AMF, 30 avril 2013, n° SAN-2013-12
AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Membres :
M. Hanus, Mme Drummond
Président :
Mme Nocquet
La 1ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») ;
Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 214-3, L. 214-4, L. 533-1, L. 533-10, L. 533-12, L. 621-15, R. 214-5, et ses articles R. 214-60 et R. 214-76 repris en substance aux articles R. 214-66 et R. 214-68 ;
Vu le règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur au moment des faits, notamment ses articles 313-3, 313-7, 313-10, 313-11, 313-18 à 313-22, 313-53, 313-54, 314-10, 315-44, 411-45-1 ;
Vu l’instruction AMF n° 2009-05 relative au prospectus complet de fonds communs de placement à risques agréés ;
Vu l’instruction AMF n° 2011-22 du 21 décembre 2011 relative aux procédures d’agrément, à l’établissement d’un document d’information clé pour l’investisseur et d’un règlement et à l’information périodique des FCPR, FCPI et FIP agréés ;
Vu la notification de griefs du 27 février 2012 adressée à la société VIVERIS MANAGEMENT SAS par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ;
Vu la décision du 20 mars 2012 de la présidente de la Commission des sanctions désignant M. Michel Pinault, membre de la Commission des sanctions, en qualité de rapporteur ;
Vu la lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 20 mars 2012 informant la société mise en cause de la nomination de M. Michel Pinault en qualité de rapporteur et lui rappelant la faculté d’être entendue, à sa demande, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier ;
Vu la lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 3 avril 2012 informant la société mise en cause, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, de ce qu’elle disposait de la faculté de demander la récusation du rapporteur dans un délai d’un mois ;
Vu les observations écrites présentées par la société VIVERIS MANAGEMENT SAS le 15 mai 2012 ;
Vu le procès-verbal d’audition du 14 février 2013 de la société VIVERIS MANAGEMENT SAS représentée par M. A ;
La Commission des sanctions
Vu le rapport de M. Michel Pinault du 18 mars 2013 ;
Vu la lettre du 18 mars 2013 déposée par porteur convoquant la société mise en cause à la séance de la Commission des sanctions du 19 avril 2013, à laquelle était joint le rapport du rapporteur ;
Vu la lettre du 4 avril 2013 déposée par porteur informant la société mise en cause de la composition de la formation de la Commission des sanctions lors de la séance, et de la faculté de demander la récusation d’un ou plusieurs de ses membres ;
Vu les observations en réponse au rapport de M. Michel Pinault présentées le 8 avril 2013 pour le compte de VIVERIS MANAGEMENT SAS, par l’intermédiaire de ses conseils ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu au cours de la séance du 19 avril 2013 :
- M. Michel Pinault, en son rapport ;
- M. Emmanuel Doumas, représentant du directeur général du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;
- Mme Michaëla d’Hollande d’Orazio, représentant le Collège de l’AMF ;
- M. B, président de la société de gestion à l’époque des faits ;
- M. A, président de la société entre le 29 décembre 2011 et le 20 mars 2013 ;
- M. C, représentant actuellement la société mise en cause ;
- Maîtres Thierry Gontard et Eric Boillot du cabinet Simmons & Simmons pour le compte de la société VIVERIS MANAGEMENT SAS ;
La société mise en cause ayant eu la parole en dernier.
FAITS ET PROCEDURE
I. FAITS
La société de gestion de portefeuilles de type 2 VIVERIS MANAGEMENT SAS (ci-après « VIVERIS MANAGEMENT »), constituée sous la forme d’une société par actions simplifiée (ci-après : « SAS »), a été agréée le 20 octobre 2000 par la Commission des opérations de bourse pour la gestion de fonds de capital investissement, qu’ils soient ouverts au public ou destinés à des investisseurs qualifiés.
Au 31 décembre 2009, VIVERIS MANAGEMENT comptait 54 personnes et déclarait, dans sa fiche de renseignements annuels, que le montant total des souscriptions recueillies s’élevait à la somme de 419,2 millions d’euros répartie entre 10 fonds commun de placement dans l’innovation (ci-après : « FCPI »), 12 fonds d’investissements de proximité (ci-après « FIP ») et 6 fonds de placement à risques (ci-après : « FCPR »).
VIVERIS MANAGEMENT détenait par ailleurs des participations majoritaires dans d’autres sociétés de gestion, telle que la société X, agréée pour la gestion d’organismes de placement collectif immobilier (ci-après « OPCI »).
Au jour du contrôle, les deux dirigeants responsables de l’orientation de la société étaient MM. B et […], exerçant respectivement les fonctions de de Président et Directeur général délégué. Ils étaient assistés, depuis le 15 janvier 2010, par deux directeurs généraux délégués, MM. […] et […], le premier en charge des investissements et de la gestion opérationnelle, le second, responsable de la gestion, du contrôle et du support, exerçant également la fonction de responsable de la conformité et du contrôle interne (ci-après : « RCCI »).
Le 29 décembre 2011, la société Y a acquis le contrôle de VIVERIS MANAGEMENT, dont le Président a été successivement remplacé par MM. A et C.
La société VIVERIS MANAGEMENT a conclu plusieurs partenariats avec différents acteurs pour la sélection, la présentation d’investissements et la gestion financière des organismes de placement en valeurs mobilières (ci-après : « OPCVM »).
En particulier, elle a, en 2008, noué un partenariat pluriannuel avec le groupe Z (en ce compris groupe Z France, ci-après collectivement désigné : « groupe Z »), spécialisé dans les énergies renouvelables. Il s’agissait d’un projet économique global portant sur le financement, le développement et la gestion de centres de production d’électricité d’origine renouvelable, en vue de bâtir le premier parc français de centrales solaires photovoltaïques.
Ce partenariat s’est d’abord matérialisé par la conclusion, le 23 décembre 2008, d’un protocole, qui prévoyait l’acquisition et l’exploitation d’unités de production, dont le groupe Z était le maître d’ouvrage, par des sociétés d’exploitation dédiées, constituées sous la forme de SAS, puis par la conclusion, le 9 novembre 2009 et le 10 juin 2010, de protocoles qui définissaient essentiellement les nouvelles modalités de financement des unités de production se rapportant aux programmes développés par le groupe Z. VIVERIS MANAGEMENT a, en outre, noué des partenariats avec :
- la société W (ci-après : « société W »), société de gestion auprès de laquelle VIVERIS a délégué, dès 2007, la gestion financière de la partie « hors quota » des OPCVM qu’elle gérait ;
- la société V, que VIVERIS MANAGEMENT conseillait depuis 2008 et qui avait vocation à investir dans un portefeuille de petites et moyennes entreprises, comme par exemple la société U ;
II. PROCEDURE
En application de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, le Secrétaire général de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF ») a décidé, le 3 février 2010, de procéder « au contrôle du respect par la société VIVERIS MANAGEMENT SAS de ses obligations professionnelles ».
Le contrôle s’est déroulé de mai à septembre 2010, sous la forme d’entretiens, d’examen de documents et de contrôles par sondage, et a donné lieu à une réunion de debriefing sur place le 6 octobre 2010.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 20 janvier 2011, le Secrétaire général de l’AMF a adressé le rapport de contrôle établi le 6 décembre 2010 à VIVERIS MANAGEMENT, prise en la personne de son président à l’époque des faits, M. B, l’invitant à lui transmettre ses éventuelles observations dans le délai d’un mois. Les 16 février et 14 mars 2011, VIVERIS MANAGEMENT a sollicité l’octroi de délais supplémentaires pour présenter ses observations. Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 18 avril 2011, il lui a été indiqué que, si des observations en réponse au rapport de contrôle ne lui étaient pas parvenues avant le 22 avril 2011, le Collège examinerait le rapport de contrôle sans lesdites observations. Celles-ci ont été déposées le 20 avril 2011.
Au cours de sa séance du 18 janvier 2012, la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, a examiné le rapport de contrôle et les observations de VIVERIS MANAGEMENT, à laquelle elle a décidé de notifier des griefs.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 27 février 2012 le président de l’AMF a notifié des griefs à la société VIVERIS MANAGEMENT en l’informant, d’une part, de la transmission de la lettre de notification à la présidente de la Commission des sanctions pour attribution et désignation d’un rapporteur, d’autre part, du délai de deux mois dont elle disposait pour présenter des observations écrites en réponse, ainsi que de la possibilité de se faire assister de toute personne de son choix et de prendre connaissance des pièces du dossier dans les locaux de l’AMF.
En substance, il est reproché à VIVERIS MANAGEMENT une gestion non conforme à l’intérêt des porteurs dans le cadre des partenariats noués avec le groupe Z, les sociétés W et V. Aux termes de la notification de griefs, cette absence de gestion des conflits d’intérêts se serait en outre « inscrite dans un contexte plus général de défaillance de son dispositif de conformité et de contrôle interne ».
Conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, le président de l’AMF a, le 27 février 2012, transmis copie de la notification de griefs à la présidente de la Commission des sanctions qui, par décision du 20 mars 2012, a désigné M. Michel Pinault en qualité de rapporteur, ce dont la société mise en cause a été informée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du même jour, lui rappelant la faculté d’être entendue, à sa demande, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 3 avril 2012, le secrétariat de la Commission des sanctions a informé VIVERIS MANAGEMENT, en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, de ce qu’elle disposait de la faculté de demander la récusation du rapporteur dans le délai d’un mois, dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.
Par lettre du 2 mai 2012, Mes Thierry Gontard et Eric Boillot ont indiqué que VIVERIS MANAGEMENT avait sollicité leur assistance dans la procédure ouverte à son encontre et ont demandé une prorogation de délai pour présenter les observations en réponse à la notification de griefs, qu’ils ont déposées le 15 mai 2012.
Par lettres du 5 juin et du 2 octobre 2012, VIVERIS MANAGEMENT a, par l’intermédiaire de ses conseils, demandé à être entendue.
Par lettre en date du 25 janvier 2013, VIVERIS MANAGEMENT, prise en la personne de son président, a élu domicile chez ses conseils, au cabinet Simmons & Simmons.
Le 14 février 2013, le rapporteur a procédé à l’audition de VIVERIS MANAGEMENT, prise en la personne de son président, M. A, assisté de M. B, président de la société à l’époque des faits, et de ses conseils, lesquels ont, par lettre du 26 février 2013, versé de nouvelles pièces au dossier de la procédure.
Par lettre du 18 mars 2013, remise par porteur le même jour et à laquelle était joint le rapport du rapporteur, la société mise en cause a été convoquée à la séance de la Commission des sanctions.
Par lettre du 4 avril 2013 remise par porteur le même jour, VIVERIS MANAGEMENT a été informée de la composition de la Commission des sanctions lors de la séance, ainsi que du délai de quinze jours dont elle disposait en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier pour demander, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, la récusation de l’un ou l’autre de ses membres.
Par lettre du 8 avril 2013, Mes Thierry Gontard et Eric Boillot ont présenté des observations, pour le compte de VIVERIS MANAGEMENT, en réponse au rapport du rapporteur.
MOTIFS DE LA DECISION
1. SUR LE GRIEF TIRE DE L’ABSENCE DE GESTION DES CONFLITS D’INTERETS ET DE LA GESTION NON CONFORME A L’INTERET DES PORTEURS DANS LE CADRE DU PARTENARIAT NOUE AVEC LE GROUPE Z
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, VIVERIS MANAGEMENT aurait négligé de mettre en place les procédures nécessaires à la prévention et à la gestion des « situations susceptibles de porter atteinte à l’intérêt des clients » alors qu’elle privilégiait « le développement de son partenariat avec le groupe Z plutôt que l’intérêt des porteurs » ; que sont notamment relevés « des actes de gestion qui se sont avérés ne pas avoir été réalisés dans l’intérêt exclusif des porteurs de parts […] car contraires aux règles d’investissement applicables aux OPCVM concernés […] et de surcroît, en contradiction avec les informations diffusées aux porteurs » ; qu’à l’appui de ce grief, il est notamment fait état « d’investissements réalisés par les FIP et FCPI de VIVERIS MANAGEMENT au profit d’un OPCI de la société X » et d’investissements via la souscription, par quatorze OPCVM (FIP,FCPI, FCPR), d’obligations convertibles émises par neuf SAS nouvellement créées pour produire de l’électricité photovoltaïque ;
Considérant qu’après avoir rappelé le contenu des textes visés au soutien du grief, dans leur rédaction applicable à la date des faits, aucune disposition moins sévère n’étant venue en réduire la portée, il conviendra d’examiner la chronologie et l’évolution du partenariat de VIVERIS MANAGEMENT avec le groupe Z en recherchant, pour chaque série de souscriptions litigieuses, d’une part, si celles-ci ont bien été faites dans l’intérêt exclusif des souscripteurs, d’autre part, si la situation nécessitait l’organisation et la mise en oeuvre de procédures de prévention et de gestion des éventuels conflits d’intérêts ; que, pour porter une appréciation sur le grief d’atteinte à l’intérêt exclusif des clients, il sera tenu compte de la spécificité des fonds de capital investissement ; que, pour pouvoir proposer des placements qui correspondent aux attentes des porteurs de parts de fonds commun de placement dans l’innovation, de fonds d’investissements de proximité ou de fonds de placement à risques, la société de gestion se doit, en effet, de rechercher une entreprises performante et sérieuse, satisfaisant aux conditions qu’impose ce type de placement, ce qui peut induire la conclusion de partenariats entre l’une et l’autre ;
1.1 Textes applicables
Considérant que ce grief se fonde sur des faits constatés entre le 22 décembre 2008 et le 30 juin 2010, qui seront examinés au regard des dispositions alors en vigueur et non modifiées ultérieurement par des dispositions plus douces ;
Considérant que l'article L. 533-1 du code monétaire et financier dispose que « Les prestataires de services d'investissement agissent d'une manière honnête, loyale et professionnelle qui favorise l’intégrité du marché ».
Considérant que l'article L. 214-3 al. 2 du même code, dont les dispositions sont reprises aujourd’hui à l’article L. 214-9 dudit code, énonçait que « les organismes de placement collectif en valeurs mobilières, le dépositaire et la société de gestion doivent agir au bénéfice exclusif des souscripteurs » ;
Considérant que l’article L. 214-4 du code monétaire et financier, dans sa version applicable à l’époque des faits disposait que : « Dans des conditions et limites fixées par décret en Conseil d'Etat, l'actif d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières comprend : a) Des instruments financiers au sens de l'article L. 211-1 ; [...] » ; qu’ à cet égard, l’article R. 214-1-1 du même code précisait que : « Un organisme de placement collectif en valeurs mobilières peut : 1° Effectuer des dépôts ; 2° Recourir aux instruments financiers suivants, qu'ils soient régis par le droit français ou un droit étranger, à l'exclusion de ceux mentionnés à l'article R. 214-5 [...] » ;
Considérant que l’article R. 214-5 du code monétaire et financier disposait que : « Par dérogation aux dispositions de l'article R. 214-1-1, l'actif d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières peut également comprendre dans la limite de 10% : […] 8° Des parts ou actions d'organismes de placement collectif immobilier ou d'organismes étrangers mentionnées au e du I de l'article L. 214-92. En outre, sont incluses dans la limite de 10% fixée au présent article les parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières ou de fonds d'investissement eux-mêmes investis à plus de 10% en parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières ou de fonds d'investissement » ;
Considérant que l’article R. 214-60 du même code, repris aujourd’hui à l'article R. 214-48, prévoyait que : « I. – La limite fixée au sixième alinéa de l'article L. 214-4 et les dispositions des articles R. 214-2 à R. 214-10 et R. 214-18 ne sont pas applicables aux fonds communs de placement dans l'innovation ; II. - L'actif d'un fonds commun de placement dans l'innovation peut être employé à : 1° 10% au plus en titres d'un même émetteur ; 2° 35% au plus en actions ou parts d'un même organisme de placement collectif en valeurs mobilières ; 3° 10% au plus en actions ou parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières à règles d'investissement allégées relevant de l'article L. 214-35 ; 4° 10% au plus en titres ou en droits d'une même entité mentionnée au b du 2 de l'article L. 214-36 ne relevant pas des autres dispositions de l'article L. 214-36, ni de l'article L. 214-41, ni de l'article L. 214-41-1. III. - Un fonds commun de placement dans l'innovation doit respecter les dispositions du présent article à l'expiration d'un délai de deux exercices à compter de son agrément par l'Autorité des marchés financiers » ;
Considérant que l’article R. 214-76 du code monétaire et financier, repris aujourd’hui à l'article R. 214-66 du même code, disposait que : « I. La limite fixée au sixième alinéa de l'article L. 214-4 et les dispositions des articles R. 214-2 à R. 214-10 et R. 214-18 ne sont pas applicables aux fonds d'investissement de proximité ;
II. L'actif d'un fonds d'investissement de proximité peut être employé à : 1° 10% au plus en titres d'un même émetteur ; 2° 35% au plus en actions ou parts d'un même organisme de placement collectif en valeurs mobilières ; 3° 10% au plus en actions ou parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières à règles d'investissement allégées relevant de l'article L. 214-35 ; 4° 10% au plus en titres ou en droits d'une même entité mentionnée au b du 2 de l'article L. 214-36 ne relevant pas des autres dispositions de l'article L. 214-36, ni de l'article L. 214-41, ni de l'article L. 214-41-1. III. Un fonds d'investissement de proximité doit respecter les dispositions du présent article à l'expiration d'un délai de deux exercices à compter de son agrément par l'Autorité des marchés financiers » ;
Considérant qu’en matière de gestion des conflits d’intérêts, l'article 313-18 du règlement général de l'AMF énonce que « le prestataire de services d’investissement prend toute mesure raisonnable lui permettant de détecter les situations de conflits d'intérêts se posant lors de la prestation de services d’investissement, de services connexes ou la gestion d'OPCVM : 1°) Soit entre lui-même, les personnes concernées ou toute autre personne directement ou indirectement liée au prestataire par une relation de contrôle ; 2°) Soit entre deux clients » ; que ces dispositions sont complétées par celles de l'article 313-19 du même règlement qui précise que : « En vue de détecter, [...], les situations de conflits d'intérêts dont l'existence peut porter atteinte aux intérêts d'un client, le prestataire de services d'investissement prend au moins en compte l'éventualité que les personnes mentionnées à l'article 313-18 se trouvent dans l'une des situations suivantes, que celle-ci résulte de la fourniture de services d'investissement ou de services connexes, ou de la gestion d'OPCVM ou de l'exercice d'autres activités : 1° Le prestataire ou cette personne est susceptible de réaliser un gain financier ou d'éviter une perte financière aux dépens du client ; 2° Le prestataire ou cette personne a un intérêt au résultat d'un service fourni au client ou d'une transaction réalisée pour le compte de celui-ci qui est différent de l'intérêt du client au résultat ; 3° Le prestataire ou cette personne est incité, pour des raisons financières ou autres, à privilégier les intérêts d'un autre client ou d'un groupe de clients par rapport aux intérêts du client auquel le service est fourni ; 4° Le prestataire ou cette personne exerce la même activité professionnelle que le client ; 5° Le prestataire ou cette personne reçoit ou recevra d'une personne autre que le client un avantage en relation avec le service fourni au client, sous quelque forme que ce soit, autre que la commission ou les frais normalement facturés pour ce service » ;
Considérant que l'article 313-20 dudit règlement prévoit que « Le prestataire de services d'investissement établit et maintient opérationnelle une politique efficace de gestion des conflits d'intérêts [...] » ; que l'article 313-21 du même règlement spécifie que « la politique en matière de gestion des conflits d'intérêts [...] doit [...] identifier, en mentionnant les [...] activités du prestataire de services d'investissement, les situations qui donnent ou sont susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêts comportant un risque sensible d'atteinte aux intérêts d'un ou de plusieurs clients, à l'occasion de [...] la gestion d'OPCVM ; 2° Définir les procédures à suivre et les mesures à prendre en vue de gérer ces conflits [...] » ; et que l'article 313-22 dudit règlement ajoute : « Le prestataire de services d'investissement tient et met à jour régulièrement un registre consignant les [...] activités exercées par lui [...] pour [lesquelles] un conflit d'intérêts comportant un risque sensible d'atteinte aux intérêts d'un ou de plusieurs de ses clients s'est produit ou, dans le cas [...] d'une activité en cours, est susceptible de se produire » ;
1.2 Examen du grief
Considérant que seront examinées les deux décisions de gestion financière visées par la notification de griefs, qui répondent à des schémas de financement différents et n’impliquent pas les mêmes fonds sous gestion ;
1.2.1 Sur l’absence de gestion des conflits d’intérêts et la gestion non conforme à l’intérêt des porteurs dans le cadre du schéma de financement impliquant un OPCI
Considérant qu’à l’issue de plusieurs mois de négociation, a été conclu le 23 décembre 2008 entre, notamment, les sociétés VIVERIS MANAGEMENT et X d’un côté, le groupe Z de l’autre, un protocole de « collaboration en vue d’investir dans les ouvrages photovoltaïques destinés à la location » (cotes R 54 à R 61) prévoyant que les unités de production dont le groupe Z était le maître d’ouvrage seraient acquises, à hauteur de 70%, par l’OPCI qui devait être créé à cette fin par la société X et, à hauteur de 30%, par des sociétés dédiées, constituées sous la forme de SAS et détenues notamment par des fonds gérés par VIVERIS MANAGEMENT, lesquelles en assureraient l’exploitation ; que, dans l’attente de la constitution de l’OPCI, il était précisé que l’investissement dans quatorze hangars photovoltaïques serait « porté » par les trois premières SAS créées ;
1.2.1.1 Examen des premiers investissements réalisés en 2008 dans les sociétés d’exploitation avant la constitution de l’OPCI
Considérant qu’il est reproché à la société de gestion d’avoir, en décembre 2008, réalisé, pour le compte de six OPCVM qu’elle gérait, des investissements dans le secteur photovoltaïque d’un montant de 11 millions d’euros, effectués sous la forme d’acquisition d’actions des trois SAS créées à cet effet et d’avances en compte courant au bénéfice de celles-ci, ce qui constituerait, en l’absence de gestion des conflits d’intérêts, une atteinte à l’intérêt exclusif des porteurs de parts ;
Considérant que, pour sa défense, la mise en cause excipe de ce que la notification de griefs « se livre à une interprétation des faits purement subjective et contraire à la réalité » ; qu’elle soutient que ces investissements, antérieurs à la conclusion des accords avec le groupe Z, seraient conformes à l’orientation de gestion des FIP et FCPI concernés, éligibles aux dispositifs de défiscalisation prévus par la loi TEPA et « éligibles au quota d’investissement » des FIP sous gestion ;
Considérant que, si l’opportunité économique de ces investissements ne relève pas de l’appréciation de la Commission des sanctions, il appartient à celle-ci de s’assurer qu’ils sont conformes aux obligations professionnelles mises à la charge de la société de gestion et qu’ils ont bien été réalisés dans l’intérêt exclusif des porteurs, au sens de l’article L. 214-3 du code monétaire et financier ; que le respect de ces prescriptions suppose, à tout le moins, que les intérêts des clients aient été pris en considération en priorité, à titre principal, et non pas concurremment avec ceux de la société ; qu’il convient donc, d’une part, de vérifier que les investissements ont bien été faits au seul bénéfice des porteurs de parts, sans prendre en compte des intérêts concurrents, divergents ou antagonistes de la mise en cause ou d’autres sociétés du groupe VIVERIS, d’autre part, de rechercher si des procédures de prévention et de gestion des conflits d’intérêts ont été organisées et mises en oeuvre ;
Considérant que les décisions d’investissement, si elles sont antérieures à la signature du protocole susvisé du 23 décembre 2008, ne sauraient, pour autant, être dissociées de l’objectif poursuivi par ce protocole, qui était de définir les modalités d’un partenariat global portant sur l’acquisition et l’exploitation d’ouvrages photovoltaïques livrés par le groupe Z ; que, dans l’attente de l’agrément de l’OPCI appelé à assurer 70% du financement, qui devait porter essentiellement sur la partie immobilière des ouvrages photovoltaïques, VIVERIS MANAGEMENT s’est engagée à ce que celle-ci soit temporairement financée par plusieurs FCPI et FIP, déjà constitués, qu’elle gérait ; que la validation du projet consistant à créer les SAS […, ... et …], destinées à assurer l’acquisition des quatorze hangars photovoltaïques, est intervenue le 11 décembre 2008, soit avant la conclusion du protocole ; que la société de gestion, si elle soutient que ces investissements « ne constituaient pas l’objet du protocole », admet cependant que « la finalisation des premiers investissements […] a conforté de facto la qualité des relations entre partenaires et les a incités à mettre en place, au travers du protocole et d’un mandat, un partenariat plus large ayant pour objet la structuration et la levée de fonds destinés au financement du programme pluriannuel du groupe Z » ; que ces financements, qui s’inscrivent dans le cadre des négociations alors conduites avec le groupe Z, ont donc bien facilité l’adoption du protocole du 23 décembre 2008 ;
Considérant que la signature de ce protocole a notamment conféré :
- à la société X, filiale de VIVERIS MANAGEMENT, le bénéfice d’un « mandat ferme et irrévocable (…) de développer une structure de financement des investissements par la mise en place d’une SPPICAV » appelée à se porter acquéreur auprès du groupe Z de la partie immobilière des ouvrages photovoltaïques (article 5) ;
- à VIVERIS MANAGEMENT et à la société V un droit de priorité « par rapport à tout autre investisseur » concernant tous les projets éligibles que le groupe Z développerait (articles 5 et 7) ;
Considérant qu’il n’est donc pas contestable que la mise en cause avait un intérêt propre à la conclusion de cet accord, qui a été facilitée par les premiers investissements mis en place ;
Considérant qu’il convient maintenant de rechercher si les investissements ont été réalisés, en priorité et à titre principal, au bénéfice des porteurs de parts des FCPI et FIP et de s’assurer qu’ils n’ont pas pris en compte les intérêts concurrents, divergents ou antagonistes de la société de gestion et de ses filiales ; qu’ils sont conformes aux contraintes posées et aux critères d’éligibilité prévus par la réglementation applicable à ces fonds ; qu’en outre, aucun élément du dossier ne permet de démentir les affirmations de la mise en cause selon lesquelles, à la suite de « la crise qui avait durement frappé l’activité et le deal flow de qualité des sociétés de capital investissement », les investissements photovoltaïques offraient une opportunité intéressante compte tenu des perspectives de rendement du secteur, garanties par le groupe Z, et de l’éventualité de les faire entrer dans des dispositifs de défiscalisation du point de vue des impôts sur la fortune et sur le revenu (ISF/IR) ; qu’en outre, il n’existait aucune concurrence, divergence ou contrariété entre les intérêts en présence ; qu’il n’est donc pas établi que la décision de faire investir les fonds sous gestion dans le secteur photovoltaïque ait été prise, en décembre 2008, en violation des dispositions de l’article L. 214-3 du code monétaire et financier imposant de respecter l’intérêt exclusif des clients ; que ce premier aspect du manquement ne sera donc pas retenu ;
Considérant qu’il demeure cependant que la conclusion de ce protocole présentait, pour la société de gestion, un intérêt propre nécessitant le respect des procédures formalisées applicables à la prévention, la détection et la gestion des situations de conflits d'intérêts, que ceux-ci soient potentiels ou avérés ; que l’organisation et la mise en oeuvre de ces dispositifs participent de l’obligation de loyauté et de professionnalisme posée à l’article L. 533-1 du code monétaire et financier ; qu’à défaut d’avoir pris les mesures nécessaires à la prévention et à la gestion du conflit d’intérêts susceptible de résulter du partenariat qu’elle avait elle-même initié avec le groupe Z, VIVERIS MANAGEMENT a commis un manquement aux articles 313-18, 313-19, 313-20, 313-21 et 313-22 du règlement général de l’AMF ;
1.2.1.2 Examen des souscriptions par les FIP et FCPI d’actions de la SPPICAV nouvellement constituée
Considérant que les éléments matériels recueillis par la mission de contrôle, non contestés par la mise en cause, montrent qu’au 31 décembre 2009, cinq FIP et un FCPI, gérés par VIVERIS MANAGEMENT, ont acquis des parts d’un OPCI, constitué sous la forme d’une société à prépondérance immobilière à capital variable (ci-après « SPPICAV »), dénommée « […] », créée et gérée par la société X et agréée par l’AMF le 26 mai 2009 ; que le financement de la partie immobilière des ouvrages photovoltaïques, qui devait être fait par l’intermédiaire de ce véhicule d’investissement dédié, a été abandonné deux mois seulement après la date de l’agrément ;
Considérant, tout d’abord, que, selon la notification de griefs, ces investissements n’étaient pas autorisés par la réglementation « qui rendait inéligible les parts ou actions d’un OPCI à l’actif des FIP et FCPI » ; qu’il convient, dès lors, d’examiner si cette décision a été prise en conformité avec les règles de composition des actifs applicables aux FIP et FCPI et si elle est conforme aux obligations professionnelles incombant aux sociétés de gestion ;
Considérant qu’il est exact qu’il résulte de la combinaison des articles L. 214-4, R. 214-1-1 et R. 214-5 8° du code monétaire et financier que les parts et actions d’un OPCI sont éligibles, dans la limite de 10%, à l’actif des OPCVM à vocation générale ; que, toutefois, les premiers alinéas des articles R. 214-60 et R. 214-76 du code monétaire et financier, qui constituent des dispositions spécifiques, applicables aux FIP et aux FCPI – lesquels constituent des fonds communs de placement à risques à statut particulier - précisent que « la limite fixée au sixième alinéa de l'article L. 214-4 et les dispositions des articles R. 214-2 à R. 214-10 et R. 214-18 ne sont pas applicables » ; que ces textes, tels qu’ils sont rédigés, ont donc objectivement pour effet d’exclure les parts d’OPCI des investissements éligibles à l’actif de ce type de fonds ;
Considérant, en conséquence, que l’investissement pour le compte des FIP et du FCPI dans une SPPICAV constitue un manquement aux articles R. 214-60 et R. 214-76 du code monétaire et financier ; que les règles de composition de l’actif des fonds ont pour objet de limiter les risques de marché, de contrepartie et de liquidité auxquels sont exposés les investisseurs ; que le non-respect de ces règles, en ce qu’il a eu pour effet d’accroître les risques encourus par les porteurs de parts des fonds de capital investissement, caractérise un défaut de respect de ses obligations par la société de gestion ;
Considérant, ensuite, que, s’agissant de financements non autorisés, la question de savoir si la société de gestion a respecté ses obligations d’agir dans l’intérêt exclusif des porteurs de parts et de mettre en place une procédure de prévention et de gestion des conflits d’intérêts ne sera examinée qu’au titre de circonstances aggravantes du manquement précédemment caractérisé ;
Considérant qu’il ressort de l’instruction que le schéma de financement dans lequel la SPPICAV avait vocation à intervenir était, au jour des souscriptions litigieuses, incertain dès lors que la direction de la législation fiscale n’avait pas répondu, à la fin du mois de mai 2009, au rescrit portant sur l’éligibilité des parcs photovoltaïques au régime des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) bénéficiant de l’exonération de l’impôt sur les sociétés ; que le groupe Z avait d’ailleurs subordonné l’investissement d’une de ses sociétés dans la SPICCAV à l’obtention préalable d’« un rescrit fiscal satisfaisant » ; que la décision prise par VIVERIS MANAGEMENT de faire investir, sans attendre la réponse de l’administration fiscale, cinq FIP et un FCPI dans cette SPPICAV s’explique davantage par sa volonté « de contribuer à l’amorçage », le plus rapidement possible, du financement des hangars par l’intermédiaire d’une société créée et gérée par la société X que par la prise en considération de l’intérêt des porteurs de parts des fonds ; que le refus d’attribution du régime des SIIC, intervenu le 30 juillet 2009, a entraîné l’abandon du projet ; qu’à l’occasion de la dissolution par anticipation de la SPPICAV, une perte de 4,94% à 7,47% a été constatée sur les participations détenues par les fonds gérés par VIVERIS MANAGEMENT ;
Considérant que cette décision d’investissement n’a donc pas été prise au bénéfice exclusif des porteurs de parts des fonds, VIVERIS MANAGEMENT ayant privilégié ses intérêts propres, lesquels étaient concurrents, sinon antagonistes, de ceux des FIP et FCPI ; que ces fonds ont en effet été amenés à participer à des financements non autorisés, lesquels se sont en outre avérés déficitaires ; qu’une telle opération est, par ailleurs, révélatrice d’une situation conflictuelle, au sens de l’article 313-19 du règlement général de l’AMF ; que la mise en cause n’a rien fait pour prévenir et gérer ce conflit avéré entre les intérêts de ses clients, ses intérêts propres et ceux de sa filiale ;
Considérant que le manquement est donc aggravé, tout à la fois, par l’absence de prise en considération de l’intérêt exclusif des porteurs et par le défaut de formalisation et de mise en oeuvre d’une politique efficace et opérationnelle de détection, de prévention et de gestion des conflits d’intérêts ;
1.2.2 Sur l’absence de gestion des conflits d’intérêts et la gestion non conforme à l’intérêt des porteurs, dans le cadre du schéma de financement impliquant un FCPR
Considérant qu’il est fait grief à la mise en cause d’avoir décidé, à la fin de l’année 2009, de financer l’acquisition de 85 hangars photovoltaïques supplémentaires proposés par le groupe Z dans le seul but de « tenir ses engagements » vis-à-vis de son partenaire ; que la notification de griefs retient que cette décision d’investissement prise pour le compte des fonds sous gestion illustrerait une situation conflictuelle, inhérente à la « volonté [de VIVERIS MANAGEMENT] de nouer des partenariats avec le groupe Z » ; qu’en l’absence de gestion des conflits d’intérêts, ces investissements caractériseraient une atteinte à l’intérêt exclusif des porteurs de parts ;
Considérant que les investissements litigieux ont été réalisés, pour le compte de quatorze OPCVM gérés par VIVERIS MANAGEMENT, notamment sous la forme de souscription d’obligations convertibles émises par treize sociétés d’exploitation (cote R 375) ; qu’afin d’apprécier si les éléments constitutifs d’un manquement sont réunis, il convient, d’une part, de vérifier, en fonction du contexte financier de l’époque et des circonstances de l’espèce, si ces investissements ont bien été réalisés, en priorité et à titre principal, au bénéfice des porteurs et de s’assurer qu’ils n’ont pas pris en compte les intérêts concurrents, divergents ou antagonistes de la société de gestion et de ses filiales, d’autre part, de rechercher si des procédures de prévention, de détection et de gestion des conflits d’intérêts ont été organisées et mises en oeuvre ;
Considérant que, selon la mise en cause, la notification de griefs se contenterait de « viser […] la rédaction malheureuse d’un compte-rendu […] pour tenter de justifier la thèse erronée d’engagements souscrits par VIVERIS MANAGEMENT envers le groupe Z » ; qu’elle ajoute que, d’une part, « les extraits et citations repris par la notification de griefs ne font pas ressortir de façon explicite la situation de conflit d’intérêts qu’il est reproché à VIVERIS MANAGEMENT de ne pas avoir géré », d’autre part, aucune obligation d’investir n’était mise à sa charge au titre des protocoles signés avec le groupe Z ;
Considérant que la société de gestion a conclu, le 9 novembre 2009 avec le groupe Z, un nouveau protocole d’accord ayant pour objet d’acquérir 85 hangars photovoltaïques sur les 110 qui lui étaient proposés ; que, selon la présentation du projet d’acquisition, telle qu’elle a été faite au comité d’investissement de VIVERIS MANAGEMENT le 28 septembre 2009, « l’équipe photovoltaïque » de la société souhaitait « crédibiliser la démarche » entreprise auprès du groupe Z, l’enjeu étant de « pallier le retard pris sur le projet Energreen » ; que, lors du comité d’engagement du 18 novembre 2009, le président de VIVERIS MANAGEMENT a décidé « à titre exceptionnel », et alors que « l’accord formel sur la dette bancaire » qui aurait dû, selon le comité d’investissement du 19 octobre 2009, avoir été préalablement obtenu, ne l’avait pas encore été, de procéder aux investissements prévus par le protocole ;
Considérant que l’examen de ce protocole signé entre, d’un côté, VIVERIS MANAGEMENT, ses FCPI, FIP et FCPR sous gestion, de l’autre, le groupe Z, montre tout d’abord que la mise en cause a, dans le cadre des stipulations contractuelles, été désignée en qualité de présidente des sociétés d’exploitation devant être constituées sous la forme de SAS pour acquérir et exploiter les hangars photovoltaïques développés par son partenaire ; qu’elle s’est trouvée, dès lors, dans la situation de devoir prendre, au titre du mandat social, des décisions conformes à l’intérêt des SAS ; que parallèlement elle devait poursuivre l’intérêt exclusif des porteurs de parts des fonds, conformément au mandat de gestion dont elle était déjà investie ; que ce cumul, s’il n’est pas en tant que tel interdit par la réglementation applicable, est en revanche susceptible de constituer une entrave au principe d’indépendance de la gestion des OPCVM et de générer des conflits d’intérêts ; qu’en effet, l’objet social des SAS, dont la mise en cause avait charge d’assurer la gestion, était d’acquérir et d’exploiter les hangars photovoltaïques financés par le biais des OPCVM qu’elle gérait ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces constatations que la décision prise, dès le 18 novembre 2009, de faire participer quatorze fonds sous gestion à la souscription des emprunts obligataires émis par les sociétés d’exploitation a permis à VIVERIS MANAGEMENT de poursuivre avec le groupe Z la relation d’affaires nouée en 2008, dans laquelle elle avait des intérêts économiques propres ;
Considérant que, dans cette situation particulière, mettant face à face des intérêts distincts, la mise en cause aurait dû respecter des procédures formalisées de prévention, de détection et de gestion des situations de conflits d’intérêts ; qu’à défaut d’avoir prévu un tel dispositif et d’avoir pris des mesures spécifiques, visant à éviter les situations susceptibles de porter atteinte aux intérêts de ses clients, VIVERIS MANAGEMENT ne s’est pas conformée à l’obligation générale, prescrite par l’article L. 533-1 du code monétaire et financier, « d’agir d’une manière honnête, loyale et professionnelle » et n’a pas respecté les prescriptions réglementaires édictées par les articles 313-18 à 313-22 du règlement général de l’AMF ; que ce premier aspect du grief est caractérisé ;
Considérant qu’il convient de rechercher si cette opération a été réalisée, en priorité et à titre principal, au bénéfice des porteurs et n’a pas pris en compte les intérêts concurrents, divergents ou antagonistes de la société de gestion et de ses filiales ; que l’investissement dans cette nouvelle série de hangars photovoltaïques, qui s’analysait, pour VIVERIS MANAGEMENT, non pas en une obligation, mais seulement en un droit de priorité, a été limité à 85 des 110 hangars proposés ; qu’il a été préalablement soumis à un processus de validation s’étant traduit par des diligences complémentaires ; qu’avant d’être adopté, il a fait l’objet de discussions, lors des réunions des comités de financement, avec les directeurs exécutifs des fonds ; que la mise en cause justifie de l’intérêt, pour les investisseurs, d’une opération qui offrait, à son terme, des perspectives de rendement de 8 à 9% et ouvrait droit, à tout moment, à une conversion en capital ; que la revente de certaines des obligations convertibles a d’ailleurs dégagé une plus-value de 4 à 6% ; que d’autres sociétés, comme Amundi, sont entrées au capital des SAS ; que le placement ne paraît pas avoir fait l’objet de réclamations des porteurs de parts des fonds, toujours détenteurs d’une partie des obligations convertibles ; qu’il n’est donc pas établi que VIVERIS MANAGEMENT, en décidant des investissements litigieux, n’aurait pas respecté l’intérêt exclusif des porteurs de parts, de sorte que le grief fondé sur l'article L. 214-3 du code monétaire et financier n’est pas caractérisé ;
1.2.3 Sur l’atteinte à la bonne information des porteurs dans le cadre des investissements réalisés dans le secteur photovoltaïque
1.2.3.1 Sur le non-respect de la contrainte de diversification des risques mentionnée dans les notices d’information et dans les documents commerciaux
Considérant qu’il est reproché à VIVERIS MANAGEMENT de n’avoir pas respecté la contrainte de diversification des risques visée dans les notices d’information et relayée dans la documentation commerciale de ses fonds ;
Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article 411-45-1 du règlement général de l’AMF, aujourd’hui repris en substance à l’article 411-113 du même règlement, que les informations comprises dans la notice d’information des fonds, partie intégrante du prospectus à partir duquel les fonds sont agréés, doivent présenter de manière claire, transparente, complète et facilement compréhensible l’ensemble des risques identifiés au jour de la création du fonds, dont le risque sectoriel ; que ces informations sont essentielles à la compréhension, des risques auxquels s’exposent les investisseurs, qui doivent pouvoir prendre leurs décisions en toute connaissance de cause ; que l’article 3 de l’instruction n° 2009-05 du 4 juin 2009, repris à l’article 23 de l’instruction n° 2011-22 du 21 décembre 2011, précise que « les objectifs et caractéristiques du prospectus complet » sont : « De fournir une information précise sur la gestion mise en oeuvre ; les modalités de fonctionnement du FCPR agréé ; les risques liés à l'investissement dans le FCPR agréé » ;
Considérant que les notices d’information des FIP Néoveris 2, Néoveris 5 et Néoveris 6 prévoyaient explicitement que : « les petites et moyennes entreprises dans lesquelles le Fonds a vocation à prendre ses participations exerceront leurs activités principalement dans des établissements situés dans les régions Provence Alpes Côte d'Azur, Languedoc Roussillon et Rhône-Alpes (régions dénommées ci-après « Grand Delta Rhodanien »), sans spécialisation particulière par secteur d'activité » ; que, pour les FIP Néoveris 5 et Néoveris 6, elles précisaient que : « le Fonds veillera à assurer une diversification de son portefeuille non coté qui couvrira une large gamme de secteurs d'activités » ;
Considérant que les investissements dans le secteur photovoltaïque réalisés entre 2008 à 2009 pour le compte de ces FIP ont représenté des montants importants, allant jusqu’à 10 millions d’euros pour Néoveris 6, et ont constitué une proportion significative, allant de 42,35% à 49,7%, de l’actif net des fonds ; que cette spécialisation n’était pas en conformité avec la stratégie d’investissement diversifiée annoncée par les notices d’information et la documentation commerciale des FIP ; que l’information ainsi donnée n’était donc pas exacte ; que, dès lors, le manquement est caractérisé ;
1.2.3.2 Présentation inexacte et trompeuse dans les rapports de gestion des investissements réalisés pour le compte des FIP
Considérant que l’obligation faite aux prestataires de services d’investissement d’agir de manière honnête, loyale et professionnelle a pour finalité première la préservation de l’intérêt des clients ; que le respect de cette obligation implique notamment la délivrance d’une information exacte, claire et non trompeuse aux investisseurs, qui doivent être mis en mesure de prendre leurs décisions d’investissement ou de désinvestissement de manière éclairée ou de confier la gestion de leurs actifs en toute connaissance de cause ; que cette obligation s’applique aussi bien aux caractéristiques de l’investissement qu’aux risques encourus ; qu’à cet égard, l’article L. 533-12 précise notamment que : « I. - Toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur […] » ; qu’en outre, l’article 314-10 du règlement général de l’AMF énonce que : « Le prestataire de services d'investissement veille à ce que toute l'information, y compris à caractère promotionnel, qu'il adresse à des clients, remplisse les conditions posées au I de l'article L. 533-12 du code monétaire et financier. Le prestataire veille également à ce que toute l'information, y compris à caractère promotionnel, qu'il adresse à des clients non professionnels ou qui parviendra probablement à de tels destinataires remplisse les conditions posées aux articles 314-11 à 314-17 » ;
Considérant qu’en l’espèce, il est reproché à VIVERIS MANAGEMENT d’avoir délivré, dans les rapports de gestion établis les 30 novembre 2009 et 31 décembre 2009, une information inexacte et trompeuse aux porteurs de parts des FIP Néoveris 2, Néoveris 5 et Néoveris 6 ;
Considérant que les éléments collectés par la mission de contrôle et non contestés par la mise en cause révèlent qu’aucun risque particulier n’a été signalé aux clients quant aux opérations réalisées à la fin de l’année 2009 dans le secteur photovoltaïque, présentées comme un moyen « d’optimiser » la gestion de trésorerie ; que l’emploi de l’expression « avec prudence », pour les investissements en capital-risque, traduisait au contraire un message rassurant ;
Considérant, pourtant, que les caractéristiques des obligations convertibles auxquelles ces FIP avaient souscrit induisaient un risque de contrepartie et de liquidité qui faisait obstacle à la qualification de « placement de trésorerie » ; que, si les rapports de gestion faisaient bien référence au partenariat conclu avec le groupe Z, ils ne comportaient, en revanche, aucun élément de nature à alerter les investisseurs sur le niveau de risque auquel ils étaient exposés et aucun renseignement sur la forme sous laquelle l’investissement avait été réalisé ; que, du fait de leur imprécision, ils ne présentaient donc pas un contenu suffisamment « exact, clair et non trompeur » ; que l’information transmise aux clients dans les rapports de gestion établis, selon les fonds, les 30 novembre 2009 et 31 décembre 2009, ne satisfaisant pas aux exigences des articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 314-10 du règlement général de l’AMF, le manquement doit être retenu ;
2. SUR LE GRIEF TIRE DE L’ABSENCE DE GESTION DES CONFLITS D’INTERETS ET LA GESTION NON CONFORME A L’INTERET DES PORTEURS DANS LE CADRE DU PARTENARIAT NOUE AVEC LA SOCIETE W
Considérant que la notification de griefs, après avoir rappelé la « délégation financière de la trésorerie de la partie hors quota » des OPCVM de VIVERIS MANAGEMENT à la société de gestion W, relève qu’en l’absence de gestion des conflits d’intérêts, la mise en cause n’aurait pas « agi dans l’intérêt exclusif des porteurs de parts des OPCVM dont elle assurait la gestion», en violation des articles L. 533-1 et L. 214-3 du code monétaire et financier et 313-18 à 313-22 du règlement général de l’AMF précités ;
Considérant que, pour caractériser ce grief, il est en outre fait état du rachat des parts du FCPR Connect Capital, présent à l’actif des OPCVM W Prudent et W Equilibre, par les fonds Innoveris Prime 2, Néoveris 8 et Néoveris 9 gérés par VIVERIS MANAGEMENT, rachat à l’occasion duquel le procès-verbal du comité de gestion de trésorerie du 18 mai 2010 précise qu’il « apportera des liquidités aux FCP W Prudent et Equilibre » ;
Considérant que VIVERIS MANAGEMENT ne justifie pas avoir mis en place une procédure de nature à détecter et à gérer les risques opérationnels et les conflits d’intérêts pouvant résulter de l’investissement de la partie « hors quota » de ses OPCVM dans W Prudent, W Equilibre et W Dynamisme, qui sont gérés par la société W ; que cette défaillance est mise en exergue par l’absence de tenue d’un registre des conflits d’intérêts au jour du contrôle ; que le manquement aux articles 313-18 à 313-22 du règlement général est donc objectivement caractérisé ;
Considérant, en revanche, que les éléments fournis par la mise en cause, justifiant de l’intérêt financier qui est résulté, pour les fonds Néoveris 8, Neoveris 9 et Innoveris Prime 2, de l’acquisition des parts du FCPR Connect Capital, conduisent à écarter le grief pris de la méconnaissance, par VIVERIS MANAGEMENT , du principe de la primauté de l’intérêt des porteurs ;
3. SUR LE GRIEF TIRE DE L’ABSENCE DE GESTION DES CONFLITS D’INTERETS ET L’ATTEINTE A L’INTERET EXCLUSIF DES PORTEURS, DANS LE CADRE DU PARTENARIAT NOUE PAR VIVERIS MANAGEMENT ET LA SOCIETE V AVEC LA SOCIETE U
Considérant qu’il est reproché à VIVERIS MANAGEMENT d’avoir, en violation des articles L. 533-1 et L. 214-3 du code monétaire et financier et des articles 313-18 à 313-22 du règlement général de l’AMF, « servi l’intérêt exclusif de sa holding » au détriment de celui des porteurs de parts des FCPI Innoveris 5 et Innoveris 6 à l’occasion de l’opération de souscription, pour le compte de ces fonds, d’obligations convertibles émises par la société V (ci-après : « société V ») ;
Considérant la mise en cause admet « que l’opération aurait mérité de figurer formellement dans le registre des conflits d’intérêts », conformément aux dispositions de l’article 313-22 du règlement général de l’AMF, de sorte que le grief tiré de l’absence de gestion des conflits d’intérêts est caractérisé ;
Considérant, toutefois, qu’elle fait valoir que les intérêts des parties étaient convergents, le taux de rendement des obligations convertibles étant plus intéressant que celui des obligations assimilables du Trésor ;
Considérant qu’il ressort cependant de ses déclarations que l’emprunt obligataire émis par la société V résultait de l’impossibilité où celle-ci se trouvait d’avoir recours à la dette bancaire et de son besoin d’obtenir les fonds sans lesquels elle n’aurait pas pu « financer son apport de fonds complémentaires à la société U » et détenir le contrôle de fait de « cette participation stratégique » ; que la rémunération supérieure à celle des obligations assimilables du Trésor, indispensable pour compenser le risque de liquidité et de contrepartie inhérent à l’émetteur non coté des obligations convertibles, ne saurait suffire à justifier de la convergence entre l’intérêt des souscripteurs et celui de la société V ;
Considérant que la souscription, par les fonds gérés par VIVERIS MANAGEMENT, de la totalité de l’emprunt obligataire émis par une autre société du même groupe a été faite en considération de l’intérêt propre et prédominant de la mise en cause, qui a pris le contrôle d’une société tierce, et non en considération de l’intérêt exclusif, tel que précédemment défini, des porteurs des FCPI Innoveris 5 et Innoveris 6 ; qu’il apparaît, en effet , que ces fonds ont été « instrumentalisés » au service de la prise de contrôle voulue par la société V ; que le manquement à l’article L. 214-3 du code monétaire et financier est donc pleinement caractérisé ;
4. SUR LE GRIEF TIRE DES DEFAILLANCES DU DISPOSITIF DE CONFORMITE ET DE CONTROLE INTERNE DE VIVERIS MANAGEMENT
4.1 Textes applicables
Considérant que les faits reprochés se sont déroulés à compter du 3 février 2007 ; qu’ils seront donc examinés à la lumière des textes dans leur version applicable à cette période ;
Considérant que l'article L. 533-10 du code monétaire et financier dispose que : « Les prestataires de services d'investissement doivent : 1. Mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect des dispositions qui leur sont applicables ; 2. Mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect par les personnes placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte, des dispositions applicables aux prestataires eux-mêmes ainsi qu'à ces personnes, en particulier les conditions et limites dans lesquelles ces dernières peuvent effectuer pour leur propre compte des transactions personnelles. Ces conditions et limites sont reprises dans le règlement intérieur et intégrées au programme d'activités du prestataire ; 3. Prendre toutes les mesures raisonnables pour empêcher les conflits d'intérêts de porter atteinte aux intérêts de leurs clients. Ces conflits d'intérêts sont ceux qui se posent entre, d'une part, les prestataires eux-mêmes, les personnes placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte ou toute autre personne directement ou indirectement liée à eux par une relation de contrôle et, d'autre part, leurs clients, ou bien entre deux clients, lors de la fourniture de tout service d'investissement ou de tout service connexe ou d'une combinaison de ces services. Lorsque ces mesures ne suffisent pas à garantir, avec une certitude raisonnable, que le risque de porter atteinte aux intérêts des clients sera évité, le prestataire informe clairement ceux-ci, avant d'agir en leur nom, de la nature générale ou de la source de ces conflits d'intérêts ; 4. Prendre des mesures raisonnables en utilisant des ressources et des procédures appropriées et proportionnées pour garantir la continuité et la régularité de la fourniture des services d'investissement, notamment lorsqu'ils confient à des tiers des fonctions opérationnelles importantes ;
5. Conserver un enregistrement de tout service qu'ils fournissent et de toute transaction qu'ils effectuent, permettant à l'Autorité des marchés financiers de contrôler le respect des obligations du prestataire de services d'investissement et, en particulier, de toutes ses obligations à l'égard des clients, notamment des clients potentiels ; 6. Sauvegarder les droits des clients sur les instruments financiers leur appartenant et empêcher leur utilisation pour compte propre, sauf consentement exprès des clients ; 7. Sauvegarder les droits des clients sur les fonds leur appartenant. Les entreprises d'investissement ne peuvent en aucun cas utiliser pour leur propre compte les fonds déposés auprès d'elles par leurs clients sous réserve des dispositions des articles L. 440-7 à L. 440-10. Le règlement général de l'Autorité des marchés financiers précise les conditions d'application du présent article. Toutefois, un arrêté du ministre chargé de l'économie, pris conformément à l'article L. 611-3, précise les conditions d'application des 4 et 7, pour les prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille » ;
Considérant que l'article 313-3 du règlement général de l'AMF précise qu' « Afin de permettre à la fonction de conformité de s'acquitter de ses missions de manière appropriée et indépendante, le prestataire de services d'investissement veille à ce que les […] personnes concernées participant à la fonction de conformité ne sont pas impliquées dans l'exécution des services et activités qu'elles contrôlent […] » ; que l’article 313-7 de ce même règlement prescrit que : « Le prestataire de services d'investissement veille à ce que ses dirigeants reçoivent, de manière fréquente et au moins une fois par an, des rapports sur la conformité, le contrôle des risques et le contrôle périodique indiquant en particulier si des mesures appropriées ont été prises en cas de défaillances. Le prestataire de services d'investissement veille également à ce que son instance de surveillance, si elle existe, reçoive de manière régulière des rapports écrits sur les mêmes questions ; qu’en outre, l’article 313-53 du règlement général de l'AMF dispose que « Dans les conditions mentionnées à l’article 313-50, le prestataire de services d'investissement s'assure de la conservation des informations relatives aux contrôles et aux évaluations mentionnés au I de l’article 313-2 » ;
Considérant que l'article 313-54 du règlement général de l'AMF disposait que : « I. - La société de gestion de portefeuille utilise en permanence des moyens, notamment matériels, financiers et humains, adaptés et suffisants. II. - Elle établit et maintient opérationnelles des procédures de prise de décision et une structure organisationnelle précisant sous une forme claire et documentée les lignes hiérarchiques et la répartition des fonctions et responsabilités dans les conditions précisées par une instruction de l’AMF. Dans le cadre des activités de gestion collective de la société de gestion de portefeuille, ces procédures de prise de décision incluent en particulier les diligences qui président à la sélection, au suivi et au contrôle des risques associés aux instruments financiers dans lesquels l’OPCVM investit. III. - Elle s'assure que les personnes concernées sont bien au courant des procédures qui doivent être suivies en vue de l'exercice approprié de leurs responsabilités.
IV. - Elle établit et maintient opérationnels des mécanismes de contrôle interne appropriés, conçus pour garantir le respect des décisions et procédures à tous les niveaux de la société de gestion de portefeuille. Les procédures de contrôle et de suivi doivent notamment permettre à la société de gestion de portefeuille de vérifier que ses dépositaires disposent de procédures et de moyens adaptés aux opérations réalisées pour son compte.
V. - Elle emploie un personnel disposant des qualifications, des connaissances et de l'expertise requises pour exercer les responsabilités qui lui sont confiées. VI. - Elle établit et maintient opérationnel un système efficace de remontées hiérarchiques et de communication des informations à tous les niveaux pertinents. VII. – Elle enregistre de manière adéquate et ordonnée le détail de ses activités et de son organisation interne. VIII. – Elle s'assure que le fait de confier des fonctions multiples aux personnes concernées ne les empêche pas ou n'est pas susceptible de les empêcher de s'acquitter de manière adéquate, honnête et professionnelle de l'une quelconque de ces fonctions. IX. - Pour l'application des I à VIII ci-dessus, la société de gestion de portefeuille tient dûment compte de la nature, de l'importance, de la complexité et de la diversité des services qu'elle fournit et des activités qu'elle exerce » ;
Considérant qu’en application de l'article 313-10 du règlement général de l'AMF, la société de gestion doit prévoir « […] des dispositions appropriées en vue d'interdire à toute personne […] intervenant dans des activités susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêts ou ayant accès à des informations privilégiées […] [de] réaliser une transaction personnelle qui remplit [certains] critères […] », et elle doit être « […] informé[e] sans délai de toute transaction personnelle réalisée par une personne concernée […] » ; que l'article 313-11 de ce même règlement prévoit : « Pour l'application des dispositions de l’article 313-10, le prestataire de services d'investissement doit en particulier s'assurer que : 1° Toutes les personnes concernées mentionnées à l’article 313-10 ont connaissance des restrictions portant sur les transactions personnelles et des mesures arrêtées par le prestataire de services d'investissement en matière de transactions personnelles et de divulgation d'information en application de l’article 313-10 ; 2° Le prestataire de services d'investissement est informé sans délai de toute transaction personnelle réalisée par une personne concernée mentionnée au premier alinéa de l’article 313-10, soit par notification de toute transaction de ce type, soit par d'autres procédures permettant au prestataire d'identifier ces transactions ; Lorsque le prestataire de services d'investissement a conclu un contrat d'externalisation, il s'assure que le prestataire de services auprès duquel la tâche ou la fonction a été externalisée conserve un enregistrement des transactions personnelles réalisées par toute personne concernée et est en mesure de lui fournir sans délai, à sa demande, ces informations ; 3° Un enregistrement de la transaction personnelle qui a été notifiée au prestataire de services d'investissement ou que celui-ci a identifiée est conservé.
Cet enregistrement mentionne également toute autorisation ou interdiction liée à cette transaction » ;
4.2 Examen du grief
Considérant que la notification de griefs relève plusieurs « dysfonctionnements significatifs » du dispositif de conformité et du contrôle interne résultant, à la fois, du manque d’indépendance du Responsable de la conformité et du contrôle interne (ci-après : « RCCI »), qui exerçait des activités opérationnelles incompatibles avec ses fonctions, et de ce que les contrôles n’ont pas été réalisés ou n’ont pas été formalisés ; que ces carences, accrues par une absence de contrôle ex-post des transactions personnelles réalisées par les collaborateurs de VIVERIS MANAGEMENT et par l’utilisation de moyens humains inadaptés, n’auraient pas permis à la fonction de conformité de s’acquitter de ses missions et, plus généralement, à VIVERIS MANAGEMENT de s’assurer du respect des règles applicables à son activité de gestion d’OPCVM, en violation des articles L. 533-10 du code monétaire et financier et 313-3, 313-7, 313-10, 313-11, 313-53, 313-54, 315-44 du règlement général de l’AMF ;
Considérant qu’ainsi qu’il a été dit, plusieurs décisions d’investissements pour le compte des fonds sous gestion ne trouvaient pas leur justification dans le seul intérêt des porteurs de parts ; que cette situation n'a été rendue possible que par l’absence de mise en place d’une politique de gestion des conflits d’intérêts efficace et opérationnelle ;
Considérant, en outre, que le RCCI, par ailleurs directeur exécutif de VIVERIS MANAGEMENT, était titulaire d’une délégation accordée le 24 janvier 2008 par M. B, laquelle, même si elle était supplétive, lui conférait des pouvoirs particulièrement étendus, comme celui de contracter tout type de convention, qu’il s’agisse des prises ou cessions de participations de la part de VIVERIS MANAGEMENT, des fonds ou des structures sous gestion de cette société, ou qu’il s’agisse de gérer le portefeuille des participations ; qu’il résulte d’un rapport d’inspection interne de la BPCE, établi à la suite d’un audit du 3 décembre 2009, que : « (…) dans la moitié des comités de 2008, en l’absence du Président, seule la signature du RCCI apparaît sur les procès-verbaux des comités et les délégations de pouvoirs accordés aux directeurs d’investissement pour la réalisation des opérations, ce qui pourrait laisser croire que le RCCI exerce un rôle opérationnel » ; que l’implication effective du RCCI dans le processus décisionnel relatif à l’investissement et au désinvestissement des fonds sous gestion était incompatible avec l’exercice, en toute indépendance, de ses missions de contrôle interne et de conformité ;
Considérant, enfin, que VIVERIS MANAGEMENT n’a pu présenter que les rapports annuels des exercices 2008 et 2009, qui figurent sur une seule page ; qu’il n’existait pas, au jour du contrôle, de registre répertoriant les conflits d’intérêts potentiels ou avérés ; que la seule remise d’une déclaration sur l’honneur, concernant le contrôle ex-post des transactions personnelles, ne répond pas aux exigences des articles 313-10 et 313-11 du règlement général de l’AMF ;
Considérant qu’il ressort de ce qui précède que VIVERIS MANAGEMENT n’avait pas, au moment des faits, mis en place des règles et des procédures garantissant le respect des dispositions qui lui sont applicables ; que le manquement aux dispositions de l’article L. 533-10 du code monétaire et financier et des articles 313-3, 313-7, 313-10, 313-11, 313-53, 313-54, 315-44 du règlement général de l’AMF est donc caractérisé ;
5. SANCTIONS ET PUBLICATION
Considérant qu’en application de l'article L. 621-15 III, a), du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur au moment des faits, les sanctions applicables sont « l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis » et, « soit à la place, soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 10 millions d’euros » ;
Considérant que certains des manquements à l’obligation de respecter l’intérêt exclusif des clients ont été écartés, de sorte qu’il n’est pas établi, au travers de l’ensemble des opérations relevées par la notification de griefs, que la mise en cause ait favorisé son intérêt propre au mépris de celui des porteurs de parts des fonds gérés de manière systématique ; qu’il demeure cependant que tel a été le cas de l’investissement non autorisé, par les FIP et FCPI sous gestion, dans la SPPICAV […] et de la souscription, par les FCPI Innoveris 5 et 6, d’obligations convertibles émises par la société V ; que ces manquements revêtent une particulière gravité ; qu’ils s’accompagnent, pour chacune des opérations visées par la notification de griefs, d’une absence totale de prévention et de gestion des conflits d’intérêts ; qu’enfin, sont caractérisées des atteintes graves à la bonne information des porteurs de parts des fonds ayant réalisé des investissements dans le secteur photovoltaïque, ainsi que des défaillances du dispositif de conformité et de contrôle interne de la société de gestion ;
Considérant que la gravité des manquements retenus est avérée ; qu’il convient toutefois de prendre également en considération, d’une part, l’absence de plaintes des porteurs de parts des fonds ayant participé, en 2008 et 2009, aux décisions d’investissement examinées, qui ne paraissent pas avoir entraîné de pertes financières significatives, d’autre part, les mesures prises par VIVERIS MANAGEMENT pour remédier aux dysfonctionnements constatés et améliorer sensiblement les procédures internes ;
Considérant que sera prononcée, à l’encontre de VIVERIS MANAGEMENT, une sanction pécuniaire de 200 000 euros ; que la publication de la présente décision ne risque ni de perturber gravement les marchés financiers ni de causer un préjudice disproportionné à la mise en cause ; qu’elle sera donc ordonnée sous une forme laissant apparaître le nom de la personne morale sanctionnée, mais non celui des sociétés étrangères à la présente procédure ;
PAR CES MOTIFS,
Et après en avoir délibéré sous la présidence de Mme Claude Nocquet, par M. Jean-Claude Hanus et Mme France Drummond, membres de la 1ère section de la Commission des sanctions, en présence du secrétaire de séance,
DECIDE DE :
- prononcer à l’encontre de la société VIVERIS MANAGEMENT une sanction pécuniaire d’un montant de 200 000 € (deux cent mille euros) ;
- publier la présente décision sur le site Internet de l’AMF.