CJUE, gr. ch., 31 janvier 2023, n° C-284/21 P
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
Annulation
PARTIES
Demandeur :
Anthony Braesch, Trinity Investments DAC, Bybrook Capital Master Fund LP, Bybrook Capital Hazelton Master Fund LP, Bybrook Capital Badminton Fund LP, Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lenaerts
Vice-président :
M. Bay Larsen
Présidents de chambre :
M. Arabadjiev, M. Regan (rapporteur), M. Safjan, M. Xuereb, M. Gratsias, Mme Arastey Sahún
Juges :
M. Biltgen, M. Jarukaitis, M. Jääskinen, M. Wahl, Mme Ziemele, M. Passer, M. Gavalec
Avocat général :
M. Rantos
Avocats :
Me Champsaur, Me Faella, Me Prosperetti, Me Siragusa
LA COUR (grande chambre),
1 Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 février 2021, Braesch e.a./Commission (T 161/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:102), par lequel celui-ci a rejeté l’exception d’irrecevabilité soulevée dans le cadre du recours introduit au titre de l’article 263 TFUE par M. Anthony Braesch, Trinity Investments DAC, Bybrook Capital Master Fund LP, Bybrook Capital Hazelton Master Fund LP et Bybrook Capital Badminton Fund LP (ci-après « Braesch e.a. »), tendant à l’annulation de la décision C(2017) 4690 final de la Commission, du 4 juillet 2017, concernant l’aide d’État SA.47677 (2017/N) – Italie, nouvelle aide et plan de restructuration modifié de Banca Monte dei Paschi di Siena (ci-après la « décision litigieuse »).
Le cadre juridique
Le règlement (UE) 2015/1589
2 Sous l’intitulé « Définitions », l’article 1er du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9), est ainsi libellé :
« Aux fins du présent règlement, on entend par :
[...]
b) “aide existante” :
[...]
(ii) toute aide autorisée, c’est-à-dire les régimes d’aides et les aides individuelles autorisés par la Commission ou le Conseil [de l’Union européenne] ;
[...]
c) “aide nouvelle” : toute aide, c’est-à-dire tout régime d’aides ou toute aide individuelle, qui n’est pas une aide existante, y compris toute modification d’une aide existante ;
[...]
f) “aide illégale” : une aide nouvelle mise à exécution en violation de l’article 108, paragraphe 3, [TFUE] ;
g) “aide appliquée de façon abusive” : une aide utilisée par le bénéficiaire en violation d’une décision prise en application de [...] l’article 4, paragraphe 3, [...] du présent règlement ;
h) “partie intéressée” : tout État membre et toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, en particulier le bénéficiaire de celle-ci, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles. »
3 L’article 4 de ce règlement, intitulé « Examen préliminaire de la notification et décisions de la Commission », prévoit, à ses paragraphes 3 et 4 :
« 3. Si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée, pour autant qu’elle entre dans le champ de l’article 107, paragraphe 1, [...] TFUE, ne suscite pas de doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, elle décide que cette mesure est compatible avec le marché intérieur (ci-après dénommée “décision de ne pas soulever d’objections”). Cette décision précise quelle dérogation prévue par le [traité] FUE a été appliquée.
4. Si la Commission constate, après un examen préliminaire, que la mesure notifiée suscite des doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, elle décide d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, [...] TFUE (ci-après dénommée “décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen”). »
4 Sous l’intitulé « Procédure formelle d’examen », l’article 6 dudit règlement énonce, à son paragraphe 1 :
« La décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen récapitule les éléments pertinents de fait et de droit, inclut une évaluation préliminaire, par la Commission, de la mesure proposée visant à déterminer si elle présente le caractère d’une aide, et expose les raisons qui incitent à douter de sa compatibilité avec le marché intérieur. La décision invite l’État membre concerné et les autres parties intéressées à présenter leurs observations dans un délai déterminé, qui ne dépasse normalement pas un mois. Dans certains cas dûment justifiés, la Commission peut proroger ce délai. »
5 L’article 9 du règlement 2015/1589, intitulé « Décisions de la Commission de clore la procédure formelle d’examen », dispose, à son paragraphe 4 :
« La Commission peut assortir sa décision positive de conditions lui permettant de reconnaître la compatibilité avec le marché intérieur et d’obligations lui permettant de contrôler le respect de sa décision (ci-après dénommée “décision conditionnelle”). »
6 L’article 16 de ce règlement, intitulé « Récupération de l’aide », prévoit, à son paragraphe 1 :
« En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire [...]. La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général du droit de l’Union. »
7 L’article 20 dudit règlement, intitulé « Application abusive d’une aide », énonce :
« Sans préjudice de l’article 28, la Commission peut, en cas d’application abusive d’une aide, ouvrir la procédure formelle d’examen en vertu de l’article 4, paragraphe 4. Les articles 6 à 9, 11 et 12, l’article 13, paragraphe 1, et les articles 14 à 17 s’appliquent mutatis mutandis. »
La directive 2014/59/UE
8 Sous l’intitulé « Conditions de déclenchement d’une procédure de résolution », l’article 32 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), prévoit, à son paragraphe 4 :
« Aux fins du paragraphe 1, point a), la défaillance d’un établissement est réputée avérée ou prévisible si celui-ci se trouve dans l’une ou plusieurs des situations suivantes :
[...]
d) un soutien financier public exceptionnel est requis, excepté les cas dans lesquels, afin d’empêcher ou de remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre et de préserver la stabilité financière, ce soutien prend l’une des formes suivantes :
[...]
iii) une injection de fonds propres ou un achat d’instruments de fonds propres à des prix et des conditions qui ne confèrent pas un avantage à l’établissement, lorsque ni les situations visées au point a), b) ou c), du présent paragraphe, ni les conditions visées à l’article 59, paragraphe 3, ne s’appliquent au moment où le soutien des pouvoirs publics est accordé.
Dans chacun des cas mentionnés aux points d), i), ii) et iii) du premier alinéa, les mesures de garantie ou les mesures équivalentes qui y sont visées ne concernent que des établissements solvables et sont soumises à approbation finale en vertu du cadre des aides d’État de l’Union [européenne]. Ces mesures sont prises à titre de précaution et à titre temporaire et sont proportionnées afin de remédier aux conséquences de la perturbation grave et elles ne sont pas utilisées pour compenser des pertes que l’établissement a subies ou est susceptible de subir dans un proche avenir.
Les mesures de soutien visées au point d), iii), du premier alinéa sont limitées aux injections nécessaires pour combler les insuffisances de fonds propres constatées dans les tests de résistance à l’échelle nationale, de l’Union ou du [mécanisme de surveillance unique (MSU)], des examens de qualité des actifs ou des études équivalentes menés par la Banque centrale européenne [BCE], [l’Autorité bancaire européenne (ABE)] ou les autorités nationales confirmées, le cas échéant, par l’autorité compétente.
[...] »
Le règlement (UE) no 806/2014
9 Sous l’intitulé « Procédure de résolution », l’article 18 du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniforme pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), dispose, à son paragraphe 4 :
« Aux fins du paragraphe 1, point a), la défaillance d’une entité est réputée avérée ou prévisible si celle-ci se trouve dans l’une ou plusieurs des situations suivantes :
[...]
d) un soutien financier public exceptionnel est requis, à l’exception des cas dans lesquels, afin de remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre et de préserver la stabilité financière, ce soutien prend l’une des formes suivantes :
[...]
iii) une injection de fonds propres ou un achat d’instruments de fonds propres à des prix et à des conditions qui ne confèrent pas un avantage à l’entité, lorsque ni les situations visées aux points a), b) et c), du présent paragraphe ni les situations visées à l’article 21, paragraphe 1, ne s’appliquent au moment de l’octroi dudit soutien.
Dans chacun des cas visés au premier alinéa, point d), i), ii) et iii), les mesures de garantie ou les mesures équivalentes qui y sont visées ne concernent que des entités solvables et elles sont subordonnées à une approbation finale au regard du cadre des aides d’État de l’Union. Ces mesures sont prises à titre de précaution et à titre temporaire et sont proportionnées afin de remédier aux conséquences de la perturbation grave et elles ne sont pas utilisées pour compenser des pertes que l’entité a subies ou pourrait subir dans un proche avenir.
Les mesures de soutien prévues au premier alinéa, point d), iii), sont limitées aux injections nécessaires pour combler les insuffisances de fonds propres constatées dans les tests de résistance à l’échelle nationale, de l’Union ou du MSU, les examens de qualité des actifs ou les études équivalentes effectués par la BCE, l’ABE ou les autorités nationales, confirmées, le cas échéant, par l’autorité compétente.
[...] »
La communication concernant le secteur bancaire
10 Le point 15 de la communication de la Commission concernant l’application, à partir du 1er août 2013, des règles en matière d’aides d’État aux aides accordées aux banques dans le contexte de la crise financière (« Communication concernant le secteur bancaire ») (JO 2013, C 216, p. 1, ci-après la « communication concernant le secteur bancaire ») se lit comme suit :
« Les communications liées à la crise précisent clairement que, même durant celle-ci, les principes généraux du contrôle des aides d’État restent applicables. En particulier, afin de limiter les distorsions de concurrence entre les banques et entre les États membres dans le marché unique, de même que pour remédier au problème de l’aléa moral, il convient de limiter les aides au minimum nécessaire et de veiller à ce que leur bénéficiaire contribue de façon appropriée aux coûts de restructuration. La banque et ses actionnaires doivent contribuer à la restructuration autant que possible au moyen de ressources propres. L’aide publique doit être accordée selon des modalités prévoyant une répartition adéquate des coûts, de sorte que ces derniers soient également supportés par ceux qui ont investi dans la banque. »
11 La partie 3 de la communication concernant le secteur bancaire est relative aux mesures de recapitalisation et de sauvetage d’actifs dépréciés. Le titre 3.1.2 de celle-ci, intitulé « Répartition des charges associant les actionnaires et les créanciers subordonnés », comporte les points 40 à 46, lesquels sont ainsi libellés :
« 40. Les aides publiques peuvent engendrer un aléa moral et nuire à la discipline de marché. Pour réduire cet aléa moral, il convient de n’accorder les aides que selon des modalités prévoyant une juste répartition des charges associant les investisseurs existants.
41. La juste répartition des charges engendrera en principe, après absorption des pertes en priorité par les fonds propres, des contributions des détenteurs de titres hybrides et de titres de créance subordonnés. Les détenteurs de titres hybrides et de titres de créance subordonnés doivent contribuer, dans toute la mesure du possible, à la réduction du déficit de fonds propres. Ces contributions peuvent prendre la forme soit d’une conversion en fonds propres de base de catégorie 1 [...], soit d’une réduction de la valeur du principal des instruments. En tout état de cause, les sorties de trésorerie du bénéficiaire vers les détenteurs de tels titres doivent être évitées dans la mesure où cela est juridiquement possible.
42. La Commission n’exigera pas de contribution de la part des détenteurs de créances privilégiées (notamment à partir de dépôts assurés, de dépôts non assurés, d’obligations et de toute autre créance privilégiée) comme composante obligatoire de la répartition des charges en vertu des règles en matière d’aides d’État, que ce soit par conversion en fonds propres ou par réduction de la valeur des instruments.
43. Si le ratio de fonds propres de la banque qui souffre d’un déficit de fonds propres avéré reste supérieur au minimum réglementaire fixé par l’[Union], la banque devrait en principe être en mesure de redresser sa position financière par ses propres moyens, notamment grâce aux mesures de mobilisation de capitaux visées au point 35. En l’absence de toute autre possibilité, notamment d’une action prudentielle imposant par exemple des mesures d’intervention précoce ou d’autres mesures correctrices, pour remédier au déficit confirmé par l’autorité de surveillance ou de résolution compétente, les titres de créance subordonnés doivent être convertis en fonds propres, en principe avant l’octroi d’une aide d’État.
44. Dans les cas où la banque ne respecte plus les exigences réglementaires minimales en matière de fonds propres, les titres de créance subordonnés doivent être convertis ou faire l’objet d’une réduction de valeur, en principe avant l’octroi d’une aide d’État. Les aides d’État ne peuvent être octroyées qu’une fois que les fonds propres, les titres hybrides et les titres de créance subordonnés ont pleinement contribué à compenser les pertes éventuelles.
45. Une exception aux exigences figurant aux points 43 et 44 peut être accordée lorsque la mise en œuvre de telles mesures risque de mettre en péril la stabilité financière ou de déboucher sur des résultats disproportionnés. Cette exception pourrait couvrir les cas où le montant de l’aide à recevoir est limité par rapport aux actifs de la banque pondérés en fonction des risques et où le déficit de fonds propres a été fortement réduit notamment grâce aux mesures de mobilisation de capitaux visées au point 35. Il est également possible d’éviter les résultats disproportionnés et de ne pas menacer la stabilité financière en planifiant différemment les mesures visant à remédier au déficit de fonds propres.
46. Dans le cadre de l’application des points 43 et 44, il convient de respecter le principe selon lequel aucun créancier ne peut être plus désavantagé [...] Les créanciers subordonnés ne devraient donc pas recevoir moins, en termes économiques, que ce que leur instrument aurait valu en l’absence d’aide d’État. »
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
12 Les antécédents du litige sont exposés aux points 1 à 14 de l’arrêt attaqué comme suit :
« 1 [...] M. Anthony Braesch, Trinity Investments [...], Bybrook Capital Master Fund [...], Bybrook Capital Hazelton Master Fund [...] et Bybrook Capital Badminton Fund [...], sont, pour le premier, un représentant de détenteurs d’obligations dénommées “Floating Rate Equity-Linked Subordinated Hybrid-FRESH” 2008 (ci-après les “obligations FRESH”) et, pour les autres, des détentrices de ces obligations.
2 [Au mois d’]avril 2008, Banca Monte dei Paschi di Siena (ci-après “BMPS”) a effectué une augmentation de capital de 950 millions d’euros réservée à J. P. Morgan Securities Ltd (ci-après “JPM”), laquelle a souscrit des actions de BMPS, les “actions FRESH”. Dans le même temps, le 16 avril 2008, JPM a conclu avec BMPS un contrat d’usufruit, selon lequel JPM conserve la nue-propriété des actions alors que BMPS a droit à l’usufruit, et un accord d’échange de sociétés (ci-après les “contrats FRESH”). JPM a obtenu les fonds nécessaires à la souscription des actions FRESH de Bank of New-York Mellon (Luxembourg), remplacée par Mitsubishi UFJ Investor Services & Banking (Luxembourg) SA (ci-après “MUFJ”), laquelle a émis les obligations FRESH, le 16 avril 2008, en vertu du droit luxembourgeois, pour un montant d’un milliard d’euros. JPM a conclu avec MUFJ un accord d’échange soumis au droit luxembourgeois et MUFJ a conclu avec les détenteurs des obligations FRESH un contrat fiduciaire également soumis au droit luxembourgeois. En vertu de ces différents contrats, qualifiés par [Braesch e.a.] d’“instruments FRESH”, les redevances perçues par JPM de BMPS au titre des contrats FRESH sont transmises à MUFJ puis aux détenteurs d’obligations FRESH sous forme de coupons.
3 Par décision du 27 novembre 2013, la Commission [...] a approuvé l’aide à la restructuration accordée par la République italienne à [...] BMPS, prenant en compte un plan de restructuration et des engagements. [Au mois de] juin 2015, BMPS avait entièrement remboursé l’aide.
4 Le 29 juillet 2016, l’[ABE] a publié les résultats du test de résistance mené à l’échelle européenne en 2016, qui a révélé un déficit de fonds propres de BMPS dans le cadre du scénario défavorable.
5 Le 23 décembre 2016, les autorités italiennes ont adopté le decreto-legge n. 237 – Disposizioni urgenti per la tutela del risparmio nel settore creditizio (décret-loi no 237, portant dispositions urgentes pour la protection de l’épargne dans le secteur du crédit) (GURI no 299, du 23 décembre 2016), qui a été converti en loi et modifié par la legge di conversione (loi de conversion), du 17 février 2017 (GURI no 43, du 21 février 2017) (ci-après le “décret-loi 237/2016”), fixant le cadre légal de l’aide de trésorerie et des recapitalisations préventives.
6 À la suite de la déclaration de la [BCE] du 23 décembre 2016, selon laquelle BMPS était solvable, la Commission a temporairement approuvé, par décision du 29 décembre 2016, une aide de trésorerie individuelle de quinze milliards d’euros en faveur de BMPS, sur la base des engagements offerts par les autorités italiennes. Les autorités italiennes se sont engagées à présenter un plan de restructuration dans un délai de deux mois à compter de l’octroi des garanties, à moins que l’aide ne soit remboursée dans ce même délai.
7 Le 30 décembre 2016, la tentative de BMPS de lever de nouveaux capitaux privés n’ayant pas abouti, elle a introduit une demande de soutien financier public exceptionnel sous la forme d’une recapitalisation préventive au titre du décret-loi 237/2016.
8 Le 28 juin 2017, les autorités italiennes ont notifié à la Commission une aide à la recapitalisation de BMPS d’un montant de 5,4 milliards d’euros, accompagnée d’un nouveau plan de restructuration [(ci-après le “plan de restructuration”)] et de nouveaux engagements.
9 Le même jour, la BCE a envoyé à la Commission une lettre indiquant que BMPS était solvable à cette date.
10 Dans la décision [litigieuse], adoptée à l’issue de la phase préliminaire d’examen, la Commission a apprécié deux mesures d’aide. La première mesure (ci-après la “mesure 1”) consiste en une aide de trésorerie de quinze milliards d’euros sous la forme de garanties de l’État sur les dettes de premier rang, mentionnée au point 6 [de l’arrêt attaqué]. La seconde mesure (ci-après la “mesure 2”) consiste en une aide à la recapitalisation préventive de BMPS d’un montant de 5,4 milliards d’euros, mentionnée au point 8 [de l’arrêt attaqué].
11 Après avoir considéré que les mesures 1 et 2 constituaient des aides d’État, la Commission a indiqué que la base légale pour apprécier leur compatibilité [avec le marché intérieur] était l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, relatif aux aides destinées à remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre. Elle a estimé que les mesures 1 et 2 étaient des aides à la restructuration de BMPS et a examiné leur compatibilité sur la base du plan de restructuration au regard des six communications sur la crise financière mondiale, en particulier [...] la communication [concernant le secteur bancaire].
12 S’agissant de la compatibilité des mesures d’aide au regard des [six] communications sur la crise [financière], premièrement, la Commission a estimé que le plan de restructuration était apte à restaurer la viabilité à long terme de BMPS. Deuxièmement, elle a considéré que la répartition des charges des détenteurs d’actions et de titres subordonnés était adéquate, limitant les coûts de restructuration et le montant de l’aide au minimum, conformément aux exigences de la communication concernant le secteur bancaire, et elle a conclu que le plan de restructuration contenait suffisamment de mesures de répartition des charges. Troisièmement, elle a considéré que le plan de restructuration contenait suffisamment de garanties pour limiter les distorsions de concurrence indues. Elle a également relevé qu’une surveillance adéquate de la mise en œuvre du plan de restructuration était assurée. Dès lors, elle a conclu que les mesures d’aide étaient proportionnées pour remédier aux conséquences d’une perturbation sérieuse de l’économie italienne.
13 La Commission a ensuite examiné la conformité des mesures d’aide avec les dispositions de la directive [2014/59]. Elle a considéré que les conditions dans lesquelles les mesures d’aide (mesures 1 et 2) avaient été accordées étaient conformes à l’exemption prévue à l’article 32, paragraphe 4, sous d), de la directive 2014/59.
14 Dans le dispositif de la décision [litigieuse], la Commission a conclu, premièrement, que les mesures 1 et 2 constituaient des aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et, deuxièmement, que ces mesures remplissaient les exigences de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et qu’elles étaient compatibles avec le marché intérieur pour des motifs de stabilité financière. »
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
13 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mars 2018, Braesch e.a. ont introduit un recours au titre de l’article 263 TFUE tendant à l’annulation de la décision litigieuse ou, à titre subsidiaire, à l’annulation de cette décision en ce qu’elle concerne le traitement des instruments FRESH.
14 À l’appui de ce recours, Braesch e.a. ont invoqué cinq moyens, tirés, le premier, de la violation des articles 18 et 21 du règlement no 806/2014 et de l’obligation de motivation, en ce que la Commission a approuvé illégalement des mesures de répartition des charges, le deuxième, de la violation de la communication concernant le secteur bancaire, des principes de protection de la confiance légitime et d’égalité de traitement ainsi que de l’obligation de motivation, en ce que la Commission a exigé l’annulation des contrats FRESH, le troisième, de la violation du principe d’égalité de traitement consacré, notamment, aux articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), en ce que la décision litigieuse a approuvé des mesures de répartition des charges discriminatoires envers les détenteurs des obligations FRESH, le quatrième, de la violation des droits de propriété de ces derniers, garantis, notamment, à l’article 17 de la Charte, en ce que la Commission a approuvé l’application de mesures de répartition des charges aux instruments FRESH et, le cinquième, de la violation de l’article 108, paragraphes 2 et 3, TFUE, de l’article 4, paragraphes 3 et 4, du règlement 2015/1589 ainsi que de leurs droits procéduraux, en ce que la Commission n’a pas ouvert la procédure formelle d’examen, alors qu’il existait des doutes sérieux quant à la compatibilité des mesures de répartition des charges approuvées par la décision litigieuse avec le droit de l’Union.
15 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 16 mai 2018, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure du Tribunal, par laquelle elle faisait valoir que le recours introduit par Braesch e.a. était irrecevable au motif qu’ils n’avaient ni intérêt à agir ni qualité pour agir, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. Ces derniers ont déposé leurs observations sur cette exception le 10 juillet 2018.
16 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries, en leurs réponses aux questions écrites posées par le Tribunal et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 9 juillet 2020.
17 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission. Après avoir constaté, aux points 35 à 41 de cet arrêt, que Braesch e.a. avaient la qualité d’« intéressés » et de « parties intéressées », au sens, respectivement, de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, le Tribunal a considéré, d’une part, aux points 43 à 55 dudit arrêt, que ceux-ci disposaient d’un intérêt à agir, ayant prouvé à suffisance de droit que l’éventuelle annulation de la décision litigieuse était susceptible de leur procurer un bénéfice, et, d’autre part, aux points 56 à 64 du même arrêt, que ceux-ci disposaient de la qualité pour agir, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, dès lors que l’approbation, dans cette décision, des mesures d’aide au regard du plan de restructuration les concerne directement et individuellement en tant qu’« intéressés » et « parties intéressées ».
Les conclusions des parties devant la Cour
18 Par son pourvoi, la Commission demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué ;
– de statuer elle-même sur le recours en première instance et de rejeter le recours comme étant irrecevable, ainsi que
– de condamner Braesch e.a. aux dépens.
19 Braesch e.a. demandent à la Cour :
– de rejeter le pourvoi et
– de condamner la Commission aux dépens.
Sur le pourvoi
20 À l’appui de son pourvoi, la Commission invoque un moyen unique, tiré d’une interprétation erronée par le Tribunal, aux points 35 à 41 et 58 de l’arrêt attaqué, de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, en ce que Braesch e.a. ont été qualifiés d’« intéressés » et de « parties intéressées », au sens de ces dispositions.
Arguments des parties
21 La Commission fait valoir que, si la notion de « partie intéressée », telle que définie à l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, laquelle est synonyme de la notion d’« intéressé », au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, couvre certes un ensemble indéterminé de destinataires, elle ne saurait, sous peine de priver de sens l’exigence selon laquelle une personne doit être une « partie intéressée », au sens de cet article 1er, sous h), pour pouvoir être considérée comme directement et individuellement concernée par une décision adoptée sur le fondement de l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement, inclure que des personnes démontrant que l’aide d’État en cause est susceptible d’avoir une incidence concrète sur leur situation en lien avec la concurrence.
22 Tout d’abord, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour en la matière que celle-ci aurait uniquement admis comme partie intéressée des personnes démontrant une incidence de cette nature, même si ces personnes n’étaient pas des concurrentes directes du bénéficiaire de l’aide. Ainsi, dans les arrêts du 9 juillet 2009, 3F/Commission (C 319/07 P, EU:C:2009:435, point 33), ainsi que du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex (C 83/09 P, EU:C:2011:341, point 63), respectivement, un syndicat de travailleurs et des acheteurs de la même matière première que le bénéficiaire de l’aide auraient été considérés comme des parties intéressées en raison de l’incidence potentielle de l’aide en cause sur leur position concurrentielle sur le marché.
23 Ensuite, cette interprétation serait corroborée par l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589. En effet, les parties intéressées énumérées à titre indicatif à cette disposition auraient comme point commun le fait qu’une aide est susceptible d’avoir, sur leur situation, une incidence, selon le cas, favorable ou défavorable, en lien avec la concurrence.
24 Enfin, il ressortirait de l’économie générale et des finalités du contrôle des aides d’État que la Commission est investie de ce contrôle uniquement en tant qu’autorité de la concurrence et que, partant, dans l’exercice de cette compétence, cette institution n’est pas censée imposer aux États membres, ainsi que la Cour l’aurait souligné dans l’arrêt du 22 septembre 2020, Autriche/Commission (C 594/18 P, EU:C:2020:742), des politiques qui ne sont pas liées à la concurrence. Ainsi, dans l’arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci (C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873, points 43, 46 et 47), la Cour, après avoir relevé que l’objectif des règles de l’Union en matière d’aides d’État est de préserver la concurrence, aurait jugé que, pour être directement concernés par une décision en la matière, les requérants doivent prouver que cette décision est susceptible de les placer dans une situation concurrentielle désavantageuse.
25 Il en résulterait que la notion de « parties intéressées », laquelle est d’ailleurs définie à l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 comme visant toute personne « dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide », ne saurait inclure des personnes susceptibles de soulever des griefs sans rapport avec l’aide d’État en cause, mais portant sur d’autres aspects de la mesure étatique générale mettant à exécution cette aide, voire sur d’autres mesures étatiques accompagnant l’aide d’État.
26 En effet, de nombreuses personnes seraient susceptibles de contester une mesure étatique mettant à exécution ou accompagnant une aide, en exprimant uniquement des préoccupations, non seulement sans lien avec la concurrence, mais également indépendantes de l’aide en cause. En revanche, pour les concurrents du bénéficiaire d’une aide d’État, l’octroi à ce dernier d’une telle aide serait la raison d’être de leurs préoccupations. Afin d’être qualifiée de « partie intéressée », une personne devrait donc exprimer des préoccupations liées, d’une certaine manière, à la concurrence au sens large, même si cette personne n’est pas concurrente du bénéficiaire de l’aide.
27 Il en ressortirait que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a erronément interprété et appliqué la notion de « partie intéressée » en se fondant sur une définition ouverte de cette notion incluant toute personne en mesure de démontrer une quelconque incidence potentielle résultant de l’aide, voire d’autres mesures étatiques accompagnant cette aide. Le Tribunal se serait même fondé sur des effets indirects et purement économiques n’ayant aucun lien avec la concurrence.
28 Ainsi, le Tribunal aurait conclu à tort, aux points 37 et 41 de l’arrêt attaqué, que la décision litigieuse risquait d’avoir une incidence concrète sur la situation de Braesch e.a. au motif que le plan de restructuration de BMPS prévoyait la possibilité d’annuler les contrats FRESH et que, en raison de l’interdépendance entre les différents liens contractuels sous-tendant les instruments FRESH, le préjudice économique qui en résulterait à long terme, eu égard aux pertes de paiement de coupons liés aux obligations FRESH, serait substantiel.
29 En effet, l’annulation des contrats FRESH serait la conséquence non pas de l’aide d’État octroyée à BMPS, mais de la décision distincte des autorités italiennes d’imposer une répartition des charges aux actionnaires et aux créanciers subordonnés de BMPS, ce qui aurait été pris en considération dans le plan de restructuration de cette dernière. Même si les autorités italiennes avaient décidé de restructurer BMPS en l’absence d’aide d’État, elles auraient pu imposer les mesures de répartition des charges, y compris l’annulation des contrats FRESH, afin de réduire le déficit de fonds propres de BMPS. Ces mesures seraient donc indépendantes de l’aide d’État que les autorités italiennes ont décidé d’octroyer à BMPS. Par ailleurs, les contrats FRESH annulés seraient le contrat d’usufruit et l’accord d’échange de sociétés conclus entre JPM et BMPS, tels que mentionnés au point 2 de l’arrêt attaqué, alors que les détenteurs d’obligations FRESH n’étaient pas parties à ces contrats.
30 Par conséquent, toute incidence des mesures de répartition des charges sur la situation de Braesch e.a. serait de nature purement économique et indirecte, par l’intermédiaire des différents liens contractuels sous-tendant les instruments FRESH.
31 Il s’ensuivrait que le raisonnement figurant au point 40 de l’arrêt attaqué est entaché d’au moins quatre erreurs de droit.
32 Premièrement, le Tribunal affirmerait à tort qu’il est sans pertinence que Braesch e.a. ne contestent pas la compatibilité avec le marché intérieur des mesures d’aide en cause, alors qu’une telle circonstance confirmerait expressément que ceux-ci contestent non pas les aides d’État octroyées à BMPS en tant que telles, mais les mesures de répartition des charges qui résultaient d’une décision indépendante prise par les autorités italiennes, ce qui prouverait que lesdites aides ne pouvaient pas avoir d’incidence, sur leur situation, en lien avec la concurrence.
33 Deuxièmement, si le Tribunal a constaté à juste titre que les engagements des autorités italiennes visant le plan de restructuration et la répartition des charges font « partie intégrante » des mesures d’aides notifiées, cette constatation serait sans pertinence pour la détermination de la qualité pour agir. Certes, ainsi qu’il ressortirait de l’arrêt du 15 octobre 2015, Iglesias Gutiérrez et Rion Bea (C 352/14 et C 353/14, EU:C:2015:691, point 28), l’autorisation accordée par la Commission serait fondée sur l’ensemble des hypothèses factuelles présentées par l’État membre concerné, que ce soit dans sa notification ou dans ses engagements, de sorte que, si cet État membre s’écarte de ces hypothèses factuelles, il mettrait en œuvre une mesure factuellement différente de celle approuvée par la Commission qui ne serait donc plus couverte par cette autorisation. Toutefois, la Commission contrôlant les aides d’État en tant qu’autorité de la concurrence, il n’en résulterait pas pour autant que toute personne nourrissant une quelconque préoccupation au sujet de l’une de ces hypothèses factuelles devrait être considérée comme une « partie intéressée », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589.
34 Troisièmement, le Tribunal aurait affirmé à tort que les mesures d’aides notifiées et les engagements présentés par les autorités italiennes ayant fait l’objet de l’appréciation de la Commission « revêtent un caractère indissociable, en ce que ces derniers conditionnent la déclaration de compatibilité ». Cette affirmation contredirait les points 99 et 100 de l’arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. (C 526/14, EU:C:2016:570), desquels il ressortirait que la conformité d’une mesure d’aide d’État aux points 40 à 46 de la communication concernant le secteur bancaire, si elle est suffisante pour que la Commission déclare cette mesure compatible avec le marché intérieur, n’est pas nécessaire à cette fin. La République italienne n’aurait donc pas été tenue de s’engager à prendre les mesures de répartition des charges envisagées dans cette communication.
35 Quatrièmement, le Tribunal aurait jugé à tort que, dès lors que la décision litigieuse a autorisé la mise en œuvre des mesures d’aide « tout en rendant ces engagements contraignants », la situation de Braesch e.a. a été nécessairement affectée par l’ensemble de ces éléments, ceux-ci ne pouvant défendre leurs intérêts qu’en demandant l’annulation de cette décision dans sa totalité. En effet, ladite décision n’aurait nullement rendu contraignants les engagements des autorités italiennes. Elle aurait été adoptée en vertu de l’article 4, paragraphe 3, du règlement 2015/1589, sur la base des engagements pris volontairement par ces autorités, y compris les mesures de répartition des charges. La décision litigieuse n’étant pas une « décision conditionnelle », au sens de l’article 9, paragraphe 4, de ce règlement, elle n’aurait pas imposé, ni d’ailleurs pu imposer, de conditions à l’État membre ou aux tiers.
36 Braesch e.a. soutiennent que la Commission ne démontre pas que l’interprétation de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 effectuée par le Tribunal est entachée d’une erreur de droit.
37 Tout d’abord, l’allégation selon laquelle la qualification en tant que « partie intéressée » dans la jurisprudence de la Cour exige une incidence préjudiciable de l’aide sur la personne concernée en lien avec la concurrence serait infondée. En particulier, dans les arrêts du 9 juillet 2009, 3F/Commission (C 319/07 P, EU:C:2009:435), et du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex (C 83/09 P, EU:C:2011:341), la Cour aurait considéré que les requérantes étaient des parties intéressées eu égard à l’existence, pour elles, d’une incidence préjudiciable de l’aide. La motivation retenue par la Cour ne mentionnerait nullement que cette incidence devrait concerner leur position concurrentielle sur le marché.
38 Ensuite, l’argument selon lequel l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 restreint la notion de « parties intéressées » aux entités qui se trouvent en situation de concurrence avec le bénéficiaire de l’aide serait également infondé. D’une part, cette disposition permettrait expressément à une entreprise qui n’est pas dans une relation de concurrence avec le bénéficiaire de l’aide d’être considérée comme une partie intéressée lorsque ses intérêts pourraient être affectés par l’octroi de l’aide. D’autre part, selon une jurisprudence constante de la Cour, consacrée, notamment, par l’arrêt du 13 juin 2019, Copebi (C 505/18, EU:C:2019:500, point 34), la liste des catégories y figurant ne serait qu’indicative et la notion de « partie intéressée » irait au-delà du bénéficiaire de l’aide ou des concurrents de celui-ci puisqu’elle recouvre un ensemble indéterminé de destinataires incluant toutes les personnes dont les intérêts sont affectés par l’octroi de l’aide.
39 Enfin, en ce qui concerne l’économie générale et les finalités du contrôle des aides d’État, l’arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci (C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873 points 43, 46 et 47), serait dépourvu de pertinence, étant donné qu’il porte sur la condition selon laquelle l’auteur du recours dirigé contre un acte doit être concerné directement par celui-ci, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et non sur la notion de « partie intéressée », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589. L’arrêt du 22 septembre 2020, Autriche/Commission (C 594/18 P, EU:C:2020:742), ne serait pas non plus pertinent, dès lors que l’interprétation de la notion de « partie intéressée » n’y est pas abordée. En tout état de cause, cet arrêt confirmerait que la Commission dispose des pouvoirs lui permettant d’examiner non seulement l’incidence d’une mesure en lien avec la concurrence, mais également la légalité de cette mesure dans son ensemble et qu’elle peut prendre en compte divers aspects n’ayant aucun lien avec la concurrence. Ainsi, dans la décision litigieuse, la Commission aurait apprécié la compatibilité des mesures en cause avec la directive 2014/59.
40 Quant aux arguments selon lesquels Braesch e.a. ne sont affectés par la décision litigieuse que d’un point de vue économique et n’invoquent que des préoccupations sans lien avec la concurrence, ils seraient fallacieux. En effet, leur situation juridique serait spécifiquement affectée par l’octroi des aides en cause, puisque cette décision rendrait l’annulation de leurs instruments FRESH contraignante pour la République italienne et BMPS. De surcroît, Braesch e.a. seraient la cible spécifique des mesures de répartition des charges, lesquelles feraient partie des engagements et constitueraient, ainsi qu’il ressort des considérants 101 à 110 de la décision litigieuse, une condition de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, conformément à la communication concernant le secteur bancaire.
41 Le Tribunal n’aurait donc pas commis d’erreur de droit en estimant, pour les motifs énoncés au point 40 de l’arrêt attaqué, que Braesch e.a. pouvaient être qualifiés de « parties intéressées » ou d’« intéressés », au sens, respectivement, de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 et de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, au motif que les mesures d’aide d’État en cause, telles qu’elles ont été notifiées et déclarées compatibles avec le marché intérieur dans la décision litigieuse, risquent d’avoir une incidence concrète sur leur situation.
42 En effet, l’annulation des instruments FRESH ne résulterait pas de l’adoption par les autorités italiennes du décret-loi 237/2016. Ce dernier, qui énumère spécifiquement les instruments de capital de BMPS soumis à la répartition des charges, ne ferait aucune référence aux instruments FRESH. Un courrier électronique adressé par BMPS à Braesch e.a. le 19 septembre 2017 ferait d’ailleurs ressortir que la Commission a exigé que les mesures prises par les autorités italiennes soient appliquées aux contrats FRESH, ce qui démontrerait que ces mesures ne s’appliquaient pas, en vertu du droit italien, à ces contrats et qu’elles n’auraient pas été appliquées à ceux-ci sans l’intervention de cette institution qui considérait elle-même que lesdites mesures devaient être appliquées en vertu du plan de restructuration rendu contraignant par la décision litigieuse.
43 Il serait sans importance à cet égard que, si les autorités italiennes avaient décidé de restructurer BMPS sans aide d’État, elles auraient tout de même pu imposer les mesures de répartition des charges, y compris l’annulation des contrats FRESH, afin de réduire le déficit de fonds propres de BMPS. En effet, il n’en demeurerait pas moins que, dans les faits, BMPS a été restructurée au moyen d’aides d’État et que les décrets fixant les mesures de répartition des charges ont été adoptés sous le visa de la communication concernant le secteur bancaire, ce qui confirmerait le lien indissociable entre les aides et les mesures de répartition des charges.
44 La Commission n’expliquerait pas la raison pour laquelle la conclusion tirée par le Tribunal au point 40 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les mesures d’aide en cause, telles qu’elles ont été notifiées et déclarées compatibles avec le marché intérieur dans la décision litigieuse, risquaient d’avoir une incidence concrète sur la situation de Braesch e.a., serait inappropriée compte tenu des motifs retenus par le Tribunal dans cet arrêt.
45 Premièrement, le fait que Braesch e.a. ne contestent pas la compatibilité des mesures d’aide en cause avec le marché intérieur ne démontrerait pas que ces mesures ne pouvaient pas avoir d’incidence sur leur situation en lien avec la concurrence, mais ne ferait que refléter la jurisprudence de la Cour, rappelée, notamment, dans l’arrêt du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex (C 83/09 P, EU:C:2011:341, point 59), selon laquelle des personnes ont la qualité de parties intéressées en raison de la violation de leurs droits procéduraux, sans qu’il soit exigé qu’elles invoquent également des questions relatives à la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.
46 Deuxièmement, il ne ressortirait d’aucun passage de l’arrêt attaqué que toute personne nourrissant une quelconque préoccupation au sujet de l’une des hypothèses factuelles présentées dans la notification ou dans les engagements devrait être considérée comme une partie intéressée. Le Tribunal indiquerait, au point 41 de cet arrêt, que c’est le fait que les mesures d’aide en cause, telles qu’elles ont été notifiées et déclarées compatibles avec le marché intérieur dans la décision litigieuse, risquaient d’avoir une incidence concrète sur la situation de Braesch e.a. qui justifiait de les qualifier de « parties intéressées ».
47 Troisièmement, il serait inexact que les autorités italiennes n’étaient pas tenues de s’engager à prendre les mesures de répartition des charges envisagées dans la communication concernant le secteur bancaire et que, partant, le Tribunal a déclaré à tort que ces engagements conditionnaient la déclaration de compatibilité avec le marché intérieur de l’aide octroyée à BMPS. En effet, la Commission elle-même admettrait la nature contraignante de ces mesures en indiquant que, si l’État membre s’écarte des hypothèses factuelles présentées à cette institution, il mettra en œuvre une mesure factuellement différente de celle approuvée qui ne sera pas couverte par l’autorisation de ladite institution. La Cour n’aurait pas jugé différemment au point 100 de l’arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. (C 526/14, EU:C:2016:570), lorsqu’elle a conclu que l’État membre concerné, s’il n’est pas obligé d’imposer des mesures de répartition des charges en vertu de la communication concernant le secteur bancaire, est cependant tenu de les imposer pour que l’aide soit considérée comme compatible avec le marché intérieur. En tout état de cause, en l’espèce, de telles mesures, qui feraient partie des engagements pris par les autorités italiennes, auraient été une condition préalable de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, ainsi qu’il ressortirait des considérants 101 à 110 de la décision litigieuse elle-même.
48 Quatrièmement, l’argument selon lequel la Commission n’est pas en mesure de transformer les engagements offerts par les États membres et les bénéficiaires en conditions d’approbation d’une aide aurait déjà été rejeté par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, Commission/Pays-Bas et ING Groep (C 224/12 P, EU:C:2014:213, points 80 et 81), dans lequel celle-ci a jugé que les engagements pris par les États membres peuvent, pour l’essentiel, être imposés par la Commission comme une condition pour que l’aide puisse être considérée comme compatible avec le marché intérieur.
Appréciation de la Cour
49 Par le présent pourvoi, la Commission reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en ayant jugé, aux points 35 à 41 et 58 de l’arrêt attaqué, que Braesch e.a. avaient qualité pour agir aux fins de demander, par leur recours introduit au titre de l’article 263 TFUE, l’annulation de la décision litigieuse, par laquelle cette institution a considéré que les aides en cause notifiées par la République italienne en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE constituent des « aides d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, qui sont compatibles avec le marché intérieur, au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
50 Cette décision ayant été adressée à cet État membre et non à Braesch e.a., il importe de rappeler que l’article 263, quatrième alinéa, TFUE prévoit deux cas de figure dans lesquels la qualité pour agir est reconnue à une personne physique ou morale pour former un recours contre un acte de l’Union dont elle n’est pas le destinataire. D’une part, un tel recours peut être formé à condition que cet acte la concerne directement et individuellement. D’autre part, une telle personne peut introduire un recours contre un acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution si celui-ci la concerne directement (arrêt du 30 juin 2022, Danske Slagtermestre/Commission, C 99/21 P, EU:C:2022:510, point 41 et jurisprudence citée).
51 En ce qui concerne la question de savoir si Braesch e.a. sont directement et individuellement concernés par la décision litigieuse, au sens de cette disposition, seule examinée par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait (voir, notamment, arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, EU:C:1963:17, p. 223, et du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 33).
52 Étant donné que le recours en première instance concernait une décision adoptée par la Commission en matière d’aides d’État, il y a lieu de rappeler également que, dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État prévue à l’article 108 TFUE, doivent être distinguées, d’une part, la phase préliminaire d’examen des aides instituée au paragraphe 3 de cet article, laquelle a seulement pour objet de permettre à la Commission de se former une première opinion sur la compatibilité partielle ou totale de l’aide en cause avec le marché intérieur, et, d’autre part, la phase d’examen visée au paragraphe 2 dudit article. Ce n’est que dans le cadre de celle-ci, laquelle est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire, que le traité prévoit l’obligation, pour cette institution, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (voir, notamment, arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 94, et du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 35).
53 Il en résulte que, ainsi que le Tribunal l’a rappelé à juste titre au point 59 de l’arrêt attaqué, lorsque, sans ouvrir la procédure formelle d’examen prévue au paragraphe 2 de l’article 108 TFUE, la Commission constate, par une décision prise sur le fondement du paragraphe 3 du même article, qu’une aide est compatible avec le marché intérieur, les bénéficiaires de ces garanties de procédure ne peuvent en obtenir le respect que s’ils ont la possibilité de contester cette décision devant le juge de l’Union. Pour ces motifs, un recours visant à l’annulation d’une telle décision, introduit par un intéressé, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, est recevable lorsque l’auteur de ce recours cherche, par l’introduction de celui-ci, à sauvegarder les droits procéduraux qu’il tire de cette dernière disposition (voir, notamment, arrêts du 19 mai 1993, Cook/Commission, C 198/91, EU:C:1993:197, points 23 à 26 ; du 15 juin 1993, Matra/Commission, C 225/91, EU:C:1993:239, points 17 à 19, ainsi que du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 36).
54 En revanche, si le requérant met en cause le bien-fondé d’une décision d’appréciation de l’aide prise sur le fondement du paragraphe 3 de l’article 108 TFUE ou à l’issue de la procédure formelle d’examen, le simple fait qu’il puisse être considéré comme intéressé, au sens du paragraphe 2 de cet article, ne saurait suffire pour admettre la recevabilité du recours. Ce requérant doit alors démontrer qu’il a un statut particulier, au sens de la jurisprudence rappelée au point 51 du présent arrêt. Il en est notamment ainsi au cas où la position du requérant sur le marché est substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision en cause (voir, notamment, arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 95, ainsi que du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 37).
55 En l’espèce, il est constant que la décision litigieuse a été adoptée au terme de la phase préliminaire d’examen, prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE ainsi que visée à l’article 4, paragraphe 3, du règlement 2015/1589, et, partant, sans que soit ouverte la procédure formelle d’examen, prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi que visée à l’article 4, paragraphe 4, de ce règlement. Or, comme le Tribunal l’a relevé aux points 32 et 60 de l’arrêt attaqué, il n’est pas davantage contesté que, par leur cinquième moyen soulevé devant le Tribunal en vue de l’annulation de cette décision, Braesch e.a. ont invoqué la violation des droits procéduraux qu’ils tireraient de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 6, paragraphe 1, dudit règlement.
56 Dans ces conditions, c’est à juste titre que le Tribunal, afin de déterminer si Braesch e.a. sont directement et individuellement concernés par la décision litigieuse, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, a examiné si ceux-ci ont la qualité d’« intéressé », au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée au point 53 du présent arrêt, un requérant ayant cette qualité remplit ces critères et il est donc recevable à introduire un recours en annulation dirigé contre une telle décision aux fins de sauvegarder ses droits procéduraux.
57 Il y a lieu de constater, toutefois, que le Tribunal a commis une erreur de droit aux points 37, 40, 41 et 58 de l’arrêt attaqué en jugeant que Braesch e.a. avaient cette qualité en l’espèce.
58 À cet égard, il convient de rappeler que la définition de la notion d’« intéressé », telle qu’elle résulte de la jurisprudence de la Cour, a été codifiée par le législateur de l’Union à l’article 1er, sous h), du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), auquel a succédé l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589. Cette dernière disposition définit la notion analogue de « partie intéressée » comme visant « tout État membre et toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, en particulier le bénéficiaire de celle-ci, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles » (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, Ja zum Nürburgring/Commission, C 647/19 P, EU:C:2021:666, point 56 et jurisprudence citée).
59 Si la notion de « partie intéressée » définie à cette dernière disposition inclut ainsi, tout particulièrement, les entreprises concurrentes du bénéficiaire de l’aide (voir, en ce sens, notamment, arrêts du 3 septembre 2020, Vereniging tot Behoud van Natuurmonumenten in Nederland e.a./Commission, C 817/18 P, EU:C:2020:637, point 50, ainsi que du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 36), il n’en demeure pas moins que cette notion vise, ainsi que le Tribunal l’a relevé à bon droit au point 35 de l’arrêt attaqué, un ensemble indéterminé de destinataires (voir, en ce sens, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C 83/09 P, EU:C:2011:341, point 63, ainsi que du 7 avril 2022, Solar Ileias Bompaina/Commission, C 429/20 P, EU:C:2022:282, point 34).
60 Ainsi, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’une entreprise qui n’est pas concurrente directe du bénéficiaire de l’aide peut néanmoins être qualifiée de « partie intéressée », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, pour autant qu’elle fait valoir que ses intérêts peuvent être affectés par l’octroi d’une aide, ce qui exige que cette entreprise démontre, à suffisance de droit, que l’aide risque d’avoir une incidence concrète sur sa situation (voir, en ce sens, notamment, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C 83/09 P, EU:C:2011:341, points 64 et 65, ainsi que du 7 avril 2022, Solar Ileias Bompaina/Commission, C 429/20 P, EU:C:2022:282, point 35). Dès lors, la qualité de « partie intéressée » ne présuppose pas nécessairement une relation de concurrence (arrêt du 2 septembre 2021, Ja zum Nürburgring/Commission, C 647/19 P, EU:C:2021:666, point 58).
61 Après avoir, au point 36 de l’arrêt attaqué, rappelé, en substance, cette jurisprudence, le Tribunal a jugé, aux points 37 à 41 et 58 de cet arrêt, que Braesch e.a. ont démontré, à suffisance de droit, que l’octroi des aides en cause et, partant, l’adoption de la décision litigieuse « risquent d’avoir », selon les termes des points 37 et 41 dudit arrêt, et même « ont », selon les termes du point 58 de celui-ci, une incidence concrète sur leur situation, de telle sorte qu’ils doivent être qualifiés de « parties intéressées », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589.
62 Afin de parvenir à cette conclusion, le Tribunal a relevé, au point 39 de l’arrêt attaqué, que, selon Braesch e.a., la partie de la décision litigieuse qui concerne les mesures de répartition des charges affecte leurs intérêts, en ce que le plan de restructuration, tel qu’il a été approuvé par la Commission, prévoit la possibilité d’annuler les contrats FRESH, ce qui s’est produit ultérieurement à leur détriment, et que, en raison de l’interdépendance entre les différents liens contractuels sous-tendant les instruments FRESH, le préjudice économique qui en résulte à long terme, eu égard à la perte de paiement de coupons liés aux obligations FRESH détenues par eux, est substantiel.
63 À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 40 de l’arrêt attaqué, qu’il était sans pertinence que Braesch e.a. ne contestent pas la compatibilité en tant que telle des aides d’État en cause avec le marché intérieur, au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, dès lors que les engagements des autorités italiennes visant le plan de restructuration et les mesures de répartition des charges font partie intégrante des aides notifiées, de telle sorte que la décision litigieuse porte sur ces aides et ces engagements pris dans leur ensemble. Selon le Tribunal, dans la mesure où lesdites aides et les engagements ayant fait l’objet de l’appréciation de la Commission revêtent un caractère indissociable, en ce que, d’une part, ces engagements conditionnent la déclaration de compatibilité des aides en cause et, d’autre part, la décision litigieuse a autorisé la mise en œuvre de celles-ci tout en rendant lesdits engagements contraignants, la situation de Braesch e.a. se voit nécessairement affectée par l’ensemble de ces éléments, ces requérants ne pouvant défendre leurs intérêts qu’en demandant l’annulation de cette décision dans son intégralité.
64 Il convient de rappeler que, conformément à l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement, lorsque la Commission constate, au terme de la phase préliminaire d’examen instituée à l’article 108, paragraphe 3, TFUE, que la mesure notifiée constitue une « aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, qui ne suscite pas de doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, elle adopte une décision de ne pas soulever d’objections, par laquelle elle déclare que cette mesure est compatible avec le marché intérieur, en vertu des dispositions de l’article 107, paragraphe 3, TFUE.
65 En l’occurrence, ainsi qu’il ressort de l’arrêt attaqué, en particulier de ses points 8 à 12 et 14, la Commission ayant, dans la décision litigieuse, considéré, à l’issue de la phase préliminaire d’examen, que le plan de restructuration et les engagements présentés par la République italienne étaient aptes à restaurer la viabilité à long terme de BMPS et que les mesures de répartition des charges des détenteurs d’actions et de titres subordonnés prévues par ceux-ci limitaient au strict minimum, conformément à la communication concernant le secteur bancaire, le montant des aides en cause notifiées par cet État membre, a estimé que ces aides constituaient des « aides d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, qui pouvaient être considérées comme compatibles avec le marché intérieur pour des motifs de stabilité financière, au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
66 Il y a lieu de relever d’emblée que, par leur recours en première instance, Braesch e.a., ainsi qu’ils l’ont confirmé à maintes reprises lors de l’audience devant la Cour et comme il ressort déjà du point 63 du présent arrêt, ne contestent ni la nature d’« aide d’État » des aides en cause ni leur compatibilité avec le marché intérieur, mais mettent uniquement en cause, ainsi qu’il ressort des points 28 à 32 de l’arrêt attaqué, la conformité au regard du droit de l’Union, en particulier, de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014, du droit de propriété consacré à l’article 17 de la Charte et de plusieurs principes généraux du droit de l’Union, d’une partie des mesures de répartition des charges notifiées par la République italienne, lesquelles sont contenues dans le plan de restructuration décrit dans cette décision et reflétées dans les engagements figurant en annexe à celle-ci.
67 À cet égard, il est constant que les mesures de répartition des charges visées par la décision litigieuse prévoient, comme il ressort des points 39 et 58 de l’arrêt attaqué, sans que cela ait été contesté par la Commission, la possibilité d’annuler les contrats FRESH conclus entre BMPS et JPM au titre de la conversion en fonds propres des titres subordonnés de BMPS.
68 Toutefois, en jugeant, aux points 37, 40, 41 et 58 de l’arrêt attaqué, que cette incidence sur les intérêts des créanciers subordonnés de BMPS résulte des aides d’État en cause et, partant, de la décision litigieuse, au motif que les mesures de répartition des charges visées par celle-ci font partie intégrante, au même titre que le plan de restructuration et les engagements présentés par les autorités italiennes, des aides notifiées, de telle sorte que, par cette décision, la Commission a rendu contraignantes lesdites mesures, le Tribunal a méconnu les règles du droit de l’Union qui régissent la portée de ladite décision et, ce faisant, a commis une erreur de droit entachant cet arrêt d’illégalité.
69 Certes, la Cour a déjà jugé, en substance, que, dans le cas où une mesure d’aide notifiée intègre, sur proposition de l’État membre concerné, des engagements consentis par celui-ci, il y a lieu de considérer, aux fins de vérifier si l’autorisation de mise en œuvre d’une telle mesure d’aide accordée par la Commission à l’issue de la phase préliminaire d’examen est encore d’application dans des circonstances où il est allégué que cet État membre n’a pas respecté ces engagements, que ceux-ci font partie intégrante de la mesure autorisée, dès lors qu’ils ont été pris en compte par cette institution dans le cadre de l’appréciation de la compatibilité avec le marché intérieur des aides d’État en cause, de telle sorte que cette autorisation ne vaut que pour autant que lesdits engagements sont respectés (voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2015, Iglesias Gutiérrez et Rion Bea, C 352/14 et C 353/14, EU:C:2015:691, point 28).
70 Toutefois, il n’en découle pas pour autant que de tels engagements doivent être considérés comme étant imposés en tant que tels par la Commission et que leurs éventuels effets nuisibles sur des tiers soient donc attribuables à la décision adoptée par cette institution.
71 En effet, par la décision litigieuse, adoptée au terme de la phase préliminaire d’examen en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et de l’article 4, paragraphe 3, du règlement 2015/1589, la Commission, afin d’apprécier si les aides d’État en cause suscitaient des doutes quant à leur compatibilité avec le marché intérieur, n’a pas imposé à la République italienne les éléments figurant dans le plan de restructuration et les engagements présentés par cet État membre, lesquels incluaient, notamment, les mesures de répartition des charges des détenteurs d’actions et de titres subordonnés.
72 À cet égard, il convient de souligner, ainsi qu’il ressort déjà des points 52 à 54 et 64 du présent arrêt, que, par une décision telle que la décision litigieuse, la Commission ne peut rien imposer ou interdire à l’État membre concerné, mais est uniquement en droit d’approuver, par une décision de ne pas soulever d’objections, le projet d’aide tel que celui-ci a été notifié par cet État membre, en déclarant cette aide compatible avec le marché intérieur. En revanche, lorsque la Commission éprouve des doutes quant à la compatibilité de l’aide notifiée avec le marché intérieur, elle est tenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et visée à l’article 4, paragraphe 4, du règlement 2015/1589.
73 Ainsi, en l’occurrence, il y a lieu de constater que, par la décision litigieuse, la Commission s’est bornée à autoriser la République italienne à mettre à exécution les aides d’État en cause en prenant note du cadre factuel préalablement défini par cet État membre dans le plan de restructuration et les engagements que celui-ci a notifiés au titre de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, afin de dissiper tout doute quant à la compatibilité de ces aides avec le marché intérieur, au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
74 Il appartenait donc à la République italienne de vérifier qu’elle serait en mesure de respecter les engagements inclus dans l’autorisation accordée par cette décision. À ce titre, il lui incombait, notamment, de s’assurer que ces engagements sont conformes à sa législation nationale et au droit de l’Union pertinents (voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2015, Iglesias Gutiérrez et Rion Bea, C 352/14 et C 353/14, EU:C:2015:691, point 29).
75 Il s’ensuit que la décision litigieuse doit être qualifiée de décision tenant compte des engagements pris volontairement par l’État membre concerné lors de la phase de notification de l’aide d’État en cause (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C 287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, point 67). À supposer même que, comme le font valoir Braesch e.a., la Commission ait poussé les autorités italiennes à inclure les contrats FRESH dans les mesures proposées, il n’en demeure pas moins que pareille inclusion se rattache, en tout état de cause, à des engagements pris par la République italienne, et non pas imposés par la Commission dans la décision litigieuse.
76 C’est donc à juste titre que la Commission a souligné, dans son pourvoi et lors de l’audience devant la Cour, qu’une décision approuvant une aide d’État comme étant compatible avec le marché intérieur à l’issue de la phase préliminaire d’examen, telle que la décision litigieuse, par laquelle la Commission ne soulève pas d’objections à l’encontre d’une telle aide, doit être distinguée d’une « décision conditionnelle », au sens de l’article 9, paragraphe 4, du règlement 2015/1589, adoptée à l’issue de la procédure formelle d’examen, par laquelle la Commission assortit elle-même sa décision approuvant une aide d’État de conditions lui permettant de reconnaître la compatibilité avec le marché intérieur ainsi que d’obligations lui permettant de contrôler le respect de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C 287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, point 67).
77 Dès lors, il ne saurait être considéré que les mesures de répartition des charges notifiées en l’occurrence par la République italienne dans le cadre de la procédure préliminaire d’examen ont été imposées par la décision litigieuse elle-même, ces mesures résultant uniquement d’actes adoptés par cet État membre.
78 Ainsi, d’une part, rien n’empêchait ce dernier de notifier un plan de restructuration et des engagements comportant des mesures différentes, quitte à ce que la Commission soit tenue, dans ce cas, d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et visée à l’article 4, paragraphe 4, du règlement 2015/1589 (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, points 43 et 44).
79 D’autre part, la décision litigieuse, si elle autorise la République italienne à verser les aides notifiées, sans cependant l’y obliger (voir, notamment, arrêt du 20 mai 2010, Todaro Nunziatina & C., C 138/09, EU:C:2010:291, points 52 et 53, ainsi que ordonnance du 30 mai 2018, Yanchev, C 481/17, non publiée, EU:C:2018:352, points 22 et 23), ne constitue pas un titre juridique sur la base duquel il pourrait être interdit à BMPS de payer des coupons aux détenteurs d’obligations FRESH, une telle interdiction trouvant sa source non pas dans cette décision mais dans le droit italien.
80 Il en résulte que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, les mesures de répartition des charges visées par la décision litigieuse n’ont pas été imposées ou rendues contraignantes par la Commission dans cette décision, mais constituent des mesures purement nationales notifiées par la République italienne, en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, sous sa propre responsabilité, qui ont été prises en compte par la Commission en tant qu’élément factuel afin d’apprécier si les aides d’État en cause pouvaient, en l’absence de tout doute à cet égard, être déclarées compatibles avec le marché intérieur à l’issue de la phase préliminaire d’examen.
81 Partant, l’annulation des contrats FRESH, dont Braesch e.a. prétendent qu’elle est susceptible d’entraîner, dans leur chef, en tant que détenteurs des obligations FRESH, un préjudice économique substantiel, ne saurait être considérée comme un effet obligatoire de la décision litigieuse, dès lors qu’elle ne résulte pas de la mise en œuvre des aides en cause en tant que telles. Elle découle, en revanche, des mesures, certes liées dans les faits, mais juridiquement distinctes, adoptées par l’État membre qui a notifié ces aides à la Commission. La circonstance que ces mesures aient, notamment, été adoptées par cet État membre dans le but d’obtenir de la Commission une décision autorisant lesdites aides et qu’elles fassent l’objet d’engagements pris en compte dans une telle décision de cette institution est sans pertinence à cet égard.
82 Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par les arguments invoqués par Braesch e.a. à l’appui de leur recours.
83 En premier lieu, en ce qui concerne leur argumentation tirée des conséquences découlant d’une violation des mesures de répartition des charges visées par la décision litigieuse, il est exact que, comme il ressort du point 69 du présent arrêt, l’autorisation de mise en œuvre des aides d’État en cause, accordée par la Commission dans cette décision, ne vaut que pour autant que tous les éléments pris en considération par cette institution dans ladite décision aux fins de l’appréciation de la compatibilité desdites aides avec le marché intérieur soient respectés.
84 Ainsi, toute méconnaissance par BMPS des engagements pris par la République italienne en matière de répartition des charges, tel que le paiement de coupons à des détenteurs d’instruments financiers relevant de ces engagements, donnerait lieu à une application abusive des aides en cause, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, lu en combinaison avec l’article 1er, sous g), du règlement 2015/1589. En effet, ces aides seraient, dans un tel cas, utilisées par le bénéficiaire en violation d’une décision prise en application de l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement, au sens de cet article 1er, sous g), dès lors que celui-ci mettrait ainsi en œuvre des aides différentes de celles approuvées par la Commission dans la décision litigieuse (voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2022, Autonome Provinz Bozen, C 102/21 et C 103/21, EU:C:2022:272, point 38).
85 En conséquence, la Commission pourrait, conformément à l’article 20 du règlement 2015/1589, ouvrir à l’égard de ces aides la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et visée à l’article 4, paragraphe 4, de ce règlement, en vue d’imposer à la République italienne la suppression ou la modification des aides ayant été appliquées de façon abusive ainsi que, le cas échéant, d’ordonner, en vertu de l’article 16, paragraphe 1, dudit règlement, applicable mutatis mutandis à cette procédure aux termes de l’article 20 de celui-ci, la récupération des montants d’aide versés illégalement.
86 Par ailleurs, des aides qui seraient mises en œuvre sans correspondre à celles qui ont été notifiées et autorisées par la Commission dans la décision litigieuse pourraient aussi être considérées comme des « aides nouvelles », au sens de l’article 1er, sous c), du règlement 2015/1589, lu en combinaison avec l’article 1er, sous b), de celui-ci, qui, ayant été octroyées en violation de l’article 108, paragraphe 3, dernière phrase, TFUE, constitueraient des « aides illégales », au sens de l’article 1er, sous f), de ce règlement, de sorte que les juridictions nationales pourraient également ordonner leur recouvrement (voir, par analogie, arrêt du 5 mars 2019, Eesti Pagar, C 349/17, EU:C:2019:172, points 87 à 89).
87 Toutefois, si la République italienne pourrait ainsi être tenue de récupérer les aides en cause, c’est non pas en raison du fait que les mesures de répartition des charges figurant en annexe à la décision litigieuse auraient été imposées par cette dernière, la Commission ne disposant pas, comme il a été relevé au point 72 du présent arrêt, d’un tel pouvoir dans le cadre de la phase préliminaire d’examen, mais, ainsi qu’il ressort des points 84 et 86 de cet arrêt, au motif que lesdites aides ne correspondraient plus aux mesures notifiées par cet État membre au titre de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et ne seraient donc plus couvertes par l’autorisation de mise en œuvre accordée par la Commission dans ladite décision, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.
88 En deuxième lieu, en ce qui concerne l’argumentation de Braesch e.a. tirée de la communication concernant le secteur bancaire, selon laquelle, en substance, celle-ci subordonnerait la compatibilité avec le marché intérieur de toute aide accordée aux banques dans le contexte de la crise financière à l’adoption de mesures de répartition des charges, il y a lieu de constater que, certes, ainsi que Braesch e.a. l’ont fait observer à juste titre, et comme il ressort du point 12 de l’arrêt attaqué, la Commission a examiné, aux considérants 101 à 110 de la décision litigieuse, la conformité des aides en cause aux dispositions de cette communication, et cela afin de s’assurer que le montant de ces aides se limite au minimum nécessaire, de réduire les distorsions de concurrence dans le marché intérieur et de remédier à l’aléa moral en veillant à ce que les actionnaires et créanciers subordonnés de BMPS contribuent de façon appropriée, dans le respect des points 40 à 46 de ladite communication, aux coûts de la restructuration par une répartition adéquate des charges.
89 La République italienne ayant, en l’espèce, notifié des mesures de répartition des charges en vue d’être autorisée par la Commission à accorder les aides en cause, cette dernière était d’ailleurs tenue de procéder à un tel examen.
90 En effet, en adoptant des règles de conduite, telles que celles figurant dans la communication concernant le secteur bancaire, afin d’établir les critères sur la base desquels elle entend évaluer la compatibilité avec le marché intérieur des aides envisagées par les États membres et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, cette institution s’autolimite dans l’exercice du pouvoir d’appréciation que l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE lui confère à cet égard, et ne saurait, en principe, se départir de ces règles, sous peine de se voir sanctionnée, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, points 39 et 40 ainsi que jurisprudence citée).
91 Toutefois, il n’en demeure pas moins, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, que la circonstance qu’une aide d’État prévoit une mesure de répartition des charges réunissant les critères énoncés à cette communication, en particulier à son point 44, si elle constitue une condition, en principe, suffisante pour que la Commission déclare cette aide compatible avec le marché intérieur, n’est pas strictement nécessaire à cette fin (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, point 99).
92 En effet, par l’adoption des règles de conduite contenues dans la communication concernant le secteur bancaire, la Commission s’est uniquement autolimitée dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, en ce sens que, si un État membre lui notifie un projet d’aide d’État qui est conforme à ces règles, cette institution doit, en principe, autoriser ce projet. Toutefois, les États membres conservent la faculté de notifier à la Commission des projets d’aide d’État qui ne satisfont pas aux critères prévus par cette communication et, ainsi qu’il ressort du point 45 de celle-ci, cette institution peut autoriser de tels projets dans des circonstances exceptionnelles (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, point 43).
93 La Commission ne saurait, en effet, renoncer, au moyen de l’adoption de règles de conduite, à l’exercice du pouvoir d’appréciation que l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE lui confère. L’adoption d’une communication telle que celle concernant le secteur bancaire n’affranchit donc pas la Commission de son obligation d’examiner les circonstances spécifiques exceptionnelles qu’un État membre invoque, dans un cas particulier, afin de solliciter l’application directe de cette disposition et de motiver son refus de faire droit à une telle demande (arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, point 41 ainsi que jurisprudence citée).
94 Il s’ensuit que la communication concernant le secteur bancaire n’est pas susceptible de créer des obligations autonomes à la charge des États membres, mais se limite à établir des conditions visant à assurer la compatibilité avec le marché intérieur des aides d’État accordées aux banques dans le contexte de la crise financière, dont la Commission doit tenir compte dans l’exercice de la large marge d’appréciation dont elle dispose en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE. Cette communication n’a donc pas d’effet contraignant à l’égard des États membres et, en particulier, n’est pas susceptible de leur imposer de procéder à des mesures de répartition des charges (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, points 44, 45 et 70).
95 Partant, un État membre n’est pas tenu d’imposer aux banques en difficulté, préalablement à l’octroi de toute aide d’État, de convertir les titres subordonnés en fonds propres ou de procéder à une réduction de leur valeur ni de faire contribuer pleinement ces titres à l’absorption des pertes. En pareil cas, l’aide d’État envisagée ne pourra toutefois pas être regardée comme ayant été limitée au strict minimum nécessaire, selon les termes du point 15 de la communication concernant le secteur bancaire, l’État membre ainsi que les banques bénéficiaires des aides d’État envisagées prenant alors le risque de se voir opposer une décision de la Commission les déclarant incompatibles avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2016, Kotnik e.a., C 526/14, EU:C:2016:570, point 100).
96 En troisième lieu, en ce qui concerne l’argumentation de Braesch e.a. tirée de l’obligation incombant à la Commission de vérifier la conformité de toutes mesures notifiées par la République italienne avec le droit de l’Union, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, la procédure prévue à l’article 108 TFUE ne doit jamais aboutir à un résultat qui serait contraire aux dispositions spécifiques du traité (arrêts du 15 juin 1993, Matra/Commission, C 225/91, EU:C:1993:239, point 41 ; du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C 156/98, EU:C:2000:467, point 78, et du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C 390/06, EU:C:2008:224, point 50). Ainsi, une aide qui, en tant que telle ou par certaines de ses modalités, viole des dispositions ou principes généraux du droit de l’Union ne peut être déclarée compatible avec le marché intérieur (arrêts du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C 390/06, EU:C:2008:224, point 50, et du 22 septembre 2020, Autriche/Commission, C 594/18 P, EU:C:2020:742, point 44).
97 En effet, lorsque les modalités d’une aide sont à ce point indissolublement liées à l’objet de l’aide qu’il ne serait pas possible de les apprécier isolément, leur effet sur la compatibilité ou l’incompatibilité de l’aide dans son ensemble doit nécessairement être apprécié à travers la procédure prévue à l’article 108 TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 22 mars 1977, Iannelli & Volpi, 74/76, EU:C:1977:51, point 14, ainsi que du 15 juin 1993, Matra/Commission, C 225/91, EU:C:1993:239, point 41).
98 C’est ainsi que la Cour a jugé qu’une aide d’État en faveur d’une activité économique appartenant au secteur de l’énergie nucléaire dont l’examen révélerait qu’elle viole des règles du droit de l’Union en matière d’environnement ne saurait être déclarée compatible avec le marché intérieur en application de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE (arrêt du 22 septembre 2020, Autriche/Commission, C 594/18 P, EU:C:2020:742, point 45). En effet, l’activité économique au cœur du projet qui est financé par une aide est indissociable de l’objet de celle-ci, de telle sorte que la Commission était tenue de s’assurer, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, que le projet de financement de la centrale nucléaire en cause ne violait pas lesdites règles du droit de l’Union.
99 De même, la Cour a écarté, dans des circonstances où, en substance, un État membre avait modifié les conditions déterminant l’identité des personnes susceptibles de bénéficier d’un régime d’aides préexistant, ce qui avait prétendument eu pour conséquence de violer le principe d’égalité de traitement à l’égard de certains opérateurs économiques, un argument aux termes duquel une telle violation du principe d’égalité de traitement, résultant de cette modification du régime, ne saurait, en tout état de cause, entacher d’illégalité la décision de la Commission approuvant ce régime, tel que modifié (arrêt du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C 390/06, EU:C:2008:224, points 49 à 52). En effet, de telles modalités, qui déterminent les conditions d’éligibilité à un régime d’aides, sont, elles aussi, indissociables de l’aide en tant que telle et relèvent donc des éléments que la Commission est appelée à examiner ainsi que, le cas échéant, à approuver, de telle sorte que, si de telles modalités aboutissent à une violation de principes généraux du droit de l’Union, une décision adoptée par la Commission qui autorise un tel régime est nécessairement entachée d’illégalité à son tour.
100 Il s’ensuit que, en l’occurrence, la Commission ne pouvait pas déclarer les aides d’État notifiées par la République italienne comme étant compatibles avec le marché intérieur, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, sans s’être préalablement assurée que ces aides, de même que la recapitalisation de BMPS qu’elles visaient à financer, ne violent pas, par ailleurs, d’autres dispositions ou principes généraux pertinents du droit de l’Union.
101 Ainsi, il est constant que, dans la décision litigieuse, comme il ressort de ses considérants 120 à 136, la Commission a vérifié que les aides d’État en cause étaient conformes à la directive 2014/59 et est parvenue à la conclusion, au considérant 137 de cette décision, que ces aides remplissaient les conditions énoncées à l’article 32, paragraphe 4, sous d), de cette directive, parmi lesquelles figure leur approbation au titre des articles 107 et 108 TFUE, pour que les formes de soutien financier public exceptionnel à un établissement de crédit ou à une entreprise d’investissement, telles qu’elles sont visées à cet article 32, paragraphe 4, sous d), lesquelles sont destinées à empêcher ou à remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre et à préserver la stabilité financière, ne déclenchent pas une procédure de résolution.
102 Dans le cadre de cette analyse, la Commission a, notamment, vérifié, au considérant 132 de la décision litigieuse, mais aussi aux considérants 101 à 110 de celle-ci, que les mesures de répartition des charges prévues par le plan de restructuration étaient adéquates aux fins de limiter le montant de l’aide octroyée au strict minimum nécessaire pour réaliser l’objectif consistant à recapitaliser BMPS.
103 En revanche, la Commission n’avait pas à vérifier si cette répartition des charges décidée par la République italienne violait elle-même les droits que Braesch e.a. affirment tirer du droit de l’Union ou du droit national. En effet, une telle violation, à la supposer établie, découlerait non pas de l’aide en tant que telle, de son objet ou de ses modalités indissociables, mais, ainsi qu’il ressort du point 81 du présent arrêt, des mesures prises par cet État membre aux fins d’obtenir de la Commission une décision autorisant ladite aide à l’issue de la phase préliminaire d’examen.
