Cass. 1re civ., 13 mars 2007, n° 06-15.316
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que par actes du 28 octobre 2005 le procureur de la République de Montpellier et le préfet de la région Languedoc-Roussillon ont saisi le président du tribunal de grande instance de Montpellier aux fins de rétraction de deux ordonnances rendues sur requête de M. Jacques X..., ancien président du conseil régional du Languedoc-Roussillon, autorisant des constats d'huissier de justice sur des documents ou pièces figurant au dossier d'un contrôle des comptes et de gestion de la région par la chambre régionale des comptes pour les exercices 1995 à 2003, conformément aux dispositions des articles L. 241-1 et R. 241-1 et suivants du code des juridictions financières ; que par ordonnance du 1er décembre 2005, le président du tribunal de grande instance de Montpellier a rejeté ces requêtes ; que par acte du 12 janvier 2006, le préfet de la région Languedoc-Roussillon a déposé un déclinatoire de compétence ;
Attendu que M. Jacques X... reproche à l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 mars 2006) d'avoir dit que les demandes de constat d'huissier portant sur des documents ou pièces figurant au dossier du contrôle de gestion de la région Languedoc-Roussillon ne ressortissaient pas à la compétence du juge judiciaire, et de l'avoir renvoyé à mieux se pourvoir, alors, selon le moyen :
1 / que le juge judiciaire des référés peut ordonner une mesure d'instruction avant tout procès dès lors que le fond du litige est de nature à relever, ne serait-ce qu'en partie, de la compétence des juridictions de l'ordre auquel il appartient, de sorte qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle était invitée à le faire par des conclusions laissées sans réponse, si les agissements d'un fonctionnaire de la chambre régionale des comptes ayant matériellement altéré deux documents n'étaient pas des actes de nature à être qualifiés de faux et de ce fait, de relever de la compétence des juridictions judiciaires et, par conséquent, de justifier la compétence du juge des référés à ordonner la sauvegarde des preuves avant tout procès, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 145 du nouveau code de procédure civile ;
2 / que le juge judiciaire des référés peut ordonner une mesure d'instruction avant tout procès dès lors que le fond du litige est de nature à relever, ne serait-ce qu'en partie, de la compétence des juridictions de l'ordre auquel il appartient, de sorte qu'en statuant ainsi, sans rechercher, si les agissements d'un fonctionnaire de la chambre régionale des comptes ne constituaient pas des actes de voies de fait relevant de la compétence des juridictions judiciaires et, par conséquent, justifiant la compétence du juge des référés à ordonner la sauvegarde des preuves avant tout procès, comme elle y était invitée à le faire par les conclusions de M. X... laissées sans réponse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard de l'article 145 du nouveau code de procédure civile ;
3 / que si la loi des 16-24 août 1790 interdit à l'autorité judiciaire de troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratifs, une mesure d'instruction, telle que le constat par huissier de justice de l'existence et de l'état de certaines pièces détenues par une autorité administrative, que le juge judiciaire peut ordonner avant tout procès, dès lors que le fond du litige est de nature à relever, ne serait-ce qu'en partie, de la compétence des juridictions de l'ordre auquel il appartient, n'est en aucune manière de nature à apporter un tel trouble si bien que la cour d'appel a méconnu les articles 145 du nouveau code de procédure civile et de la loi des 16-24 août 1790 ;
Mais attendu que, si avant tout procès et toute détermination de la compétence au fond, et dès lors que le litige est de nature à relever, fût-ce pour partie, de l'ordre de juridiction auquel il appartient, le juge des référés peut ordonner une mesure d'instruction sans que soit en cause le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, il en est autrement lorsqu'il est demandé au juge des référés d'ordonner une mesure d'instruction qui porte à titre exclusif sur un litige dont la connaissance au fond n'appartient manifestement pas à son ordre de juridiction ; qu'ayant relevé, par des motifs non critiqués par le pourvoi, d'une part, que le fond du litige relatif à l'activité de contrôle des comptes et de gestion de la chambre régionale des comptes ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire et que les actes incriminés rentraient dans les attributions légales de la Cour des comptes et d'autre part, que la requête, qui ne précisait pas le fondement juridique de l'éventuelle procédure au fond permettant de justifier de la compétence d'attribution du juge saisi, avait pour objet de permettre à M. X... d'apporter à la chambre régionale des comptes les observations les plus précises possibles, la cour d'appel a, répondant aux conclusions qu'il lui est reproché d'avoir délaissé, légalement justifié sa décision
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.