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Décisions

Cass. 3e civ., 29 novembre 2000, n° 98-21.540

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

M. Bourrelly

Avocat général :

M. Weber

Avocats :

SCP Parmentier et Didier, SCP Gatineau, Me Blanc, SCP Boré, Xavier et Boré, Me Le Prado, SCP Rouvière et Boutet, Me Vuitton

Poitiers, du 9 sept. 1998

9 septembre 1998

Sur le premier moyen du pourvoi principal des époux Z... :

(Publication sans intérêt) ;

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal des époux Z... :

Vu l'article 1733 du Code civil ;

Attendu que le locataire répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 9 septembre 1998), qu'au cours de la nuit du 28 février au 1er mars 1991, un incendie a pris naissance dans le logement, appartenant à M. D..., pris à bail, successivement par M. C... jusqu'à la première de ces dates, puis par les époux Z... ; que le feu s'est propagé dans d'autres locaux du même immeuble en copropriété et y a causé des dommages ; que M. D... et son assureur, la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (Maif) ont assigné la société Agence du marché, chargée par M. D... de la location, et la société Azur assurances (société Azur), son assureur, M. C... et son assureur, la société Les Mutuelles du Mans, les époux Z... et la société Assurances groupe de Paris, leur assureur, ainsi que MM. A... et B..., ès qualités de syndics du syndicat des copropriétaires, en réparation du préjudice occasionné à M. D... ; que MM. X... et Y..., propriétaires d'autres logements endommagés, ont demandé réparation à MM. A... et B..., à M. D... et à son assureur, à Mme Z... et à la société Garantie mutuelle des fonctionnaires ; que le syndicat des copropriétaires et son assureur, la société Assurances générales de France (société AGF), ont assigné en réparation les époux D..., les époux Z... et la société Agence du marché ;

Attendu que, pour condamner les époux Z... in solidum avec M. C... et son assureur, la société les Mutuelles du Mans, la société Agence du marché et son assureur, la société Azur, à payer une certaine somme à M. D..., l'arrêt constate que les époux Z..., titulaires d'un bail devant prendre effet à compter du 1er mars 1991, à 0 heure, ont dressé l'état des lieux le 27 février 1991, se sont rendus dans le local le lendemain, vers 21 heures 30, après avoir reçu un jeu de clés de l'Agence du marché, chargée par M. D... de la location, ont alors déplacé les meubles, tenté de remettre une prise électrique dans son logement, fait fonctionner et arrêté les radiateurs électriques, et que M. Z... a fumé une cigarette qu'il dit avoir éteinte dans un cendrier placé dans la cuisine, et en déduit que les époux Z... ont pris, sans équivoque, possession des lieux par anticipation, et doivent être considérés comme devenus locataires de l'appartement, conjointement avec M. C..., à partir du 28 février 1991 à 21 heures 30 ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser l'existence de rapports locatifs avant la date prévue pour la prise d'effet du bail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal des époux Z... :

Vu l'article 1733 du Code civil, ensemble l'article 1384, alinéa 2, du même Code ;

Attendu que pour condamner les époux Z... à payer certaines sommes à M. X..., à la société AGF et au syndicat des copropriétaires, l'arrêt retient que la cause du sinistre ne peut être attribuée à une imprudence des époux Z... qui ne sont pas responsables sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, et qu'ayant pris sans équivoque possession des lieux par anticipation, ceux-ci en sont devenus locataires conjointement avec le locataire en titre, M. C..., ce qui rend applicable à leur encontre la présomption de responsabilité de l'article 1733 du Code civil, enfin, qu'est recevable l'action de M. X... contre les époux Z... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 1733 du Code civil n'est applicable que dans les rapports entre bailleur et preneur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Agence du marché et de la société Azur assurances :

Vu l'article 1383 du Code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Agence du marché et son assureur, la société Azur, à payer en réparation du préjudice causé par l'incendie certaines sommes à MM. X... et D..., au syndicat des copropriétaires et à leurs assureurs respectifs, et à garantir M. C... et son assureur, la société les Mutuelles du Mans, des condamnations prononcées contre eux, l'arrêt retient que si la faute commise par la société Agence du marché qui, remettant quelques heures avant la prise d'effet du bail aux époux Z... un jeu de clés de l'appartement qu'elle avait été chargée de louer, a permis à ceux-ci de prendre possession des lieux, n'a pas de lien direct établi avec le sinistre, elle est à l'origine, par le cumul des locations effectives, de la complexité juridique d'imputation de la responsabilité de l'incendie, donc du litige lui-même, et entraîne l'obligation pour la société Agence du marché d'en réparer les conséquences ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

Et, sur le moyen unique du pourvoi provoqué de M. C... et de la compagnie les Mutuelles du Mans :

Vu l'article 1733 du Code civil, ensemble, l'article 1384, alinéa 2, du même Code ;

Attendu que, pour condamner M. C... et la société les Mutuelles du Mans à payer une certaine somme au syndicat des copropriétaires et une autre à la société AGF, l'arrêt retient que, locataire en titre, M. C... ne peut se dégager de la présomption de responsabilité édictée par l'article 1733 du Code civil pour le motif d'une perte de jouissance du bien loué ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 1733 du Code civil n'est applicable que dans les rapports entre bailleur et preneur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a condamné M. A..., ès qualités, à payer diverses sommes, mis hors de cause les compagnies GMF et M. B..., ès qualités, et condamné M. X... à payer des dommages-intérêts à la compagnie GMF, l'arrêt rendu le 9 septembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges.