Cass. 1re civ., 19 mars 2002, n° 00-11.907
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Renard-Payen
Avocat général :
M. Sainte-Rose
Avocats :
SCP Boulloche, SCP Parmentier et Didier
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 7 décembre 1999), que M. Y... , désigné en qualité d'expert par le tribunal administratif d'Amiens, le 13 octobre 1987, à la suite de fissures apparues dans le bâtiment abritant une école maternelle que la commune d'Eppeville avait fait construire en 1977, a conclu à l'absence d'erreur de conception ; qu'au vu de ce rapport, la commune a conclu un accord avec les constructeurs et s'est désistée de son action en responsabilité contre ces derniers, le 3 septembre 1991 ; que l'état des bâtiments s'étant sensiblement aggravé en 1992, le président du tribunal administratif d'Amiens a, par ordonnance du 9 avril 1993, commis un nouvel expert, M. X... , lequel a conclu à l'existence de graves défauts de conception du bâtiment ; que le tribunal administratif ayant, par jugement du 31 décembre 1998, rejeté, en raison de l'accord et de l'expiration de la garantie décennale, la demande d'indemnisation formée contre les constructeurs par la commune, cette dernière, aux fins de mettre en jeu la responsabilité de l'expert Y... , a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Péronne, le 25 mars 1999, d'une demande de désignation d'un expert dont les conclusions seraient ainsi opposables à M. Y... ; que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'incompétence de la juridiction judiciaire soulevée par M. Y... et ordonné l'expertise demandée ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense :
Attendu que la commune soutient que le pourvoi est irrecevable, au regard des articles 606 et 608 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel s'étant bornée à rejeter l'exception d'incompétence dont elle était saisie et à ordonner une expertise sans trancher le principal ;
Mais attendu que le juge des référés ayant, en l'espèce, épuisé sa saisine en prescrivant, avant tout procès et en vertu de l'article 145 du même Code les mesures destinées à établir la preuve de faits dont pouvait dépendre la solution du litige, le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique :
Attendu que le demandeur au pourvoi fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté l'exception soulevée par lui, alors que l'expertise sollicitée par la commune d'Eppeville sur le fondement de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile, tendant à mettre en jeu la responsabilité d'un expert judiciaire commis par la juridiction administrative dans l'accomplissement de sa mission de collaborateur du service public, ressortissait, hors le cas de la faute personnelle, détachable du fonctionnement du service judiciaire administratif, à la juridiction administrative, tant pour connaître d'une faute commise dans l'accomplissement de sa mission que pour apprécier l'existence d'un lien de causalité entre cette faute et réparation d'un dommage de travaux publics ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé à bon droit que l'action en responsabilité contre l'expert judiciaire devait se tenir devant la juridiction judiciaire puisque les éventuelles fautes commises par lui engageaient sa propre responsabilité et non celle de l'Etat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.