Cass. crim., 18 janvier 2017, n° 15-84.003
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
Mme Chauchis
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Spinosi et Sureau
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 12 octobre 2010, Mme Wei Wei X..., qui n'avait effectué aucune déclaration de transfert de capitaux, a été contrôlée par les agents du service des douanes de l'aéroport de Roissy alors qu'elle était en partance pour Hong Kong, et trouvée en possession, dans ses bagages, de la somme globale de 590 110 euros ; que le tribunal l'a déclarée coupable du délit prévu par l'article 464 du code des douanes mais relaxée du chef de blanchiment ; que le ministère public a interjeté appel de ce jugement ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 324-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a déclaré Mme X... coupable de blanchiment de fraude fiscale et de travail dissimulé ;
" aux motifs que, sur le délit de blanchiment, Mme X..., épouse Y..., et M. Z...sont poursuivis pour avoir apporté leur concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect des délits de travail dissimulé et de fraude fiscale, en l'espèce en organisant et en participant au transfert de la somme de 590 110 euros en la dissimulant dans des bagages, somme provenant de France et d'Italie à destination de la Chine, et issu d'une activité commerciale de confection et de vente de textiles exercée en Italie et en France, sans aucune déclaration aux organismes sociaux et fiscaux français et italiens ; qu'il est constant que les fonds étaient dissimulés dans des bagages, emballés dans despaquets cadeau et sans avoir été déclarés aux douanes ; que l'enquête a établi que les deux prévenus, avant l'interpellation à Roissy de Mme X..., épouse Y..., étaient tous les deux présents en région parisienne et en contacts téléphoniques fréquents, que les bagages enregistrés de la prévenue accusaient une augmentation de poids de trois kilos entre Rome et Roissy ; que, s'il est affirmé par la défense que l'argent retrouvé en possession de Mme X..., épouse Y..., correspond à des sommes dues par la société italienne Paradisio à la société chinoise Qi Jin pour des marchandises exportées régulièrement de Chine en Italie, la cour s'étonne, au regard du montant découvert dans les bagages, qu'il n'ait pas été procédé à leur règlement par un virement bancaire ; que l'ensemble de ces circonstances et les déclarations, ou absence de déclaration, des prévenus, celles de M. Z...selon lesquelles l'argent lui était destiné mais qu'il refusait de venir s'en expliquer, celles de Mme X..., épouse Y..., sur les conditions de transfert de l'argent, dans le but d'éluder les impôts, argent issu d'activités non déclarées par des commerçants de Rome, établissent que les fonds proviennent d'activités commerciales non déclarées en Italie et en France, ce qui caractérise en tousses éléments le délit de blanchiment ; qu'en conséquence le jugement sera infirmé et les prévenus seront déclarés coupables des délits de blanchiment de fraude fiscale et de travail dissimulé ainsi que visés à la prévention ;
" alors que le blanchiment, infraction de conséquence, suppose, pour être caractérisé, que soient relevés précisément les éléments constitutifs du crime ou du délit principal ayant procuré à son auteur un profit direct ou indirect ; qu'en déclarant Mme X... coupable de blanchiment de fraude fiscale et de travail dissimulé, sans jamais relever précisément les éléments constitutifs des délits ayant procuré à leur auteur un profit direct ou indirect, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour dire établi le délit de blanchiment, la cour d'appel retient notamment que l'ensemble des éléments du dossier et spécialement les déclarations de Mme X..., épouse Y..., sur les conditions de transfert de l'argent, issu d'activités non déclarées par des commerçants de Rome, dans le but d'éluder les impôts, établissent que les fonds proviennent de telles activités en Italie et en France ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors qu'il suffit, pour caractériser l'infraction de blanchiment, d'établir que son auteur avait conscience de l'origine frauduleuse des fonds et non de la nature exacte des infractions d'origine, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 152-1 et L. 152-4 du code monétaire et financier, 464 et 465 du code des douanes, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a ordonné, à titre de peine complémentaire, la confiscation de la somme de 590 110 euros, déduction faite de l'amende douanière, somme actuellement déposée sur le compte de l'AGRASC à la Caisse des dépôts et consignations ;
" alors que la confiscation des sommes saisies en application des articles L. 152-1 du code monétaire et financier et 464 du code des douanes peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la consignation, il est établi que l'auteur de l'infraction est ou a été en possession d'objets laissant présumer qu'il est ou a été l'auteur d'une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu'il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s'il y a des raisons plausibles de penser qu'il a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu'il a participé à la commission de telles infractions ; qu'en ordonnant la confiscation de la somme saisie, lorsque Mme X... a été poursuivie pour des infractions de blanchiment de travail dissimulé et de fraude fiscale, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen " ;
Attendu que la demanderesse ne saurait se faire un grief de ce que la cour d'appel a ordonné, conformément aux prévisions de l'article 131-21 du code pénal, la confiscation des sommes trouvées en sa possession, dès lors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que ces sommes constituent l'objet de l'infraction de blanchiment dont elle a été déclarée coupable ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.