Cass. 3e civ., 27 février 2008, n° 06-19.348
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Paloque
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
Me Blondel, SCP Bachellier et Potier de la Varde, SCP Boutet, SCP Defrenois et Levis, SCP Monod et Colin, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 13 avril 2006), que M. X... et la société civile immobilière X... (la SCI), promoteurs immobiliers, ont fait édifier un bâtiment dénommé "résidence Vaite II", sur un terrain pentu, les terrasses et les remblais de cette résidence étant retenus par un mur de soutènement réalisé par la société Chonsui ; que les 19 et 20 décembre 1998, de fortes pluies s'étant abattues sur l'île de Tahiti, dont l'intensité a justifié un arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle, le mur de soutènement s'est effondré provoquant des dégâts importants à un immeuble situé en contrebas appartenant à l'Office Polynésien de l'Habitat (OPH, venant aux droits de l'OTHS) ; que ce dernier a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite II ( le syndicat ), son assureur, la société Groupe des assurances nationales (Gan) ainsi que M. X..., la SCI, la société Chonsui et la société Axa en réparation de son préjudice ; que le syndicat a appelé en garantie la société Chonsui, M. X... et la SCI ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal n° E 06-19348 de la société Chonsui :
Attendu que la société Chonsui fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec M. X... et la SCI, à garantir le syndicat des condamnations mises à sa charge, alors, selon le moyen, que l'existence de vices de construction affectant un ouvrage qui, en place depuis plusieurs années, s'est écroulé précisément au moment d'un événement climatique exceptionnel qualifié de catastrophe naturelle, n'empêche le constructeur de se prévaloir d'un cas de force majeure que si, sans ces vices de construction, l'ouvrage aurait résisté à cet événement naturel ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des constatations de l'arrêt que le mur de soutènement de la Résidence Vaite II se serait effondré même si les pluies exceptionnelles ayant donné lieu à un arrêté de calamités naturelles ne s'étaient pas produites, ni qu'à l'inverse, le mur ne se serait pas effondré ce jour-là s'il n'avait pas été affecté de vices de construction ; qu'en décidant néanmoins que la responsabilité de l'entreprise Chonsui était engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, la cour d'appel a violé ces textes ;
Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que les fortes précipitations pluviales survenues les 19 et 20 décembre 1998 ne pouvaient être qualifiées ni de véritables dépressions, ni de tempêtes, ni encore moins de cyclones, que de tels événements étaient susceptibles d'arriver en période des pluies dans les zones tropicales, et qu' ils ne possédaient pas les caractères d'imprévisibilité et d'irrésistibilité de la force majeure, la cour d'appel a pu en déduire que la société Chonsui ne justifiait pas d'une cause étrangère exonératoire de la responsabilité qu'elle encourait sur le fondement de l'article 1792 du code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué formé par la société Gan (n° E 06-19.348), ci-après annexé :
Attendu qu'ayant formé, le 15 septembre 2006, un pourvoi principal contre l'arrêt du 13 avril 2006, la société Gan est irrecevable, en application de l'article 624 du code de procédure civile, à formuler, le 28 juin 2007, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
Sur les moyens uniques des pourvois incidents formés par M. Roger X... et de la SCI n° E 06-193.48 et C 06-19.415), réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu que M. Roger X... et la SCI avaient la qualité de constructeurs de l'ouvrage, la cour d'appel, qui a constaté qu'ils avaient commis, avec la société Chonsui, des fautes dans l'exécution de leur mission, dans une proportion qu'elle a souverainement appréciée, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais, sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Gan (n° C 06-19.415) :
Vu l'article 334 du code de procédure civile ;
Attendu que la garantie est simple ou formelle selon que le demandeur en garantie est lui-même poursuivi comme personnellement obligé ou seulement comme détenteur d'un bien ;
Attendu que pour rejeter la demande de garantie formée par la société Gan à l'encontre de M. X..., de la SCI et de la société Chonsui, l'arrêt retient qu'il n'existe aucun lien de droit entre eux ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle, une telle action étant distincte de l'action directe prévue par le code des assurances, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie formé par la société Gan contre M. X..., la SCI X... et la société Chonsui, l'arrêt rendu le 13 avril 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée.