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Décisions

Cass. crim., 15 novembre 2000, n° 00-81.166

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme De la Lance

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Gatineau, Me Foussard

Paris, 9e ch., du 26 janv. 2000

26 janvier 2000

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 227 du Livre des procédures fiscales, 1741 et 1750 du Code général des Impôts, 8 et 9 du Code de commerce, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christian Y... coupable de fraude fiscale et d'omission de passation d'écritures, et l'a condamné à diverses sanctions pénales et civiles,

"aux motifs qu'il admet avoir développé une activité personnelle en utilisant les machines de la société Salomon, et que cette utilisation sans contrepartie pour la société Salomon constitue un acte exclusif du lien de subordination qu'il invoque ; que la participation de Christian Y... à la gestion de la société est ainsi établie ;

"et aux motifs, concernant les omissions déclaratives, due les premiers juges ont à juste titre estimé que le caractère systématique des omissions de déclarations établissait la mauvaise foi des prévenus ; que le jugement sera confirmé sur la déclaration de culpabilité, les faits retenus à la charge de Christian Y... excluant ceux postérieurs au 23 février 1995, date de sa démission, étant précisé que l'obligation de déclarer le chiffre d'affaires réalisé au cours du mois de décembre 1994 était située au mois de janvier 1995 ;

"et aux motifs, concernant l'omission de passation d'écritures, qu'il est établi et non contesté que seuls des documents épars et non centralisés ont été présentés au vérificateur ; que l'infraction est à cet égard constituée et sera retenue pour le seul exercice 1994, et jusqu'au 23 février 1995 à la charge de Christian Y... ;

"1 / alors qu'en déduisant la participation de Christian Y... à la gestion de la société Salomon, de la seule circonstance qu'il a développé une activité personnelle en utilisant les machines de la société, sans caractériser les actes de gestion accomplis par l'intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé les textes visés au moyen" ;

"2 / alors que la loi n'édicte aucune présomption de responsabilité à l'encontre des dirigeants sociaux ; que dès lors en déduisant la mauvaise foi de Christian Y... de la seule circonstance qu'il a participé à la gestion de la société, la cour d'appel a méconnu le principe sus-rappelé et violé les textes visés au moyen ;

"3 / alors qu'une même d'infraction ne peut être imputée cumulativement au dirigeant de droit et au dirigeant de fait d'une entreprise ; qu'en l'espèce il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. X... s'est comporté en dirigeant de fait de la société Salomon ; que dès lors la responsabilité des infractions, objet de la poursuite, devait lui être imputée ; qu'en retenant néanmoins la responsabilité pénale de Christian Y..., la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui en résultaient et a violé les textes visés au moyen" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Christian Y..., président du conseil d'administration de la société Salomon, et Dominique X..., dirigeant de fait de cette société, ont été poursuivis des chefs de fraude fiscale, pour, notamment, s'être abstenu de déposer toute déclaration en matière de TVA, et d'omission d'écritures en comptabilité ;

Attendu que, pour déclarer Christian Y... coupable des délits reprochés en 1994 et jusqu'au 23 février 1995, les juges du second degré énoncent qu'en vertu d'un procès-verbal du conseil d'administration de la société du 2 janvier 1991, il a été désigné pour succéder à Dominique X... dans les fonctions de président-directeur général, qu'il n'est pas démontré qu'il ait manisfesté un refus de ces fonctions, qu'il n'a engagé aucune procédure pour faire établir la fausseté du procès-verbal précité, qu'il a conservé ce titre pendant plus de 4 ans avant de démissionner le 23 février 1995 et que l'utilisation des machines de la société pour développer une activité personnelle exclut le lien de subordination qu'il invoque ;

Qu'ils ajoutent qu'en dépit des multiples mises en demeure adressées à la société, aucune déclaration de chiffre d'affaires n'a été déposée au cours de l'année 1994, que le caractère systématique des omissions de déclarations caractérise la mauvaise foi du prévenu et qu'il est établi et non contesté que seuls des documents épars et non centralisés ont été présentés au vérificateur ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que le président d'une société anonyme, responsable des obligations fiscales vis-à-vis de l'Administration, en application de l'article 244 de la loi du 24 juillet 1966, peut être condamné pour fraude fiscale conjointement avec un dirigeant de fait dont la participation à la gestion de l'entreprise a été établie, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation du principe de légalité des délits et des peines, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Christian Y... au paiement des impôts fraudés et des majorations et pénalités y afférentes ;

"alors que les juges doivent spécifier la peine prononcée ainsi que le montant des réparations civiles ; que, dès lors, en se bornant à condamner le prévenu au paiement des impôts fraudés et des majorations et pénalités y afférentes, sans préciser le montant desdits impôts, majoration et pénalités, la cour d'appel a prononcé une sanction indéterminée et violé le principe de légalité des délits et des peines" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les juges du fond, après avoir condamné les prévenus pour fraude fiscale, les ont déclarés solidairement tenus avec la société Salomon "au paiement des impôts fraudés, et des majorations et pénalités y afférentes, dans les limites des faits visés à la prévention et retenus à la charge de chacun d'entre eux" ;

Qu'en prononçant ainsi, et dès lors qu'il n'appartient pas au juge répressif, qui n'est pas le juge de l'impôt, de déterminer le montant des impôts fraudés, des majorations et des pénalités, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 1745 du Code général des impôts ;

Que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.