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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 15 décembre 2022, n° 19/02747

LYON

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Gifetal Aluminium (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gonzalez

Conseillers :

Me La-Mesta, Me Faivre

Avocats :

Me Briatta, Me Joly, Me Sourbe, Me Llacer

T. com. Lyon, du 11 mars 2019, n° 2018j4…

11 mars 2019

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 26 février 2002, la SAS Gifetal Aluminium (ci-après la société Gifetal Aluminium), qui exerce une activité de fabrication de portes et fenêtres en aluminium, mais également de concepteur gammiste de garde-corps, a conclu un contrat d'agent commercial avec M. [O] pour une durée indéterminée, celui-ci étant chargé de commercialiser, au nom et pour le compte de la société, ses différents produits, ce à titre exclusif sur les départements 04, 05, 06, 13, 34 et 83.

Par courrier recommandé du 11 décembre 2017, M. [O] a informé la société Gifetal Aluminium de son souhait de céder son mandat à M. [M] et sollicité l'agrément de cette dernière pour régulariser l'opération.

Après différents échanges avec M.[O], la société Gifetal Aluminium lui a adressé une lettre recommandée le 18 janvier 2018 pour lui faire part de son refus d'agréer M. [M] comme successeur.

Par courrier recommandé du 24 janvier 2018, M. [O] a constaté la rupture de son mandat aux torts de la société Gifetal Aluminium et réclamé le versement d'une indemnité de rupture, d'une indemnité compensatrice de préavis, ainsi que des commissions dont il estime avoir été fraudé.

Par acte du 27 février 2018, M. [O] a fait assigner la société Gifetal Aluminium devant le tribunal de commerce de Lyon en paiement de ces sommes.

Par jugement du 11 mars 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- condamné la société Gifetal Aluminium à payer à M. [O] Ia somme de 47.880 euros à titre d'indemnité de rupture,

- condamné la société Gifetal Aluminium à payer à M. [O] la somme de 11.970 euros à titre d'indemnité de préavis,

- débouté M. [O] du surplus de ses demandes,

- condamné la société Gifetal Aluminium, sous peine d'une astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification du jugement à intervenir, à communiquer à M. [O] la copie de toutes les factures adressées à la clientèle de son secteur géographique accompagnée des comptes clients correspondants pour la période courant entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2018,

- condamné la société Gifetal Aluminium à payer à M. [O] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Gifetal Aluminium aux entiers dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

M. [O] a interjeté appel par acte du 18 avril 2019.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 11 mai 2020, fondées sur les les articles L. 134-6, L. 134-11, L. 134-12 et R. 134-3 du code de commerce, ainsi que sur l'article 700 du code de procédure civile, M. [O] demande à la cour :

- de le recevoir en son appel et le déclarer bien fondé,

- de condamner la société Gifetal Aluminium à lui régler les sommes suivantes :

- 28.299 euros TTC au titre de l'indemnité compensatrice de préavis inexécuté,

- 188.665,89 euros au titre de l'indemnité légale de cessation de mandat,

- 74.074,14 euros TTC au titre de sa facture de commissions du 16 avril 2019,

- 11.605,72 euros TTC au titre des commissions dues au jour de la rupture selon le relevé de commissions du 12 février 2018,

- 15.000 euros TTC au titre de la vente ACL,

- 4.440 euros TTC au titre du solde dû sur la vente Confort Habitat,

- de lui donner acte de ce qu'il se réserve le droit de chiffrer définitivement le montant de ses commissions arriérées et celui des indemnités découlant de la rupture du contrat dès lors que la société Gifetal Aluminium aura déféré à son obligation de communiquer les éléments comptables nécessaires à la vérification de ses commissions,

- de condamner la société Gifetal Aluminium, sous peine d'une astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à lui communiquer du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 la copie de toutes les factures adressées à la clientèle de son secteur géographique accompagnée des comptes clients correspondants,

- de condamner la société Gifetal Aluminium à lui régler la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SAS Bret et Brumm.

Concernant les entraves à la cession du mandat et la rupture subséquente du contrat, M.[O] fait essentiellement valoir :

- que le droit de l'agent de céder son mandat à un successeur est expressément prévu par l'article L. 134-13-3 du code de commerce, étant précisé que cette cession ne peut avoir pour effet de modifier le contenu du mandat cédé et que le mandant doit justifier son refus d'agréer le successeur proposé par des motifs légitimes et sérieux qui doivent tenir à la personne même du successeur et non à celle du cédant,

- que si le mandant refuse l'agrément pour des raisons non légitimes et sérieuses ou s'oppose à toute cession, il provoque la cessation du contrat et doit indemniser l'agent commercial,

- que dans le cas présent, la société Gifetal Aluminium n'a jamais légitimement justifié son refus d'agréer les deux successeurs respectivement présentés par ses soins,

- que dans un premier temps, il a ainsi proposé M.[R] [H], que la société Gifetal Aluminium admet avoir agréé dans ses écritures, avant de faire pression sur lui pour le dissuader de maintenir sa candidature, en évoquant ses origines susceptibles de poser des difficultés dans le cadre de sa mission de représentation de la société auprès de la clientèle, comme relaté par M. [H] dans une attestation,

- qu'il n'a eu d'autre choix que de rechercher un autre successeur qu'il a finalement trouvé en la personne de M.[M],

- que la société Gifetal Aluminium a initialement estimé que celui-ci disposait des aptitudes nécessaires, ainsi qu'elle l'a indiqué par mail le 3 novembre 2017, avant de faire obstacle à cette opération, en tentant de lui imposer une baisse de son taux de commission de 8 % à 6 % et une exclusion du commissionnement sur l'un des plus gros clients, la société NTM Aluminium,

- que les compétences de M.[M] sont en effet parfaitement démontrées par son curriculum vitae qui avait été joint au courrier recommandé de présentation du 11 décembre 2017, celui-ci ayant une grande expérience dans le domaine des fournitures industrielles métalliques du bâtiment pour avoir travaillé pendant 19 ans pour un fabriquant de matériel et mobilier métallique sur mesure, ainsi que durant 8 années au total pour des entreprises de bâtiment,

- que M.[M] maîtrisait donc les deux spécificités principales de la vente des produits de la société Gifetal Aluminium, à savoir la fabrication et la vente de fournitures métalliques sur mesure, et la clientèle du bâtiment,

- que bien qu'ayant accepté inconditionnellement la candidature de M.[M] par mail du 3 novembre 2017 en considération de ses qualités professionnelles, la société Gifetal Aluminium a fait volte-face un mois plus tard en imaginant pouvoir profiter de l'opération pour modifier unilatéralement et de manière substantielle le contrat cédé, ce qui a conduit M.[M] à abandonner son projet d'acquisition,

- que la société Gifetal Aluminium n'a pas daigné revenir sur ces violations contractuelles malgré les lettres recommandées qu'il lui a adressées, ce qui est constitutif d'une rupture détournée des relations contractuelles, du fait de l'entrave à l'exercice du droit de présentation,

- que la société Gifetal Aluminium tente désormais d'inverser les rôles, en se prévalant de l'absence d'avenant écrit formalisant l'extension du territoire de l'agent commercial pour soutenir qu'il aurait lui-même tenté de profiter de l'opération de cession pour obtenir une modification du contrat pour 5 départements litigieux (11, 26, 30, 66 et 84) qui ne lui auraient jamais été confiés,

- que la commune intention des parties d'étendre son territoire géographique à ces 5 départements est pourtant démontrée par ses relevés de commissions sur lesquels figurent des dizaines de clients implantés dans ces 5 départements et pour lesquels il a régulièrement été commissionné par la société Gifetal Aluminium, étant rappelé que la preuve du contenu du contrat d'agent commercial peut être rapportée par tous moyens,

- que les allégations de la société Gifetal Aluminium sur ce point sont d'autant plus surprenantes qu'en prévision de la cession, elle avait accepté de mettre à son jour son contrat en y faisant figurer les 5 départements précités à l'article 3 "secteur", ce document ayant été signé et paraphé par le dirigeant de la société,

- que la réduction unilatérale du taux de commission, au sujet de laquelle la société Gifetal Aluminium est étonnamment taisante, constitue en tout état de cause à elle-seule un motif suffisant de rupture du contrat aux torts exclusifs du mandant, l'article 1134 ancien du code civil exigeant l'accord du cocontractant pour toute modification substantielle de la convention,

- qu'aucun des autres aménagements contractuels invoqués par la société Gifetal Aluminium pour tenter de faire croire qu'il a voulu renégocier le contrat n'était en réalité nécessaire, dès lors que l'interdiction de représenter une société concurrente est déjà prévue par les dispositions supplétives de l'article 134-3 du code de commerce, que la présence ou non d'une clause d'objectif est sans incidence sur le droit à l'indemnité légale de cessation de mandat et qu'il n'avait aucune intention de poursuivre son activité après la cession compte tenu de son âge, de sorte que la suppression de la clause de non-concurrence post-contractuelle était sans portée,

- qu'il n'a jamais accepté le retrait du client NTM au motif de prétendues déficiences de sa part dans le traitement de ce client, sachant qu'il n'a jamais été informé de la moindre difficulté sur ce point tant par le client que par la société Gifetal Aluminium,

- qu'un tel retrait intervenu à son insu relève donc également d'une modification unilatérale de l'objet du contrat que la société Gifetal Aluminium tente vainement de légitimer a posteriori par une attestation de complaisance du client qui s'est entendu avec elle pour l'évincer dans l'espoir de recevoir, à titre de remise, tout ou partie de sa commission.

Sur la violation de l'exclusivité accordée par l'article 3 du contrat et les paiements des arriérés de commissions, M.[O] expose :

- qu'en vertu de cette stipulation contractuelle, il bénéficiait de l'exclusivité de la représentation de la société Gifetal Aluminium sur le secteur et la clientèle définis au contrat,

- que l'octroi de cette exclusivité entraînait l'obligation de le commissionner sur toutes les ventes intervenues dans son secteur, qu'elles soient directes ou indirectes,

- qu'en vertu de l'article L. 134-6 du code de commerce, ce droit à commission sur toutes les affaires réalisées dans l'univers confié à l'agent, qu'il soit ou non intervenu dans leur réalisation, n'est même plus conditionné à l'existence d'une exclusivité, mais uniquement au fait qu'un territoire géographique et/ou une clientèle déterminée sont accordés à l'agent commercial,

- que ce droit à commission sur toutes les ventes lui est d'ailleurs expressément reconnu par l'article 6 du contrat prévoyant "une commission mensuelle qui sera due pour toutes les affaires commandées, acceptées et facturées dans le secteur confié à M. [O], cette commission étant fixée à 8 % sur le montant net des encaissements liés aux ventes hors TVA relative à toutes les commandes directes ou indirectes concernant les produits référencés...",

- que la société Gifetal Aluminium lui a au demeurant toujours réglé les commissions sur ces ventes indirectes pendant toute la durée de leurs relations contractuelles, les relevés de commissions versés aux débats comportant un grand nombre d'opérations faites sans son intervention et dont le paiement n'a pas donné lieu à une quelconque contestation,

- que la société Gifetal Aluminium a lourdement violé l'exclusivité en réalisant directement des ventes au profit des sociétés ACL et Confort Habitat, puis en lui refusant le paiement des commissions correspondantes, ou à tout le moins, en minorant très fortement celle du client Confort Habitat (3 % au lieu de 8 %),

- qu'il prouve la réalité de la vente ACL, dont la société Gifetal Aluminium nie l'existence, par des photographies du chantier en cours de réalisation sur lesquelles apparaissent les produits de la société, tels que vendus sur con catalogue,

- que surtout, en analysant les informations contenues dans la clé USB reçue après la régularisation de sa déclaration d'appel, il a constaté que la fraude ne portait pas seulement sur les deux clients Confort Habitat et ACL évoqués ci-dessus, mais sur au moins 184 factures qui auraient dû figurer sur les relevés de commissions que la société Gifetal Aluminium avait l'obligation de lui adresser en application de l'article L. 134-6 du code de commerce,

- que cette dissimulation volontaire d'une partie d’un commissionnement est elle-aussi constitutive d'une faute grave,

- qu'il est donc bien fondé à solliciter le paiement des commissions relatives à ces 184 opérations, ce qui représente 74.074,14 euros TTC, selon la facture établie par ses soins le 16 avril 2019, somme dont il a vainement demandé le règlement à la société Gifetal Aluminium au moyen d'une mise en demeure adressée le 23 avril 2019,

- qu'il peut aussi prétendre aux commissions sur les affaires en cours au moment de la rupture, conformément aux prévisions de l'article 9 du contrat, soit 11.605,72 euros selon les relevés de commissions édités par la société Gifetal Aluminium le 12 février 2018,

- qu'eu égard à ces dissimulations volontaires, il était en droit, conformément à l'article R. 134-3 du code de commerce, de vérifier son commissionnement depuis le 1er janvier 2016 par l'obtention d'une copie de toutes les factures adressées par la société Gifetal Aluminium à la clientèle de son secteur accompagnée des comptes clients correspondants,

- que la société Gifetal Aluminium n'a que très partiellement exécuté la condamnation mise à sa charge à ce titre par les premiers juges, puisqu'elle s'est abstenue de fournir la totalité des justificatifs comptables par département pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, les extraits de "comptes tiers" communiqués ne mentionnant même pas l'existence de la vente ACL,

- que l'extraction comptable contenue dans la clé USB lui ayant été remise a été programmée, non pas pour retracer les ventes appartenant à son secteur géographique, mais pour celles faites aux clients qui lui étaient nominativement attribués,

- que cette production est nécessairement incomplète, ce qui est source d'un préjudice évident, car les commissions arriérées doivent être réintégrées dans l'assiette de calcul des indemnités de cessation de mandat et de l'indemnité compensatrice de préavis inexécuté, ce qui fait obstacle au chiffrage définitif du montant des commissions dues, d'où le maintien de sa demande de communication, sous astreinte ; des éléments comptables relatifs aux opérations réalisées sur son secteur géographique du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017.

En raison des différentes fautes graves ayant justifié la rupture aux torts exclusifs du mandant, M.[O] estime être bien fondé à solliciter :

- l'indemnité légale de cessation du mandat, qui, en tant qu'elle vient réparer la perte d'une part de marché et la privation de la rémunération à laquelle il pouvait légitimement prétendre, doit être fixée à l'équivalent de deux années de commissions brutes, calculées sur la base des commissions perçues au cours des trois dernières années d'exécution du mandat, en réintégrant en sus les commissions restées impayées, telles que retracées dans la facture du 16 avril 2019, ce qui porte le montant de cette indemnité à la somme de 188.665,89 euros,

- l'indemnité compensatrice du préavis inexécuté d'une durée de 3 mois en raison de son ancienneté et dont l'assiette de calcul est "prorata temporis" celle de l'indemnité légale de cessation du mandat, ce qui donne une somme de 28.299 euros TTC

Par conclusions notifiées par voie électronique le15 juillet 2020, fondées sur les articles L. 134-4, L. 134-11 et L. 134-12 et du code de commerce, ainsi que sur les articles 1103 et 1353 du code civil, la société Gifetal Aluminium demande à la cour :

- de la recevoir en son appel incident et, infirmant la décision déférée,

- de juger qu'elle n'avait pas contractuellement l'obligation de donner son agrément à la cession du contrat d'agent commercial de M. [O] à M. [M],

- de juger qu'elle avait un juste motif de refus d'agrément,

- de juger que M. [O] a tenté de modifier le contrat d'agent qui liait les parties, de manière unilatérale, en apportant des modifications substantielles, notamment en supprimant :

- la clause de non-concurrence qui les liait,

- la clause d'objectif qui permettait à la société Gifetal Aluminium de mettre fin au contrat, en cas de non-atteinte des objectifs fixés,

- l'interdiction qui lui était faite de servir des entreprises concurrentes sans l'autorisation de la société Gifetal Aluminium,

- de juger qu'elle n'a commis aucune faute en refusant les modifications apportées unilatéralement par M. [O] au contrat existant, dans la mesure où elle était en droit de refuser ce nouveau cadre contractuel substantiellement modifié par M. [O],

- de juger qu'elle n'a commis aucune entrave à la cession du contrat de M. [O], ce dernier devant supporter seul les conséquences de son échec dans la cession de son contrat d'agent en raison des modifications qu'il a tenté d'apporter,

- de débouter en conséquence M. [O] de ses demandes au titre de l'indemnité de préavis et de l'indemnité légale de cessation de contrat,

- de juger que M. [O] n'ignorait pas l'existence des 184 opérations qu'il prétend découvrir aujourd'hui et qui n'étaient pas commissionnées,

- de juger en toute hypothèse que M. [O] ne rapporte pas la preuve d'être intervenu sur ces 184 ventes ce qui lui ferme son droit à commissions, par application des dispositions de l'article 6 de son contrat,

- de débouter en conséquence M. [O] de sa demande de condamnation à une somme de 74.074,14 euros TTC au titre de sa facture de commissions du 16 avril 2019,

- de le débouter également de ses demandes de condamnation au titre de la vente ACL et d'un solde qui serait dû sur la vente Confort Habitat,

À titre subsidiaire sur ce point,

- de juger que les commissions sur ces 184 ventes ne doivent pas être calculées sur 8 % mais sur 4 % du montant de celles-ci, soit 38.554,87 euros HT, conformément à la pratique rappelée par la société Gifetal Aluminium,

- de juger que la demande portant sur les commissions dues au jour de la rupture selon relevé de commissions du 12 février 2018 est insuffisamment fondée,

- de débouter en conséquence M. [O] de ce chef de demande,

- de condamner M. [O] à lui payer la somme de 10.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

S'agissant d'abord de l'échec de la cession du mandat, la société Gifetal Aluminium soutient en substance :

- qu'en vertu de l'article 9 du contrat d'agent commercial et des règles applicables en la matière, elle n'a pas l'obligation d'agréer le successeur dès lors qu'elle justifie de l'insuffisance réelle, au point de vue professionnel ou moral, du successeur désigné,

- que dans le cas présent, elle a rapidement constaté l'incompatibilité de M.[M] au poste d'agent commercial comme relaté par mail à M.[O] le 2 janvier 2018, puis dans un courrier du 18 janvier 2018 aux termes duquel elle indique que ce dernier ne connaît absolument pas le type de clientèle de la société, constituée de serruriers-métalliers, ni le matériau qu'est l'aluminium, et fait également état de son comportement agressif et intolérant avec de réelles menaces de poursuites judiciaires s'il n'était pas satisfait à ses volontés,

- qu'en effet, l'expérience de M.[M] dans le domaine des fournitures industrielles métalliques du bâtiment n'était pas significative, alors qu'elle-même est une société de pointe dans ce domaine, en tant que propriétaire de la marque "Garde-corps Gifetal",

- que par ailleurs, il est faux de prétendre qu'elle a unilatéralement tenté d'apporter des modifications substantielles au contrat existant à l'occasion de l'exercice du droit de présentation, seuls MM.[O] et [M] ayant agi de la sorte,

- qu'ainsi, en réponse au courriel de M.[O] du 25 août 2017 proposant des modifications à apporter au contrat et l'établissement d'un avenant pour les secteurs géographiques manquants 30, 84, 11, 26 et 66, elle a répondu très clairement qu'elle souhaitait maintenir les termes du contrat existant,

- que malgré cette volonté exprimée, MM.[O] et [M] ont poursuivi leur tentative de passage en force, ainsi que le révèlent les courriels envoyés par M.[O] les 2 novembre 2017 et 14 novembre 2017, puis la transmission, par M.[M], d'un nouveau contrat modifié au nom de M.[O] pour signature et cession,

- qu'il s'agissait de modifications substantielles puisque le nouveau contrat visait 5 nouveaux départements (11, 26, 30, 66 et 84), ce qu'elle n'a jamais accepté, le document produit par M.[O] à cet égard ne constituant pas un accord de sa part, mais uniquement le reflet de la renégociation du contrat existant à l'initiative de M. [O] avant d'opérer la cession au profit de M.[M],

- que ce document comporte d'ailleurs en dernière page des mentions manuscrites de son dirigeant constitutives de contreparties, qui n'ont jamais été reprises par M.[O],

- que d'autres modifications de taille ont également été introduites dans le nouveau contrat, à savoir la suppression de la clause imposant son accord écrit préalable pour la représentation d'une entreprise concurrente, la suppression de la clause de non-concurrence post-contractuelle stipulée à l'article 9 et la suppression de la clause d'objectif annuel visée à l'article 7 lui ouvrant la faculté de rompre le contrat,

- que ces modifications substantielles ne sont pas contestées par M.[O] qui tente seulement d'en atténuer la portée et n'était pas sans savoir que cette tentative de modification en force appellerait nécessairement des contre-propositions, dont la baisse des commissions à 6 %,

- qu'il savait surtout qu'il encourait un risque d'échec important en cherchant à faire modifier dans des proportions aussi conséquentes et à son avantage le contrat existant,

- que cette nouvelle mouture la fragilisait considérablement, puisqu'elle permettait à l'agent de travailler pour des concurrents sans avoir à obtenir son autorisation, de librement la concurrencer en fin de mandat et de lui interdire de mettre en fin au contrat en cas de non atteinte des objectifs,

- qu'elle ne peut, par conséquent, être considérée comme responsable de l'échec de la cession d'un contrat modifié unilatéralement par M.[O] à son désavantage,

- que l'abandon du projet d'acquisition par M.[M] relève du seul entêtement de M.[O] à vouloir bouleverser l'ordre juridique établi par son contrat qui faisait loi entre les parties, de sorte que celui-ci doit supporter seul les conséquences de l'échec dans la cession du contrat d'agent et être débouté de ses demandes relatives au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité légale de cessation de mandat.

