en définitive, le jugement, sera confirmé, aucun f‹3ndement juridique ne justifiant une restitution de î’aui.al ;
Attendu que l’équité ne commande pas de faire application à Mademoiselle Benoit, qui bénéficie de l’aide juridictionnelle, des dispositions de l’article 7oO du nouveau code de procédure civile :
Décision :
Par ces Motifs, La cour,
Confirme le jugement,
Déboute Mademoiselle Benoit de sa demande en remboursement de frais irrépétibles,
Condamne Monsieur Fresard et Mademoiselle Bensalem aux dépens d’appel qui seront recouvres comme =n matière d’aide juridictionnelle.