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Décisions

Cass. 1re civ., 18 avril 1989, n° 87-19.142

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsard

Rapporteur :

M. Grégoire

Avocat général :

M. Dontenwille

Avocats :

SCP Vier et Barthélémy, Me Copper-Royer

Aix-en-Provence, du 1 juill. 1987

1 juillet 1987

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er juillet 1987), que durant la nuit du 20 au 21 juin 1983 un individu pénétra, par la porte-fenêtre laissée ouverte, dans la chambre que les époux Y... occupaient au rez-de-chaussée de l'hôtel Floréal, à Vence, et y déroba des bijoux, objets et espèces d'une valeur totale de 150 000 francs, que leurs propriétaires avaient laissés sur une table pendant leur sommeil ; que sur la demande en réparation des époux Y... la cour d'appel, estimant que leur préjudice était imputable à la fois à une faute de l'hôtelier et à leur propre imprudence, a condamné la société anonyme Le Floréal à leur payer 75 000 francs de dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses trois branches :

Attendu que la société anonyme Le Floréal fait grief à l'arrêt, en premier lieu, d'avoir retenu la réalité du vol allégué par les époux Y... sans rechercher si les objets prétendûment dérobés "avaient effectivement été déposés dans leur chambre" ; qu'elle soutient en second lieu que la cour d'appel n'a pas caractérisé la faute de l'hôtelier permettant d'exclure la limitation légale de réparation fixée par l'article 1953, alinéa 3, du Code civil ; qu'elle lui reproche enfin d'avoir retenu la faute d'imprudence des époux Y... sans en déduire qu'elle avait été la cause unique du dommage dont ils demandaient réparation ;

Mais attendu qu'après avoir souverainement estimé qu'étaient démontrées tant la réalité que l'importance du vol commis dans la chambre des époux Y..., la cour d'appel a constaté que le portail donnant accès au jardin de l'hôtel demeurait ouvert toute la nuit sans faire l'objet d'une surveillance particulière et que le concierge procédait seulement à une ronde toutes les deux heures ; qu'elle a pu considérer que cette mesure unique était insuffisante eu égard à la configuration des lieux, et en conclure que la faute ainsi retenue à la charge de l'hôtelier constituait à tout le moins l'une des causes du préjudice subi par les époux Y... ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses trois branches :

Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré que la société anonyme Le Floréal était responsable pour moitié seulement du préjudice dont ils ont été victimes, alors, selon le moyen, que la cour d'appel n'a répondu ni aux conclusions faisant valoir qu'ils n'avaient conservé dans leur chambre que les bijoux qui leur étaient strictement nécessaires, eu égard à leur niveau social, ni aux motifs du jugement, infirmé sur ce point, selon lesquels les époux Y... pouvaient légitimement croire "que leur présence dans les lieux constituait une garde suffisante de leurs biens" ; qu'ils soutiennent enfin qu'en constatant que l'établissement ne présentait pas une sécurité suffisante, sans en déduire l'entière responsabilité de l'hôtelier, la cour d'appel a violé l'article 1953 du Code civil ;

Mais attendu que la cour a pu estimer, sans s'arrêter à des détails d'argumentation, que les époux Y..., en ne plaçant pas, pour la nuit, des objets de valeur dans un meuble fermé à clé, avaient commis une imprudence qui, ayant rendu possible la perpétration du vol, justifiait un partage de responsabilité ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident.