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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. com. B, 4 mars 2010, n° 07/02975

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cabinet Hudault (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Filhouse

Conseillers :

M. Bertrand, Mme Brissy-Prouvost

Avoués :

SCP Fontaine-Macaluso Jullien, SCP Curat- Jarricot

Avocats :

SCP Fortunet & Associés, SCP Sarlin Chabaud Marchal Mallet

T. com Nîmes, du 7 juin 2007

7 juin 2007

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu l'assignation délivrée le 24 janvier 2006 à la SAS Cabinet Hudault, à Villeneuve-les-Avignon (30400) devant le tribunal de commerce de Nîmes, par M. Thierry H., qui sollicitait notamment :

- l'annulation de la décision d'exclusion de cette société le frappant,

- la condamnation sous astreinte de 300,00 € par jour de retard de la société à lui remettre les procès-verbaux des assemblées générales tenues les 22 septembre et 28 octobre 2005,

- la condamnation de la SAS Cabinet Hudault à lui payer une somme de 25.000,00 € à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice moral,

- l'exécution provisoire du jugement,

- sa condamnation à lui payer une somme de 5.000,00 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu la décision en date du 7 juin 2007, de cette juridiction qui a, notamment :

- retenu sa compétence, au visa de l'article 42 du nouveau code de procédure civile,

- dit et jugé que la décision d'exclusion prise à l'encontre de M. Thierry H. a été prise en violation des dispositions légales et statutaires,

- annulé la décision d'exclusion de M. Thierry H., en date du 28 octobre 2005,

- condamné la SAS Cabinet Hudault à payer à M. H. la somme symbolique de 1,00 € au titre du préjudice moral,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la SAS Cabinet Hudault à payer à M. H. la somme de 2.000,00 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- rejeté les autres demandes des parties et condamné la SAS Cabinet Hudault aux dépens ;

Vu l'appel de cette décision interjeté le 5 juillet 2007 par la SAS Cabinet Hudault ;

Vu l'arrêt n°237 rendu par cette cour d'appel le 10 septembre 2009, qui a, notamment :

- reçu les appels en la forme et, avant dire droit au fond,

- ordonné la réouverture des débats à la conférence du magistrat de la mise en état du jeudi 15 octobre 2009 à 9 h 30,

- enjoint à la SCP FONTAINE-MACALUSO-JULLIEN, avoué de la SAS Cabinet Hudault, de communiquer à son adversaire la pièce n°30 de son bordereau, comportant toutes ses pages et non tronquée comme elle l'avait fait précédemment,

- enjoint aux parties de conclure sur les conséquences juridiques à tirer de l'encaissement sans réserve, le 28 février 2006, par M. Thierry H., du prix de rachat de la totalité de ses actions par la SAS Cabinet Hudault,

- réservé tous autres droits et moyens des parties, ainsi que les dépens ;

Vu les dernières conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour le 21 décembre 2009 et signifiées à son adversaire le 18 décembre précédent, auxquelles est joint un bordereau récapitulatif des pièces communiquées, dans lesquelles la SAS Cabinet Hudault soutient notamment que :

- M. Thierry H. a accepté sans réserve le paiement de ses 1001 parts sociales en encaissant le 28 février 2006 la somme de 109.609,50 € versée le 25 janvier 2006, peu important que son banquier l'ait placée sur un compte intitulé séquestre, alors qu'aucune convention de séquestre n'a été conclue avec l'appelante,

- dès lors la cession des parts sociales est parfaite et M. Thierry H. a perdu sa qualité d'associé et donc son droit d'agir en nullité de la décision d'exclusion de la société le visant, faute d'intérêt et de qualité d'associé,

- ses demandes doivent donc être déclarées irrecevables,

- subsidiairement, il n'y a pas lieu à annulation de la décision du 28 octobre 2005, au vu des articles 7, 12 et 13 des statuts,

- plus subsidiairement, si la décision d'exclusion était annulée, M. Thierry H. doit être condamné à restituer à la SAS Cabinet Hudault la somme de 109.609,50 € qu'il a perçue ;