104 Dans ces conditions, si un tiers s’estime affecté par des mesures adoptées par les autorités d’un État membre dans le contexte de la restructuration d’une entreprise, le fait que ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’un plan de restructuration nécessitant le versement d’aides étatiques et que, par conséquent, cet État membre notifie ces aides à la Commission afin de solliciter l’approbation desdites aides à l’issue de la phase préliminaire d’examen ne confère pas à ce tiers la qualité de « partie intéressée », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, dans le cadre de la procédure menée par cette institution au titre de l’article 108 TFUE. Dans un tel cas, si ledit tiers considère que, en raison de l’adoption de telles mesures, l’État membre concerné a méconnu le droit de l’Union, c’est devant le juge national, seul compétent à cet égard, qu’il doit contester la légalité de ces mesures, ce juge ayant la faculté, voire l’obligation s’il statue en dernier ressort, de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, au besoin, pour l’interroger quant à l’interprétation ou la validité des dispositions pertinentes du droit de l’Union.
105 Or, en l’occurrence, ainsi qu’il a déjà été constaté au point 66 du présent arrêt, Braesch e.a. ne prétendent pas être affectés par les aides en cause, dont ils ne contestent d’ailleurs ni qu’elles constituent des « aides d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ni qu’elles sont compatibles avec le marché intérieur, au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, mais ils allèguent subir l’incidence des mesures de répartition des charges visées par la décision litigieuse, dont la conformité au droit de l’Union, faisant l’objet des moyens invoqués à l’appui de leur recours en première instance, soulève, selon eux, des doutes sérieux qui auraient dû amener la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen.
106 Toutefois, ainsi qu’il ressort des points 69 à 80 du présent arrêt, ces mesures de répartition des charges sont des mesures purement nationales qui ont été notifiées par la République italienne, sous sa propre responsabilité, et qui n’ont ainsi pas été imposées par la Commission et sont donc juridiquement distinctes des aides en cause, cette institution les ayant uniquement prises en compte en tant qu’élément factuel aux fins de l’adoption de la décision litigieuse. C’est, dès lors, ainsi qu’il découle du point 104 du présent arrêt, exclusivement aux juridictions nationales compétentes qu’il incombe de contrôler la légalité desdites mesures au regard du droit national et du droit de l’Union pertinents.
107 À cet égard, il importe de souligner qu’une juridiction nationale qui, ayant été saisie de la légalité des mesures de répartition des charges en cause, annulerait celles-ci en totalité ou en partie au motif qu’elles sont entachées d’illégalité n’irait pas à l’encontre de la décision litigieuse, dès lors que cette dernière n’impose pas ces mesures et n’a pas apprécié leur conformité au droit de l’Union.
108 Dans le cas où ladite juridiction parviendrait à la conclusion, à la lumière de l’interprétation du droit de l’Union qui serait fournie par la Cour à l’issue d’un éventuel renvoi préjudiciel au titre de l’article 267 TFUE, que les mesures de répartition des charges en cause sont, en totalité ou en partie, illégales, il incomberait à la République italienne, si cette illégalité ne lui permettait plus de respecter l’intégralité des engagements pris à l’égard de la Commission en mettant en œuvre les aides notifiées conformément à l’autorisation accordée par la décision litigieuse, de notifier de nouvelles mesures en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, sous peine d’être tenue, ainsi qu’il ressort des points 84 à 86 du présent arrêt, de récupérer les aides déjà versées en vertu de cette décision.
109 Il en ressort que, d’une part, contrairement à ce que Braesch e.a. ont soutenu lors de l’audience devant la Cour, ceux-ci ne sont nullement privés du droit à un recours juridictionnel effectif garanti à l’article 47, premier alinéa, de la Charte et, d’autre part, c’est à tort que le Tribunal a jugé, au point 40 de l’arrêt attaqué, que Braesch e.a. ne pouvaient défendre leurs intérêts qu’en demandant l’annulation de la décision litigieuse au juge de l’Union.
110 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit en ce que le Tribunal a considéré, aux points 37, 40, 41 et 58 de cet arrêt, que Braesch e.a. doivent être qualifiés de « parties intéressées », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589.
111 Partant, il convient d’accueillir le moyen unique soulevé par la Commission dans son pourvoi.
112 En conséquence, il y a lieu d’annuler l’arrêt attaqué.
Sur le recours devant le Tribunal
113 Conformément à l’article 61, premier alinéa, seconde phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer elle-même définitivement sur le litige lorsque celui-ci est en état d’être jugé.
114 Tel est le cas, en l’espèce, s’agissant de l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission au cours de la procédure devant le Tribunal, en ce que cette dernière reproche à Braesch e.a. un défaut de qualité pour agir, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, pour demander l’annulation de la décision litigieuse.
115 À titre liminaire, il convient de constater que, ainsi que la Commission le soutient à juste titre dans cette exception, la décision litigieuse, qui est adressée à la République italienne, ne constitue pas un acte réglementaire aux termes de l’article 263, quatrième alinéa, second membre de phrase, TFUE, dès lors qu’elle n’est pas un acte de portée générale (arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 92 ainsi que jurisprudence citée).
116 Dans ces conditions, il convient uniquement d’examiner, conformément à la jurisprudence rappelée au point 50 du présent arrêt, si, ainsi que le soutient la Commission dans son exception d’irrecevabilité, Braesch e.a. ne peuvent pas être considérés comme étant directement et individuellement concernés par cette décision, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, premier membre de phrase, TFUE.
117 En premier lieu, en ce que Braesch e.a. visent, par leur cinquième moyen, à sauvegarder les droits procéduraux qu’ils tireraient de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 6, paragraphe 1, du règlement 2015/1589, il convient de relever que, pour les motifs exposés aux points 64 à 110 du présent arrêt, ils n’ont pas la qualité d’« intéressés » et de « parties intéressées », au sens, respectivement, de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 1er, sous h), de ce règlement, de telle sorte qu’ils ne peuvent pas, à cette fin, être considérés comme étant directement et individuellement concernés par cette décision, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, premier membre de phrase, TFUE.
118 Il s’ensuit que Braesch e.a. n’ont pas qualité pour agir, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, afin de sauvegarder des droits procéduraux qu’ils tireraient de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 6, paragraphe 1, du règlement 2015/1589.
119 En second lieu, en tant que Braesch e.a. visent, par leurs quatre premiers moyens, à mettre en cause le bien-fondé de la décision litigieuse, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence issue de l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17), à laquelle il est fait référence aux points 51 et 54 du présent arrêt, ces parties ne pourraient, dans un tel cas, prétendre être individuellement concernées par cette décision, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, premier membre de phrase, TFUE, que si ladite décision les atteignait en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait, ce qui serait, notamment, le cas si leur position sur le marché était substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision litigieuse.
120 En l’occurrence, il est cependant constant que Braesch e.a. ne soutiennent pas que la décision litigieuse exerce une quelconque incidence sur leur position concurrentielle sur le marché, mais se bornent, en substance, à faire valoir, d’une part, qu’ils ont adressé à la Commission une lettre exprimant leurs préoccupations quant à l’incidence négative de cette décision sur leur situation et, d’autre part, que ladite décision fait référence, lorsqu’elle décrit, à son considérant 32 et à la note en bas de page 35 figurant sous ce point, les mesures de répartition des charges prévues par le plan de restructuration concernant les créanciers subordonnés de BMPS, au contrat d’usufruit relatif aux instruments FRESH, tel que mentionné au point 2 de l’arrêt attaqué.
121 Or, de telles circonstances ne démontrent nullement que Braesch e.a. se trouvent dans une situation de fait qui les individualise d’une manière analogue à celle du destinataire, dès lors que ceux-ci sont affectés par les mesures de répartition des charges visées par la décision litigieuse en leur qualité de détenteurs d’instruments financiers de la même manière que l’ensemble des autres détenteurs d’instruments affectés par ces mêmes mesures. Il est sans incidence à cet égard, contrairement à ce que Braesch e.a. ont fait valoir, notamment, lors de l’audience devant la Cour, que, à la différence de ces autres instruments financiers, les instruments FRESH ne seraient pas, quant à eux, visés explicitement par le décret-loi 237/2016.
122 Par ailleurs, il y a lieu de souligner que, conformément à la jurisprudence de la Cour, le seul fait, à le supposer avéré, que Braesch e.a. auraient joué un rôle actif dans le cadre de la phase préliminaire d’examen menée par la Commission ne saurait suffire pour les reconnaître comme étant individuellement concernés par la décision litigieuse en l’absence de démonstration que leur position sur le marché a été substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 38 et jurisprudence citée).
123 Il s’ensuit que Braesch e.a. ne sont pas individuellement concernés par la décision litigieuse, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 51 et 54 du présent arrêt.
124 Eu égard au caractère cumulatif des conditions prévues à l’article 263, quatrième alinéa, premier membre de phrase, TFUE, selon lesquelles une personne doit être à la fois directement et individuellement concernée par l’acte dont l’annulation est demandée, le fait que l’une d’entre elles fasse défaut dans le chef d’un requérant a pour conséquence que le recours en annulation qu’il a formé contre cet acte doit être considéré comme étant irrecevable (voir, en ce sens, arrêts du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C 583/11 P, EU:C:2013:625, point 76, ainsi que du 4 décembre 2019, Polskie Górnictwo Naftowe i Gazownictwo/Commission, C 342/18 P, non publié, EU:C:2019:1043, point 37).
125 Il en résulte que Braesch e.a. n’ont pas davantage qualité pour agir afin de contester le bien-fondé de la décision litigieuse.
126 En conséquence, il convient d’accueillir l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission en première instance en ce que cette dernière reproche à Braesch e.a. un défaut de qualité pour agir, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, pour demander l’annulation de la décision litigieuse.
127 Il y a, dès lors, lieu de rejeter le recours en première instance comme étant irrecevable.
Sur les dépens
128 Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.
129 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.
130 En l’espèce, Braesch e.a. ayant succombé et la Commission ayant conclu à la condamnation de ces derniers aux dépens, il y a lieu de les condamner aux dépens afférents à la procédure devant le Tribunal et au présent pourvoi.
Par ces motifs, la Cour (grande chambre) déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 février 2021, Braesch e.a./Commission (T 161/18, EU:T:2021:102), est annulé.
2) Le recours introduit en première instance par Anthony Braesch, Trinity Investments DAC, Bybrook Capital Master Fund LP, Bybrook Capital Hazelton Master Fund LP et Bybrook Capital Badminton Fund LP, tendant à l’annulation de la décision C(2017) 4690 final de la Commission, du 4 juillet 2017, concernant l’aide d’État SA.47677 (2017/N) – Italie, nouvelle aide et plan de restructuration modifié de Banca Monte dei Paschi di Siena, est rejeté comme étant irrecevable.
3) Anthony Braesch, Trinity Investments DAC, Bybrook Capital Master Fund LP, Bybrook Capital Hazelton Master Fund LP et Bybrook Capital Badminton Fund LP sont condamnés à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission relatifs tant à la procédure de première instance qu’à celle de pourvoi.