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Décisions

Cass. com., 18 décembre 2019, n° 18-12.536

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP Spinosi et Sureau

Lyon, du 21 déc. 2017

21 décembre 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que, par acte du 11 mars 2011, la société Financière de la santé (la cessionnaire) a acquis l'intégralité des titres de la société Financière du cheval vert détenus, notamment, par T... L... et M. D... ; que ces derniers (les garants) ont conclu avec la cessionnaire, le même jour, une convention de garantie d'actif et de passif ; qu'une partie du prix de cession a été stipulée payable à terme, sous réserve de l'absence de compensation avec la garantie souscrite ; que, reprochant à la société cessionnaire de n'avoir pas réglé, à la date prévue, l'intégralité du prix de vente, T... L... et M. D... l'ont assignée en paiement ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu que T... L... et M. D... font grief à l'arrêt de rejeter toutes leurs demandes et de les condamner solidairement à payer à la société Financière de la santé la somme de 39 783,84 euros au titre de la garantie des redressements fiscaux alors, selon le moyen, que, selon les termes clairs et précis de l'article 6.6.1 de la convention de garantie d'actif et de passif, l'information des cédants constitue une condition de « mise en oeuvre » et d'« exercice » de la garantie ; qu'en jugeant cependant qu'aux termes de cet article, la violation de l'obligation d'information n'était pas sanctionnée par une déchéance, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la convention, violant ainsi l'article 1192 du code civil ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, des termes de l'article 6.6.1 de la convention de garantie d'actif et de passif, que leur ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu que la violation de l'obligation d'information mise à la charge de la société cessionnaire n'était pas sanctionnée par la déchéance de la garantie ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour ordonner la compensation, à concurrence de la somme de 71 368,98 euros, entre la dette de la société cessionnaire au titre du prix de cession et celle des garants au titre de la convention de garantie relative aux conséquences d'un litige ayant opposé la société Médiane, filiale de la société Financière du cheval vert, au centre hospitalier de Pierrefeu (le CHSP), l'arrêt, après avoir relevé que les parties ne s'opposaient pas sur ce montant mais que la société cessionnaire soutenait devoir en être indemnisée au titre de la garantie d'actif et de passif tandis que MM. L... et D... estimaient, au contraire, qu'il était en leur faveur, retient que le décompte des garants édité le 22 février 2016 doit conduire à retenir cette somme de 71 368,98 euros comme devant être imputée sur le crédit vendeur au titre de la garantie d'actif et de passif ;

Qu'en statuant par de tels motifs, alors qu'elle avait constaté que les garants avaient, par voie de compensation avec la dette de la société cessionnaire au titre du crédit vendeur, préalablement payé la somme de 181 862,96 euros à la suite de la condamnation prononcée dans ce litige contre la société Médiane en première instance, majorée des frais et honoraires correspondants, et relevé que l'article 6.8 de la convention de garantie stipulait qu'« en cas de remise en cause de ladite décision par une autre décision de justice rendue en dernier ressort, ayant pour effet un encaissement de sommes au profit de la filiale au titre du litige susvisé, le montant des sommes préalablement versées par les garants leur sera remboursé », ce dont il se déduisait que ce n'est pas la somme restituée par le CHSP à la société Médiane, nette de son incidence fiscale, en raison de l'infirmation du jugement en appel, soit 110 493,78 euros, qui devait être réincorporée à la dette de la société cessionnaire mais celle, précitée, de 181 862,96 euros, et que la différence entre ces deux montants, 71 368,98 euros, devait être portée au crédit des garants et non de la cessionnaire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que, pour arrêter les comptes entre les parties, l'arrêt retient que le tableau produit par les garants fait état d'un solde du prix de 0 euro avant l'intervention du jugement entrepris et que MM. L... et D... ne sont donc pas fondés à réclamer à ce titre un quelconque solde ;

Qu'en statuant ainsi, alors que tableau en question, intitulé « Détail du crédit vendeur - Résumé principal (hors intérêts) » ne révèle aucun solde de 0 euro entre les parties et mentionne, au contraire, d'un côté, un solde de 112 962,82 euros que la société cessionnaire estime avoir réglé en trop et, de l'autre, un solde de 8 434,66 euros dont les garants soutiennent être créanciers, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette « l'incident de pièces » formé par T... L... et M. D..., l'arrêt rendu le 21 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée.