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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-6, 14 janvier 2021, n° 19/14157

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

MMA Iard (SA), MMA Iard Assurances Mutuelles (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Noel

Conseillers :

Mme Vella, Mme Allard

TI Brignoles, du 5 avr. 2019, n° 18-0005…

5 avril 2019

Exposé des faits et procédure

Le 18 septembre 2016, le véhicule conduit par Mme Isabelle C., assuré auprès des MMA a été endommagé à la suite d'un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par Mme Mallaury C..

Par acte du 23 mars 2018, la société MMA Iard et les MMA iard assurances mutuelles ont fait assigner Mme C. devant le tribunal d'instance de Brignoles, pour obtenir l'indemnisation des préjudices matériels à hauteur de 8170,12€ en principal, assortis des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 juillet 2017.

Mme C. a demandé au tribunal de dire qu'elle n'est pas la seule responsable des préjudices subis et à titre subsidiaire elle a sollicité un échelonnement de sa dette sur 24 mois.

Selon jugement du 5 avril 2019, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a :

- condamné Mme C. à payer à la société MMA Iard et à la société MMA iard assurances mutuelles la somme de 8170,12€ en réparation du préjudice matériel ;

- débouté Mme C. de ses demandes ;

- condamné Mme C. à payer à la société MMA Iard et à la société MMA iard assurances mutuelles la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 5 septembre 2019, dont la régularité et la recevabilité, ne sont pas contestées, Mme C. a relevé appel général de ce jugement en ce qu'il l'a :

- condamnée à payer à la société MMA Iard et à la société MMA iard assurances mutuelles la somme de 8170,12€ en réparation du préjudice matériel ;

- condamnée à payer la société MMA Iard et à la société MMA iard assurances mutuelles la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance,

- débouté de sa demande de paiement de délai au motif qu'elle n'aurait à justifier de ses charges mensuelles à régler.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 3 novembre 2020.

Prétentions et moyens des parties

Selon ses conclusions du 28 novembre 2019, Mme C. demande à la cour :

' réformer le jugement qui l'a déboutée de sa demande de paiement et qui l'a condamnée au paiement de la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' constater qu'elle justifie de sa situation financière ;

' constater qu'elle est débitrice malheureuse de bonne foi ;

' lui allouer les plus larges délais de paiement pour s'acquitter de la somme due ;

' statuer ce que de droit sur les dépens.

Elle ne conteste pas le montant de la condamnation à payer à hauteur de 8170,12€, mais sollicite des délais de paiement pour s'acquitter de ce montant sur le fondement de l'article 1345-5 du code civil. Elle justifie que son avis d'imposition au titre des revenus sur l'année 2018fait état d'un revenu mensuel de 997,16€ alors que ses charges mensuelles fixes s'établissent à 542,74€. Elle ne peut sans s'endetter faire face au paiement et demande à la cour de lui octroyer des délais de paiement.

Par conclusions du 7 février 2020, la société MMA Iard et à la société MMA iard assurances mutuelles demandent à la cour :

à titre principal

' juger que l'appel de Mme C. qui n'entre pas dans les prévisions de l'article 542 du code de procédure civile est irrecevable ;

à titre subsidiaire

' débouter Mme C. de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

' confirmer le jugement en toutes ses dispositions

' juger que la somme de 8170,12€ sera assorti des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 juillet 2017 ;

' condamner Mme C. à leur payer la somme de 8170,12€ à compter de la mise en demeure du 5 juillet 2017 ;

en toute hypothèse

' la condamner au paiement d'une somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Elles exposent que le 18 septembre 2016, Mme C. était au volant d'un véhicule Citroën lorsqu'elle est venue heurter un véhicule BMW après avoir omis de marquer l'arrêt absolu un panneau stop, lequel véhicule BMW a percuté le véhicule mini Austin conduit par Mme C., assuré auprès des MMA. L'enquête a révélé que Mme C. qui n'était pas assurée, était sous l'emprise d'alcool et de stupéfiants. C'est après avoir vainement tenté d'obtenir le paiement du préjudice matériel, qu'elles ont été contraintes de l'assigner devant le tribunal d'instance.

Mme C. qui ne sollicite que des délais de paiement sur le fondement de l'article 1343-5 du Code civil poursuit une fin qui n'entre pas dans les prévisions de l'article 542 du code de procédure civile ; la jurisprudence ayant considéré qu'est irrecevable l'appel qui ne tend qu'à l'octroi de délai de grâce.

À titre subsidiaire, elles font observer que Mme C. a déjà obtenu les plus larges délais de paiement puisque depuis le 5 juillet 2017, elle n'a jamais donné suite aux réclamations le paiement amiable ni formulé aucune proposition de règlement depuis le jugement du 5 avril 2019 dont il est relevé appel. Elle ne saurait donc s'arroger des délais supplémentaires d'autant que sa situation est inchangée par rapport à celle qu'elle a présentée devant le premier juge.

L'arrêt est contradictoire, conformément à l'article 467 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

Sur la recevabilité de la demande

Par application de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation à son annulation par la cour d'appel.

Le principe selon lequel, l'appel qui ne tend qu'à l'octroi de délai de grâce est irrecevable ne s'applique pas lorsque cette demande d'échelonnement du paiement a été formulée devant le premier juge et qu'elle a été rejetée.

L'appel de Mme C. tendant à la réformation du jugement qui l'a déboutée de sa demande de délai de grâce est donc recevable.

Sur la demande de délai

Bien qu'appelante de l'intégralité des dispositions du jugement, devant la cour, Mme C. ne conteste ni le montant de sa dette à hauteur de 8170,12€ ni sa condamnation à paiement de somme en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit des MMA.

Par application de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération les besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Le juge du fond dispose d'un pouvoir souverain pour apprécier si des délais de grâce peuvent être accordés au débiteur.

Mme C. qui est née le 4 juin 1994 avait 22 ans lors de la survenue de l'accident et elle en a 26 à ce jour.

Elle produit des bulletins de salaire sur la période de septembre 2019 à janvier 2020, établissant qu'elle perçoit un salaire brut de 1.055,60€ et net de 797,74€, non soumis à prélèvement de l'impôt à la source, au titre d'un emploi de serveuse à temps partiel et sur 104h mensuelles.

Elle justifie de ses frais fixes mensuels de 542,74€ comprenant un crédit immobilier ainsi qu'un crédit à la consommation pour travaux immobiliers pour un montant cumulé de 269,12€, le reste étant constitué de frais fixes n'incluant ni la dépense alimentaire ni vestimentaire.

S'il est exact, comme le soutient la société MMA que depuis la mise en demeure du 5 juillet 2017, Mme C. n'a procédé à aucun paiement ni formulé aucune proposition d'étalement de sa dette, et que depuis le jugement du 5 avril 2019, dont appel, elle a admis être débitrice de la somme de 8170,12€, sans procéder ni à paiement ni à proposition d'étalement de sa dette, il se déduit des pièces versées que, confrontées à ses revenus, ses facultés de paiement sont minimes et que considération prise des besoins du créancier, sa demande de délai doit être accueillie à raison d'une somme mensuelle de 150€ sur 24 mois, la dernière mensualité réglant le solde total de sa dette, précision expresse et reprise au dispositif du présent arrêt qu'à défaut de règlement d'une seule mensualité l'intégralité de cette dette deviendra immédiatement exigible.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.

Mme C. qui est tenue à paiement supportera la charge des entiers dépens d'appel.

L'équité ne commande d'allouer aux MMA une indemnité au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La Cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur la demande de délais,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Accorde à Mme C. un délai de 24 mois pour s'acquitter de sa dette de 8170,12€ en principal outre intérêts et frais, par versements mensuels de 150€, le premier versement intervenant le 5 du mois suivant le présent arrêt devenu définitif et le dernier versement soldant l'intégralité de sa dette ;

- Dit qu'à défaut d'un seul paiement la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible ;

- Déboute la société MMA Iard et à la société MMA Iard assurances mutuelles de leur demande au titre de leurs propres frais irrépétibles exposés en appel ;

- Condamne Mme C. aux entiers dépens d'appel.