Vu les dernières conclusions n°2 déposées au greffe de la cour le 17 décembre 2009 et signifiées à son adversaire le même jour, auxquelles est joint un bordereau récapitulatif des pièces communiquées, dans lesquelles M. Thierry H. soutient avoir encaissé le prix de ses parts sociales avec des réserves, conteste avoir donné valablement son consentement à la cession des actions par l'encaissement du prix de vente de celles-ci, et demande notamment la confirmation de la décision entreprise et la condamnation de la SAS Cabinet Hudault à lui payer une somme de 25.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral, outre celle de 5.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 11 janvier 2010 ;

Vu les écritures des parties auxquelles il y a lieu de se référer pour une plus ample relation des faits, de la procédure et des moyens de celles-ci ;

SUR CE :

SUR LA PROCÉDURE :

Attendu que la décision du tribunal de commerce d'Avignon de retenir sa compétence territoriale n'est pas critiquée par les parties en cause d'appel ; que le jugement déféré doit donc être confirmé de ce chef ;

Attendu que la fin de non-recevoir d'irrecevabilité tirée du défaut prétendu de qualité et d'intérêt des demandes de M. Thierry H., fondées sur la perte alléguée de sa qualité d'associé après le 28 février 2006, invoquée par l'appelante, doit être rejetée ; qu'en effet, à la date de la décision d'assemblée générale dont il conteste la validité, le 28 octobre 2005, M .Thierry H. avait bien la qualité d'associé et il a donc toujours qualité et intérêt pour contester cette décision dont il prétend qu'elle lui a causé un préjudice personnel, avant la cession de ses parts sociales ;

Attendu que désormais la pièce n°30 du bordereau de l'appelante a été complètement et régulièrement communiquée à l'intimé, comme l'avait enjoint la cour dans son précédent arrêt, pour respecter le principe du contradictoire ;

SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :

sur la validité de la décision d'exclusion de M. Thierry H. de la SAS Cabinet Hudault :

Attendu que M. Thierry H. était associé au sein de la SA Cabinet Hudault, société d'expertise pour les sociétés d'assurances, établie à Villeneuve les Avignon (30400), depuis le 1er août 1997 et qu'il l'est demeuré après la transformation de celle-ci en SAS, décidée par l'assemblée générale extraordinaire du 21 février 2001 ;

Qu'il fût également salarié de cette société, en qualité de directeur général, alors que son frère Didier H., également associé, en était le président directeur général ;

Qu'il soit constant que, victime d'une rechute d'un accident du travail, M. Thierry H. a été en arrêt de travail depuis le 9 juin 2004, puis licencié le 1er août 2007 ;

Que dans une lettre du 6 juin 2005, M. Didier H., agissant au nom de la société, demandait à son frère de céder ses parts sociales, invoquant l'impossibilité future prévisible pour M. Thierry H. de reprendre ses activités d'expert au sein de la société en raison de son état de santé, ceci en application des statuts imposant aux actionnaires d'être des professionnels en exercice ;

Que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 septembre 2005, la SAS Cabinet Hudault, sous la signature de son président directeur général Didier H., lui a réclamé, notamment, la restitution de divers matériels précédemment mis à sa disposition pour exercer sa profession d'expert en assurance (appareil photo, dictaphone, véhicule de fonction) et le remboursement de frais personnels pris en charge par l'entreprise, pour 2.284,50 € ;

Qu'en réponse à cette dernière lettre, M. Thierry H., le 15 septembre 2005 à écrit à son frère Didier, lui proposant de restituer les matériels encore détenus par lui et réclamant le paiement de sommes restant dues par la société à son égard ;

Que la SAS Cabinet Hudault a tenu une assemblée générale extraordinaire le 28 octobre 2005, dont l'objet était l'exclusion de deux associés et la suspension de leurs droits de vote jusqu'à la cession de leurs actions, selon la convocation adressée le 23 septembre précédent à M. Thierry H., par lettre recommandée avec accusé de réception ;

Que par une autre lettre recommandée avec accusé de réception du même jour, son frère Didier, au nom de la société, l'informait de ce que l'assemblée générale se prononcerait sur son exclusion en qualité d'associé à la fin du mois d'octobre, conformément aux statuts ;

Qu'il lui rappelait que le préambule des statuts prévoyait que chaque associé s'était engagé à conditionner sa participation au capital à l'exercice effectif et permanent de l'activité d'expertise, de conseil ou de consultant ; qu'il considérait que selon les statuts, la perte, quelle qu'en soit la cause, de cette condition d'activité était considérée comme essentielle et déterminante, entraînant de plein droit la disparition de la qualité d'associé et le retrait définitif de la société par la cession intégrale de sa participation ;

Que dans cette lettre, invoquant également l'article 13 alinéa 3 des statuts qui sanctionne des agissements ou comportements de nature à nuire ou à porter atteinte à l'image de la société dont il aurait été l'auteur, de nombreuses fois, il lui notifiait l'exclusion envisagée qui sera prononcée le 28 octobre 2005 lors de l'assemblée générale, l'invitant à présenter ses observations éventuelles par écrit 10 jours avant cette date ;

Que l'assemblée générale extraordinaire de la SAS Cabinet Hudault du 28 octobre 2005, selon le procès-verbal des délibérations qui est produit, a adopté deux résolutions, à la majorité de 1.498 voix sur 2.500 :

- la première décidant d'exclure, notamment, M. Thierry H. en qualité d'associé à compter de ce jour, après avoir pris connaissance de la correspondance adressée le 23 septembre 2005 par M. Didier H., rappelant à son frère les motifs de la décision de l'assemblée, en application du préambule et des articles 7 et 13 paragraphe 3 des statuts,

- la seconde décidant, conformément à l'article 13 § 3 des statuts, de suspendre les droits de vote de M. Thierry H. jusqu'à la date de cession de ses actions ;

Attendu que le fait que M. Didier H., représentant la société, ait écrit à son frère Thierry le 23 septembre 2005 pour l'informer qu'une assemblée générale extraordinaire de la société se tiendrait le 28 octobre 2005 pour se prononcer sur l'exclusion de deux associés, dont lui-même, en lui indiquant notamment :' je te notifie l'exclusion envisagée qui sera prononcée le 28 octobre 2005 à 11 h lors d'une assemblée générale qui se tiendra au cabinet etc.' constitue plus une maladresse rédactionnelle qu'une décision sociale anticipée, de nature à vicier la décision de l'assemblée générale régulièrement prise ce jour-là ; qu'elle ne justifie donc pas la demande d'annulation de cette délibération de la SAS Cabinet Hudault, régulièrement votée à la majorité des parts sociales, après la convocation de tous les associés, conformément aux statuts sociaux et règles légales applicables en la matière ;

Mais attendu que, d'une part, la délibération de l'assemblée générale du 28 octobre 2005 prononce l'exclusion de M. Thierry H. sans motif objectif particulier, se référant seulement à la lettre du 23 septembre 2005 susvisée et aux articles 7 et 13 § 3 des statuts, alors que la convocation adressée aux associés pour participer à cette réunion ne précisait pas non plus les motifs de l'exclusion à prononcer ; que ceci est imprécis et insuffisant pour garantir le respect des droits de l'associé exclu à se défendre devant l'assemblée générale, alors qu'il est constant que les motifs d'exclusion non détaillés contenus dans la lettre du 23 septembre 2005 étaient contestés par l'associé ;

Que d'autre part sur les deux motifs exposés dans la lettre du 23 septembre 2005, l'un tenait à des agissements ou comportements susceptibles de porter atteinte à l'image de la société, prétendument commis de nombreuses fois par M. Thierry H. et prévus à l'article 13 des statuts mais non datés ni détaillés quant à leur nature dans cette lettre ni dans la convocation adressée séparément le même jour, pour qu'il participe à cette assemblée générale ;

Que ceci ne permettait pas à l'associé de présenter une défense quelconque sur ce point lors de l'assemblée générale ; que la décision d'exclusion de la société n'est donc pas fondée valablement sur ce grief simplement allégué puis retenu par le vote majoritaire des associés, étant relevé que M. Didier H. à lui seul détenait la majorité absolue des actions de la société ;

Que le second motif était tiré de l'arrêt de travail de longue durée de M. Thierry H., pour une raison médicale incontestée, qui était assimilé à la perte par celui-ci de la condition d'exercice effectif et permanent de l'activité professionnelle au sein du cabinet d'expertise, exigée en préambule des statuts, perte entraînant de plein droit la disparition de la qualité d'associé et le retrait définitif de la société, par la cession intégrale de sa participation aux autres associés ou à la société ;

Qu'une telle disposition conventionnelle, en ce qu'elle a pour objet d'exclure un associé de la société contre son gré pour des faits non fautifs et relatifs à son activité professionnelle, s'avère déroger aux principes de la liberté du travail et de la liberté du commerce et de l'industrie ; qu'elle doit donc être interprétée strictement en cas de litige entre les associés relatif à son application et son étendue ;

Que la commune intention des parties à la rédaction de ces statuts sociaux était, selon également les autres stipulations de ce préambule, destinée à fournir à la société un apport en industrie de la part de chacun de ses associés, ceux-ci pouvant toutefois se faire substituer par une société qu'ils contrôlent pour cette contribution, tout en leur interdisant l'exercice d'une activité concurrente, à peine d'exclusion (article 13.3 des statuts) et en réglementant de façon restrictive l'agrément de nouveaux associés (article 12) ;

Que dès lors qu'il était accepté, par les statuts comme par les décisions sociales, que l'apport en industrie ainsi requis pouvait résulter d'un contrat de travail salarié, ce qui était le cas de M. Thierry H., il ne pouvait être considéré, en application desdits statuts, que la situation d'arrêt de travail pour cause d'accident du travail de ce salarié, conforme aux dispositions légales d'ordre public en la matière, caractérisait de sa part un défaut d'exercice d'activité professionnelle au profit de la société, tel qu'exigé dans le préambule, ce concours étant seulement suspendu pour un motif légitime pendant la durée de l'arrêt de travail ;

Que c'est ajouter au texte des statuts que de considérer qu'une inaptitude temporaire, pour raison médicale, à exercer l'activité salariée au service de la société caractérise la perte de cette activité professionnelle entraînant de plein droit la perte de la qualité d'associé et l'obligation de céder ses actions ;

Qu'en l'espèce la cour retient que le 28 octobre 2005 M. Thierry H. était alors toujours salarié de la société, en arrêt de travail légitime, et n'avait donc nullement perdu cette condition d'activité professionnelle au sein du cabinet statutairement exigée, son retour au travail ne pouvant être, à cette date, totalement exclu, pas plus que sa situation d'arrêt de travail à la suite d'un accident du travail ne pouvait lui être imputée à faute, comme un manquement à ses obligations sociales statutaires ;

Que de même il n'enfreignait pas l'article 7 des statuts en détenant, en qualité de personne physique toujours salariée de la société, des actions de celle-ci, son arrêt de travail ne lui ôtant pas la qualité de salarié tant qu'il n'était pas licencié ;

Qu'en conséquence il s'avère que la décision de l'assemblée générale du 28 octobre 2005 a été prise en violation des droits de la défense de M. Thierry H., associé exclu, et sans motif légitime ; Qu'elle caractérise un abus de droit des associés majoritaires, aucun motif objectif autre que le conflit personnel existant entre l'associé majoritaire, M. Didier H. et son frère Thierry, n'imposant à la SAS Cabinet Hudault de prononcer l'exclusion de cet associé à ce moment, sans attendre la fin de son contrat de travail salarié, alors en cours ;

Que ces faits, caractérisant une intention de nuire, justifient l'annulation de cette décision ; que le jugement déféré doit donc être confirmé de ce chef, par ces motifs ajoutés à ceux non contraires qu'il a retenus à l'appui de cette décision ;

sur la qualité d'associé de la SAS Cabinet Hudault de M. Thierry H.

Attendu que dans ses conclusions d'appel, M. Thierry H. demande ensuite à la cour de constater qu'il est toujours associé de la SAS Cabinet Hudault, au motif qu'après son licenciement, le 1er août 2007, il n'a fait l'objet d'aucune procédure d'exclusion de la société ;

Mais attendu qu'il apparaît qu'il a, en fait, cédé la totalité de ses 1.001 actions de la société à celle-ci, après l'assemblée générale du 28 octobre 2005 dont l'annulation était poursuivie, ayant notamment encaissé le 28 février 2006 le paiement du prix offert par lettre en date du 15 décembre 2005 pour ses actions rachetées par la société elle-même, soit la somme de 109.609,50 € ; qu'il est constant aussi que la SAS Cabinet Hudault détient, à son nom depuis cette date, les 1.001 actions précédemment détenues par M. Thierry H. sans que celui-ci ait contesté ce transfert de propriété ;

Attendu que la cour constate que l'existence de cette cession d'actions, quelles qu'en aient été les conditions qui sont discutées dans les conclusions des parties, laquelle n'a, en elle-même, jamais été remise en cause par M. Thierry H. ; que celui-ci en effet ne sollicite pas de la cour pas plus qu'il ne l'avait sollicité dans son assignation devant le tribunal de commerce de Nîmes, en suite de l'annulation de son exclusion de la société le 28 octobre 2005, que soit prononcée également l'annulation de la cession de ses actions qui en a découlé en application des statuts mais qui constitue un acte juridique distinct de la décision sociale annulée ; qu'il n'en sollicite pas non plus la résolution pour vice de son consentement ;

Qu'il n’ait jamais demandé et ne demande pas plus devant la cour la condamnation de la SAS Cabinet Hudault à lui restituer les 1.001 actions cédées le 28 février 2006 et effectivement transférées alors en pleine propriété à la SAS Cabinet Hudault, ni n'a offert et n'offre, en contrepartie, de lui restituer le prix de vente de 109.609,50 € qu'il a perçu sans protestation ni réserves exprimées le 28 février 2006 ;

Que dès lors cette cession produit à ce jour tous ses effets juridiques et depuis le 28 février 2006, comme le soutient l'appelante, M. Thierry H. a perdu la qualité d'associé de la SAS Cabinet Hudault, pour ne plus détenir aucune action de cette société depuis lors ; ceci nonobstant l'annulation de la délibération de l'assemblée générale du 28 octobre 2005 l'ayant exclu de la société, qui a pour seule conséquence de le réintégrer dans ses droits d'associés à compter du 28 octobre 2005, jusqu'à la cession de ses actions, le 28 février 2006 ;

Attendu que, sur l'interrogation de la cour dans son précédent arrêt, M. Thierry H. soutient qu'il n'a pas encaissé le prix de vente de ses parts sociales sans réserves, produisant désormais une lettre officielle de son conseil, en date du 23 mars 2006 (pièce n°66), indiquant à l'avocat adverse que la somme de 109.609,50 € avait été placée sur un compte spécifique de séquestre à la BNP Paribas, en raison de la nature litigieuse du paiement et des contestations en cours concernant la nature des sommes ;

Mais attendu que ces réserves sont postérieures de près de deux mois de la réception du chèque et d'un mois de l'encaissement de la somme représentant le prix de vente des parts sociales, et non antérieures ou concomitantes avec celui-ci, le 28 février 2006 ; que l'encaissement a donc été fait, à cette date, sans protestation ni réserves expresses exprimées par M. Thierry H. ;

Que la décision prise par M. Thierry H. de placer cette somme, dès son encaissement sur un compte bancaire particulier, intitulé séquestre, mais ne résultant pas d'une véritable convention de séquestre conclue avec la SAS Cabinet Hudault, s'analyse en un simple contrat de dépôt et non en un séquestre conventionnel ; Que M. Thierry H. conservait en effet toute liberté de retirer cet argent de ce compte bancaire à première demande de sa part auprès de son banquier, sans condition préalable ni accord d'un tiers qui soit requis et ne justifie d'ailleurs pas, comme le relève l'appelante, que cette somme se trouve encore sur ce compte bancaire ;

Qu'il ne constitue donc pas une réserve exprimée à l'acceptation du prix de cession des parts sociales transmis par acte d'huissier de justice en date du 25 janvier 2006 ;

Qu'il convient en conséquence de constater que par cette cession d'actions dont l'annulation ou la résolution ne sont pas sollicitées, et qui a pris effet le 28 février 2006, M. Thierry H. a alors perdu sa qualité d'associé de la SAS Cabinet Hudault ; qu'il doit donc être débouté de sa demande tendant à dire et juger qu'il est toujours associé de la société, après l'annulation de la décision sociale de son exclusion en date du 28 octobre 2005 ;

sur le préjudice moral de M. Thierry H.

Attendu que la SAS Cabinet Hudault a commis un abus de droit en excluant sans motif objectif et légitime M. Thierry H. de la société, le 28 octobre 2005 ; que ce comportement fautif entraîne sa responsabilité et son obligation de réparer le préjudice ainsi causé à ce dernier ;

Que M. Thierry H., frère de l'associé majoritaire dirigeant la société qui a procédé à son exclusion, M. Didier H., était l'un des associés fondateurs en 1997 de cette petite société essentiellement familiale et destinée à l'exercice en commun de l'activité professionnelle d'expertise ou de conseil ;

Que le caractère injustifié et brusque, sans attendre son licenciement pour cause d'incapacité médicale d'exercer sa profession, de la décision prise par la société à son encontre est manifestement de nature à avoir profondément blessé moralement M. Thierry H., par ailleurs alors atteint d'une affection physique invalidante à la suite d'un accident du travail ;

Que c'est donc à tort que le jugement déféré a considéré que ce dommage pouvait être réparé par l'allocation d'une somme symbolique de 1,00 € à titre de dommages et intérêts ; que la cour évalue en l'espèce la réparation de ce préjudice moral, due par la SAS Cabinet Hudault, à la somme de 10.000,00 €, à titre de dommages et intérêts ;

SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS :

Attendu qu'il y a lieu d'allouer à M. Thierry H. la somme de 3.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, que devra lui payer la SAS Cabinet Hudault, condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, en sus de celle de 2.000,00 € déjà mise à sa charge pour les frais irrépétibles de la procédure exposés en première instance par le jugement déféré, également confirmé de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu les articles 4, 5, 6, 9, 12 et 16 du code de procédure civile,

Vu les articles 1134, 1156 et 1382 du code civil,

Vu l'article L.227-16 du code de commerce,

Vu l'arrêt n°237 prononcé le 10 septembre 2009 par cette cour,

Rejette la fin de non-recevoir opposée à l'action de M. Thierry H. par la SAS Cabinet Hudault, pour défaut d'intérêt ou de qualité ;

Confirme, par ajout de motifs, le jugement du tribunal de commerce de Nîmes en date du 7 juin 2007, en ce qu'il a annulé la décision de l'assemblée générale de la SAS Cabinet Hudault en date du 28 octobre 2005, ayant prononcé l'exclusion de M. Thierry H., associé ;

La réforme sur l'évaluation du préjudice moral subi par M. Thierry H. et condamne la SAS Cabinet Hudault à payer à ce dernier, en réparation de ce préjudice moral lié à cette exclusion injustifiée et abusive, la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts ;

Constate que par la cession de ses 1.001 actions au profit de la SAS Cabinet Hudault intervenue le 28 février 2006, M. Thierry H. a alors perdu la qualité d'associé de cette société ;

Confirme la décision entreprise pour le surplus ;

Condamne la SAS Cabinet Hudault aux dépens d'appel ainsi qu'à payer une somme de 3.000,00 € à M. Thierry H., par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes des parties ;

Dit que la SCP d'avoués CURAT-JARRICOT pourra recouvrer directement contre la partie ci-dessus condamnée, ceux des dépens dont elle aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.