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Décisions

CA Douai, premier président, 12 janvier 2023, n° 21/05301

DOUAI

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Eurovia Picardie (Sté)

Défendeur :

Direction Régionale de l'Economie, de l'Emploi, du Travail et des Solidarités des Hauts de France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Château

Avocats :

Me Camus-Demailly, Me Luttel

CA Douai n° 21/05301

12 janvier 2023

Exposé des faits :

Par requête en date du 24 février 2021, Monsieur [UX] [SS], chef du pôle concurrence, consommation, répression des fraudes et métrologie au sein de la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France, devenue la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail, et des solidarités depuis le 1er avril 2021, ci-après la DREETS, a présenté au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Arras une demande aux fins d'autorisation de visite et saisie au sein des locaux de la société Eurovia Picardie ( ci-après Eurovia) à [Localité 3] et [Localité 8], ainsi que dans ceux des sociétés Oise TP Lhotellier, Colas [Localité 3], Colas Nord Est, Ramery TP, et Oise [Localité 5], Guintoli et Siorat ainsi que dans les entreprises des mêmes groupes qui seraient situées à la même adresse, au motif que lesdites entreprises auraient pris une part active ou à plusieurs pratiques visant à se répartir des marchés d'aménagement et les travaux de chaussée et ce en violation des dispositions de l'article L. 420-1 du code de commerce relatif aux pratiques anti-concurrentielles.

Par ordonnance du 9 mars 2021, le juge des libertés et de la détention d'Arras a autorisé, en application de l'article L. 450-4 du code de commerce, une opération de visite et saisie au sein des locaux de la société Eurovia Picardie zone d'activités de Pinçolieu, [Adresse 1] à [Localité 3] et [Adresse 7] à [Localité 8].

Cette opération a été exécutée par la DREETS le 16 mars 2021.

Par déclaration en date du 23 mars 2021, la société Eurovia a déposé un recours contre le déroulement des opérations de visites et saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 16 mars 2021 dans le cadre de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention le 9 mars 2021.

Cette affaire a été enrôlée sous le numéro de répertoire général 21/5301.

Prétentions et moyens des parties à l'audience du 18 octobre 2022.

La société Eurovia demande, au visa des articles 6, 8 et 13 de la Convention Européenne des droits de l'Homme, 432-8 et 432-9 du code pénal, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce de :

- 1. Annuler dans leur ensemble les opérations de visites et saisies diligentées le 16 mars 2021 dans les locaux des agences de [Localité 8] et [Localité 3] en ce que :

- les enquêteurs ont examiné des supports et outils contenant de nombreuses données privées de ses dirigeants et salariés et ont saisi ces données, en violation de leurs droits fondamentaux à la protection de la vie privée et au respect du secret des correspondances ;

- des saisies massives et indiscriminées ont été réalisées en totale violation du principe de proportionnalité, affectant ainsi sa capacité à exercer son droit à un recours effectif ;

En conséquence :

- 2. Déclarer la nullité des quatre procès-verbaux de visites et saisies des 16 et 17 mars 2021 ;

- 3. Ordonner que lui soit restitué l'original et toute copie éventuelle de l'intégralité des pièces saisies sous scellés n° 1 et 2 et sous scellé numérique annexés aux procès-verbaux du 16 mars 2021 établis à [Localité 3] ;

- 4. Ordonner que lui soit restitué l'original et toute copie éventuelle de l'intégralité des pièces saisies sous scellés n° 1 à 4 et sous scellé numérique annexés aux procès-verbaux des 16 et 17 mars 2021 établis à [Localité 8] ;

5. interdire toute utilisation subséquente des procès-verbaux de visites et saisies des 16 et 17 mars 2021 et/ou des pièces irrégulièrement saisies.

A titre subsidiaire :

1. constater que les enquêteurs ont saisi de très nombreux éléments n'entrant pas dans le champ de la présomption d'infraction énoncée dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 9 mars 2021 et :

2. annuler la saisie de l'ensemble des éléments saisis hors champ de cette présomption ;

Ou à titre infiniment subsidiaire :

1. annuler la saisie de l'ensemble des éléments au format papier visés dans le tableau figurant en partie 4 de leurs écritures ;

2. annuler la saisie de l'intégralité du contenu des quatre téléphones appréhendés ;

3. annuler la saisie de l'intégralité des huit messageries appréhendées ;

4. ordonner que lui soit restitué l'original et toutes copies éventuelles de l'ensemble de ces éléments ;

5. Interdire toute utilisation subséquente de ces pièces.

En tout état de cause :

1. débouter la DREETS des Hauts-de-France de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

2. condamner la DREETS des Hauts-de-France au paiement des entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

1- des fouilles et saisies de données personnelles des dirigeants et salariés de la société ont été effectuées sans prise préalable des mesures de protection qui s'imposaient en la matière en ce que :

1.1 les enquêteurs ont manipulé et fouillé sans précaution particulière en violation du droit au respect de la vie privée garanti par les articles 6, 8 et 13 de la CEDH, l'article 9 du code civil et les articles 432-8 et 432-9 du code pénal :

A [Localité 8] les ordinateurs de Mme [PG], de M. [C], de M. [NN], de M. [O], de Mme [R], de M. [LI], ainsi que deux clés USB provenant du bureau de M. [NN], une clé USB provenant du bureau de M. [C] et une autre provenant du bureau de M. [O], ainsi que le téléphone personnel de Mme [R], les téléphones de MM. [C], [NN] et [K] ainsi qu'une carte Sim provenant du bureau de M [NN],

A [Localité 3], les ordinateurs de Mme [XC], de M. [A], de M. [DG] et une clé USB provenant du bureau de M. [A], ainsi que les deux téléphones de M. [A] (un personnel et un professionnel), ainsi que le téléphone de M. [DG].

1.2 A [Localité 8], les enquêteurs ont demandé de leur communiquer d'ici le 19 mars 2021, l'intégralité des messageries électroniques de MM. [C], [O], [N] et [NN] pour la période comprise entre février 2016 et septembre 2018

1.3 Les enquêteurs ont fouillé le serveur de l'entreprise, dont un espace intitulé « personnel » à [Localité 8] et [Localité 3] ;

1.4 Les enquêteurs n'ont pas pris le soin de s'assurer au préalable de l'existence de documents entrant dans le champ de l'enquête sur certains supports personnels avant d'en opérer la fouille systématique ;

Certains téléphones saisis n'ont aucun lien avec l'accord-cadre, ni même avec des marchés de travaux mais relèvent de l'usage privé et personnel de certains salariés ;

Le respect du principe de proportionnalité commandait aux enquêteurs, eu égard à l'ingérence dans les droits fondamentaux des dirigeants et salariés, de prendre des dispositions de nature à limiter cette ingérence à ce qui était strictement nécessaire à l'objectif poursuivi par les inspections.

2- Des saisies de masse indiscriminées réalisées en totale violation du principe de proportionnalité, ce qui affecte sa capacité à exercer pleinement son droit à un recours effectif en ce que :

Les opérations de visites et saisies autorisées par un juge des libertés pour l'application des règles de concurrence ne peuvent notamment être considérées comme telles que si les principes de nécessité et de proportionnalité sont respectés ;

2.1 Le volume de fichiers saisis -plus de 65 000 -, des documents papier -560- (seules les premières pages ayant été cotées), et 394 giga-octects de données numériques est disproportionné par rapport aux différents éléments rassemblés par l'administration ;

2.2 Des saisies aussi massives ont conduit à appréhender des éléments qui se trouvent hors du champ défini par l'ordonnance ;

2.3 Les inventaires des fichiers informatiques saisis par les enquêteurs ne permettent pas de prendre connaissance avec exactitude des documents saisis puisqu'ils ne contiennent qu'une seule ligne et aucun élément ne permet d'identifier le cas échéant des éléments couverts par le secret de la correspondance avocat-client ou relevant de la vie privée des dirigeants et des salariés ;

2.4 Une telle volumétrie de documents saisis, en plus des différents ordinateurs et téléphones portables, ne lui permet pas de former un recours effectif en ce qu'il ne serait pas possible de contrôler la régularité de chacune des saisies et ce, dans un délai raisonnable.

3- A titre subsidiaire, la saisie de très nombreux documents au-delà du champ défini par l'ordonnance devra être annulée en ce que :

3.1 Les saisies massives et indiscriminées ont permis aux enquêteurs d'appréhender des éléments qui n'entrent pas dans le champ de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention (éléments personnels ; éléments concernant d'autres marchés de travaux ; éléments concernant la gestion interne de l'entreprise).

3.2 Si la DREETS soutient que « les enquêteurs n'ont pas été en mesure, durant le temps de l'opération, d'accéder à des messageries, « lesquelles nécessitaient un temps de téléchargement incompatible avec la réalisation des opérations », cette indication ne figure pas dans le procès-verbal des visites et saisies qui affirme plutôt que « l'entreprise n'a pas été en mesure de permettre de consulter les archives de messagerie ». De plus, cette demande de saisie a été émise par des enquêteurs disposant d'un pouvoir de contrainte ;

3.3. De nombreux éléments personnels ont été saisis par les enquêteurs, notamment le contenu des téléphones de Mme [R], de M. [C], de M. [K] et de M. [NN].

En réponse, la DREETS demande de :

Dire et juger mal fondée la société Eurovia Picardie dans toutes ses demandes et l'en débouter ;

Dire et juger mal fondé le recours formé par la société Eurovia à l'encontre du déroulement des opérations de visites et saisies autorisées par l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Arras du 9 mars 2021 ;

Condamner, en conséquence, la société Eurovia aux entiers dépens.

Elle fait valoir :

1- Quant à la prétendue non-application des mesures de protection qui s'imposaient lors des fouilles et des saisies contenant des données privées :

La société appelante ne précise nullement qu'elles étaient les précautions devant être prises dans le cadre des saisies des ordinateurs et téléphones portables ;

La société appelante n'apporte aucun élément de nature à prouver que les enquêteurs n'auraient pas pris les mesures adéquates pour protéger les données personnelles saisies, de sorte que ses propos ne sont que des allégations ;

Pour qu'un élément personnel soit écarté des éléments de l'enquête, il est nécessaire d'en constater in concreto le contenu par les enquêteurs qui sont fondés à consulter lesdits supports pour pouvoir ensuite discriminer ;

Les enquêteurs ne peuvent faire autrement que saisir une messagerie dans son intégralité en raison du principe de l'insécabilité des messageries ;

La société appelante n'identifie pas avec précision les documents à exclure du champ des saisies opérées ;

Le déroulement des opérations a été supervisé par un officier de police judiciaire ;

L'occupant des lieux, ou bien son représentant, avait la possibilité de faire des observations et d'émettre des réserves par écrit, ce qui n'a pas été fait en l'espèce ;

La société appelante ne peut comparer les enquêtes menées par la commission européenne qui sont des enquêtes administratives ' et les enquêtes effectuées dans le cadre d'une opération de visite et saisie.

2- Sur le caractère prétendument massif et indiscriminé des saisies en violation du principe de proportionnalité :

Le volume de documents saisis s'explique par la taille de la société Eurovia ;

Tous les documents saisis ont été préalablement examinés par les enquêteurs en fonction de leur pertinence quant au champ de l'ordonnance. A ce titre, la société appelante n'apporte aucune preuve de nature à prouver que les enquêteurs n'auraient pas pris de telles précautions ;

La quantité de données saisies ne constitue pas, à lui seul, un moyen pertinent de nature à convaincre du caractère massif et indiscriminé des saisies effectuées ;

Concernant l'inventaire, l'exigence d'inventaire prévue à l'article 56 du code de procédure pénale a pour objectif l'identification des documents saisis. L'inventaire dressé était donc conforme à la réglementation en vigueur et aux exigences de la CEDH, et n'entache pas le droit à un recours effectif dont est titulaire la société Eurovia ;

3- Quant à la prétendue saisie de nombreux documents au-delà du champ défini par l'ordonnance :

L'ordonnance ne mentionne pas une présomption limitée aux marchés de travaux conclus avec le conseil départemental de l'Oise mais énonce expressément que la présomption dont il est question porte sur une part active des entreprises à une ou plusieurs pratiques visant à se répartir des marchés d'aménagement et de travaux de chaussées et ce, en violation de l'article L. 420-1 du code de commerce ;

Selon une jurisprudence constante, les saisies d'éléments n'entrant pas le champ de l'ordonnance n'invalident pas lesdites saisies ;

Lorsque des messages entrant dans le champ de l'ordonnance sont trouvés, le principe de l'insécabilité des messages s'applique si bien que les enquêteurs ont pu saisir l'entièreté des messageries électroniques ;

Lors des opérations, peuvent être saisis tous les documents (papier ou électronique), à condition qu'ils soient utiles aux besoins de l'enquête, soit tous les documents en lien direct ou indirect avec l'activité des entreprises visées, comme, par exemple, ceux susceptibles d'éclairer, de confirmer ou d'infirmer les suspicions, d'expliquer le contexte, de connaître l'activité de l'entreprise, sa situation économique et financière ;

Afin de limiter la durée de l'opération de visite et saisie réalisée au sein des locaux de la société à [Localité 8], et ainsi en réduire l'impact sur l'activité de la requérante, les enquêteurs ont acté l'engagement de l'occupant des lieux à adresser lesdites messageries, par courrier, à la DIRRECTE des Hauts-de-France ». Les messageries adressées par l'occupant des lieux à la DIRRECTE ne rentrent donc pas dans le champ d'application de l'article L. 450-4 du code de commerce.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Il sera rappelé que si l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, principe reprise à l'article 9 du code civil, et que si les articles 432-8 et 432-9 du code pénal interdisent aux personnes dépositaires de l'autorité publique dans le consentement de l'intéressé que dans les cas prévus par la loi, tout comme ils ne peuvent procéder à l'ouverture, la révélation du contenu des correspondances, à leur interception ou leur divulgation quand elles sont émises par voie de télécommunications que dans les cas prévus par la loi, il résulte de l'article L 450-4 du code de commerce dans sa version en vigueur du 5 décembre 2020 au 28 mai 2021, suite à la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 - art. 37 (V), version applicable à la date du 9 mars 2021 à laquelle le juge des libertés et de la détention d'Arras a statué que :

« Les agents mentionnés à l'article L. 450-1 ne peuvent procéder aux visites en tous lieux ainsi qu'à la saisie de documents et de tout support d'information que dans le cadre d'enquêtes demandées par la Commission européenne, le ministre chargé de l'économie ou le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence sur proposition du rapporteur, sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. Ils peuvent également, dans les mêmes conditions, procéder à la pose de scellés sur tous locaux commerciaux, documents et supports d'information dans la limite de la durée de la visite de ces locaux. Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun d'eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l'un des juges des libertés et de la détention compétents.

Le juge vérifie que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession du demandeur de nature à justifier la visite. Lorsque la visite vise à permettre la constatation d'infractions aux dispositions du livre IV du présent code en train de se commettre, la demande d'autorisation peut ne comporter que les indices permettant de présumer, en l'espèce, l'existence des pratiques dont la preuve est recherchée. »

2. Il a été jugé dans le cadre de l'appel formé par la société Eurovia Picardie à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Arras du 9 mars 2021, par ordonnance de ce jour, que l'autorisation de visite et de saisie dans les locaux de la société Eurovia Picardie avait été donnée régulièrement par le juge et l'appelante a été déboutée de sa demande d'annulation de l'ordonnance, de sorte que les opérations de visite et saisie ont bien une base légale.

3. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société Eurovia Picardie, ces opérations ont été ordonnées en vue de la recherche de pratiques permettant une entente entre les entreprises de travaux publics cités dans la requête en vue de l'attribution de marchés d'aménagement et de travaux de chaussée aux entreprises Colas, Eurovia et Eiffage dans le cadre de marchés publics, et pas seulement en vue de recherches de pratiques anti-concurrentiels relatives aux seuls marchés attribués de février à juillet 2016 par la commission des marchés publics du conseil départemental de l'Oise. Ainsi, la société Eurovia Picardie est mal fondée à prétendre que ne pouvaient pas être saisis des documents postérieurs à la période de janvier à juillet 2016.

4. Si la société Eurovia Picardie reproche aux enquêteurs l'absence de prise de mesures de protection préalable à la « fouille » de ses deux établissements de [Localité 3] et de [Localité 8] et aux saisies, elle ne précise nullement qu'elles sont les mesures de protection qui n'ont pas été prises.

4.1 La présente juridiction note que le procès-verbal du 16 mars 2021 n° 16032021/EUROVIA PICARDIE-[Localité 3]/O signé par Mme [HE] [BB], [B] [HK] et [ZB] [NH], rédacteurs dudit procès-verbal, Mme [G] [L] officier de police judiciaire et M. [AY] [A], ingénieur étude, désigné par M. [V] [DG], chef de secteur, occupant des lieux, à [Localité 3] [Adresse 1], établit que :

4.1.1 les opérations se sont déroulées en présence constante de M. [A] et de Mme [L], et que si les données numériques accessibles depuis les deux téléphones de MM. [A], depuis le téléphone de M. [DG], aucune donnée n'a été saisie,

4.1.2 c'est après avoir constaté que les ordinateurs de MM. [A] et [DG] comportaient des données entrant dans le champ de l'autorisation de visite et saisie, que les fichiers sélectionnés ont été gravés sur DVD-R, en présence de M. [A], aucune donnée n'ayant été saisie sur la clé USB Cetim,

4.1.3 c'est après autorisation de l'occupant des lieux d'accéder au contenu des zones partagées et zones personnelles du serveur/espace réseau ainsi qu'au contenu du logiciel Kheops que ceux-ci ont été examinés, M. [A] réalisant lui-même l'extraction de données de la base Kheops, relatives à la liste des marchés étudiées par Eurovia Picardie secteur de [Localité 3] du 1er janvier 2017 au 16 mars 2021.

4.1.4 les enquêteurs ont expressément demandé à M. [A] si des fichiers de messagerie sont susceptibles de contenir des documents protégés par le secret de la correspondance avocat-client.

4.1.5 le tout a été placé sous scellé fermé.

4.1.6 Aucun des documents pour lesquels il est demandé à titre infiniment subsidiaire l'annulation de la saisie a été saisi dans le cadre de ces opérations menées par Mme [HE] [BB], [B] [HK] et [ZB] [NH],

4.1.7 l'ensemble de ces éléments infirme les allégations de la société Eurovia Picardie selon lesquelles ces opérations de visite et saisie précises ont été menées en violation des dispositions des articles 6, 8 et 13 de la CEDH, 9 du code civil, 432-8 et 432-9 du code pénal, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, de sorte que sa demande de déclarer nul ce procès-verbal est mal fondée tout comme la demande subséquente de restitution des pièces saisies sous scellé 1 à [Localité 3], la demande subsidiaire d'annulation des éléments de saisie allégués comme étant hors champ de la présomption d'infraction énoncée dans l'ordonnance du juge des libertés du 9 mars 2021.

