Cass. com., 26 mars 1996, n° 94-14.051
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Poullain
Avocat général :
M. Raynaud
Avocats :
SCP Defrénois et Levis, SCP Delaporte et Briard
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 mars 1994), que M. de X..., actionnaire majoritaire de la société anonyme Cap Pharma, a sollicité un apport de capitaux de MM. Y... et Bourgeois ; que, pour éviter que leurs apports ne le privent de la majorité du capital dans cette société et ses filiales, M. de X... a créé la SARL Coparmed, dont il était l'associé majoritaire et qui est devenue propriétaire de la majorité des actions de la société Cap Pharma, tandis que, pour protéger les nouveaux actionnaires, majoritaires en capital et minoritaires en droits de vote, il s'est engagé, s'ils en faisaient la demande entre le 1er juillet et le 31 décembre 1992, à racheter leurs parts, actions et comptes d'associés à un prix convenu ; que MM. Y... et Bourgeois ont présenté cette demande et qu'il s'est refusé d'y donner suite ; qu'ils l'ont assigné en exécution de son engagement devant le tribunal de commerce de Paris ;
Attendu que M. de X... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté le contredit qu'il avait formé contre le jugement du tribunal de commerce se déclarant compétent, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'achat de droits sociaux relève par exception de la compétence de la juridiction commerciale lorsqu'il a pour objet et pour effet le changement de contrôle d'une société ; que la cour d'appel, qui a constaté que le 12 décembre 1990 il avait le contrôle de la société Cap Pharma et que la création de la société Coparmed, dans laquelle il était majoritaire dès l'origine, lui avait permis de conserver le contrôle de la société Cap Pharma dont la seconde détenait la majorité du capital, n'a pas tiré les conséquences légales de ces constatations d'où il résultait que, ni lors de la passation de la promesse de rachat, ni a fortiori lors de l'action en exécution de celle-ci, il n'y avait eu transfert de contrôle emportant compétence du juge commercial, et donc violé l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 et l'article 632 du Code de commerce ; alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, la cour d'appel n'a pas recherché, comme l'y invitaient ses conclusions, si, lorsqu'il avait été mis en demeure d'exécuter son obligation de rachat, il n'avait pas, au moins à ce moment, le contrôle des sociétés visées, de sorte que l'exécution de son obligation, à supposer celle-ci valable, n'avait ni pour objet ni pour effet un changement de contrôle ; qu'ainsi l'arrêt attaqué n'est pas légalement justifié au regard de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 et de l'article 632 du Code de commerce ; alors, enfin, que l'engagement de rachat repris au point 8 du pacte d'associés avait pour objet de permettre aux investisseurs de retrouver le montant de leurs investissements, le point 11 précisant d'ailleurs qu'il avait conservé le contrôle des sociétés visées afin que soit maintenu un cautionnement bancaire de 4 millions de francs en sorte que cet engagement n'avait pas pour contrepartie la renonciation des investisseurs à assurer le contrôle ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et l'article 632 du Code de commerce ;
Mais attendu que la convention, qui a pour objet l'organisation de la société commerciale en transférant son contrôle ou en en garantissant le maintien à son titulaire, est un acte commercial et relève de la compétence des tribunaux de commerce ; qu'ayant constaté que les apports de MM. Y... et Bourgeois faisaient perdre le contrôle de la société Cap Pharma et de ses filiales à M. de X... et que la société holding Coparmed a été créée pour éviter ce résultat, et que, pour protéger les associés majoritaires en capital qu'un tel montage rendait minoritaires en voix, un droit de sortie leur a été garanti par l'engagement de rachat pris par M. de X..., l'arrêt retient que la clause de rachat ne constituait pas un engagement autonome mais que son acceptation, imposée par les investisseurs, donnait à M. de X... le contrôle des sociétés, effet suffisant pour lui donner la nature d'acte commercial ; qu'ayant ainsi souverainement apprécié que pour les parties, l'engagement litigieux n'était pas dissociable de la convention portant sur le contrôle des sociétés, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante, a fait une exacte application du principe ci-dessus rappelé ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.