Cass. com., 15 mars 2011, n° 09-13.299
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
SCP Baraduc et Duhamel, SCP Delaporte, Briard et Trichet
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 29 septembre 1997, M. X... a cédé à la société Cerberus, aux droits de laquelle vient la société Siemens (le cessionnaire) 90 % des actions composant le capital de la société Litem (la société) ; que par une convention du même jour, conclue en présence de son épouse, Mme X..., il s'est engagé à garantir le cessionnaire de toute diminution de l'actif ou augmentation du passif résultant d'opérations de toute nature nées antérieurement au jour du transfert des actions Litem et qui n'auraient pas été suffisamment prises en compte, dans les comptes arrêtés au 31 décembre 1996 et dans l'arrêté en forme de bilan au 30 septembre 1997 ; que l'article 12 de cette convention prévoyait que " pour la mise en oeuvre des présentes garanties, sous peine de déchéance de tous droits, et afin que le cédant puisse faire valoir ses observations, le cessionnaire s'oblige à prévenir le cédant par lettre recommandée avec avis de réception, de toute vérification comptable ou sociale, de toute notification, injonction ou assignation ; ce courrier devra parvenir au cédant dans un délai de 15 jours au plus tard, suivant la réception de l'avis, de la notification ou de l'injonction ou de la signification " ; que par courrier du 6 décembre 2000, le cessionnaire a informé M. et Mme X... de l'envoi par l'administration fiscale d'un avis de vérification de comptabilité adressé le 16 octobre 2000 à la société ; qu'à la suite d'une lettre du 22 décembre 2000 les informant de la mise en oeuvre de la garantie, le cessionnaire a, par acte du 26 mars 2007, assigné les époux X... en paiement d'une certaine somme en application de la convention de garantie ; que ces derniers ont fait valoir qu'ils n'avaient pas été prévenus, dans le délai de 15 jours prévu par l'article 12 de la convention de garantie, de l'avis de vérification de comptabilité et que cette information tardive et négligente leur avait causé un préjudice et privait le cessionnaire du bénéfice de la garantie ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que pour condamner M. et Mme X... à payer une certaine au titre de la convention de garantie, l'arrêt retient que même si le courrier du 6 décembre 2000 ne respecte pas le délai de quinzaine prévu par l'article 12 de la convention de garantie de passif, il convient de relever que les opérations de vérification de la comptabilité de la société se sont poursuivies du 31 octobre 2000 jusqu'au 22 mai 2001, date de la réunion de synthèse et que M. et Mme époux X... ne sont pas fondés à soutenir qu'ils ont été privés de toute possibilité de contestation ou de discussion avec l'administration fiscale ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors que l'article 12 de la convention de garantie de passif sanctionnait le non-respect du délai d'information du cédant par la déchéance de tous droits au titre de ladite convention, la cour d'appel a méconnu la loi des parties et violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134, alinéas 1et et 3, du code civil ;
Attendu que si la règle selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle, elle ne l'autorise pas à porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus entre les parties ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient qu'en tout état de cause, les conventions doivent être exécutées de bonne foi et que M. et Mme X... qui se sont engagés, aux termes de l'article 11 de la convention de garantie de passif, à indemniser le cessionnaire « en raison de l'appauvrissement subi par Litem en cas de rappels définitifs d'impôts, de cotisations para-fiscales et sociales dont la cause ou l'origine résulte de faits nés antérieurement à ce jour » et qui ont déclaré que la société était à jour du paiement de l'ensemble de ses dettes fiscales ne pouvaient se prévaloir de la déchéance de garantie qu'ils invoquaient, au regard de leurs agissements frauduleux à l'origine directe et exclusive du passif fiscal ayant donné lieu aux notifications de redressement des 22 décembre 2000 et 12 septembre 2001 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application, le second par fausse application ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.