4.2 La présente juridiction note que le procès-verbal du 16 mars 2021 n° 16032021/EUROVIA PICARDIE-[Localité 3]/O signé par MM. [T] [Z] et [D] [H], rédacteurs dudit procès-verbal, Mme [G] [L] officier de police judiciaire et M. [V] [DG], chef de secteur, occupant des lieux sis à [Localité 3] [Adresse 1], établit que :

4.2.1 les opérations se sont déroulées en présence constante de M. [DG] et de Mme [L],

4.2.2 aucun document papier n'a été saisi dans le bureau de la secrétaire d'accueil, les deux salles d'archives, dans la salle traceur, dans le local copieur, le bureau de passage, et le bureau de M. [S], conducteur de travaux.

4.2.3 les éléments placés sous scellés qui correspondent notamment à des courriers adressés à Colas Nord Picardie, Ramery, trouvés sur l'ordinateur de Mme [XC] secrétaire, (4 fichiers) et 27 documents sélectionnés en vue de leur saisie dans le bureau de M. [DG], et après que celui-ci et l'officier de police judiciaire en aient pris connaissance.

4.2.3.1 les 4 fichiers saisis sur l'ordinateur de Mme [XC] dateraient de 2013, les intitulés « courrier à Colas Nord Picardie ayant pour objet correction d'une erreur matérielle » et « courrier à Ramery ayant pour objet marché subséquent à l'accord-cadre » faisant au contraire présumer qu'ils rentrent dans le périmètre des investigations autorisées par l'ordonnance du 9 mars 2021.

4.2.3.2 les documents saisis dans le bureau de M. [DG] ne concernent que des documents professionnels, notamment des devis des sociétés Colas ou SPC, faisant présumer qu'ils rentrent dans le périmètre des investigations autorisées par l'ordonnance du 9 mars 2021, tel que rappelé ci-dessus.

4.2.4 l'ensemble de ces éléments infirme les allégations de la société Eurovia Picardie selon lesquelles ces opérations de visite et saisie précises ont été menées en violation des dispositions des articles 6, 8 et 13 de la CEDH, 9 du code civil, 432-8 et 432-9 du code pénal, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, de sorte que seront rejetées sa demande de déclarer nuls ce procès-verbal comme étant mal fondée, de même que la demande subséquente de restitution des pièces saisies dans le cadre de ce procès-verbal, tout comme la demande subsidiaire d'annulation, des éléments de saisie allégués comme étant hors champ de la présomption d'infraction énoncée dans l'ordonnance du juge des libertés du 9 mars 2021 et la demande infiniment subsidiaire relative à la restitution des documents saisis dans le bureau de M. [DG].

4.3 La présente juridiction note que le procès-verbal du 16 mars 2021 n° 16032021/EUROVIA PICARDIE-[Localité 8] /O signé par MM. [Y] [W], [JD] [FF] et [LO] [E], rédacteurs du procès-verbal, de Mme [F] [W], officier de police judiciaire et de Mme [X] [PG], responsable financière, occupant des lieux sis à [Localité 8] [Adresse 7] établit que :

4.3.1 les opérations se sont déroulées en présence constante de Mme [PG] et de Mme [W] ;

4.3.2 s'il est bien exact qu'ont été opérées de nombreuses saisies de données numériques accessibles depuis les ordinateurs de Mme [PG], responsable financière, de M. [O], président de la SAS Eurovia Picardie, de M. [J] [NN], responsable du bureau d'études agence de [Localité 4], de M. [UK] [C], chef d'agence de [Localité 4], de Mme [JJ] [R] secrétaire d'études agence de [Localité 4], et de M. [WW] [LI], technicien bureau d'études agence de [Localité 4], c'est après qu'ait été constatée la présence de données entrant dans le champ de l'autorisation de visite et saisie donnée par le juge des libertés et de la détention d'Arras le 9 mars 2021, des constats de la présence de ces données sur les ordinateurs de Mme [PG], de M. [NN], de M. [C] et de M. [LI] ayant été au surplus placées en annexe 6 du procès-verbal ;

4.3.3 l'accès au contenu des fichiers présents sur les espaces publics (P), services (S), personnel (R) et Atria (O) présents sur le serveur de l'entreprise et de la messagerie de M. [LI] a été expressément sollicité de l'occupant des lieux avant que ne soient procédé à la saisie de données numériques après qu'ait été constatée la présence de données entrant dans le champ de l'autorisation de visite et saisie donnée par le juge des libertés et de la détention d'Arras le 9 mars 2021, tout comme les saisies de données numériques entrant dans ce même champ sur les téléphones de MM. [K], [NN], [C] et de Mme [R].

4.3.4 les fichiers numériques sélectionnés ont été copiés sur un support vierge après que Mme [PG] et l'officier de police judiciaire en aient pris connaissance,

4.3.5 les enquêteurs ont expressément demandé à Mme [PG] si des fichiers de messagerie sont susceptibles de contenir des documents protégés par le secret de la correspondance avocat-client.

4.3.6 le tout a été placé sous scellé fermé.

4.3.7 les enquêteurs ont accepté de réaliser une copie des fichiers saisis pour l'occupant des lieux. La société Eurovia Picardie a ainsi disposé de plus de dix-huit mois jusqu'à la date de l'audience pour les examiner et justifier qu'ils présentaient des données personnelles comme elle le prétend, ce qu'elle ne fait pas.

4.3.8 Compte-tenu de la présomption retenue par le juge des libertés de pratiques de concertation en vue de favoriser les attributions de marchés aux entreprises des groupes Colas, Eurovia et Eiffage, tel que cela a été rappelé ci-dessus, la société Eurovia est mal fondée à soutenir que seraient hors champ de la présomption retenue par le juge, tous documents qui ne se rapporteraient à l'attribution des marchés du conseil départemental de l'Oise entre janvier et juillet 2016 suite à l'accord-cadre de 2015.

4.3.9 l'ensemble de ces éléments infirme les allégations de la société Eurovia Picardie selon lesquelles ces opérations de visite et saisie précises ont été menées en violation des dispositions des articles 6, 8 et 13 de la CEDH, 9 du code civil, 432-8 et 432-9 du code pénal, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, de sorte que seront rejetées sa demande de déclarer nuls ce procès-verbal comme étant mal fondée, de même que la demande subséquente de restitution des pièces saisies dans le cadre de ce procès-verbal, tout comme la demande subsidiaire d'annulation, des éléments de saisie allégués comme étant hors champ de la présomption d'infraction énoncée dans l'ordonnance du juge des libertés du 9 mars 2021 et la demande infiniment subsidiaire relative à la restitution des documents saisis dans le cadre de ce procès-verbal.

4.4 La présente juridiction note que le procès-verbal des 16 et 17 mars 2021 n° 16032021/EUROVIA PICARDIE-[Localité 8] /P signé par MM. [PT] et [U], rédacteurs du procès-verbal, Mme [F] [W], officier de police judiciaire et Mme [M] [I], secrétaire de la direction régionale, désignée par Mme [X] [PG], responsable financière, occupant des lieux sis à [Localité 8] [Adresse 7] établit que :

4.4.1 les opérations se sont déroulées en présence constante de Mme [M] [I], secrétaire de la direction régionale, désignée par Mme [PG] et de Mme [W] ;

4.4.2 aucun document papier n'a été saisi dans les bureaux de Mmes [PG], [I], [R], de MM. [K],

4.4.3 il a été procédé à la mise sous scellé de 383 documents saisis dans le bureau de M. [J] [NN], responsable du bureau d'études agence de [Localité 4], de 9 documents saisis dans le bureau de M. [WW] [LI], technicien bureau d'études agence de [Localité 4], de 51 documents dans le bureau de M. [UK] [C], chef d'agence de [Localité 4], et de 90 documents dans le bureau de M. [O], président de la SAS Eurovia Picardie et ce après qu'ait été constatée la présence de données entrant dans le champ de l'autorisation de visite et saisie donnée par le juge des libertés et de la détention d'Arras le 9 mars 2021, et après qu'ils aient été communiqués à Mme [I] et qu'une copie en ait été faite pour l'occupant des lieux.

La société Eurovia Picardie a ainsi disposé de plus de dix-huit mois jusqu'à la date de l'audience pour les examiner et justifier qu'ils présentaient des données personnelles comme elle le prétend, ce qu'elle ne fait pas.

4.4.4 Compte-tenu de la présomption retenue par le juge des libertés de pratiques de concertation en vue de favoriser les attributions de marchés aux entreprises des groupes Colas, Eurovia et Eiffage, tel que cela a été rappelé ci-dessus, la société Eurovia est mal fondée à soutenir que seraient hors champ de la présomption retenue par le juge, tous documents qui ne se rapporteraient à l'attribution des marchés du conseil départemental de l'Oise entre janvier et juillet 2016 suite à l'accord-cadre de 2015, les documents saisis ayant trait à l'activité de la société Eurovia dans le cadre de marchés publics de voirie entre 2016 et 2021.

4.4.5 l'ensemble de ces éléments infirme les allégations de la société Eurovia Picardie selon lesquelles ces opérations de visite et saisie précises ont été menées en violation des dispositions des articles 6, 8 et 13 de la CEDH, 9 du code civil, 432-8 et 432-9 du code pénal, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, de sorte que seront rejetées sa demande de déclarer nuls ce procès-verbal comme étant mal fondée, de même que la demande subséquente de restitution des pièces saisies dans le cadre de ce procès-verbal, tout comme la demande subsidiaire d'annulation, des éléments de saisie allégués comme étant hors champ de la présomption d'infraction énoncée dans l'ordonnance du juge des libertés du 9 mars 2021 et la demande infiniment subsidiaire relative à la restitution des documents saisis dans le cadre de ce procès-verbal.

5- Sur la supposée irrégularité des saisies des messageries électroniques de MM. [C], [O], [N] et [NN]

5.1 Il résulte du procès-verbal du 16 mars 2021 signé par MM. [Y] [W], [JD] [FF] et [LO] [E], rédacteurs du procès-verbal, de Mme [F] [W], officier de police judiciaire et de Mme [X] [PG] que les enquêteurs avaient demandé à Mme [PG] de mettre à leur disposition les archives de messagerie de MM. [C], [P] [N], de Mme [R], de M. [NN] et de M. [O], qu'ils ont été en mesure de consulter l'archive de messagerie de Mme [R] et la seconde partie de l'archive de la messagerie de M. [NN] et que l'entreprise n'a pas été en revanche en mesure de leur permettre de consulter les archives de messagerie de MM. [C], [P] [N], de M. [NN] (1° partie) et de M. [O], et ont noté que l'occupant des lieux s'étaient engagé à communiquer par voie postale lesdites messageries : 33 Go pour M. [C], 23 Go pour M. [O], 14 Go pour M. [N] et 16 Go pour M. [NN], couvrant une période de février 2016 à septembre 2016, et ce par voie postale,

5.2 La transmission des fichiers, si elle a été faite, elle l'a été de façon volontaire par la requérante ;

5.3 Les fichiers transmis volontairement aux services de la DREETS des Hauts-de-France ne disposent pas du statut de saisies et ne relèvent donc pas de l'article L. 450-4 du code de commerce.

PAR CES MOTIFS

Déclare mal fondé le recours formé par la société Eurovia Picardie l'encontre des opérations de visite domiciliaire et saisie en date du 16 mars 2021, autorisée par l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Arras en date du 9 mars 2021 autorisant dans les locaux de la société Eurovia Picardie à [Localité 3] et [Localité 8],

Déboute la société Eurovia Picardie de toutes ses demandes formées à titre principal, subsidiaire ou infiniment subsidiaires dans le cadre de son recours contre les opérations de visite domiciliaire et saisie en date du 16 mars 2021, autorisée par l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Arras en date du 9 mars 2021 autorisant dans les locaux de la société Eurovia Picardie à [Localité 3] et [Localité 8],

Condamne la société Eurovia Picardie aux éventuels dépens.