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Décisions

CA Aix-en-Provence, 11e ch. B, 31 janvier 2013, n° 12/02988

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Coleno

Conseillers :

M. Junillon, Mme Camugli

Avocats :

Me Barathon, SCP Tollinchi Perret Vigneron

T. com. Tarascon, du 9 janv. 2012

9 janvier 2012

La S.A.R.L. HABESO était propriétaire d'un fonds de commerce de bar hôtel restaurant guinguette exploité RN7 à Senas sous l'enseigne Hôtel restaurant la Ginguette Senassaise, dans des locaux appartenant aux époux X.

Par acte du 15 mai 2008 les époux X ont consenti à M. Y un bail précaire pour l'exploitation du fonds de commerce pour la période du 15 septembre au 15 novembre 2008.

La S.A.R.L. Habeso dont Mme X est la gérante a consenti à M.Y un contrat non daté de location gérance du fonds de commerce à compter du 15 novembre 2008 pour se terminer le 31 septembre 2010.

Par arrêté du 12 juin 2009, le maire de la ville de Senas ordonnait la fermeture de l'établissement jusqu'à exécution de travaux de mise en conformité aux prescriptions de sécurité.

Par jugement du 19 mars 2010 le tribunal de commerce de Tarascon a arrêté le plan de redressement par continuation de la S.A.R.L. Habeso, de X et de Z son épouse.

Par jugement du 9 août 2010 le tribunal de commerce de Tarascon a condamné la S.A.R.L. Habeso et les époux X à payer à M. Y la somme de 40.000 euros au titre des travaux de mise en conformité.

Par jugement du 25 février 2011 le tribunal de commerce de Tarascon a prononcé la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. Habeso et des époux X pour non-respect de leurs engagements, Maître W étant nommé liquidateur.

Par ordonnance du 11 mai 2011 le juge commissaire à la demande de Maître W a prononcé la résiliation du contrat de location gérance consenti à M. Y au visa de l'article L 641-11-1 du code de commerce, en raison du fait que le fonds de commerce était fermé depuis plus de deux ans, que les travaux de mise en conformité ne pourront pas être exécutés, faute de financement, et que la clientèle n'existait plus.

Par jugement du 9 janvier 2012 le tribunal de commerce de Tarascon saisi par M.Y d'un recours à l'égard de cette ordonnance, l'en a débouté.

Par acte du 20 février 2012 M.Y a relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

M.Y par conclusions déposées et signifiées le 18 mai 2012 auxquelles il est fait expressément référence pour le détail de l'argumentation demande à la cour de réformer la décision, de constater que la résiliation judiciaire du contrat de location gérance porte une atteinte excessive à ses intérêts de dire que les conditions de l'article L 641-11-1-IV du code de commerce ne sont pas réunies et de condamner Maître W es qualité à lui payer la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il souligne qu'il était inscrit au registre du commerce jusqu'au 3 décembre 2009, que la fermeture administrative et la cassation d'activité sont imputables aux bailleurs qui n'ont pas satisfait à leur obligation de délivrance, et qui sont mal venus à lui reprocher cet état de fait, que l'atteinte excessive à ses intérêts avait été déjà relevée par une précédente ordonnance du tribunal de commerce de Tarascon du 5 août 2009, qu'elle est caractérisée par le fait qu'il est domicilié <adresse>.

Maître W par conclusions déposées et signifiées le 19 juillet 2012 conclut à la confirmation de la décision et demande à la cour de déclarer le contrat de location gérance dont bénéficie M.Y inopposable, de constater la disparition du fonds de commerce pour perte de clientèle, de prononcer la résiliation du contrat de location gérance pour défaut d'objet et de condamner M.Y à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que M.Y n'est plus inscrit au registre du commerce depuis le 3 décembre 2009 du fait d'une 'cessation d'activité, suppression du fonds de commerce,' que le contrat de location gérance n'a pas fait l'objet de publicité, ce qui le rend inopposable, que les travaux de mise en conformité nécessaires à la réouverture ne pourront se faire faute de liquidité, qu'à défaut d'exploitation et de clientèle le fonds de commerce n'existe plus, que la résiliation du contrat est nécessaire à la poursuite des opérations de liquidation, et qu'enfin la décision du tribunal de commerce de Tarascon du 5 août 2009 rejetant la demande de résiliation du contrat de location gérance présentée par la société HABESO a été rendue alors que les bailleurs et la société Habeso étaient in bonis.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 novembre 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La demande principale de Maître W sur laquelle a été rendue la décision critiquée est fondée sur l'article L 641-11-1 IV qui dispose que le contrat en cours peut être résilié a la demande du liquidateur, lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent, la résiliation est prononcée par le juge commissaire si elle est nécessaire aux opérations de liquidation et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du contractant.

C'est à juste titre que M.Y souligne une telle demande présuppose que le contrat de location gérance n'est pas caduc, ce qui aurait rendu sans objet la demande de résiliation.

S'agissant d'une demande de résiliation fondée sur l'article L 641 11-1-IV, M.Y ne peut utilement opposer l'obligation de délivrance, une telle inexécution ne constituant pas un cas de dérogation à l'application de ces dispositions.

Par ailleurs, la perspective d'une expulsion, qui constitue la conséquence directe de la résiliation du contrat de location gérance, ne saurait à elle seule en l'absence de tout élément particulier suffire à caractériser une atteinte excessive aux droits de M. Y.

La mise en location gérance n'a pas fait l'objet de publicité et ne figure pas sur l'extrait K bis de la société Habeso, l'exploitation a cessé et l'immatriculation de M.Y au registre du commerce a été radiée à compter du 3 décembre 2009 pour cessation d'activité et suppression du fonds de commerce.

Dans ces circonstances Maître W est fondé à soutenir que le contrat de location gérance est inopposable et que faute de clientèle il a perdu l'un de ses élément essentiels.

L'établissement dans lequel est exploité le fonds de commerce a fait l'objet d'un arrêté de fermeture du maire de Senas du 12 Juin 2009.

Les travaux de mise en conformité nécessaires à la réouverture du fonds de commerce ont fait l'objet d'un rapport d'expertise judiciaire établi par M. A, dont les conclusions ont été retenues par le tribunal de commerce de Tarascon qui par jugement du 9 août 2010 et jugement rectificatif du 21 mars 2011 a condamné les époux X et la société Habeso sous astreinte journalière à effectuer les travaux préconisés à concurrence de 22.000 euros pour les époux X et 16.000 euros pour la société HABESO.

Maître W affirme sans être démenti qu'il n'a pas les liquidités pour financer ces travaux, de sorte qu'il n'existe aucune perspective de réouverture ou de reprise d'activité.

La décision rendue par le tribunal de commerce de Tarascon qui a rejeté le 5 août 2009 la demande en résiliation du contrat de location gérance présentée par le loueur n'est pas transposable par analogie, cette décision ayant été rendue dans un conteste différent alors que les débiteurs de l'obligation de mise en conformité faisaient l'objet d'un plan de redressement, ce qui n'est plus le cas, leur liquidation ayant été prononcée, et que la décision de fermeture venait juste d'intervenir.

M.Y fait état d'une promesse de vente dont il est bénéficiaire et qui a entraîné le versement d'un acompte, mais cette acquisition n'a pas été finalisée, il n'est ni démontré ni même prétendu qu'elle est en voie de l'être, les premiers juges ont relevé que M.Y n'a jamais démontré sa capacité à acquérir ni le fonds ni l'immeuble, et aucun élément nouveau n'est présenté devant la cour sur ce point qui sera tenu pour acquis.

En conséquence, M.Y ne peut soutenir que la résiliation du contrat de location gérance portant sur un fond qu'il n'exploite pas, et qu'il n'est plus en mesure d'exploiter pour des raisons tant juridiques que matérielles tenant à l'absence de conformité des lieux, la perte de clientèle, le défaut d'immatriculation au registre du commerce et l'inopposabilité aux tiers est susceptible d'entraîner à son égard des conséquences excessives.

La résiliation du contrat étant nécessaire aux opérations de liquidation et particulièrement à la vente de l'actif immobilier, la résiliation du contrat a été a juste titre approuvée par la décision déférée qui a dit que l'ordonnance du juge commissaire devrait recevoir son plein effet.

La décision déférée sera donc confirmée sans qu'il y ait lieu de statuer sur les demandes subsidiaires de Maître W, et sans qu'il y ait matière à application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant contradictoirement

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M.Y aux dépens d'appel.