Concernant les autres réclamations financières de M.[O], la société Gifetal Aluminium observe :

- que M.[O] ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait violé l'exclusivité qui lui était conférée en réalisant directement des ventes auprès du client ACL à [Localité 5] ([Localité 5]), les photos produites ne permettant pas de justifier qu'elle a effectué le chantier,

- qu'elle a bien commissionné M.[O] pour la vente Confort Habitat à hauteur de 3 %, comme ce dernier le reconnaît dans sa pièce n° 13,

- que les 184 ventes dissimulées dont se prévaut M.[O] étaient en réalité toutes connues de lui,

- qu'à titre d'exemple, allant régulièrement voir le client NTM qui était le plus de son secteur, il était informé de tous les chantiers avec cette entreprise, y compris ceux dont la commission était de 0 %,

- que son métier requérant la fourniture de centaines de pièces de profils et de visseries différentes par chantier, il ne s'en est jamais déroulé un seul sans qu'elle ait eu à refournir des pièces spécifiques manquantes,

- que le fait que ces commissions ne figurent pas sur les relevés adressés à M.[O] est totalement indépendant de sa volonté, puisque cette absence résulte de l'utilisation du logiciel comptable et commercial Sage lequel ne mentionne que les factures dont le taux de commission est supérieur à 0 %, ce que feint de découvrir M.[O], alors qu'il n'a jamais contesté le moindre relevé au cours des relations contractuelles ayant duré plus de 15 années,

- qu'en toute hypothèse, l'article 6 du contrat de M.[O], qui stipule que "la commission sera due à l'agent dès que la vente aura été imputée parfaite, c'est-à-dire dès que l'acte commercial aura été réalisé par l'agent (...)" déroge aux dispositions de l'article L. 134-6 du code de commerce dont le caractère est supplétif,

- que cette dérogation emporte que la commission n'est due à M. [O] que s'il prouve qu'il est personnellement intervenu sur les 184 ventes pour lesquelles il réclame une commission, ce qu'il échoue à faire,

- que si ces ventes devaient malgré tout être retenues, le calcul de la commission devrait alors s'effectuer sur une base de 4 % correspondant au taux appliqué pour le client NTM Aluminium, comme elle le rappelle dans son courrier du 18 janvier 2018,

- qu'enfin, le retrait des clients ACL et NTM au profit d'un autre commercial s'est fait avec l'accord de M.[O] qui a admis qu'elle reprenne le lien en direct compte tenu de la dégradation de ces relations avec ces clients, ainsi que le confirme la lettre rédigée par la société NTM.

Enfin, pour ce qui de la communication des éléments comptables, la société Gifetal Aluminium considère avoir satisfait à l'injonction qui lui a été faite de communiquer sous astreinte les pièces comptables utiles, car elle n'avait pas à transmettre la copie de la totalité des factures et comptes clients relatifs aux opérations réalisées sur les départements 11, 26, 30, 66 et 84, non attribués à M.[O]. Elle précise encore que celui-ci n'a pas répondu au courrier officiel de son avocat en date du 21 mai 2019 par lequel elle lui demandait de préciser la liste exhaustive des pièces faisant défaut suite au courrier qu'il avait envoyé 23 avril 2019 pour réclamer les éléments comptables relatifs aux 5 départements litigieux.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 22 septembre 2020, les débats étant fixés au 2 novembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient à titre liminaire de rappeler que les demandes de constat et dire et juger ne constituent pas des prétentions mais uniquement un rappel des moyens et qu'il n'y a donc pas de lieu de statuer sur ce point, la cour n'en étant pas saisie.

Il est également précisé qu'en vertu des dispositions de l'article 9 de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l'action se poursuit et doit être jugée conformément à la loi ancienne, y compris en appel, le contrat ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de cette ordonnance.

Sur l'imputabilité de la rupture du contrat d'agent commercial,

Selon l'article L. 134-12 du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits. Les ayants droit de l'agent commercial bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l'agent.

L'article L. 134-13 3° du même code dispose par ailleurs que l'indemnisation de cession du contrat n'est pas due dans le cas où selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.

L'exercice effectif du droit de céder peut se heurter au refus opposé par le mandant seulement s'il est justifié par des motifs légitimes et sérieux tenant à la personne du successeur et non à celle du cédant.

A défaut de tels motifs, le mandant est considéré comme étant à l'origine de la fin des relations contractuelles et doit indemniser l'agent commercial des conséquences de la rupture en application de l'article L. 134-12 précité.

En l'espèce, l'article 9 du contrat d'agent commercial régularisé le 26 février 2002 entre les parties stipule que "M.[O] aura la faculté de présenter à la société Gifetal Aluminium un successeur. Le mandant n'aura pas l'obligation de l'agréer. La présentation devra intervenir dans le délai d'un mois après la fin du contrat."

Ce même article mentionne par ailleurs qu'"en cas de résiliation du présent contrat à l'exclusion d'une rupture de son fait ou provoquée par sa faute grave, M.[E] [O] aura droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi conformément à l'article 12 de la loi du 25 juin 1991. M.[E] [O] devra faire valoir son droit dans un délai d'un an à compter de la cessation effective de son contrat, sous peine de forclusion. Enfin, cette indemnité ne sera pas due dans le cas où M.[E] [O] céderait sa clientèle à un successeur que le mandant aura accepté d'agréer préalablement."

Il convient d'abord de relever que l'analyse des échanges intervenus entre les parties entre le 25 août 2017 et le 12 décembre 2017 révèle qu'à l'occasion de l'exercice de son droit de présentation d'un successeur, tant M.[O] que la société Gifetal Aluminium ont souhaité apporter des modifications conséquentes au contrat initial.

Ainsi, dans un message électronique du 25 août 2017 à 8h14 adressé à la société Gifetal Alumimium, M.[O] a-t-il proposé des amendements au contenu du contrat initial sur la base d'une analyse faite par une association des agents commerciaux située à [Localité 6], ce à l'initiative de M.[H], le premier candidat potentiel à sa succession. Il a par ailleurs sollicité qu'un avenant soit établi pour prévoir les secteurs géographiques manquants de son point de vue, à savoir les départements 30, 84, 11, 26 et 66 (pièces n° 2 et 2bis de l'intimée).

Par la suite, M. [O] n'aura de cesse de réitérer ces demandes, et en particulier celle tendant à ce que les 5 départements précités soient intégrés dans son contrat, avec la même clause d'exclusivité que les 6 qui y figuraient initialement, ce dans la perspective de la cession de son contrat, comme en témoignent ses courriers et courriels des 4 septembre 2017 (pièce n° 3 de l'intimée), 14 novembre 2017 (pièce n° 10 de l'intimée) et 11 décembre 2017 (pièce n° 4 de l'appelant), mais aussi l'acte de cession de mandat sous condition suspensive signé par lui-même et M.[M] (pièce n° 3 de l'appelant).

Il s'agit d'une modification substantielle de l'équilibre contractuel initial, dès lors qu'elle correspond à un quasi doublement du secteur géographique octroyé en 2002 à M.[O] et que celui-ci ne démontre pas que l'ajout de ces 5 départements ne constituait que la consécration écrite d'une pratique commune des parties mise en place depuis plusieurs années.

Certes, eu égard au caractère consensuel du contrat d'agent commercial, tel qu'il résulte de l'article L. 134-2 du code de commerce, les parties peuvent convenir de changements dans le champ et le contenu des missions initialement imparties à l'agent, sans le stipuler par écrit. Mais il appartient alors à celui qui excipe de cette évolution contractuelle d'en rapporter la preuve par tous moyens.

Or, dans le cas présent, force est de constater que M.[O] ne justifie nullement de ses allégations selon lesquelles au cours de ses 15 années d'exercice, sa mission se serait, avec l'accord du mandant, étendue à ces 5 départements. En effet, aucune des pièces qu'il produit ne permet d'établir qu'au moins sur les trois ou quatre dernières années de son mandat, il serait intervenu dans cette zone géographique, non mentionnée dans son contrat écrit initial. Ainsi, tant sur les états détaillés des factures commissionnées qui lui ont été adressés mensuellement par la société Gifetal Aluminium durant son mandat (pièces n° 190 à 212 de l'appelant), que sur les extraits de compte tiers ultérieurement transmis par cette même entreprise en exécution du jugement déféré (pièces n° 43 à 189 de l'appelant) il est uniquement fait mention du nom des sociétés clientes, sans référence particulière à leur implantation géographique.

Seules quelques entreprises peuvent être localisées au vu des adresses figurant sur les factures fournies par M. [O]. Cependant, aucune d'entre elles n'est située dans les 5 nouveaux départements revendiqués par ce dernier, puisque le siège des sociétés NTM Aluminium et Confort Habitat est dans le département 06 (pièces n° 214 à 216 de l'appelant), tandis que celui de la société BPI est situé dans le département 13 (pièce n° 213 de l'appelant).

De son côté, la société Gifetal Aluminium n'a jamais admis, dans les courriers et courriels adressés à M. [O] au cours de cette période de renégociation du contrat, qu'elle avait confié à ce dernier les départements 11, 26, 30, 84 et 66 en sus de ceux initialement prévus dans le contrat du 26 février 2002.

Au contraire, dans un courriel du 25 août 2017 à 10 h02 en réponse aux modifications envisagées par M.[O], la société Gifetal Aluminium écrit-elle : "le contrat est un contrat de base que nous avions passé ensemble. Je souhaiterais que le contrat reste celui de base, tel que nous l'avions décidé ensemble (...) Durant toutes ces années, notre contrat n'a jamais été remis en cause, je ne comprends pas pourquoi le faire le maintenant" (Pièce n° 9 de l'intimée).

Elle réitèrera ses propos dans un courrier du 18 janvier 2018 aux termes duquel elle estime que la baisse du taux de commission qu'elle réclame est liée aux modifications préalablement apportées par M.[O], notamment quant à l'ajout de nouveaux départements.

Il s'infère de cet écrit que les autres modifications contractuelles souhaitées par M.[O], pour importantes qu'elles puissent être en réalité sur le plan juridique, n'ont pas été considérées comme substantielles par la société Gifetal Aluminium pendant cette phase de renégocation du contrat préalable à sa cession éventuelle, de sorte qu'elle est mal venue à prétendre désormais dans ses écritures qu'elles appelaient nécessairement des contre-propositions de sa part. En effet, hormis les départements litigieux évoqués ci-dessus, la société Gifetal Aluminium n'a jamais évoqué à un quelconque moment la question de la suppression des clauses d'objectif annuel et de non-concurrence post-contractuelle, ainsi que de celle imposant son accord écrit préalable pour la représentation d'une entreprise concurrente, alors que ces changements étaient envisagées dès le courriel du 25 août 2017 auquel étaient annexés les commentaires de l'association des agents commerciaux de [Localité 6].

Il sera par suite retenu que pour la société Gifetal Aluminium, seul l'ajout des 5 départements litigieux avait pour effet de modifier l'économie générale du contrat initial d'agent commercial de M. [O] au cours des échanges sur les conditions de la cession du contrat à un successeur.

Comme indiqué précédemment, la société Gifetal Aluminium a fini par elle-aussi vouloir imposer des modifications au contrat consistant :

- d'une part, à baisser à 6 % le maximum du taux de la commission due à l'agent sur le montant net des encaissements liés aux ventes hors TVA, contre 8 % maximum dans le contrat du 26 février 2002,

- d'autre part, à exclure la société NTM Aluminium de la clientèle de l'agent commercial.

Il sera observé que la société Gifetal Aluminium a fait part tardivement de cette volonté d'opérer ces changements, à un stade très avancé des pourpalers en vue de la cession du mandat à M.[M], à laquelle elle avait déjà donné un accord de principe par courriel du 3 novembre 2017 (pièces n° 10 et 16 de l'appelant), puisque sa première demande écrite en ce sens intervient le 12 décembre 2017, date à laquelle elle a apposé les mentions manuscrites suivantes sur le courrier qui lui avait été envoyé le 11 décembre 2017 par M. [O] pour demander la confirmation officielle de l'agrément du cessionnaire : "nous vous donnons notre accord pour M.[M] avec une commission maximum à 6 % et client exclusif Gifetal sans rétribution de commission pour la société NTM Aluminium" (pièce n° 5 de l'intimée).

Elle ensuite maintenu ces deux exigences dans une lettre du 20 décembre 2017 par laquelle elle fait savoir qu'elle confirme son accord pour la candidature de M. [M] sous les deux conditions suivantes : un taux de commission maximum de 6 % et l'absence de rétribution pour son client exclusif NTM Aluminium (pièce n° 5 de l'appelant).

La diminution de 2 % du taux maximum de commission susceptible d'être perçu par l'agent commercial ne peut toutefois s'analyser en une modification substantielle, dans la mesure où le projet de contrat d'agent commercial soumis par M. [O] à la société Gifetal Aluminium dans la perspective de la cession prévoyait d'ores et déjà, à l'article 5, que la commission serait ramenée au taux de 6 % à compter du 1er janvier 2018 (pièce n° 217 de l'appelant).

Il est en revanche incontestable que l'exclusion du client NTM Aluminium entraîne un bouleversement dans l'équilibre contractuel, car celui-ci représentait une part très conséquente du chiffre d'affaires de M.[O].

En effet, l'étude des relevés détaillé des commissions versées à M. [O] durant l'année 2017, tels qu'édités par la société Gifetal Aluminium, fait apparaître que la société NTM Aluminium était l'un des plus gros clients de M. [O], y compris sur l'année 2017, ce qui réduit à néant l'argumentation de la société Gifetal Aluminium selon laquelle M. [O] avait consenti à ce qu'elle reprenne le lien direct avec ce client compte tenu de la dégradation des relations commerciales entre celui-ci et M.[O] et conduit à écarter l'attestation rédigée le 18 décembre 2019 par M.[J] (société NTM Aluminium), manifestement établie pour les besoins de la cause (pièce n° 13 de l'intimée).

