Cass. crim., 16 octobre 2013, n° 12-86.189
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
Mme Labrousse
Avocat général :
M. Gauthier
Avocats :
Me Foussard, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 1741 du code général des impôts et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré un contribuable (M. X..., le demandeur) coupable de fraude fiscale par dissimulation de sommes sujettes à l'impôt, l'a condamné à une peine d'amende de 10 000 euros, a déclaré l'administration des impôts fondée en sa constitution de partie civile et dit qu'il serait solidairement tenu, avec la société dont il était le dirigeant (la SARL Etablissements Guillot), au paiement des impôts fraudés ainsi qu'à celui des pénalités y afférentes ;
"aux motifs qu'il résultait des analyses réalisées dans le cadre de la procédure fiscale contradictoire, lesquelles n'avaient pas été contestées sur ce point, qu'il y avait eu pour les périodes allant du 1er avril 2005 au 30 juin 2007 une minoration du chiffre d'affaires déclaré éludant en conséquence le versement de la TVA correspondante, et ce dans les termes rappelés précédemment (minoration du chiffre d'affaires s'élevant à 96 215 euros pour la période du 1er avril 2005 au 30 juin 2006 correspondant à une TVA éludée de 22 351 euros, et à 670 677 euros pour la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2007, correspondant à une TVA éludée de 97 481 euros) ; que le prévenu invoquait l'absence d'élément intentionnel au regard du délit poursuivi ; que s'il versait aux débats copies des courriers (mentionnant des écarts relevés en matière de TVA et des régularisations à devoir être effectuées) établis les 22 juillet 2004, 22 juillet 2005, 4 octobre 2006 et 29 octobre 2007 par le cabinet d'expertise comptable auquel sa société recourait pour la révision de sa comptabilité, il apparaissait cependant que les déclarations périodiques de taxe sur le chiffre d'affaires (minoré au titre des périodes poursuivies) étaient établies par les services internes à l'entreprise du prévenu, le cabinet d'expertise comptable ne retraitant les opérations qu'au vu des éléments qui lui étaient transmis par l'entreprise et ne lui signalant qu'avec retard les écarts ou anomalies ainsi que les régularisations devant intervenir sur la prochaine déclaration de chiffre d'affaires (courriers du 22 juillet 2004 pour le bilan clôturé au 31 mars 2004, 22 juillet 2005 pour le bilan clôturé au 31 mars 2005, 4 octobre 2006 pour le bilan clôturé au 30 juin 2006, 29 octobre 2007 pour le bilan clôturé au 30 juin 2007) ; que ces constatations étaient en cohérence avec les déclarations de M. Y... qui précisait que son cabinet « n'établissait pas les déclarations de TVA et n'avait indiqué aucune méthode particulière pour les établir » ; que si le prévenu invoquait la complexité des opérations concernées en raison de cessions de facture ou créance, il lui appartenait, comme dirigeant de plusieurs sociétés devant connaître ses obligations notamment fiscales, de mettre en oeuvre par lui-même ou par le recours à des professionnels qualifiés pour l'informer et le conseiller utilement, des procédures permettant de déclarer avec exactitude le chiffre d'affaire réalisé, et ce d'autant plus que les anomalies et écarts constatés n'étaient pas ponctuels mais s'étaient succédé au fil des ans ; qu'en recourant dans ces conditions aux seuls services internes de l'entreprise (dont l'intéressé avait convenu à l'audience qu'ils avaient commis des erreurs) pour réaliser les déclarations en cause dont il avait conscience du renouvelle-ment du caractère inexact depuis au moins 2004 et ce alors même qu'il avait contribué à amplifier considérablement sur le dernier exercice la « complexité » dont il se prévalait, par un recours important aux cessions de factures pour obtenir des financements dans le contexte dégradé que connaissait l'entre-prise, M. X... avait consciemment et volontairement méconnu les obligations fiscales qui étaient les siennes comme gérant de droit de la société « Etablissements Guillot » et ce, en connaissance des conséquences de ces manquements, aucun élément du dossier n'établissant au surplus que la régularisation de TVA préconisée par le cabinet comptable dans son courrier du 29 octobre 2007 eût été mise en oeuvre lors de la déclaration suivante de chiffre d'affaires ; que la soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt était ainsi établie ; que le délit était donc constitué en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel ;
"1°) alors que n'a pas volontairement dissimulé des sommes sujettes à l'impôt le contribuable qui a commis une erreur de fait en établissant l'impôt, croyant s'être entièrement conformé à ses obligations fiscales ; qu'après avoir constaté que la minoration du chiffre d'affaires déclaré pour les exercices 2005-2006 et 2006-2007 était due à des erreurs des services internes de l'entreprise, la cour d'appel ne pouvait considérer que le prévenu avait volontairement dissimulé les sommes sujettes à la TVA ;
"2°) alors que, en toute hypothèse, la volonté coupable du prévenu doit être concomitante à l'élément matériel de l'infraction ; que la cour d'appel ne pouvait, sans tirer des conséquences erronées de ses propres constatations, se fonder sur la connaissance que le prévenu avait en 2004 du caractère erroné des déclarations de TVA réalisées pour les exercices 2005-2006 et 2006-2007" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.