CE, 6e et 1re sous-sect. réunies, 2 novembre 2005, n° 270825
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Hagelsteen
Rapporteur :
Mlle Vialettes
Commissaire du gouvernement :
M. Guyomar
Avocats :
SCP Delaporte, Briard, Trichet, SCP Coutard, Mayer, SCP de Chaisemartin, Courjon
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 4 août 2004 et 29 avril 2005, présentés pour M. Olivier Y... demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 6 mai 2004 de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en tant que celle-ci a prononcé à son encontre un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 euros ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code monétaire et financier ;
Vu la loi n° 2007-706 du 1er août 2003 de sécurité financière ;
Vu le décret n° 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. Y..., de la SCP Coutard, Mayer, avocat de M. X... et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de l'Autorité des marchés financiers,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Y... demande l'annulation de la décision en date du 6 mai 2004 de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en tant que celle-ci a prononcé à son encontre un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 euros ;
Sur la régularité de la décision attaquée :
Considérant que le moyen tiré de ce que Mme Z n'était pas habilitée à lui notifier, le 11 juillet 2003, les griefs qui lui étaient faits, manque en fait, celle-ci ayant été élue le 9 octobre 2002 présidente du Conseil des marchés financiers ; qu'en outre, le requérant ne saurait invoquer à ce même titre les dispositions régissant l'Autorité des marchés financiers qui n'étaient pas applicables aux actes de constatation et de poursuite accomplis antérieurement à la première réunion de la commission des sanctions de cette Autorité ; qu'enfin, au vu de l'ensemble des énonciations de la décision attaquée qui a analysé tous les manquements de la société Fideuram Wargny avant de retenir à la charge du requérant les faits susceptibles de lui être reprochés en sa qualité de dirigeant de la société qu'il avait alors, la commission ne saurait être regardée comme ayant insuffisamment motivé sa décision ;
Sur le bien-fondé de la décision attaquée :
Considérant que pour la mise en oeuvre des dispositions du règlement général du Conseil des marchés financiers, il convient de tenir compte de l'organisation de l'entreprise concernée et, en particulier, de la répartition des fonctions telle qu'elle apparaît compte tenu des délégations de pouvoir à l'intérieur de l'entreprise ; que, toutefois, peut être mise en cause, au titre de ces dispositions, toute personne qui a personnellement pris part à un manquement alors même que les agissements reprochés dépasseraient le cadre de ses attributions telles qu'elles ressortent des documents relatifs à l'organisation de l'entreprise ;
Considérant, d'une part, qu'en retenant à la charge de M. Y..., président du conseil d'administration de la société au moment des faits, l'insuffisance des précautions prises pour décider de l'établissement d'une relation d'affaires avec la société EBS, le retard pris à formaliser cette relation par un contrat daté et signé et la gravité des lacunes dans le contrôle de la situation des clients, la commission, qui, en tout état de cause, n'était pas tenue par les conclusions de son rapporteur, n'a, en lui imputant des manquements aux articles 2-1-3, 2-4-15, 2-4-16, 3-1-1, 3-4-1 et 3-3-5 du règlement général du Conseil des marchés financiers alors applicable, commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation au regard des fonctions qu'il exerçait ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du III de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier : « Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements » ; qu'en l'espèce, compte tenu de la gravité des manquements retenus et notamment de leurs conséquences pour les clients concernés, la sanction prononcée n'a pas revêtu un caractère excessif, sans qu'il soit besoin de rechercher si l'intéressé en avait, par ailleurs, retiré des avantages ou profits ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation du requérant doivent être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie dans la présente instance, la somme de 5 000 euros que réclame le requérant au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Olivier Y... et à l'Autorité des marchés financiers.