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Décisions

AMF, 4 septembre 2008, n° SAN-2008-21

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Membres :

Mme Cohen-Branche, M. Jalenques de Labeau, M. Ferri

Président :

M. Labetoulle

AMF n° SAN-2008-21

3 septembre 2008

La 1ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF »),

Vu le code monétaire et financier, notamment son article L. 621-15, ainsi que ses articles R. 621-5 à R. 621-7 et R. 621-38 à R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 321-21, 321-24, 321-76, 332-8, 332-32, 332-34, 332-43 et 332-52 dans leur rédaction en vigueur à l’époque des faits ;

Vu les règles de fonctionnement de la Banque Centrale de Compensation (LCH.Clearnet SA), approuvées, en tant que règles de fonctionnement d’une Chambre de compensation, par une décision de l’AMF en date du 2 mars 2004, notamment les articles de ces Règles 4-8-5-1, dans sa rédaction en vigueur à l’époque des faits, et 1-7-2-2 dont la rédaction est aujourd’hui reprise à l’article 1-8-8-1 ;

Vu l’Instruction IV.8-1 de LCH.Clearnet SA publiée le 2 mai 1997 relative aux délais de règlement et de livraison ;

Vu l’Instruction IV.8-3 de LCH.Clearnet SA publiée le 20 août 2004 relative aux procédures de régularisation des suspens sur les transactions effectuées sur les marchés de valeurs mobilières d’Euronext Paris, en vigueur à l’époque des faits ;

Vu le Livre I (« Règles harmonisées ») des règles de marché d’Euronext, notamment ses articles 4601 et 8104/1 ;

Vu l’Instruction aux affiliés n° 123 d’Euroclear France relative à la date de dénouement des opérations au comptant ;

Vu les notifications de griefs en date du 22 mai 2006 adressées à la banque X, représentée par son directeur général, M. [...], ainsi qu’à MM. A, C et B ;

Vu la décision du 21 juin 2006 du président de la Commission des sanctions désignant M. Joseph Thouvenel, membre de la Commission des sanctions, en qualité de rapporteur ;

Vu les observations écrites présentées par le cabinet Salans pour la banque X et pour MM. A, C et B et reçues à l’AMF le 10 juillet 2006 ;

Vu les procès-verbaux de l’audition de M. [...], responsable du contrôle des services d’investissement (ci-après « RCSI ») de la banque X, de celle de M. B et de celle de M. C, tous trois en date du 17 octobre 2006 ;

Vu les procès-verbaux de l’audition de M. A et de celle de la banque X, représentée par son directeur général, M. [...], tous deux en date du 21 novembre 2006 ;

Vu le premier rapport de M. Joseph Thouvenel en date du 12 septembre 2006 ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception portant convocation à la séance de la Commission des sanctions du 8 novembre 2007, auxquelles était annexé le rapport signé du rapporteur, adressées à la banque X, prise en la personne de son directeur général, M. [...], et à MM. A, C et B le 13 septembre 2007 ;

Vu les observations écrites communes en réponse au rapport du rapporteur présentées par le cabinet Salans pour la banque X et pour MM. A, C et B, reçues à l’AMF le 2 octobre 2007 ;

Commission des sanctions

Vu la décision de la Commission des sanctions en date du 8 novembre 2007 demandant au rapporteur de poursuivre ses diligences ;

Vu les lettres en date du 20 décembre 2007 par lesquelles le Rapporteur a invité les personnes mises en cause, le président de l’AMF et la société LCH.Clearnet SA à lui produire toutes observations utiles relatives notamment à l’interprétation et à la combinaison des dispositions relatives au délai de règlement-livraison et à la procédure de dénouement forcé ainsi qu’aux enjeux correspondants, à la fois pour les activités d’arbitrage et pour l’intégrité du marché ;

Vu les observations écrites produites par le président de l’AMF le 24 janvier 2008 et par le directeur général de LCH.Clearnet le 29 janvier 2008 ;

Vu les observations complémentaires communes produites par le cabinet Salans pour la banque X et pour MM. A, C et B, reçues à l’AMF le 30 janvier 2008 ;

Vu le rapport complémentaire de M. Joseph Thouvenel en date du 30 avril 2008 ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception, en date du 30 avril 2008, portant convocation à la séance de la Commission des sanctions du 12 juin 2008, auxquelles étaient annexés les rapports signés du rapporteur, adressées à la banque X, prise en la personne de son directeur général, M. [...], et à MM. A, C et B ;

Vu les observations en réponse au rapport complémentaire du rapporteur présentées par le Cabinet Salans pour la banque X, prise en la personne de son directeur général, M. [...], et pour MM. A, C et B, reçues à l’AMF le 20 mai 2008 ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception en date du 1er juillet 2008, avisant la banque X, prise en la personne de son directeur général, M. [...], et MM. A, C et B, que la séance de la Commission des sanctions, initialement prévue le 12 juin 2008, était reportée au 4 septembre 2008 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance du 4 septembre 2008 :

- M. Joseph Thouvenel en son rapport ;

- Mme Marianne Thiery, commissaire du Gouvernement, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- M. C ;

- M. A ;

- M. B ;

- M. [...], représentant de la Banque X, en qualité de directeur général et d’Administrateur, assisté de M. [...], RCSI de la Banque X ;

- Mes Muriel Goldberg-Darmon et Froment-Meurice, conseils de MM. C, A, B et de la Banque X ;

les personnes mises en cause ayant pris la parole en dernier.

I – FAITS ET PROCEDURE

A - Les faits

La banque X, société anonyme à conseil d’administration, est un établissement de crédit agréé par le Comité des Etablissements de Crédit et des Entreprises d’Investissement pour fournir les services d’investissement :

 de réception et transmission d’ordres pour le compte de tiers ;

 d'exécution d’ordres pour le compte de tiers ;

 de négociation pour compte propre ;

 de prise ferme et de placement.

L’établissement est également teneur de compte conservateur.

L’activité de négociation pour compte propre y est dirigée par M. A. Une mission de contrôle de l’AMF a porté sur le respect des obligations professionnelles de l’établissement dans le cadre du service de la négociation pour compte propre. Seules ont été examinées les interventions du desk « Risque arbitrage » lors de l’augmentation de capital de la société EURO DISNEY SCA (ci-après « EURO DISNEY ») dont la période de souscription était ouverte du 31 janvier au 8 février 2005 inclus. Le desk dont il s’agit est composé de deux personnes, MM. C et B.

C’est le 21 janvier 2005 que la société EURO DISNEY a annoncé le lancement de l’augmentation de capital approuvée par ses actionnaires lors de l’assemblée générale du 17 décembre 2004. Le prix de souscription a été fixé à 0,09 € par action. Plus de 253 millions d’euros étaient attendus, et ont été obtenus, de cette recapitalisation. Les actions nouvelles ont été immédiatement assimilées aux actions anciennes et ont été admises aux négociations sur Euronext Paris et Euronext Bruxelles le 23 février 2005.

La souscription des actions nouvelles était réservée par préférence aux détenteurs d’actions anciennes ou aux cessionnaires de leurs droits. Ils pouvaient souscrire :

 à titre irréductible : à raison de 13 actions nouvelles pour 5 actions anciennes ;

 à titre réductible : pour le nombre d’actions demandées en sus de celles leur revenant à titre irréductible, dans la limite du nombre d’actions à émettre non souscrites à titre irréductible et au prorata du nombre d’actions anciennes dont les droits auraient été utilisés à l’appui de la souscription à titre irréductible.

Pendant la période de souscription, des transactions sur le titre EURO DISNEY ont été effectuées pour des quantités importantes par la banque X. Celle-ci a notamment procédé à des ventes d’actions à découvert qui ont provoqué des suspens de règlement-livraison à la Chambre de compensation. Ce sont ces opérations qui ont conduit au contrôle mené par le Service du Contrôle des Prestataires et des Infrastructures de Marché de l’AMF. Le rapport de contrôle a été établi le 19 octobre 2005 et communiqué à la banque X, qui a produit des observations en réponse en date du 8 décembre suivant. Ce rapport et ces observations ont été examinés par la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, lors de sa séance du 25 avril 2006.

B - La procédure

Par lettres recommandées avec avis de réception en date du 22 mai 2006, le président de l’AMF, sur décision prise par la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l'AMF le 25 avril 2006, a notifié les griefs qui leur étaient reprochés :

 à la banque X, représentée par son directeur général, M. [...],

 à M. A, en sa qualité de responsable direct de l’activité de négociation pour compte propre à la banque X ;

 à MM. C et B, au titre de leurs fonctions au desk « Risque arbitrage »,

en les informant, d’une part, de la transmission des lettres de notification au président de la Commission des sanctions pour attribution et désignation d’un rapporteur, et d’autre part, du délai d’un mois dont ils disposaient pour présenter des observations écrites en réponse aux griefs énoncés dans ces lettres, ainsi que de la possibilité de se faire assister de toute personne de leur choix et de prendre connaissance des pièces du dossier dans les locaux de l’AMF.

Les notifications de griefs retiennent :

 En ce qui concerne le manquement relatif au délai de règlement-livraison :

Les notifications de griefs adressées aux quatre personnes mises en cause rappellent d’abord que la date de dénouement, par règlement des capitaux et livraison des titres, des transactions portant sur des titres de capital négociés sur Euronext et dont le règlement est stipulé au comptant a lieu « trois jours après la date de négociation ».

Les notifications de griefs relèvent en premier lieu que « le rapport de contrôle a mis en évidence des défauts de livraison répétés et persistants de la banque X consécutifs à des ventes effectuées pour compte propre sur le titre EURO DISNEY malgré la mise en place d’emprunts de titres ». Elles relèvent que, outre que ces emprunts de titres EURO DISNEY « étaient très insuffisants pour permettre à l’établissement d’honorer ses engagements », la banque X « a poursuivi ses ventes pour compte propre pour des quantités très importantes de titres alors même qu’elle n’arrivait plus à honorer les livraisons de titres consécutives aux ventes réalisées antérieurement ». Il en est résulté des défauts de livraison « permanents entre le 8 février et le 22 février 2005, les quantités de titres en cause ayant dépassé les cent millions de titres les 17 et 18 février 2005 ».

Elles relèvent en second lieu qu’à cette absence de respect des délais de règlement-livraison, s’est ajouté l’usage d’un « artifice » aux fins de bénéficier de délais supplémentaires. Plus précisément : « la banque X a effectué plusieurs transactions ayant eu pour effet d’apurer des suspens vis-à-vis du compensateur d’un premier membre de marché mais d’en créer de nouveaux vis-à-vis du compensateur d’un deuxième membre du marché ». Outre les opérations des 9 et 10 février 2005, les notifications de griefs mentionnent ainsi celles du 16 février 2005, immédiatement avant l’ouverture et la clôture des transactions : « le ‘desk arbitrage’ de la banque X a émis, à quelques secondes d’intervalle et auprès de membres du marché distincts, des ordres d’achat et de vente destinés à s’apparier entre eux et provoquant sur le marché règlementé (…) trois transactions portant respectivement sur 20, 30 et 36 millions de titres EURO DISNEY qui ont eu pour conséquence de multiplier par trois le volume de titres échangés sur EURO DISNEY ce jour là ». Pour conforter la qualification d’ « artifice » qu’elles retiennent pour ces opérations, les notifications de griefs citent l’enregistrement d’une conversation téléphonique en date du 16 février 2005 entre M. B et M. C, ce dernier étant alors en congé et absent de la banque X entre le 10 février et le 21 février 2005. Après que M. B a rapidement mentionné à son collègue absent « ce que j’ai fait, c’est ce qu’on avait prévu », M. C observe : « Donc là normalement, ça te recule de trois jours ».

Il est retenu à l’encontre des quatre personnes mises en cause que l’ensemble de ces opérations auraient contrevenu aux dispositions des articles 321-24, 332-32 et 321-76 du Règlement général de l’AMF ainsi qu’aux règles relatives au dénouement des opérations auxquelles renvoient ces dernières dispositions. Il est en outre retenu que l’artifice dont il est fait état pourrait être examiné au regard des dispositions de l’article 8104 des règles harmonisées d’Euronext.

 En ce qui concerne le manquement relatif au calendrier de l’augmentation de capital :

Les notifications de griefs adressées à la banque X et à MM. A et B relèvent que « la banque X a arrêté le nombre de titres à souscrire dans le cadre de la souscription à titre réductible après la date de clôture de la souscription, fixée au 8 février [2005] ». Elles font état de l’enregistrement d’une conversation téléphonique en date du 11 février 2005 entre M. B et M. C, alors en congé, qui « semble (…) établir qu’à cette date, l’établissement n’avait pas encore déterminé le nombre de titres à souscrire et envisageait de l’augmenter en le portant de 50 millions à 100 millions de titres ». Les notifications de griefs relèvent ensuite qu’ « en définitive, l’instruction de souscription transmise par la banque X à l’établissement centralisateur a porté effectivement sur 100 millions de titres ».

Il est retenu qu’en s’octroyant un délai supplémentaire, la banque X aurait indûment bénéficié d’un avantage par rapport aux autres investisseurs et que ces faits pourraient, tant en ce qui concerne la banque X que MM. A et B, être examinés au regard de l’article 321-76 du règlement général de l’AMF.

 En ce qui concerne le manquement tiré du défaut de contrôle des services d’investissement :

La notification de griefs adressée à la banque X relève que la société n’avait pas mis en place les procédures qui auraient permis d’alerter le RCSI sur les dysfonctionnements relevés à l’occasion de l’opération d’arbitrage dont il s’agit.

Plus précisément, elle relève :

 que le RCSI n’a été informé des incidents rencontrés « ni par l’équipe du ‘desk arbitrage’, ni par le back office, ni par le directeur de l’activité de négociation pour compte propre » ;

 que les procédures d’alerte, insuffisantes pour que le RCSI puisse prendre connaissance des dysfonctionnements entraînés par les ventes à découvert de titres EURO DISNEY, « n’auraient pas été conformes aux exigences de l’article 332-34 du Règlement général de l’AMF » ;

 que « les risques relatifs à la mise en oeuvre des processus de règlement-livraison n’auraient pas été évalués comme le prévoit l’article 332-43 du Règlement général de l’AMF ».

Elle retient que l’ensemble de ces faits révèle des déficiences dans le contrôle des services d’investissement mis en place à la banque X, susceptibles d’être examinés au regard des articles 321-21, 332-8 et 332-52 du même règlement général.

Copie des notifications de griefs a été transmise par le président de l’AMF au président de la Commission des sanctions, en application de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, par lettre du 31 mai 2006.

Le président de la Commission des sanctions a désigné le 21 juin 2006 M. Joseph Thouvenel en qualité de rapporteur. Celui-ci en a avisé la banque X et MM. A, C et B par lettres recommandées avec avis de réception en date 28 juillet 2006, en leur rappelant la possibilité d’être entendu, à leur demande, dans les locaux de l’AMF, en application du I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Des observations écrites communes ont entre-temps été présentées pour la banque X et pour MM. A, C et B et ont été reçues à l’AMF le 10 juillet 2006.

M. Joseph Thouvenel a entendu successivement, à leur demande :

 le 17 octobre 2006, M. [...], RCSI de la banque X, en tant que témoin, puis M. B et enfin M. C ;

 le 21 novembre 2006, M. A puis la banque X représentée par M. [...].

La banque X, prise en la personne de M. [...], son directeur général, et MM. A, C et B ont été convoqués à la séance du 8 novembre 2007 par lettres recommandées avec avis de réception en date du 13 septembre 2007 auxquelles était joint le rapport du rapporteur.

Des observations écrites communes en réponse au rapport du rapporteur ont été présentées par les quatre personnes mises en cause. Elles ont été reçues à l’AMF le 2 octobre 2007.

A l’issue de sa séance du 8 novembre 2007, la Commission des sanctions a estimé ne pas être en état de statuer et a ordonné un supplément d’instruction. Conformément aux motifs de cette décision, le Rapporteur a invité, le 20 décembre 2007, les personnes mises en cause, le président de l’AMF - pris en sa qualité de président de la Commission spécialisée n° 1 du Collège qui a décidé la notification des griefs - et la société LCH.Clearnet SA - prise en sa qualité d’auteur des textes relatifs à la procédure de dénouement forcé - à lui produire par écrit toutes observations utiles relatives à l’interprétation et à la combinaison des dispositions relatives au délai de règlement-livraison et à la procédure de dénouement forcé, aux enjeux correspondants, à la fois pour les activités d’arbitrage et pour l’intégrité du marché, ainsi que des indications sur les règles en vigueur et les pratiques suivies sur d’autres marchés d’instruments financiers comparables.

Le président de l’AMF a produit des observations, en réponse à cette invitation, par courrier du 24 janvier 2008. Le directeur général de LCH.Clearnet SA a produit les siennes par courrier du 29 janvier suivant. Des observations complémentaires communes ont été produites pour la banque X et pour MM. A, C et B ; elles ont été reçues à l’AMF le 30 janvier 2008.

Le 30 avril 2008, M. Joseph Thouvenel a déposé son rapport complémentaire.

La banque X, prise en la personne de M. [...], son directeur général, et MM. A, C et B ont été convoqués à la séance du 12 juin 2008 par lettres recommandées avec avis de réception en date du 30 avril 2008 auxquelles était joint le rapport complémentaire du rapporteur, ainsi que son premier rapport.

Des observations écrites communes en réponse au rapport complémentaire du rapporteur ont été présentées par les quatre personnes mises en cause. Elles ont été reçues à l’AMF le 20 mai 2008.

La banque X, prise en la personne de M. [...], son directeur général, et MM. A, C et B ont été avisés par lettres recommandées avec avis de réception en date du 1er juillet 2008, que la séance de la Commission des sanctions, initialement prévue le 12 juin 2008, était reportée au 4 septembre 2008.

II – SUR LES OBSERVATIONS DES MIS EN CAUSE

A – En ce qui concerne le manquement relatif au délai de règlement-livraison

Considérant que, pour leur défense commune, la banque X et MM. A, C et B font valoir dans leurs observations écrites :

 à titre liminaire, que l’opération d’arbitrage dont il leur est fait grief, réalisée à l’occasion de l’augmentation de capital d’EURO DISNEY avec maintien du droit préférentiel de souscription, « est une opération usuelle au sein de l’activité ‘Arbitrage technique’ de la banque X, tant en termes de risques qu’en termes de montants » et que si elle « s’est finalement soldée par un profit, elle aurait aussi bien pu générer, selon les conditions du marché, une perte importante » ; que cette opération d’arbitrage « ne s’est distinguée d’autres opérations que par la difficulté à obtenir les quantités souhaitées d’emprunt de titres » ; qu’il suit de là que le RCSI a pu légitimement ne pas être alerté, ni par la nature ni par la taille de l’opération ;

 qu’à défaut du dénouement à bonne date d’une position ouverte, LCH.Clearnet SA déclenche une procédure de régularisation des suspens dite « procédure de rachat » selon les termes de son Instruction IV.8-3 ; que ce déclenchement n’intervient qu’au « soir du septième jour de compensation suivant la date de dénouement théorique », ainsi qu’en dispose l’article 1er de cette Instruction ; qu’il suit de là que « seule l’opération conclue le 8 février pouvait donner lieu à une procédure de rachat » ; que cette procédure « a bien été mise en oeuvre, la banque X ayant reçu une notification de rachat de [la] position [vendeuse ouverte issue de cette opération] le 22 février au soir », conformément aux dispositions de l’article 3 de la même Instruction ;

 que la banque X a « activement cherché et obtenu des emprunts de titres même s’il s’avère qu’a posteriori, [elle] n’a pas obtenu les quantités d’emprunt suffisantes ».

Considérant qu’au cours de son audition, M. [...], représentant la banque X, a en outre déclaré : « Affirmer que nous avons fait tourner les positions pour éviter le rachat est inexact » ; qu’en ce qui concerne les difficultés rencontrées pour emprunter des titres EURO DISNEY, M. A a déclaré lors de son audition : « Cela fait vingt-trois ans que je fais ce métier d’arbitragiste. Pour moi, il est inconcevable que l’on ne trouve pas de l’emprunt de titres. Depuis cette affaire, il existe une nouvelle procédure » ; que, répondant à l’observation selon laquelle deux prestataires de services d’investissement avaient réagi à l’absence de contreparties prêteuses de titres EURO DISNEY, notamment en refusant les ordres de vente à découvert sur cette valeur, M. B a justifié la poursuite des opérations d’arbitrage par la banque X en déclarant : « Ces deux opérateurs s’adressent aux particuliers alors que la banque X a accès à la conservation des grosses banques qui nous permet, à un coût qui, en l’espèce, était plus élevé, de couvrir ses besoins » ; qu’enfin, M. [...], RCSI, a indiqué : « depuis les faits, concernant cette procédure de suivi des suspens et de la remontée des informations qui en découlent, j’ai notamment à ma disposition, quotidiennement, l’ensemble des suspens éventuels en cours à la Banque » ;

Considérant que, dans leurs observations écrites communes en réponse au premier rapport du rapporteur, la banque X et MM. A, C et B affirment à titre liminaire que le rapport du rapporteur ne développe « aucune analyse juridique ou technique », que leurs explications « ne sont donc aucunement remises en cause », que le Rapporteur n’apporte pas la preuve de la « mauvaise foi » qu’il attribue aux mis en cause et que son rapport « comprend de nombreuses erreurs tout en étant incomplet » ;

Considérant que, dans ces observations écrites, en ce qui concerne spécifiquement le manquement relatif aux délais de règlement-livraison, les personnes mises en cause font valoir :

 que « la situation de marché a (…) mis la banque X dans une situation totalement indépendante de sa volonté où des suspens ont été générés, malgré ses efforts continus de recherche d’emprunt [de titres] à prix élevé » ;

 que « la banque X n’a jamais procédé à aucune opération lui permettant d’éviter la procédure de rachat prévue par LCH.Clearnet et n’a donc pas usé d’artifices visant à bénéficier d’un délai supplémentaire de règlement-livraison » ;

 que l’opération d’arbitrage, « tout à fait usuelle pour la banque X (…) s’est finalement débouclée, sans atteinte à l’intégrité du marché [et] (…) a, en pratique, nettement favorisé la réussite de l’augmentation de capital d’EURO DISNEY, en absorbant une importante quantité des actions souscrites à titre irréductible et à titre réductible » ;

 qu’aucune imputabilité à titre personnel ne peut être retenue à l’encontre de MM. A, C et B ;

Considérant que dans leurs observations écrites communes reçues à l’AMF le 30 janvier 2008, les personnes mises en cause soutiennent que :

 de la lecture de l’article 322-32 du règlement général de l’AMF, il résulte qu’ « aucune sanction n’est attachée à l’absence de disponibilités en conservation propre des titres vendus à découvert » ;

 dans ses commentaires de ces dispositions, « l’AMF ne mentionne à aucun moment une sanction possible en cas d’échec de la recherche d’emprunts de titres » ;

 l’article 332-35 devenu 322-35 du même règlement général ne prévoit, parmi les conséquences de suspens constatés par le teneur de compte conservateur, que le recours à l’emprunt ou, le cas échéant, à la procédure de rachat forcé ;

 « en cas d’échec de cette recherche d’emprunt de titres, générateur de suspens, la sanction est alors la mise en oeuvre d’une procédure de rachat de la position afin de remédier à la situation au plus tard à J + 10, ou dès J + 4 si LCH.Clearnet l’estime nécessaire » ;

 en l’espèce, la banque X « a mis en oeuvre tous les moyens nécessaires pour trouver de l’emprunt de titres EURO DISNEY en quantité suffisante » ;

 il convient de rappeler que l’activité d’arbitrage est par nature génératrice de suspens involontaires, en raison notamment de la possibilité pour le prêteur de rappeler les titres prêtés ou de la réception tardive des titres empruntés ;

Considérant que, dans leurs observations écrites communes en réponse au rapport complémentaire du rapporteur, la banque X et MM. A, C et B font enfin valoir qu’il résulte clairement des observations du président de l’AMF que « l’obligation de recourir à l’emprunt de titres (…) [est] une obligation de moyens et non de résultat ».

B – En ce qui concerne le manquement relatif au calendrier de l’augmentation de capital

Considérant que, pour leur défense, la banque X et MM. A et B font valoir dans leurs observations écrites communes :

 que la date limite fixée par l’établissement centralisateur pour le dépôt des dossiers par les intermédiaires, soit le 16 février 2005, a bien été respectée par la banque X ;

 que « si la demande de réductibles a bien été ajustée après le 8 février 2005 (…), la banque X n’a pour autant bénéficié d’aucune information supplémentaire par rapport aux autres investisseurs et donc d’aucun avantage » ;

Considérant que, dans leurs observations écrites communes en réponse au rapport du rapporteur, la banque X et MM. A et B font valoir que l’article 321-76 du règlement général de l’AMF, qui est le seul mentionné dans les notifications de griefs, est « imprécis et d’une portée extrêmement large » et qu’il est « impossib[le] de poursuivre les mis en cause sur la base [de ce] seul article » ; qu’en tout état de cause, la date limite de dépôt des dossiers à l’établissement centralisateur ayant bien été respectée, la banque X doit être mise hors de cause ; que les mises en cause à titre personnel de MM. A et B ne sont ni motivées dans le rapport du rapporteur ni, en tout état de cause, justifiées ;

C – En ce qui concerne le manquement tiré du défaut de contrôle des services d’investissement

Considérant que, pour sa défense, la banque X a fait valoir dans ses observations écrites :

 que « ni le niveau de risque, ni le volume, ni le déroulement de l’opération ne justifiaient d’une alerte spécifique » ;

 qu’en ce qui concerne les suspens engendrés par l’opération d’arbitrage en cause, « les contrôles et alertes du back office ont joué leur rôle puisque les traders du desk concerné et le responsable du front office ont été alertés tant sur les suspens en cours que sur l’impatience croissante des contreparties » ;

Considérant que, dans ses observations écrites en réponse au rapport du rapporteur, la banque X affirme que si l’article 332-52 du règlement général de l’AMF dispose qu’au cas où des suspens se produiraient, « le responsable du contrôle des services d’investissement en vérifie les conditions et les délais d’apurement », ce texte « n’impose aucune saisine, ni aucune action particulière du responsable du contrôle des services d’investissement, si ce n’est [de] vérifier les conditions et les délais d’apurement » ;

III – SUR LES MOTIFS DE LA DECISION

A - En ce qui concerne le manquement relatif au délai de livraison

Considérant que l’article 321-24 du règlement général de l’AMF dispose à son 3ème alinéa : « Les services mentionnés à l’article 311-1 sont exercés avec diligence, loyauté, équité, dans le respect de la primauté des intérêts des clients et de l’intégrité du marché » ; que les services dont il s’agit comprennent notamment les services d’investissement pour lesquels la banque X était agréée à l’époque des faits ;

Considérant que l’article 332-32 du règlement général de l’AMF, dont les dispositions ont été reprises à l’article 322-32, a notamment pour objet de prévenir le défaut de livraison des instruments financiers ; qu’il dispose à cet effet : « La livraison d’instruments financiers consécutive à une opération effectuée par le prestataire habilité pour compte propre, en relation ou non avec des opérations réalisées par des clients, fait l’objet d’un contrôle systématique de disponibilités en conservation propre, afin d’éviter un défaut de livraison ou d’empêcher l’usage des instruments financiers inscrits au nom de tiers. Faute de disponibilités en conservation propre suffisantes, le teneur de compte conservateur recourt à un emprunt des instruments financiers en cause » ;

Considérant que l’article 321-76 du même règlement, dans sa rédaction applicable à l’époque des faits, laquelle a été complétée mais non remplacée par des dispositions plus douces, disposait : « Le prestataire habilité exerce ses activités dans le respect de l’ensemble des règles organisant le fonctionnement des marchés » ; que, parmi ces règles, l’article 4601 du livre I des Règles de marché d’Euronext procède lui-même par référence : « Les transactions effectuées sur un marché de titres d’Euronext sont compensées conformément aux règles de compensation. Leur règlement-livraison s’effectue via les systèmes désignés par Euronext » ; qu’aux termes de l’article 4-8-5-1 des règles de fonctionnement de la Banque centrale de compensation (LCH.Clearnet SA), approuvées, en tant que règles de fonctionnement d’une chambre de compensation, par une décision de l’AMF en date du 2 mars 2004 : « Le règlement de capitaux et la livraison des instruments financiers, entre les adhérents compensateurs entre eux d’une part, et entre les collecteurs d’ordres et les adhérents compensateurs d’autre part, a lieu dans un délai maximal à partir de la date de la transaction. Ce délai (…) est indiqué dans une instruction » ; que, pour les achats et ventes au comptant, comme en l’espèce, ce délai est fixé à trois jours par l’article 1er de l’Instruction IV.8-1 relative aux délais de règlement et de livraison ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1-7-2-2 des Règles de fonctionnement mentionnées plus haut, dont la rédaction est aujourd’hui reprise à l’article 1-8-8-1 : « Les suspens peuvent à tout moment faire l’objet d’un rachat ou d’une revente à l’initiative de LCH.Clearnet SA. Ce rachat ou cette revente est réalisée conformément aux procédures de rachats ou de reventes telles que définies dans une instruction, aux risques et aux frais de l’adhérent compensateur défaillant » ; qu’aux termes de l’article 1er de l’instruction IV.8-3 relative aux procédures de régularisation des suspens sur les transactions effectives sur les marchés de valeurs mobilières d’Euronext Paris, en vigueur à l’époque des faits, dont le contenu est aujourd’hui repris à l’article 1er de l’Instruction I.8-2 : « LCH.Clearnet SA initie un rachat en vue de dénouer toute position ouverte vendeuse (…) le soir du septième jour de compensation suivant la date de dénouement théorique » ; que l’article 4 de cette Instruction précise : « le soir du septième jour de compensation suivant la date de dénouement théorique (…), l’adhérent compensateur vendeur qui détient un suspens et l’adhérent compensateur acheteur correspondant reçoivent une confirmation [les] informant que la procédure de rachat sera engagée » ;

1. - Sur la portée respective des délais fixés, d’une part, par l’Instruction IV.8-1 de LCH.Clearnet SA relative aux délais de règlement et de livraison et, d’autre part, par son Instruction IV.8-3 relative aux procédures de régularisation des suspens sur les transactions effectives sur les marchés de valeurs mobilières d’Euronext Paris

Considérant que les dispositions relatives à la procédure de rachat que LCH.Clearnet SA a la faculté de déclencher « le soir du septième jour de compensation suivant la date de dénouement théorique » - comme d’ailleurs celles relatives à la pénalité de retard applicable à tout adhérent compensateur dont la position nette n’a pas donné lieu à règlement des capitaux ou livraison des titres dans le délai de trois jours - se situent dans le cadre exclusif des relations entre la Chambre de compensation et ses adhérents ; qu’en revanche, la fixation d’un délai à partir de la date de la transaction pour la livraison des instruments financiers - lequel, en l’état actuel des textes, est de trois jours - a été édictée par le régulateur directement dans l’intérêt du marché, pour en préserver la fluidité et prévenir les suspens ; que, contrairement à ce que soutient la banque mise en cause, les opérations d’arbitrage, dont le déroulement n’est pas incompatible avec le respect de cette règle, ne sauraient en être exonérées, d’une façon qui au demeurant porterait atteinte à l’égalité des conditions d’intervention des différents opérateurs sur le marché ; que, dès lors, un dépassement du délai de livraison peut - notamment dans le cas d’un prestataire habilité opérant pour compte propre - constituer un manquement dans les conditions précisées ci-après, alors même que les conditions nécessaires à la mise en oeuvre par la Chambre de compensation de la procédure de dénouement forcé ne sont pas remplies ;

2. - Sur les principes applicables à la caractérisation du manquement relatif au délai de livraison

Considérant que s'il appartient à la commission de tenir compte, le cas échéant, des aléas qui ont pu déjouer les prévisions normales d'un donneur d'ordres, le dépassement du délai de livraison est passible d'une sanction disciplinaire dans le cas où le donneur d'ordre a pris des positions vendeuses sans disposer de l’assurance raisonnable de pouvoir, notamment par le recours à des emprunts de titres, procéder en temps voulu à la livraison des instruments financiers correspondants ;

3. - Sur l’application de ces principes à l’espèce

3.1. - Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la banque X a rencontré des difficultés lors de l’exécution d’une opération d’arbitrage pour compte propre consistant à acheter des droits de souscription aux actions EURO DISNEY à émettre en février 2005 et à vendre à découvert par anticipation des actions existantes - afin de tirer parti d’éventuelles différences entre, d’une part, le prix de revient des actions qu’elle escomptait obtenir lors de l’augmentation de capital en cours, lequel comprend, outre des frais d’intermédiation, le prix d’achat des droits de souscription et le prix de souscription des actions nouvelles et, d’autre part, le prix de vente sur le marché des actions existantes auquel il y a lieu d’ajouter le coût de l’emprunt des titres nécessaire au respect du délai de livraison - ;

Considérant que la banque X s’est en effet rapidement heurtée à une pénurie de contreparties prêteuses de titres EURO DISNEY existants ; qu’ainsi, si elle a encore pu trouver à emprunter 17 250 000 titres au cours des journées des 3 et 4 février 2005, ce n’est ensuite que le 21 février suivant qu’elle a pu procéder à un nouvel emprunt de titres, pour un montant d’ailleurs extrêmement limité (20 868 titres) ; qu’au plus tard à compter du 4 février, compte tenu tant de l’assèchement des possibilités d’emprunts que, corrélativement, de la très forte hausse des taux auxquels avaient été réalisés les derniers emprunts, la banque X ne disposait plus de l’assurance raisonnable de pouvoir procéder en temps voulu à la livraison des titres qu’elle vendrait à découvert ; qu’elle n’en a pas moins poursuivi ses achats de droits de souscription jusqu’au dernier jour de leur cotation, soit le 8 février 2005, augmentant de plus de 35 % entre ces deux dates sa position acheteuse en droits de souscription ainsi que, corrélativement sa position vendeuse de titres existants ; qu’à ce titre déjà, le manquement tenant au dépassement du délai de livraison fixé par l’Instruction IV 8-1 de LCH.Clearnet SA est caractérisé ;

Considérant qu’en outre, la banque X, qui avait ainsi acquis la capacité de souscrire pour plus de 80 millions d’actions nouvelles à titre irréductible, a demandé à souscrire à titre réductible pour un nombre plus important encore d’actions, et s’est en conséquence, pour faire face à l’accroissement de sa position acheteuse d’actions nouvelles, mise en position nette vendeuse de plus de 130 millions de titres anciens au 17 février 2005, soit à la veille de l’annonce du résultat de son augmentation de capital par la société EURO DISNEY ; que ce montant représentait 12 % du capital de la société avant augmentation de capital ;

3.2. - Considérant, de surcroît, qu’il ressort des pièces du dossier que les 9, 10 et 16 février 2005, la banque X a demandé et obtenu l’exécution d’ordres d’achat qui se sont appariés à des ordres de vente pour des quantités et des prix identiques, qu’elle avait elle-même transmis à quelques secondes d’intervalle à des membres négociateurs distincts ; que l’exécution de ces ordres a eu pour objet - ainsi d’ailleurs que le confirme l’enregistrement d’une conversation téléphonique entre les deux personnes composant le « desk arbitrage » - et pour effet - et alors même que, comme le soutiennent les mis en cause, elle aurait été sans incidence sur la procédure de dénouement forcé prévue par l’Instruction IV.8-3 de LCH.Clearnet SA - d’apurer des suspens vis-à-vis d’un premier compensateur pour en créer d’autres vis-à-vis d’un second, masquant ainsi la méconnaissance du délai de livraison de trois jours ; que ces opérations, ont revêtu un caractère artificiel au sens de l’article 8104/1 du livre I des règles de marché d’Euronext ;

3.3. - Considérant que le manquement ainsi avéré au délai de livraison est également imputable tant à M. C qu’à M. B, en raison de leur participation active à l’opération d’arbitrage dont il s’agit, ainsi que, plus généralement, de leur capacité d’initiative sur les opérations d’arbitrage de la banque X ; que M. A, responsable de l’activité de négociation pour compte propre, n’a pas pris de mesures pour empêcher les comportements décrits plus haut, ni pour les faire cesser une fois qu’il en a été informé ; que le manquement lui est par suite également imputable à titre personnel.

B - En ce qui concerne le manquement relatif au calendrier de l’augmentation de capital

Considérant, en ce qui concerne le respect du calendrier de cette opération, que sont applicables les dispositions précitées des articles 321-24 et 321-76 du règlement général de l’AMF ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les mis en cause, les notifications de griefs ainsi d’ailleurs que le premier rapport du rapporteur leur ont fourni une indication claire de la nature du manquement reproché et des faits invoqués à cet égard, sur lesquels ils ont pu exercer les droits de la défense ; que parmi « l’ensemble des règles organisant le fonctionnement du marché » que l’article 321-76 du règlement général de l’AMF fait obligation aux prestataires habilités de respecter dans l’exercice de leur activité, figurent celles de l’article 321-24 de ce règlement ;

Considérant qu’il n’est pas contesté que la banque X a arrêté le montant de sa propre souscription à titre réductible au-delà de la date de clôture de la souscription, qui avait été clairement et suffisamment communiquée au marché ; qu’elle n’a en conséquence pas respecté l’obligation qui lui est faite, ainsi qu’à tous les prestataires habilités, d’agir avec équité dans le respect de l’intégrité du marché ; que le manquement est par suite constitué ; que la circonstance, à la supposer établie, qu’elle n’aurait en fait pas mis à profit le retard dont elle s’est accordé à elle-même le bénéfice pour ajuster le montant de sa souscription à titre réductible en fonction d’informations nouvelles, dont les autres actionnaires n’auraient pas disposé, est sans influence sur le principe de la caractérisation du manquement ;

Considérant qu’il résulte de l’Instruction, et notamment de la transcription de l’enregistrement d’une conversation téléphonique en date du 11 février 2005 entre MM. B et C, que M. B a participé activement à la fixation tardive du montant de la souscription à titre réductible de la banque X à l’augmentation de capital d’EURO DISNEY ; que M. A, responsable direct de l’activité de négociation pour compte propre, veillait à ce que la taille des opérations d’arbitrage n’excède pas les limites fixées par l’actionnaire de la banque X ; qu’à ce titre, il a nécessairement exercé son contrôle, ou aurait dû l’exercer, sur la décision de porter à 100 millions de titres le montant de la souscription à titre réductible initialement envisagée au niveau de 50 millions ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le manquement est également imputable à MM. A et B ; qu’il ne peut en revanche être imputé à M. C, alors en congé ;

C - En ce qui concerne le manquement tiré du défaut de contrôle des services d’investissement

Considérant que l’article 332-34 du règlement général de l’AMF dispose : « Tout mouvement d’instruments financiers en conservation non effectué dans les délais fixés par les règles des marchés ou des systèmes de règlement-livraison est détecté immédiatement par le système d’information et porté à la connaissance du service concerné aux fins de régularisation » ; qu’aux termes de l’article 332-52 du même règlement général : « Le responsable du contrôle des services d'investissement s'assure de l'efficacité des procédures de gestion prévisionnelle des flux d'instruments financiers et d'espèces destinées à prévenir les suspens et les infractions aux prescriptions du 2° de l'article 332-4. / Au cas où néanmoins des suspens se produiraient, le responsable du contrôle des services d'investissement en vérifie les conditions et les délais d'apurement ».

Considérant que quel qu’ait été l’échange d’informations entre le back office et le front office sur le déroulement de l’opération d’arbitrage, il ne saurait justifier le défaut de saisine du RCSI lorsqu’ont été constatés l’extrême difficulté d’obtenir des prêts de titres, et le coût de ceux-ci, et qu’il a été néanmoins décidé de poursuivre l’opération et d’en accroître la taille ; que le manquement relatif à l’article 332-34 du règlement général est ainsi caractérisé ;

D - En ce qui concerne les sanctions et la publication de la décision

1. - Considérant qu’aux termes du II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier : « Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements » ;

Considérant qu’en raison de son incidence sur la fluidité et l’intégrité du marché, un manquement relatif à un dépassement du délai de livraison provoqué par la prise de positions vendeuses en dépit de l’absence de l’assurance raisonnable de pouvoir procéder à la livraison en temps voulu des instruments financiers correspondants, revêt un caractère particulier de gravité ; qu’en l’espèce la façon dont la banque X a accru après le 4 février 2005 la taille de l’opération d’arbitrage qu’elle avait engagée est spécialement critiquable ; qu’il y a lieu, en revanche, pour déterminer les sanctions encourues, de tenir compte de ce qu’antérieurement à la présente décision - prononcée, ainsi qu’il a été dit, après un supplément d’instruction - la portée exacte de la règle relative au délai de livraison et la combinaison de celle-ci avec les dispositions relatives à la procédure de dénouement forcé des transactions pouvaient ne pas apparaître pleinement ;

2. - Considérant que le V de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier dispose que « la commission des sanctions peut rendre publique sa décision dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées » ; que, par ces dispositions, le législateur a entendu permettre à la commission de tenir compte des exigences d’intérêt général relatives à la loyauté du marché, à la transparence des opérations et à la protection des épargnants qui fondent son pouvoir de sanction ainsi que de l’intérêt qui s’attache pour la sécurité juridique de l’ensemble des opérateurs à ce que ceux-ci puissent, en ayant accès à ses décisions, connaître son interprétation des règles qu’ils doivent observer ;

Considérant qu’alors que la publication de la présente décision ainsi que de la décision en date du 8 novembre 2007 ordonnant un supplément d’instruction n’est pas de nature à causer aux personnes mises en cause un trouble manifestement disproportionné avec les manquements relevés à leur encontre et qu’un intérêt général s’attache à la bonne connaissance de règles importantes pour le fonctionnement du marché et susceptibles d’intéresser de nombreux intervenants sur le marché, il y lieu de faire usage des dispositions précitées du V de l’article L. 621-15 ;

PAR CES MOTIFS,

Et après en avoir délibéré sous la présidence de M. Daniel Labetoulle, par Mme Marielle Cohen-Branche et M. Guillaume Jalenques de Labeau, membres de la 1ère section de la Commission des sanctions, et par M. Alain Ferri, membre de la 2ème section de la Commission des sanctions, siégeant en application de l’article R. 621-7. I du code monétaire et financier, en présence du secrétaire de séance,

DECIDE DE :

- prononcer un avertissement et une sanction pécuniaire de 300 000 € (trois cent mille euros) à l’encontre de la banque X ;

- prononcer un avertissement et une sanction pécuniaire de 25 000 € (vingt cinq mille euros) à l’encontre de M. A ;

- prononcer un avertissement et une sanction pécuniaire de 20 000 € (vingt mille euros) à l’encontre de M. B ;

- prononcer un avertissement et une sanction pécuniaire de 15 000 € (quinze mille euros) à l’encontre de M. C ;

- publier la présente décision ainsi que celle du 8 novembre 2007 au « Bulletin des annonces légales obligatoires », ainsi que sur le site Internet et dans la revue de l’Autorité des marchés financiers.