Cass. 3e civ., 17 décembre 2008, n° 07-14.601
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cachelot
Avocats :
Me Foussard, SCP Yves et Blaise Capron
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 31 janvier 2007), que, par acte notarié du 21 septembre 1993, une société civile ayant pour objet l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation en vue de sa location a été constituée entre M. X... et son épouse Mme Y... ; qu'en 2005, Mme Y..., alors en instance de divorce, a demandé, sur le fondement de l'article 1869 du code civil, l'autorisation de se retirer de cette société, dénommée WB Immobilier (la SCI) ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l'associé d'une société civile, qui souhaite se retirer totalement ou partiellement de la société, et dont la demande ne relève que de convenances personnelles, ne justifie pas de justes motifs de retrait de cette société ; qu'en relevant, pour décider que Mme Y... avait un juste motif de se retirer de la société, que de par son divorce avec M. X..., qui était en l'occurrence un divorce pour faute, elle avait perdu la confiance initialement accordée à son époux pour assurer la gestion de la société au mieux des intérêts de tous les associés, quand il appartenait à Mme Y... d'exercer désormais les pouvoirs qui lui étaient dévolus en sa qualité de co-gérante par les statuts, les juges, qui ont statué par un motif impropre à caractériser un juste motif de retrait, ont violé l'article 1869 du code civil ;
2°/ qu'en retenant également, comme juste motif de retrait au sens de l'article 1869 du code civil, la circonstance que M. X... n'avait pas organisé, durant 12 années, d'assemblée générale annuelle de la SCI, ce qui faisait apparaître au fil des ans la disparition de l'affectio societatis, à savoir l'absence de volonté de poursuivre une oeuvre commune sur un pied d'égalité au moyen de la société, quand il est constant, et rappelé par l'arrêt, que Mme Y..., pendant toutes ces années, avait donné mandat à M. X... pour assurer seul la gestion de la société, les juges, qui n'ont pas caractérisé un juste motif de retrait, ont à nouveau violé les articles 1134 et 1869 du code civil ;
3°/ que les juges se sont également fondés sur la circonstance que Mme Y... a préféré obtenir une autorisation de retrait de la société par décision de justice, plutôt que par décision unanime des autres associés ; qu'en statuant de la sorte, quand Mme Y... n'a fait qu'exercer l'option qui s'offrait à elle de par l'article 1869 du code civil pour obtenir le retrait de la société, les juges du fond, qui n'ont pas caractérisé l'existence d'un juste motif d'obtenir l'autorisation judiciaire de se retirer de la société, ont par suite violé à nouveau l'article 1869 du code civil :
4°/ que les juges du fond ne peuvent, sans encourir la censure, se prononcer aux termes de motifs hypothétiques ; qu'en retenant encore, comme juste motif de retrait, que si Mme Y... décidait d'exercer désormais les pouvoirs qui lui sont dévolus en vertu des statuts, il s'ensuivrait inévitablement une paralysie du fonctionnement de la société, les juges ont statué par un motif hypothétique, et par suite, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que l'absence de réunion annuelle des associés révélait la disparition de l'affectio societatis, consacrée par le refus opposé à la régularisation proposée à une assemblée générale du 19 mai 2005 dans le contexte d'un divorce qui était lui-même l'aboutissement d'une vie séparée depuis plusieurs années, et retenu, par motifs propres, que compte tenu de la procédure de divorce pour faute en cours et du caractère très conflictuel des relations existant désormais entre les cogérants, il était démontré, d'une part, que la confiance initialement accordée par Mme Y... à son époux pour assurer la gestion de la société au mieux des intérêts de tous les associés avait disparu et, d'autre part, que si Mme Y... décidait d'exercer les pouvoirs qui lui étaient dévolus en vertu des statuts, il s'ensuivrait inévitablement une paralysie du fonctionnement de la société, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur la circonstance que Mme Y... avait préféré demander une autorisation judiciaire plutôt que de solliciter le consentement unanime des associés, et qui, sans se fonder sur un motif hypothétique, a examiné successivement l'hypothèse de gestion de la société par M. X... seul et celle de cogestion par les deux époux pour en inférer une conséquence certaine et unique, a pu en déduire l'existence d'un juste motif de retrait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.