A titre d'exemple, il ressort de l'état des commissions établi par la société Gifetal Aluminium pour le mois de janvier 2017 que sur 11 factures commissionnées pour un montant global de 2.475, 69 euros HT, 5 concernent la société NTM Aluminium pour la somme de 1.386,20 euros. En février 2017, 3 factures sur les 4 commissionnées sont relatives à la société NTM Alumimium, ce qui correspond à la somme de 1.182,97 euros HT sur 1.313,09 euros HT de commissions au total, en mars 2017, 8 sur 15, soit 3.578 euros HT de commissions NTM Aluminium sur un total de 4.980,12 euros HT, en mai 2017, 9 sur 13, ce qui représente 4.062, 41 euros HT de commissions NTM Aluminium sur un total de 4.642,25 euros HT, en juillet 2017, 14 sur 23, soit 5.415,88 euros HT de commissions NTM Aluminium sur un total de 7.340,36 euros HT de commissions et en août 2017, 1 facture sur 3, mais la plus importante, puisqu'elle a généré une commission de 1.470,95 euros HT sur un total de 2.061,19 euros HT.

La société Gifetal Aluminium concède d'ailleurs elle-même, dans une missive du 18 janvier 2018, que la société NTM Aluminium fait partie de ses clients principaux et que sa notoriété a imposé qu'elle lui réserve le département 06 (pièce n° 7 de l'appelant et n° 8 de l'intimée).

Au vu de ces éléments, il y a lieu de retenir que la volonté de la société Gifetal Aluminium de retirer le client NTM Aluminium du secteur confié à l'agent commercial ne pouvait qu'aboutir à la remise en cause du principe même de la cession du contrat, eu égard à la perte très importante de chiffre d'affaires qu'une telle exclusion induisait.

Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que M.[M] ait manifesté un vif mécontentement vis-à-vis du gérant de la société Gifetal Aluminium qui s'est traduit par une certaine agressivité verbale de sa part lors d'un échange téléphonique que la société Gifetal Aluminium a mis en avant dans un courriel du 2 janvier 2018 puis dans sa lettre du 18 janvier 2018 (pièces n° 6 et 8 de l'intimée) pour tenter de justifier son refus d'agréer M. [M] après avoir fait part de son accord quelques semaines auparavant (pièces n° 10 et 16 de l'appelant déjà évoquées ci-dessus).

Au regard des circonstances très particulières dans lesquelles il s'inscrit, ce comportement ne saurait constituer à lui-seul un motif légitime de refus d'agrément, ce d'autant que la société Gifetal Aluminium reconnaît, dans le courrier du 18 janvier 2018, qu'elle a voulu réserver tout le département 06 à la société NTM Aluminium, en s'opposant corrélativement à ce que M.[M] démarche d'autres clients métalliers dans ce département, ce qui revenait à vider encore un peu plus de sa substance le contrat cédé.

L'autre raison invoquée par la société Gifetal Aluminium dans son courrier du 18 janvier 2018 pour expliquer son changement brutal d'avis quant à l'agrément de M.[M], à savoir le fait que celui-ci ne connaîtrait absolument pas son type de clientèle, composé de serruriers métalliers, et n'aurait aucune notion de l'aluminium, matériau constituant le cœur de son activité, n'apparaît quant à elle pas fondée sur des considérations objectives.

Ainsi, la société Gifetal Aluminium a-t-elle été destinataire du curriculum vitae de M. [M] dès le 12 décembre 2017, de sorte qu'elle était parfaitement informée de son expérience professionnelle. Par ailleurs, comme l'a relevé à juste titre le tribunal de commerce, seules quelques semaines se sont écoulées entre son accord de principe à l'agrément de M.[M] et son soudain revirement, une période aussi courte étant nécessairement insuffisante pour apprécier les compétences professionnelles de M.[M].

Il découle de l'ensemble des observations qui précèdent que la société Gifetal Aluminium a fait entrave à la cession du mandat en tentant d'imposer une modification substantielle qui remettait en cause l'équilibre contractuel et en opposant ensuite un refus illégitime à l'agrément de M.[M].

Par ces motifs substitués, le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la rupture du contrat d'agent initiée par M.[O] est imputable à la société Gifetal Aluminium, sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant les autres moyens développés par l'appelant pour justifier que la résiliation est intervenue aux torts exclusifs du mandant.

Il s'ensuit que conformément aux dispositions de l'article 134-13 du code de commerce, M.[O] est bien fondé à réclamer le paiement de l'indemnité de préavis et de l'indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, telles que prévue aux articles 134-11 et 134-12 du même code.

Sur les conséquences financières de la rupture du contrat,

- Sur les arriérés de commissions

- Au titre des 184 ventes figurant dans la facture de commission du 16 avril 2019

En vertu de l'article L. 134-6 du code de commerce, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence lorsqu'elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre.

L'alinéa 2 de cet article prévoit quant à lui que s'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe.

Ces dispositions n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent y déroger contractuellement.

En l'espèce, l'article 6 du contrat d'agent commercial régularisé le 26 février 2002 entre M.[O] et la société Gifetal Aluminium stipule dans un premier paragraphe qu'en contrepartie de ses services, M. [O] percevra "une commission mensuelle qui sera due pour toutes les affaires commandées, acceptées et facturées dans le secteur confié à Monsieur [E] [O] ; cette commission est fixée à 8 % sur le montant net des encaissements liés aux ventes hors TVA relatifs à toutes les commandes directes et indirectes concernant les produits référencés."

Le deuxième paragraphe précise cependant que "la commission sera due à l'agent dès lors que la vente aura été imputée parfaite, c'est-à-dire que l'acte commercial aura été réalisé par l'agent, que la commande aura été agréée et enregistrée par la société Gifetal Aluminium et la livraison exécutée mais restera subordonnée au règlement définitif du client au terme normal du délai de paiement consenti".

Il ne peut qu'être constaté que ces deux paragraphes sont en contradiction l'un avec l'autre, puisque que le premier ne fait que reprendre les dispositions de l'article L. 134-6 précité sur les droits à commission de l'agent auquel un secteur géographique a été confié, qu'il soit ou non intervenu, tandis que le second y déroge en prévoyant que la commission n'est due à l'agent que lorsque celui-ci a personnellement participé à la réalisation de la vente.

Cette difficulté avait d'ailleurs été soulevée par l'association des agents commerciaux de [Localité 6] qui proposait, dans ses commentaires sur le contrat (pièce n° 2bis de l'intimée) que ce paragraphe soit supprimé, car il signifie que l'agent doit lui-même être intervenu dans la vente pour percevoir sa commission, ce qui n'est pas le cas pour les commissionnements qui portent à la fois sur les ventes directes et indirectes.

Face à cette contradiction, il y a lieu, conformément aux articles 1156 et 1161 anciens du code civil, de rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes et d'examiner les autres stipulations du contrat en vue de déterminer le sens à donner à la clause litigieuse.

Le seul autre article faisant référence à la rémunération de l'agent commercial est l'article 9 qui porte sur la fin des relations entre les parties. Dans sa partie sur le droit à commission, cet article relate ainsi qu'en "cas de cessation du contrat pour quelque motif que ce soit, M.[E] [O] pourra prétendre aux commissions :

- sur toutes les affaires résultant d'un ordre transmis antérieurement à la rupture du contrat et dont M. [E] [O] serait à l'origine de par sa prospection ;

- sur les affaires conclues dans un délai d'un mois à compter de la rupture du contrat, si elles résultent principalement de son action sur le secteur avant la cessation du contrat."

Cette clause va dans le même sens que le paragraphe 2 de l'article 6, à savoir un commissionnement dû à l'agent uniquement s'il a participé lui-même à la concrétisation de la vente.

Surtout, l'analyse des relevés détaillés des commissions établis entre mars 2016 et janvier 2018 par la société Gifetal Aluminium et dont il n'est pas contesté par M.[O] qu'il en a régulièrement été destinataire (pièces n° 192 à 212 de l'appelant) fait apparaître que sur toutes les affaires conclues par la société Gifetal Aluminium avec les clients du secteur de M.[O], seul un certain nombre d'entre elles donnait lieu au versement d'une commission à l'intéressé.

En effet, chaque relevé comporte deux parties bien distinctes : la première dresse la liste les "factures commissionnées", tandis que la seconde se rapporte aux "factures non commissionnées", étant souligné qu'au cours d'une période donnée, les mêmes clients peuvent faire l'objet de factures commissionnées et de factures non commissionnées. Or, selon les indications de chaque relevé, la commission réglée mensuellement à M.[O] est uniquement calculée sur les factures dites "commissionnées", les autres factures émises ne conduisant pas au versement d'une commission à ce dernier. Par exemple, en mai 2017 (pièce n° 204 de l'appelant), la commission réglée à M.[O] s'est élevée à 4.642,25 euros HT, ce qui correspond à 13 factures commissionnées dont 9 relatives au client NTM Aluminium, la société Gifetal Aluminium ayant par ailleurs émis 16 autres factures sans commission au profit de M. [O] dont 6 concernent également la société NTM Aluminium.

De son côté, M. [O] ne produit aucune pièce de nature à établir qu'il aurait en réalité perçu des commissions portant sur la totalité des ventes mentionnées sur les relevés mensuels, et pas seulement sur celles correspondant aux factures dites "commissionnées". De même, il ne démontre pas qu'au cours de l'exécution du contrat, il aurait à un quelconque moment contesté les modalités de calcul de ses commissions telles qu'opérées par la société Gifetal Aluminium.

Il sera dès lors retenu que dans la mise en œuvre du contrat, les parties s'étaient accordées sur le fait que seules les opérations dans lesquelles M. [O] est personnellement intervenu ouvraient droit à un commissionnement, conformément aux stipulations du paragraphe 2 de l'article 6 et à celles de l'article 9. Il doit à ce stade être rappelé que l'exclusivité dont bénéficiait M.[O] dans son secteur géographique avait pour seul corollaire d'interdire au mandant de faire intervenir un autre agent commercial sur le secteur octroyé. En revanche, l'exclusivité octroyée n'empêche pas le mandant de réaliser lui-même des ventes qui seront alors qualifiées d'indirectes pour l'agent et pourront lui ouvrir droit à commission, en vertu de l'article L. 134-6 précité du code de commerce, sous réserve de l'absence de convention contraire, comme dans le cas présent.

M.[O] est par suite mal fondé à prétendre que la société Gifetal Aluminium lui aurait réglé des commissions afférentes à des ventes indirectes, cette allégation étant démentie par la simple lecture des relevés de commissions évoqués ci-dessus.

Il ne saurait par conséquent être fait droit à sa demande tendant au paiement de 184 factures non commissionnées pour un montant de 74.074,14 euros selon la facture établie par ses soins le 16 avril 2019.

- Au titre des ventes Confort Habitat et ACL

Selon l'article 1315 ancien du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'occurrence, s'agissant de la commission réclamée par M. [O] au titre d'une vente ACL, il convient de relever que les photographies et la publicité non datées dont il se prévaut (pièces n° 20, 21 et 218 de l'appelant) ne constituent pas des éléments probants suffisants pour établir qu'avant la rupture du contrat, la société Gifetal Aluminium a effectivement vendu des produits à cette société ACL pour la réalisation d'une résidence "Arabesque" située à Antibes, ainsi que l'a justement apprécié le tribunal de commerce. Surtout, M.[O] lui-même indique, dans un courrier du 24 janvier 2018 (pièce n° 8 de l'appelant), qu'il n'est pas à l'origine de cette vente, de sorte que même à supposer qu'elle ait bien eu lieu, celle-ci ne lui ouvrait pas droit à commission, faute d'intervention de sa part, ce conformément à la pratique commune des parties telle que retenue supra.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé, en ce qu'il a débouté M.[O] de sa demande en paiement d'une commission de 15.000 euros au titre de cette vente ACL.

Concernant le solde de la commission relative aux deux factures Confort Habitat en date des 30 juin 2017 et 31 juillet 2017, il sera observé que si l'article 6 du contrat d'agent commercial relatif à la rémunération de l'agent stipule, dans le premier paragraphe, une commission fixée à 8 % sur le montant net des encaissements liés aux ventes hors TVA, il précise, dans le 3ème paragraphe, que "le taux de commission pourra varier selon le marché négocié par le client en accord mandant-agent".

La lecture des relevés détaillés des commissions révèle à cet égard que le taux de commissionnement appliqué par les parties variait entre 3 % et 8 % selon le client, le taux étant par exemple de 5 % pour le plus gros client la société NTM Aluminium, de 4 % pour la société Omnium Façades et de 8 % pour la société MD Menuiseries.

M.[O] ne justifiant pas qu'il aurait convenu avec son mandant d'un taux de commission supérieur à celui figurant dans le relevé de commission du mois de novembre 2017 où apparaissent les deux ventes Confort Habitat, à savoir 3 % (pièce n° 13 de l'appelant), sa demande en paiement d'un complément de commission à hauteur de 4.440 euros sera également rejetée, ce qui conduit dès lors à la confirmation du jugement entrepris sur ce point.

- Au titre des commissions dues au jour de la rupture

Il ressort du dernier relevé de commissions établi le 12 février 2018 par la société Gifetal Aluminium (pièces n° 13 et 212 de l'appelant), que la somme revendiquée par M. [O] au titre des commissions lui restant dues au jour de la rupture, soit la somme de 11.605,72 euros TTC, correspond au montant total des commissions relatives aux "factures non commissionnées".

Dans la mesure où la cour a considéré que seules les factures dites "commissionnées" ouvraient droit au versement d'une commission à M.[O] conformément à la pratique commune des parties, il ne sera pas fait droit à sa demande en paiement de cette somme de 11.605,72 euros.

Par ces motifs substitués, le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur le calcul de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité de préavis.

En application de de l'article L. 134-11 du code de commerce, lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. Les dispositions du présent article sont applicables au contrat à durée déterminée transformé en contrat à durée indéterminée. Dans ce cas, le calcul de la durée du préavis tient compte de la période à durée déterminée qui précède.

La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.

Les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts. Si elles conviennent de délais plus longs, le délai de préavis prévu pour le mandant ne doit pas être plus court que celui qui est prévu pour l'agent.

Par ailleurs, selon l'article 134-12 du même code, en cas de cessation des relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

Les usages en la matière conduisent généralement à accorder à l'agent commercial une indemnité égale aux commissions brutes perçues au cours des deux dernières années du mandat, dans la mesure où il convient de lui octroyer l'équivalent du manque à gagner consécutif à la rupture, durant la période nécessaire à la reconstitution d'une clientèle équivalente.

Toutefois, l'indemnité compensatrice de cessation de contrat ne peut être fixée sans un examen de la réalité du préjudice qu'elle doit réparer eu égard aux circonstances particulières de l'affaire.

En l'espèce, les parties étaient liées par un contrat à durée indéterminée qui a été rompu après plus de 15 années de mise en œuvre sans difficultés particulières, celles-ci étant apparues à compter du moment où M. [O] a initié des démarches de recherche d'un successeur dans la perspective d'un départ en retraite, ainsi que le reconnaît la société Gifetal Aluminium en page 2 de ses dernières écritures.

Au vu de la durée des relations contractuelles et de leur bon déroulement, hormis durant les derniers mois marqués par une dégradation des rapports entre le mandant et le mandataire dans un contexte de renégociation du contrat préalablement à sa cession, il sera retenu que M.[O] est légitime à solliciter une indemnité équivalente à deux années de commissions perçues dans le cadre du contrat d'agent commercial régularisé avec la société Gifetal Aluminium, calculées sur la moyenne des commissions versées au cours des trois dernières années d'exécution du mandat, comme il le sollicite.

En revanche, compte tenu du rejet des demandes de M.[O] tendant au paiement des commissions retracées dans la facture du 16 avril 2019, des commissions dues selon lui au jour de la rupture et des commissions au titre des ventes Confort Habitat et ACL, les sommes y afférentes ne peuvent évidemment être réintégrées dans l'assiette de calcul de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité de préavis.

Conformément à ce qui a été retenu supra, seules les opérations dans lesquelles M. [O] est intervenu doivent être prises en considération pour l'évaluation du montant des indemnités.

A cet égard, force est de constater que dans ses conclusions récapitulatives, M.[O] ne communique pas d'éléments chiffrés sur les commissions qu'il a effectivement perçues au cours des trois dernières années de mise en œuvre du contrat.

Néanmoins, ses pièces n° 8 et 9 font état du montant global des commissions qui lui ont t été versées par la société Gifetal Aluminium entre 2015 et 2017, à savoir 68.592,50 euros en 2015, 52.395,83 euros en 2016 et 43.362,62 euros en 2017.

Il est à noter que la société Gifetal Aluminium n'a jamais discuté ces montants qui correspondent d'ailleurs en tous points aux chiffres figurant dans les relevés mensuels de commission édités par ses soins, à tout le moins pour les années 2016 et 2017, puisque ceux de l'année 2015 n'ont pas été produits.

Le montant mensuel moyen des commissions de M. [O] au cours des trois dernières années du contrat était donc de 68.592,50 + 52.395,83 + 43.362,62 = 164.350,95 euros/36 = 4.565,30 euros HT.

La société Gifetal Aluminium sera par conséquent condamnée à verser à M.[O] la somme globale de 109.567,30 euros (24 x 4.565,30) au titre de l'indemnité de rupture.

Sur la base de la même assiette de calcul, il sera octroyé à M.[O] une somme de 13.695,90 euros (3 x 4.565,30) au titre du rappel des commissions pendant la période de préavis de 3 mois, étant précisé que le contrat d'agence signé le 26 février 2002 ne fait que reprendre les dispositions de l'article L. 134-11 du code de commerce concernant la durée du préavis, à savoir 3 mois à compter de la 3ème année d'exécution du mandat.

Sur la production des pièces comptables.

En vertu de l'article R. 134-3 du code de commerce, le mandant remet à l'agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé.

L'agent commercial a droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.

En l'occurrence, il y a lieu de relever que M.[O] a été destinataire de l'ensemble des relevés détaillés de commissions établis par la société Gifetal Aluminium entre janvier 2016 et janvier 2018. Par ailleurs, en exécution de la décision du tribunal de commerce, la société Gifetal Aluminium lui a transmis l'ensemble des factures clients pour la période du 1er janvier 2016 au 30 juin 2018, ainsi que les comptes clients correspondants.

Il convient dès lors de considérer que la société Gifetal Aluminium a suffisamment satisfait à son obligation d'information à l'égard de M.[O].

Il sera au demeurant observé qu'eu égard à l'impossibilité de faire application de l'article L. 134-6 du code de commerce concernant les ventes indirectes réalisées par la société Gifetal Aluminium, pour les raisons développées supra, M.[O] n'est pas fondé à solliciter la communication des éléments comptables qui porteraient sur l'intégralité des factures adressées à la clientèle de son secteur géographique accompagnée des comptes clients correspondants, étant de surcroît rappelé que ce secteur géographique ne saurait être étendu aux 5 départements supplémentaires qu'il revendique.

Il doit encore être souligné que tout en réclamant la communication de pièces comptables qu'il estime nécessaires à l'évaluation exhaustive des commissions auxquelles elle peut prétendre, M.[O] n'en tire aucune conséquence sur le plan de ses prétentions, puisqu'il a formulé ses demandes financières, sans solliciter qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'analyse desdites pièces.

Au regard de ces différentes observations, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a ordonné à la société Gifetal Aluminium de communiquer à M.[O] la copie de toutes les factures adressées à la clientèle de son secteur géographiques accompagnée des comptes clients correspondants pour toute la période courante entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2018.

M.[O] sera par ailleurs débouté de sa demande complémentaire aux mêmes fins pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

La société Gifetal Aluminium, qui succombe pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, il paraît inéquitable de laisser à M.[O] la charge des frais irrépétibles qu'il a exposés en cause d'appel, lesquels seront évalués à la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité de procédure déjà allouée en première instance et justement évaluée par le tribunal à la somme de 2.500 euros qui sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré, en ce qu'il a :

- débouté M.[O] de ses demandes au titre des arriérés de commissions et des rappels de commissions pour les ventes ACL et Confort Habitat,

- condamné la SAS Gifetal Aluminium aux dépens de première instance, ainsi qu'à payer à M.[E] [O] la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirme pour le surplus de ses dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu d'ordonner à la SAS Gifetal Aluminium de communiquer à M.[E] [O] la copie de toutes les factures adressées à la clientèle de son secteur géographiques accompagnée des comptes clients correspondants pour toute la période courante entre le 1er janvier 2015 et le 30 juin 2018,

Condamne la SAS Gifetal Aluminium à payer à M.[E] [O] la somme de 109.567,30 euros HT à titre d'indemnité en application de l'article L. 134-12 du code de commerce,

Condamne la SAS Gifetal Aluminium à payer à M.[E] [O] la somme de 13.695,90 euros HT au titre du rappel des commissions pendant la période de préavis de 3 mois,

Déboute M.[E] [O] de sa demande complémentaire en paiement de la somme de 74.074,14 euros TTC au titre des arriérés de commissions selon la facture du 16 avril 2019,

Condamne la SAS Gifetal Aluminium aux dépens d'appel, ces derniers avec droit de recouvrement,

Condamne la SAS Gifetal Alumimium à payer à M.[E] [O] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.