Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 11 avril 2014, n° 13/23575

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

C. M.

Défendeur :

C. R., P. C. , O. J., SARL E-TOXIC, SOCIÉTÉ CONVERSIS HOSTING GMBH

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Madame Marie-Christine AIMAR

Conseillers :

Madame Sylvie NEROT, Madame Isabelle DELAQUYS

Avocats :

AARPI YS AVOCATS, Me Antoine GUERINOT, SELARL IWan, Me Cécile TORDJMAN, Me Sonia-maïa GRISLAIN, AARPI JRF, Me Natacha TRAPARIC, SELURL Cabinet Khalid OUADI, Me ZEIFMAN, Me Tomas GURFEIN, Me Nils BAYER

CA Paris n° 13/23575

10 avril 2014

Vu l'assignation délivrée le 29 novembre 2011 par Madame Corinne Morel à l'encontre de Messieurs Claude Rozier, Pierre Cassez, Olivier Januario, respectivement créateur, développeur et éditeur de sites internet et des sociétés E-Toxic SARL et Conversis HostingGmbH, respectivement prestataire de services techniques et hébergeur de sites, en contrefaçon de ses droits d'auteur sur l'ouvrage intitulé ' Guide du tarot - tome 2 : Les arcanes majeurs' du fait de sa reproduction sur divers sites internet,

 

Vu le jugement rendu le 13 juin 2013 par le tribunal de grande instance de Paris qui a, notamment, rejeté sa demande indemnitaire au titre du droit d'auteur aux motifs, en particulier, que :

 

' L'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.

 

Le droit de l'article susmentionné est conféré, selon l'article L 112-1 du même code, à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soit le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.

 

Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d'une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d'une oeuvre originale. Néanmoins, lorsque cette protection est contestée en défense, l'originalité d'une oeuvre doit être explicitée par celui qui s'en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d'identifier les éléments traduisant sa personnalité',

 

et que :

 

' Faute d'établir que le contenu de son ouvrage révèle sa personnalité, Madame Morel ne saurait bénéficier de la protection de son oeuvre au titre du droit d'auteur',

 

Vu l'appel interjeté par Madame Corinne Morel le 12 septembre 2013,

 

Vu le mémoire reçu par RPVA le 02 décembre 2013 par lequel Madame Corinne Morel, au visa des dispositions de l'article 61-1 de la Constitution et de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009, demande à la cour :

 

- de prendre acte de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle pour violation des articles 1er, 2, 6, 16 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, de l'article 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que les principes d'intelligibilité et d'accessibililté de la loi reconnus dans la décision 2006-540 DC du 27 juillet 2006,

 

- de constater que la question soulevée est applicable à la procédure pendante devant la cour d'appel de Paris, pôle 5 - chambre 2, RG n° 13/18038,

 

- de constater que la question soulevée porte sur une disposition qui n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel dans des circonstances identiques ,

 

- de constater que la question soulevée présente un caractère sérieux ,

 

- de constater que Madame Corinne Morel ne peut pas défendre ses droits en appel puisque l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle l'oblige à faire la preuve de l'originalité de son oeuvre sans lui dire comment elle doit et peut remplir cette obligation,

 

- de transmettre à la Cour de cassation sans délai la question prioritaire de constitutionnalité soulevée afin que celle-ci procède à l'examen qui lui incombe en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel pour qu'il relève l'inconstitutionnalité de la disposition contestée, prononce son abrogation et fasse procéder à la publication qui en résultera,

 

Vu les écritures en défense à la question prioritaire de constitutionnalité signifiées le 31 janvier puis le 11 février 2014 par la société de droit allemand Conversis Hosting GmbH par lesquelles elle demande à la cour :

 

- de constater que la question soulevée n'est pas applicable à la procédure pendante devant la cour d'appel,

 

- de constater que la question soulevée ne présente pas un caractère sérieux,

 

- de constater que Madame Morel peut défendre ses droits en appel puisque ce n'est pas l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle qui l'oblige à faire la preuve de l'originalité de son oeuvre mais les règles de preuve en général que la loi prévoit,

 

- de rejeter la demande de transmission à la Cour de cassation en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel pour qu'il prononce son abrogation,

 

- de condamner Madame Morel aux frais et dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 3.500 euros et à lui verser la somme indemnitaire de 4.000 euros pour les diverses procédures abusives initiées à son encontre,

 

Vu les écritures en défense à la question prioritaire de constitutionnalité signifiées le 07 février 2014 par la société à responsabilité limitée E-Toxic au terme desquelles elle prie la cour, au visa de l'article 1382 du code civil , de la directive 2000/31 du 08 juin 2000, de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 et de ses conclusions au fond du 30 janvier 2014 :

 

- de constater qu'elle s'en rapporte à justice sur la question prioritaire de constitutionnalité,

 

- de condamner Madame Morel à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter tous les dépens,

 

Vu les écritures en défense à la question prioritaire de constitutionnalité signifiées le 19 février 2014 par Monsieur Olivier Januario qui demande à la cour :

 

- de considérer que Madame Morel ne réunit pas les trois conditions requises pour se prévaloir de l'application de l'article 61-1 de la Constitution,

 

- de déclarer la question prioritaire de constitutionnalité irrecevable,

 

- de considérer que les demandes aux fins de question prioritaire de constitutionnalité sont dépourvues de tout fondement en droit comme en fait et de l'en débouter,

 

- de considérer qu'il appartient à Madame Morel d'apporter la preuve de l'originalité de son oeuvre en application des dispositions du code de procédure civile et non de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle,

 

- de considérer que l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle ne fait que définir le droit d'auteur et intègre une présomption de protection, ce dont Madame Morel ne peut se plaindre,

 

- de considérer qu'il appartient à Madame Morel de défendre ses droits en cause d'appel en sollicitant la réformation du jugement dont appel et, ce faisant, en rapportant la preuve dont elle s'est dispensée en première instance,

 

- de considérer que rien n'empêche Madame Morel de le faire, si ce n'est sa mauvaise volonté,

 

- de considérer que la prétendue non-constitutionnalité de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle est hors de propos,

 

- de rejeter la demande de transmission de Madame Morel à la Cour de cassation en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel pour qu'il prononce l'abrogation de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle,

 

- de condamner Madame Morel à lui verser la somme indemnitaire de 4.000 euros pour procédure abusive, celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens,

 

Vu le courrier daté du 21 février 2014 adressé à la cour par le conseil de Monsieur Pierre Cassez déclarant s'en rapporter à la décision de la cour,

 

Vu les écritures en défense à la question prioritaire de constitutionnalité signifiées le 26 février 2014 par Monsieur Claude Rozier par lesquelles il prie la cour, au visa des articles 61-1 de la Constitution, 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 07 novembre 1958 , et des articles L 111-1 du code de la propriété intellectuelle et 9 du code de procédure civile :

 

- à titre principal, de considérer que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Madame Morel ne remplit aucune des trois conditions de recevabilité exigées par l'article 23-2 de l'ordonnance du 07 novembre 1958 et de déclarer irrecevable la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Madame Morel,

 

- à titre subsidiaire, de constater que l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle n'est pas en cause dans la présente procédure et que Madame Morel tente en réalité de remettre en cause la seule appréciation souveraine des juges du fond quant à l'originalité de l'oeuvre, qu'il lui appartient donc de faire la preuve de l'originalité de son ouvrage pour pouvoir prétendre à la protection par le droit d'auteur conformément aux dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, de constater, de plus, qu'une procédure d'appel est actuellement pendante devant la cour de céans sous le n° de RG 13/18038, que c'est uniquement dans le cadre de cette procédure qu'il appartient à Madame Morel de défendre ses droits et de considérer que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Madame Morel est donc dépourvue de tout fondement en droit et en fait,

 

- en conséquence, de rejeter la demande de transmission à la Cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Madame Morel,

 

- en tout état de cause, de condamner Madame Morel à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens,

 

Vu l'avis écrit du Ministère Public en date du 27 janvier 2014 et développé à l'audience concluant que si sont satisfaites les conditions de la transmission de la question à la Cour de cassation tenant au lien qu'elle doit présenter avec le litige en cours et au fait qu'elle porte sur une disposition qui n'a pas encore été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel dans des circonstances identiques, tel n'est pas le cas de la condition tenant au caractère sérieux de la question dans la mesure où :

 

- eu égard à la rédaction de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, la protection qu'il confère à l'auteur d'une oeuvre de l'esprit est acquise du seul fait de sa création,

 

- la jurisprudence en a tiré comme conséquence que ce n'est qu'en cas de contestation que l'originalité doit être démontrée,

 

- en matière de revendication de la protection du droit d'auteur, ce texte laisse toute initiative à celui qui y prétend pour prouver l'existence d'un apport original,

 

- la détermination de l'existence de l'originalité relève de l'appréciation souveraine des juges du fond tenus de préciser en quoi le texte ou la forme graphique comporte un apport intellectuel de l'auteur caractérisant une création originale,

 

de sorte que ces dispositions spécifiques du texte contesté infirment l'argumentaire soutenu au titre de la question prioritaire de constitutionnalité qui s'analyse en conséquence comme étant dépourvue de caractère sérieux et qu'il n' y a donc pas lieu de la transmettre à la Cour de cassation,

 

Vu l'accord des parties pour plaidoiries immédiates, ainsi qu'acté par le greffier d'audience ,

 

SUR CE

 

Considérant qu'en application de la loi organique du 10 décembre 2009 susvisée, lorsqu'il est soutenu, à l'occasion d'une instance en cours, qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation ;

 

Que l'article 126-2 du code de procédure civile édicte, à peine d'irrecevabilité, les conditions de forme que doit revêtir le moyen tendant à cette fin, tout comme la forme des éventuelles observations des parties au litige ;

 

Que la transmission de la question suppose la réunion de trois conditions, à savoir : que la disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure et constitue le fondement des poursuites, que cette disposition n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, et que la question n'est pas dépourvue de sérieux ;

 

Considérant, en l'espèce et s'agissant de la recevabilité du mémoire reçu par transmission électronique le 02 décembre 2013, que celui-ci satisfait aux conditions formelles prescrites puisqu'il se présente comme un écrit distinct et motivé, à l'instar des observations des parties adverses sur la question prioritaire de constitutionnalité susceptible, comme telles, d'être jointes à l'éventuelle transmission de la question à la Cour de cassation ;

 

Considérant, s'agissant de la première des conditions de la transmission, que c'est de manière inopérante que Monsieur Rozier soutient que la disposition contestée n'est pas applicable à la procédure en cours au motif, repris par la société Conversis Hostings faisant valoir que la question litigieuse concerne l'administration de la preuve et le pouvoir souverain d'appréciation du juge, que celle-ci ne porte que sur la démonstration de l'originalité de son oeuvre et que c'est tout aussi vainement que Monsieur Olivier Januario tire, par ailleurs, cumulativement argument du fait que les premiers juges se sont fondés sur les dispositions combinées des articles L 111-1 et L 112-1 du code de la propriété intellectuelle, que Madame Morel ne conteste pas la constitutionnalité de ce dernier texte et ne peut exciper de l'anticonstitutionnalité de tout le droit positif français et européen en matière de propriété intellectuelle, dès lors que l'action tend à voir juger, par application de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, que l'ouvrage dont elle est l'auteur doit être considéré comme une oeuvre de l'esprit qui lui permet de jouir, sans formalités, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ;

 

Considérant, s'agissant de la deuxième condition tenant à l'absence de décision du Conseil constitutionnel ayant précédemment, dans ses motifs ou son dispositif, déclaré conforme la disposition contestée, que le Conseil constitutionnel a certes eu à connaître, comme le soutient Monsieur Januario, de la constitutionnalité de la loi du n° 2006-961 du 1er août 2006 et qu'elle a rendu une décision n° 2006-540 DC le 27 juillet 2006 ;

 

Qu'il y a, toutefois, lieu de relever que, sur interpellation de la cour qui a demandé au conseil de Madame Morel de préciser quelles dispositions législatives portent atteinte, selon elle, aux droits et libertés garantis par la Constitution, puisque l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle comporte quatre alinéas et que le 'mémoire' saisissant la cour ne reprend ni même ne précise la ou les disposition(s) contestée(s), il lui a été indiqué, en présence des parties et ainsi qu'acté, que seule fait l'objet de la contestation la constitutionnalité de l'alinéa premier de cet article qui dispose :

 

' L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous' ,

 

et que Monsieur Januario ne peut se borner à faire état de la modification législative intervenue après l'adoption de la loi du 1er août 2006 relative aux droits d'auteur et droits voisins dans la société de l'information, qui n'a porté que sur l'alinéa 3 de l'article L 111-1 précité en introduisant un alinéa 4, et affirmer, en termes à tout le moins hypothétiques, qu'il paraîtrait pour le moins surprenant que ledit Conseil constitutionnel ait modifié l'article L 111-1 en juillet 2006 en laissant demeurer le reste de l'article inconstitutionnel. Cela n'est pas sérieux' ;

 

Qu'il ne peut donc être considéré que la disposition précisément contestée a été précédemment déclarée conforme à la Constitution dans les motifs ou le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

 

Considérant enfin, s'agissant du caractère sérieux que doit revêtir la question, qu'elle ne requiert pas de la cour l'appréciation de la conformité du texte législatif à la constitution mais lui impose de vérifier si cette question n'est pas dilatoire et si elle n'est pas dépourvue de caractère 'sérieux', notion que la circulaire d'application CIV/04/10 du 1er mars 2010 propose de cerner au paragraphe 2.2.3.2 (3°) en disant qu'elle est fréquemment définie comme'denature à faire naître un doute dans un esprit éclairé' ;

 

Qu'il est constant que si la question peut être reformulée par le juge à effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui appartient pas d'en modifier l'objet ou la portée ;

 

Que force est de relever en l'espèce que si le 'mémoire' de Madame Morel invoque pas moins de six dispositions issues du bloc de constitutionnalité ainsi que deux principes à valeur constitutionnelle auxquels l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, en son alinéa premier, serait contraire, elle ne formule aucune question précise ;

 

Qu'elle se contente, en effet, d'affirmer tour à tour, à travers la contestation récurrente de la décision rendue qu'elle critique déjà d'abondance en préambule, que son droit à se défendre a été méconnu, que son ouvrage a été l'objet d'une discrimination puisque 'tous les livres publiés sur des sujets abondamment traités sont protégés par la loi', que le principe d'égalité des droits a été bafoué du fait d'une comparaison avec des oeuvres préexistantes menée selon des considérations inintelligibles, que l'article L 111-1 dépend de l'arbitraire du juge alors que la Constitution précise que seul le peuple est souverain et que la condition d'originalité n'est exigée que pour les adaptations alors que le litige porte sur une reproduction, que, de plus, le droit de propriété est inscrit dans la Constitution et que la décision du juge permet à tous d'utiliser son oeuvre sans autorisation, que l'article L 111-1 autorise le juge à 'retirer à l'oeuvresa protection' de sorte que quiconque peut 'utiliser' son oeuvre sans la citer, qu'il est porté atteinte à son intégrité morale, à sa dignité , à son honneur et à sa réputation en méconnaissance des droits fondamentaux que sont la liberté, la sûreté, la propriété et la résistance à l'oppression, qu'en affirmant que son oeuvre n'était pas protégée le juge a rompu avec le principe d'égalité, qu'en l'état, elle n'a aucune certitude de retrouver ses droits alors que la sûreté est inscrite dans la Constitution, qu'elle est libre de décider si elle autorise ou non la reproduction de son oeuvre et que l'article L 111-1 la prive d'une liberté fondamentale et qu'enfin, l'article L 111-1 engendre une décision irrationnelle, qu'une personne douée de raison ne peut comprendre la décision rendue le 13 juin 2013 et qu'elle doit être jugée comme tous les êtres humains sur la base d'une loi qui répond à la raison, la Déclaration universelle des droits de l'homme prévoyant que tous les êtres humains sont doués de raison ;

 

Que sauf à modifier l'objet et la portée de ce que Madame Morel présente comme des questions, il a lieu de considérer que dans les termes généraux où elle est posée, elle ne fait pas naître un doute raisonnable dans un esprit éclairé ;

 

Qu'en effet, les dispositions contestées telles qu'elles sont interprétées par la Cour de cassation règlent de façon différente des situations différentes, les 'oeuvres de l'esprit' n'ayant pas vocation à bénéficier dans leur ensemble, dès lors que la propriété intellectuelle n'est pas un droit général et absolu, de la protection sans formalités par elles instaurée mais requérant, pour accéder à la protection du droit d'auteur, qu'elles s'expriment sous une forme communicable au public et qu'elles procèdent de choix exprimant la personnalité de son auteur ;

 

Qu'elles sont également justifiées au regard de l'objectif poursuivi d'équilibre entre, d'une part, le droit de chacun à la protection de ses intérêts moraux et matériels découlant d'une production relevant de la création culturelle et, d'autre part, les libertés fondamentales telles la liberté d'expression, la liberté d'entreprise, du commerce et de l'industrie ou encore la liberté de circulation des biens et des services ;

 

Qu'il s'en induit que 'la question'dont la cour est saisie par Madame Morel ne présente pas le caractère de sérieux requis et qu'il n'y a donc pas lieu de la transmettre à la Cour de cassation ;

 

Considérant qu'il n'y a pas lieu, non plus, dans le cadre de ce simple exercice du droit de contester l'application d'une disposition législative au motif qu'elle est contraire à une norme fondamentale, fût-il mal apprécié, à condamnation pour abus de procédure ni à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

Que les dépens doivent être réservés ;

 

PAR CES MOTIFS

 

Statuant publiquement par décision susceptible de recours dans les conditions de l'article 23-2 alinéa 3 de l'ordonnance n° 58-1067 du 07 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

 

Déclare recevable en la forme la demande de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation formée par Madame Corinne Morel le 02 décembre 2013 ;

 

Rejette la demande de transmission à la Cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité soumise à la cour par Madame Corinne Morel pour transmission au Conseil constitutionnel aux fins d'abrogation de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle ;

 

Rejette les demandes indemnitaires ainsi que celles formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

Renvoie la cause et les parties à l'audience de mise en état du jeudi 15 mai 2014 à 13 heures pour fixation d'un calendrier de procédure ;

 

Réserve les dépens.