Cass. com., 14 décembre 2010, n° 09-68.868
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP de Chaisemartin et Courjon
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 5 mars 2004, Mme X..., M. Y... et M. Z... (les cédants), agissant tant en leur nom personnel qu'au nom et pour le compte des autres actionnaires, ont cédé à M. A..., qui s'est substitué la société RFIL (le cessionnaire), la totalité des actions représentant le capital de la société Etablissements Giorgi frères (la société), moyennant un prix stipulé révisable en fonction du bilan arrêté au 30 avril 2004 ; que les cédants ont consenti une garantie d'actif et de passif établie sur la base des comptes arrêtés à cette date et assortie d'une garantie bancaire à première demande ; que le prix global et définitif a été fixé et le solde payé le 24 décembre 2004 ; qu'après avoir indiqué aux cédants que des charges supplémentaires apparues dans les comptes pour des événements antérieurs au 30 avril 2004 le conduisaient à mettre en oeuvre la garantie d'actif et de passif, le cessionnaire a mis en jeu les garanties à première demande ; que les cédants ayant demandé en justice la restitution des sommes payées à ce titre, le cessionnaire a reconventionnellement formulé diverses réclamations ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour écarter la réclamation fondée sur la dépréciation des bennes figurant à l'actif du bilan comme travaux en cours, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les cédants ont informé le cessionnaire des difficultés de commercialisation de ces matériels et proposé l'inscription d'une provision pour dépréciation, que cette proposition ne constitue pas une reconnaissance du bien-fondé de la réclamation du cessionnaire, que celui-ci, qui n'a réclamé ni l'inscription de ladite provision dans les comptes ni la mention de la dépréciation dans l'annexe avant la fixation définitive du prix au mois de décembre 2004, était parfaitement informé des difficultés qu'il invoque aujourd'hui et que par conséquent il n'y a pas lieu de mettre en jeu la garantie pour un événement connu et accepté ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les cédants s'étaient engagés à garantir le cessionnaire de tout préjudice que la société viendrait à supporter par l'effet de la diminution d'un poste d'actif ou de l'augmentation d'un poste de passif dans les comptes au 30 avril 2004, dès lors que la cause ou l'origine de cette diminution d'actif ou de cette augmentation de passif serait antérieure à cette date, sans distinguer selon que le cessionnaire avait ou non connaissance de cette cause ou origine, la cour d'appel a méconnu la loi des parties et violé le texte susvisé ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt relève encore que la lettre du 24 juin 2005, par laquelle la société Vicorep, chargée de la commercialisation des bennes, indiquait au cessionnaire avoir été conduite à la conclusion que les bennes étaient en dehors des attentes du marché, est impropre à démontrer que la dévalorisation était avérée au 30 avril 2004 et retient que la preuve que la dépréciation était acquise avant le 30 avril 2004 ne ressort pas des éléments du dossier ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la cause ou l'origine de la dépréciation de cet élément d'actif était antérieure à la date de référence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour écarter la demande fondée sur l'insuffisance de l'information relative aux engagements de retraite pesant sur la société, l'arrêt retient que c'est à tort que le cessionnaire soutient que ces engagements auraient dû être provisionnés et relèvent de la garantie de passif ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions devant la cour d'appel, le cessionnaire admettait qu'en l'absence d'obligation de provisionner de tels engagements au bilan, ceux-ci ne relevaient pas de la garantie de passif et, soutenant que leur montant aurait dû figurer dans l'annexe établie par le commissaire aux comptes, invoquait ce manquement au titre d'une action en réduction du prix, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen, qui est recevable :
Vu les articles 1134 et 1149 du code civil ;
Attendu que pour condamner les cédants à payer une certaine somme au titre du préjudice né de la non-conformité de l'installation électrique, l'arrêt retient que la demande formée à ce titre est fondée à hauteur de la somme de 56 684,31 euros hors taxes correspondant au montant des travaux sur une valeur en mars 2004 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'évaluation du préjudice doit être faite au jour où le juge rend sa décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement en ce que celui-ci avait dit mal fondée la demande tendant à mettre en jeu la garantie d'actif et de passif au titre des bennes et des engagements de retraite et en ce qu'il a condamné les cédants à payer au cessionnaire une somme de 37 184,31 euros au titre de la non-conformité de l'installation électrique, l'arrêt rendu le 29 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée.