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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 10 novembre 2022, n° 21/04409

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

MMA IARD Assurances Mutuelles (SA), MMA IARD (SA), Generali Assurances IARD (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Delapierregrosse

Conseillers :

Mme Rauline, Mme Malardel

Avocats :

Me Quentel-Henry, Me Rochet Bernadac, Me Ropert, Me David, Me Chelin

TJ de Lorient, du 19 mai 2021

19 mai 2021

Exposé du litige :

Suivant contrat en date du 29 mai 2008, M. et Mme [S] ont confié à M. [D] [T], exerçant sous l'enseigne commerciale 'Bat'Innov', une mission complète de maîtrise d'œuvre pour la construction d'une maison d'habitation sur la commune d’ [Localité 10].

Le lot 'chauffage géothermique' a été confié à la société Geothermic, aux droits de laquelle vient la société Etao/Ebea 35, pour un prix de 11 895,42 euros TTC.

Le lot 'carrelage' incluant la chape du plancher chauffant a été confié à la société Jean-Marc Tual, pour un prix forfaitaire de 12 368,07 euros qui a été majoré en cours de chantier pour atteindre la somme de 16 481,02 euros.

Au jour de la réalisation des travaux, la société Jean-Marc Tual était assurée en responsabilité civile décennale auprès de la société MMA IARD.

Les travaux de construction ont débuté au mois de juin 2008 et les époux [S] ont pris possession des lieux le 1er août 2009.

Le 22 septembre 2009, un procès-verbal de réception sans réserve a été régularisé avec la société Geothermic. Le 15 octobre 2009, un procès-verbal de réception avec réserves a été régularisé avec la société Jean-Marc Tual.

Exposant que des désordres étaient apparus affectant le carrelage et que la mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 mai 2017 à la société Jean-Marc Tual était restée sans effet, les époux [S], par actes d'huissier des 12, 13 et 21 juin 2017, ont fait assigner M. [T], la société Jean-Marc Tual et son assureur la société MMA IARD, la société Etao/Ebea 25 et son assureur la société CRAMA, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lorient, aux fins d'expertise judiciaire.

Il a été fait droit à cette demande par ordonnance du 11 juillet 2017, désignant M. [C] [R] en qualité d'expert.

Les opérations d'expertise ont été rendues communes et opposables par ordonnance du 16 janvier 2018 à la société Generali Assurances IARD, devenue assureur de la société Jean-Marc Tual à compter du 1er janvier 2016.

L'expert a déposé son rapport le 20 juin 2018.

Par actes d'huissier des 4 et 6 décembre 2018, M. et Mme [S] ont fait assigner les sociétés Jean-Marc Tual, MMA IARD, MMA Assurances Mutuelles, M. [T] et la société Generali Assurances IARD, devant le tribunal de grande instance de Lorient en indemnisation de leurs préjudices.

Par acte d'huissier du 20 décembre 2019, la société Jean-Marc Tual a appelé en intervention forcée la société Generali Assurances IARD.

Par un jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 19 mai 2021, le tribunal judiciaire de Lorient a :

- dit que le rapport d'expertise est opposable à M. [T] ;

- déclaré M. [T] et la société Jean-Marc Tual responsables sur le fondement de la responsabilité décennale des désordres affectant l'immeuble des époux [S] ;

- dit que la clause d'exclusion de solidarité contenue dans le contrat de maîtrise d'œuvre régularisé entre M. [T] et les époux [S] n'était pas opposable à ces derniers ;

- dit que la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles devaient leur garantir à la société Jean-Marc Tual, tant au titre des désordres matériels qu'au titre des désordres immatériels ;

- dit que les franchises contractuelles n'étaient pas opposables aux époux [S] ;

- dit que la société Jean-Marc Tual sera garantie dans les limites de la police souscrite ;

- dit que les demandes présentées à l'encontre de la société Generali Assurances IARD étaient sans objet ;

- condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser aux époux [S] :

- au titre de leur préjudice matériel :

- la somme de 66 947,51 euros TTC indexée en fonction de la variation de l'indice BT01 du coût de la construction à la date du jugement, l'indice de référence étant celui publié à la date du dépôt du rapport d'expertise ;

- la somme de 8 436 euros TTC ;

- au titre de leurs préjudices immatériels, la somme de 30 845,16 euros ;

- fixé, dans les rapports entre eux, le partage de responsabilité suivant :

- M. [T] : 10 % ;

- la société Jean-Marc Tual : 90 % ;

- condamné en conséquence M. [T] à garantir la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à hauteur de 10 % de l'ensemble des condamnations prononcées contre elles, y compris au titre des dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual et les MMA à verser aux époux [S] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Jean-Marc Tual et les MMA à verser à la société Generali Assurances IARD la somme de 2 500 euros sur le même fondement ;

- condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual et les MMA aux dépens, comprenant ceux de la procédure de référé et le coût de l'expertise judiciaire.

Les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 13 juillet 2021, intimant M. et Mme [S], la société Generali France Assurances, la société Jean-Marc Tual et M. [T].

Dans leurs dernières conclusions transmises le 31 mars 2022, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles au visa des articles 1147 ancien et 1792 et suivants du code civil, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 19 mai 2021 en ce qu'il a :

- dit qu'elles doivent leur garantir à la société Jean-Marc Tual, tant au titre des désordres matériels qu'au titre des désordres immatériels ;

- condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser aux époux [S] la somme de 8 436 euros TTC au titre de leur préjudice matériel et la somme de 30 845,16 euros au titre de leur préjudice de jouissance,

- dit que les demandes présentées à l'encontre de la société Generali Assurances IARD sont sans objet ;

- fixé, dans les rapports entre constructeurs, le partage de responsabilité suivant :

- M. [T] : 10 % ;

- la société Jean-Marc Tual : 90 % ;

- condamné en conséquence M. [T] à garantir la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à hauteur de 10 % de l'ensemble des condamnations prononcées contre elles, y compris au titre des dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual et les MMA à verser aux époux [S] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Jean-Marc Tual et les MMA à verser à la société Generali Assurances IARD la somme de 2 500 euros sur le même fondement ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

Et statuant de nouveau,

-juger que seule la garantie décennale pourra être mobilisée si la responsabilité décennale de la société Jean-Marc Tual est retenue ;

-imputer à M. [T] une part de responsabilité d'au moins 30 % dans la survenance des désordres

-condamner M. [T] à les garantir d'au moins 30 % des condamnations prononcées à leur encontre en principal, frais et accessoires ;

-limiter leur garantie aux dommages matériels de M. et Mme [S], soit le coût des travaux réparatoires hors ceux du déménagement et du réaménagement, du garde meuble et d'une location pendant six mois ;

-débouter les époux [S] de toute demande présentée à leur encontre au titre des préjudices immatériels (coût du déménagement et du réaménagement, coût du garde meuble pendant six mois, coût d'une location pendant six mois, préjudices de jouissance et préjudice moral) ;

-condamner la société Generali à indemniser M. et Mme [S] de l'ensemble de leurs préjudices immatériels ;

A titre subsidiaire,

- minorer le préjudice de jouissance allégué par M. et Mme [S] ;

- dire et juger qu'en tout état de cause, il ne pourra être accordé pour la période d'exécution des travaux ;

- minorer le préjudice moral fixé en première instance à hauteur de 5 000 euros ;

- minorer les réclamations des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dépens comme de droit.

Dans leurs dernières conclusions transmises le 11 avril 2022, M. et Mme [S] demandent à la cour de :

- débouter les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, M. [T] et la société Generali de l'ensemble de leurs demandes ;

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré le rapport d'expertise opposable à M. [T] ; déclaré M. [T] et la société Jean-Marc Tual responsables sur le fondement de la responsabilité décennale des désordres affectant l'immeuble ; écarté la clause d'exclusion de solidarité contenue dans le contrat de maîtrise d'œuvre régularisé avec M. [T]'; accordé à la société Jean-Marc Tual la garantie de la société MMA IARD et de la société MMA IARD Assurances Mutuelles au titre des désordres matériels et immatériels ; dit que les demandes présentées à l'encontre de la société Generali Assurances IARD sont sans objet'; condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual et les MMA à leur verser la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; a dit que les franchises contractuelles ne leur sont pas opposables ;

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel incident ;

- infirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à leur verser :

- au titre de leur préjudice matériel :

- la somme de 66 947,51 euros TTC indexée en fonction de la variation de l'indice BT01 du coût de la construction à la date du jugement, l'indice de référence étant celui publié à la date du dépôt du rapport d'expertise ; la somme de 8 436 euros TTC ;

- au titre de leurs préjudices immatériels, la somme de 30 845,16 euros ;

A titre incident,

- condamner in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles et à titre subsidiaire la Société Generali, à leur verser :

- la somme de 6 900 euros au titre des frais de location pendant les travaux de reprise, outre 1 000 euros au titre des frais annexes de location ;

- la somme de 2 677,90 euros TTC au titre du coût de souscription d'une assurance dommage ouvrage, outre intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2018 ;

- la somme de 37 099,53 euros au titre du préjudice de jouissance jusqu'à la date de la décision de première instance ;

- au titre du préjudice de jouissance ultérieur, la somme de 805 euros par mois de la date de la décision de première instance à la date de la décision d'appel ou de la date de commencement des travaux de reprise si elle était antérieure ;

- la somme de 8 000 euros au titre du préjudice moral ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

A titre subsidiaire,

- confirmer les préjudices et montants retenus par le tribunal ;

En tout état de cause,

- condamner les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser la somme de 7000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises le 13 janvier 2022, M. [T] demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que le rapport d'expertise lui est opposable ; l'a condamné in solidum avec la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à verser aux époux [S], au titre de leur préjudice matériel la somme de 66 947,51 euros TTC indexée en fonction de la variation de l'indice BT01 du coût de la construction à la date du jugement, l'indice de référence étant celui publié à la date du dépôt du rapport d'expertise et la somme de 8 436 euros TTC ; au titre de leurs préjudices immatériels, la somme de 30 845,16 euros'; fixé, dans les rapports entre constructeurs, le partage de responsabilité suivant M. [T] : 10 % , la société Jean-Marc Tual : 90 % ; l'a condamné à garantir la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à hauteur de 10 % de l'ensemble des condamnations prononcées contre elles, y compris au titre des dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; l'a condamné in solidum avec la société Jean-Marc Tual et les MMA à verser aux époux [S] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le confirmer pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

- débouter M. et Mme [S], la société Jean-Marc Tual et la société MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles et Generali, de leurs demandes, fins et conclusions ;

- dit que le rapport d'expertise déposé par M. [R], expert judiciaire, lui est inopposable lequel n'a pas été mis en mesure de discuter les dires et observations des parties ;

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de toute responsabilité de M. [T] ;

- condamner la société Jean-Marc Tual, son assureur, la société MMA IARD et MMA ARD Assurances Mutuelles et Generali et les requérants, M. et Mme [S] à lui verser la somme de 3 000 euros, in solidum au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Jean-Marc Tual, son assureur, la société MMA IARD et les requérants, M. et Mme [S] aux entiers dépens ;

- à titre infiniment subsidiaire et si la cour retenait une part de responsabilité de M. [T] dans la survenance des désordres, exclure toute condamnation in solidum ou solidaire à l'égard de M. [T] dans le cadre des condamnations à prononcer et limiter la responsabilité de M. [T] à 10 % ;

- diminuer l'indemnisation allouée aux époux [S] concernant le préjudice de jouissance, et la limiter en tout état de cause à la période d'exécution des travaux, ainsi que le préjudice moral,

- condamner la société Jean-Marc Tual, son assureur, la société MMA IARD et MMA ARD Assurances Mutuelles et Generali et M. et Mme [S] à lui verser la somme de 3 000 euros, in solidum au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Jean-Marc Tual, son assureur, la société MMA IARD et les requérants, M. et Mme [S] aux entiers dépens ;

- diminuer le montant des sommes allouées aux époux [S] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions en date du 13 janvier 2022, la société Generali Assurances IARD demande à la cour de :

A titre principal,

- débouter la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles de l'ensemble de leurs demandes ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré les demandes présentées à son encontre de sans objet et condamné in solidum la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

- condamner la SA MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à lui verser la somme de 3 500 euros application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'instance d'appel ;

- condamner les même aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

- constater l'absence d'aléa du contrat d'assurance souscrit auprès de Generali ;

En conséquence,

- dire et juger que les garanties facultatives et responsabilité civile de la police d'assurance Generali ne sont pas mobilisables ;

- débouter toutes les parties de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de Generali visant à la condamnation de cette dernière au titre des garanties facultatives ;

A titre infiniment subsidiaire, sur les préjudices immatériels,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté les époux [S] de leur demande au titre de la souscription d'un contrat d'assurance dommage ouvrage ;

- débouter les époux [S] de leur demande au titre de la souscription d'une assurance dommage-ouvrage ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a valorisé le préjudice de jouissance à la somme de 400 euros par mois ; a débouté les époux [S] de leur demande de préjudice de jouissance pendant la période de travaux,

- réduire à de plus justes le préjudice moral ;

En tout état de cause,

- condamner M. [T] à la garantir à hauteur de 30 % du montant des condamnations qui seraient mise à sa charge, tant en principal, frais, accessoires, frais irrépétibles et dépens ;

- déclarer sa franchise opposable à son assurée, la société Jean-Marc Tual, et en tant que de besoin ;

- condamner la société Jean-Marc Tual à verser à M. et Mme [S] le montant de la franchise, correspondant à 15 % du montant du préjudice lié aux dommages immatériels, tel que fixé par le Tribunal de céans, somme qui ne saurait être inférieur à 1 500 euros, ni supérieur à 12 000 euros ;

- débouter toutes parties de toute demande plus amples ou contraire à l'encontre de la concluante ;

- condamner toute partie succombant, ou les unes à défaut des autres, à verser à la concluante la somme de 3 500 euros application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les même aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 3 janvier 2022, la société Jean-Marc Tual demande à la cour de :

- confirmer à titre principal le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé la condamnation des sociétés MMA à garantir la société Tual de toutes condamnations prononcées à son encontre, tant en principal intérêts que frais ;

- débouter en conséquence les sociétés MMA de leurs demandes en cause d'appel ;

- condamner à titre subsidiaire et d'appel incident la société Generali in solidum avec la société MMA à garantir la société Tual de toutes condamnations ne correspondant pas exclusivement à la réfection des travaux et pouvant correspondre aux dommages immatériels ;

-condamner in solidum les sociétés MMA et toutes parties succombant, au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la société TUAL, ainsi qu'en tous les dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 6 septembre 2022.

Motifs :

- Sur l'opposabilité du rapport d'expertise à M. [T]':

M.[T] soutient que le rapport de M. [R] lui est inopposable dès lors qu'il n'a pas été en mesure de faire valoir ses observations, ce qui caractérise un défaut de respect du contradictoire à son égard. Il fait observer qu'il n'a pas reçu les courriers recommandés que lui a adressés l'expert, ni les avis de passage, lequel ne lui a pas non plus adressé les dires des autres parties.

M et Mme [S] rétorquent que le défaut de respect du contradictoire lors d'une expertise entraîne sa nullité, ce que M. [T] ne demande pas. Ils ajoutent que l'expert a rappelé l'ensemble des convocations adressées aux parties, lesquelles incluaient bien le maître d'œuvre qui a été destinataire de ses notes et qu'il n'appartient pas à l'expert de communiquer les dires des parties.

Il est constant que les irrégularités relatives au respect du contradictoire à l'occasion des opérations d'expertise sont sanctionnées par l'article 175 du code de procédure civile, qui renvoie à l'application du régime des nullités des actes de procédure. M. [T] qui ne demande pas la nullité du rapport ne peut soutenir qu'il lui est inopposable dès lors qu'il a été régulièrement appelé aux opérations d'expertise lors de l'instance en référé qui a désigné M. [R].

Au surplus, l'expert dans son rapport a rappelé les diligences accomplies pour convoquer les parties aux deux réunions qu'il a organisées, par courriers recommandés et au moyen de leur messagerie électronique. Il a relevé que les courriers recommandés adressés à M. [T] à l'adresse qu'il avait fournie lui étaient revenus avec la mention «'avisé, non réclamé'» et n'a signalé aucun message d'erreur concernant l'adresse électronique professionnelle de l'intéressé. Les pièces produites par les époux [S] démontrent que les notes et le pré-rapport de l'expert lui ont également été adressés par mail, étant observé que l'expert n'a pas à adresser les dires aux parties.

Il s'ensuit que M. [T] ne poursuivant pas la nullité de l'expertise alors que le rapport a été débattu contradictoirement, le tribunal sera approuvé pour avoir dit que le rapport d'expertise lui est opposable.

-Sur la nature du désordre :

M.[R] a constaté la présence de fissures dans le carrelage de l'ensemble des pièces, accompagnées de désaffleurements entraînant un risque de coupure, ainsi que des creux en ligne dans le carrelage, significatifs d'une contrainte importante imposée aux carreaux, le domaine élastique du matériau étant dépassé. Il a relevé que de nouvelles fissures étaient apparues entre les deux réunions d'expertise espacées de six mois, caractéristiques d'un désordre évolutif.

Les investigations ont mis en évidence des déformations importantes et des fissurations du plancher chauffant, support du carrelage. Il est apparu que la chape d'enrobage des réseaux n'avait pas été réalisée comme prévue dans le descriptif et le devis de la société Jean-Marc Tual avec un mortier de ciment traditionnel, mais était une chape anhydrite dépourvue de fibres ou de treillis, armature nécessaire selon le DTU. Il a également été constaté l'absence des joints de fractionnement exigés par les règles de l'art et le DTU. L'expert en a déduit que ces défauts expliquaient le désordre et que la pérennité de l'ouvrage n'était pas assurée. Considérant que le seul remplacement des carreaux fissurés ne pouvait remédier au désordre, il a préconisé la réfection complète de la chape avant de poser un nouveau revêtement, travaux d'une durée de six mois, impliquant de vider la maison dont le coût a été évalué à 66947,51€ TTC.

M.[T] qui prétend que les causes du désordre ont été mal analysées par l'expert ne produit aucune pièce de nature à étayer son propos et il convient d'observer que, les notes et le pré-rapport lui ayant été envoyés sur sa messagerie professionnelle, il n'a pas jugé utile d'adresser la moindre observation d'ordre technique à l'expert. Il résulte du rapport que M. [R] a pris soin de vérifier également la production d'eau chaude afin d'écarter un fonctionnement inadapté du chauffage comme cause des désordres. Il n'a fait aucune remarque sur la qualité du carrelage posé et sa compatibilité avec un support constitué d'un plancher chauffant.

Le tribunal a retenu à juste titre que ces désordres, évolutifs, de nature à générer des coupures, entraînaient une impropriété de l'ouvrage à sa destination et présentaient une nature décennale. La société Jean-Marc Tual, comme les appelantes ne le discutent pas, ni d'ailleurs M. [T] qui argumente sur la possibilité de lui imputer les désordres. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

-Sur les responsabilités :

M.[T] soutient que le désordre est uniquement imputable à la société Jean-Marc Tual qui a modifié la nature de la chape sans l'en informer, comme l'a relevé l'expert, décision unilatérale qu'il a tenté de masquer puisque la chape anhydrite n'est pas non plus mentionnée dans la facture. Il en déduit que dans ces conditions, il ne lui était pas possible d'assurer le phasage et le suivi que nécessitent la réalisation de ce type de chape. Il ajoute qu'il n'était en charge que de la coordination des travaux et que de plus, les maîtres d'ouvrage se sont impliqués dans le suivi du chantier, réalisant eux-mêmes la première mise en chauffe de la chape.

M et Mme [S] soutiennent que la responsabilité décennale de M. [T] est engagée dès lors qu'il était titulaire d'une mission complète de maîtrise d'œuvre, que l'expert a pointé sa défaillance dans le suivi du chantier. Ils relèvent qu'il ne démontre pas l'existence d'une cause étrangère exonératoire de sa responsabilité.

La société Jean-Marc Tual, comme les sociétés MMA ne contestent pas que la responsabilité décennale de l'entrepreneur est engagée.

Selon l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

Cette responsabilité suppose que le désordre soit imputable aux travaux ou aux prestations du constructeur. Or, contrairement à ce que prétend M. [T], le contrat signé avec les maîtres de l'ouvrage témoigne qu'il était titulaire d'une mission complète de maîtrise d'œuvre comprenant, selon l'article 2, l'ensemble des phases de conception et d'exécution du projet de construction et notamment celle de direction et de coordination des travaux. Il s'en déduit que le désordre lui est imputable. Ne rapportant la preuve d'aucune cause étrangère exonératoire, laquelle ne peut résulter des manquements d'un autre constructeur, et ne démontrant pas l'intervention fautive alléguée des maîtres d'ouvrage à l'origine des désordres, sa responsabilité de plein droit est engagée à leur égard, de même que celle de la société Jean-Marc Tual.

-Sur la garantie des assureurs :

Les sociétés MMA rappellent que la société Jean-Marc Tual était assurée selon contrat à effet du 1er octobre 2008 garantissant sa responsabilité décennale ainsi qu'au titre des garanties facultatives après réception les dommages immatériels, que cette police a été résiliée à compter du 31 décembre 2011.

Elles ne discutent pas devoir prendre en charge le montant des travaux réparatoires, mais soutiennent que ne peuvent être inclus dans les dommages matériels les coûts accessoires de déménagement, garde meubles et location mis à leur charge par le tribunal, ni le coût de souscription d'une assurance dommages ouvrage.

Concernant les dommages immatériels, elles font valoir que cette garantie facultative ayant pris fin à la date de résiliation de la police, ils doivent être supportés par la société Generali , assureur de la société Jean-Marc Tual à la date de la réclamation.

Les époux [S] soutiennent que la réparation des dommages matériels doit comprendre l'intégralité des sommes nécessaires à la réfection des ouvrages et donc les frais de déménagement, de relogement, que le jugement doit être confirmé sur ce point.

S'agissant de la garantie des dommages immatériels, ils relèvent qu'elle a bien été souscrite par la société Jean-Marc Tual auprès des MMA et a été maintenue suite à la résiliation du contrat pendant la période subséquente, dès lors que le fait dommageable s'est produit pendant la durée du contrat ce qui n'est pas discuté.

A titre subsidiaire, ils demandent la garantie de la société Generali, assureur de la société Jean-Marc Tual à compter du 1er janvier 2016 pour ces dommages et soutiennent que la première réclamation résulte de l'assignation en référé du 12 juin 2017, aucune réclamation n'étant démontrée à l'égard de l'entrepreneur avant la date d'effet de la police, de sorte que la société Generali ne peut invoquer une absence d'aléa'.

La société Jean-Marc Tual demande la confirmation du jugement qui a retenu la garantie des MMA pour les deux types de dommages et subsidiairement celle de la société Generali. Elle objecte qu'aucune réclamation ne lui avait été présentée avant la souscription de la police en 2016.

La société Generali demande la confirmation du jugement qui l'a mise hors de cause. Elle relève que les pièces contractuelles produites par les MMA montrent que la garantie facultative des dommages immatériels a été souscrite par l'entrepreneur.

A titre subsidiaire, elle soutient ne pas être tenue à garantir les dommages immatériels dès lors qu'elle n'était pas l'assureur de la société Jean-Marc Tual à la date de la première réclamation qui est intervenue avant la souscription de la police comme en témoignent l'assignation des maîtres d'ouvrage et la chronologie du sinistre reprise pas l'expert, lesquelles mentionnent une dénonciation des désordres dès 2010-2011. Elle estime que le sinistre était connu de l'assurée à la date de la conclusion du contrat et qu'il n'en a pas fait état, ce qui a fait disparaître tout aléa et exclut la garantie.

Les dommages matériels':

Les sociétés MMA, selon la police souscrite à effet du 14 février 2008, étaient assureurs de la société Jean-Marc Tual à la date des travaux et doivent donc supporter le coût des réparations de l'ouvrage, ce qui ne fait pas débat. Outre ce coût, les dommages matériels garantis doivent intégrer l'ensemble des frais indispensables pour assurer la réparation des désordres. Dès lors que la maison, habitation principale des maîtres d'ouvrage, doit être entièrement vidée de ses meubles et de tout occupant pour permettre aux entreprises d'intervenir, l'ensemble de ces frais annexes générés par cette contrainte relève des dommages matériels et doit être supporté par l'assureur tenu au titre de la garantie obligatoire. M et Mme [S] sont donc fondés à demander la prise en charge de ces frais aux sociétés MMA. Le jugement est confirmé.

Dans le cadre de la garantie obligatoire, les sociétés appelantes ne peuvent opposer leurs franchises et limites contractuelles qu'à leur assurée et non aux maîtres d'ouvrage. Elles ne peuvent donc demander que la société Jean-Marc Tual soit condamnée à verser aux maîtres d'ouvrage le montant de la franchise contractuelle.

Les dommages immatériels':

La police souscrite par la société Jean-Marc Tual auprès des MMA, versée aux débats comporte parmi les garanties facultatives après réception celle des dommages immatériels.

Les conventions spéciales applicables et visées aux conditions particulières énoncent à l'article 10 que cette garantie (5c) couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date de la résiliation ou d'expiration de la garantie et que la première réclamation est adressée à l'assuré entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent de 10 ans à compter de la résiliation ou de l'expiration. La garantie ne couvre toutefois les sinistres dont le fait dommageable a été connu de l'assuré postérieurement à la date de la résiliation que si, au moment où l'assuré en a eu connaissance, cette garantie n'avait pas été resouscrite ou l'était sur une base du déclenchement par le fait dommageable. Cette article reprend les dispositions de l'article L 124-5 du code des assurances.

En l'espèce, le contrat souscrit par la société Jean-Marc Tual auprès de la société Generali, à effet du 1er janvier 2016, montre que la garantie des dommages immatériels était prévue au titre des garanties complémentaires de la responsabilité décennale. L'article 3.6.6 des conditions générales stipule que ces garanties facultatives sont déclenchées par la réclamation.

Si la société Generali indique que cette réclamation, laquelle s'entend comme la mise en cause amiable ou judiciaire de la responsabilité de l'assuré adressée à ce dernier ou à son assureur, est antérieure à la souscription du contrat en 2016, il lui appartient d'en rapporter la preuve. Celle-ci ne peut résulter des éléments non étayés de la chronologie du litige rappelés dans une assignation ou le rapport d'expertise. Ainsi qu'il est observé, le mail de M. [T] adressé à la société Jean-Marc Tual produit par l'assureur ne porte pas de date. Il en est de même de la tenue de réunions en 2010-2011 auxquelles il n'est pas établi que la société Jean-Marc Tual ait participé. La société Genarali est, de fait, dans l'incapacité de dater précisément la réclamation qu'elle allègue ou même la date à laquelle son assuré aurait eu connaissance du sinistre affectant le sol de la maison.

Les seules pièces caractérisant une réclamation de la part des époux [S] versées aux débats sont la mise en demeure adressée à la société Tual le 22 mai 2017, suivie d'une assignation en référé expertise en juin suivant, donc postérieurement à la conclusion du contrat d'assurance de la société Generali. Dans la mesure où la garantie avait été resouscrite à la date de la réclamation en 2017, la garantie des dommages immatériels ne peut être supportée par les sociétés MMA et faute de démontrer l'absence d'aléa à raison d'une connaissance précise du sinistre par son assurée à la date de souscription de la police en 2016, la société Generali lui doit la garantie de ces dommages. Le jugement est réformé sur ce point.

-Sur l'indemnisation des préjudices de M et Mme [S]':

Sur la condamnation in solidum des constructeurs':

Le tribunal a condamné in solidum la société Jean-Marc Tual et M. [T] à indemniser les maîtres d'ouvrage.

M. [T] soutient que cette condamnation doit être réformée au regard de l'article 12 du contrat qui stipule que le maître d'œuvre n'assurera les responsabilités édictées par les articles 1792 et 2270 du code civil que dans la mesure de ses fautes personnelles éventuelles sans aucune solidarité.

M et Mme [S] font observer que la clause ne vise que la solidarité et non l'obligation in solidum et que dans la mesure où la responsabilité de M. [T] est engagée sur un fondement décennal, cette clause ne peut être appliquée et doit être réputée non écrite en application de l'article 1792-5 du code civil. Ils répliquent qu'elle ne peut concerner que la responsabilité contractuelle du constructeur.

S'il est constant que cette clause s'applique également à la demande de condamnation in solidum du maître d'œuvre avec d'autres constructeurs, le tribunal a relevé à juste titre qu'elle n'est susceptible de s'appliquer que si est recherchée sa responsabilité contractuelle de droit commun. Elle n'est en revanche pas applicable à la responsabilité décennale de M. [T] régime d'ordre public appliqué contre lui.

Les préjudices matériels':

Concernant le coût des travaux de reprise, le montant de 66947,51€ TTC accordé par le tribunal sur la base de l'évaluation de l'expert n'est pas discuté.

S'agissant des préjudices annexes, M et Mme [S] forment un appel incident sur le coût de leur relogement pendant six mois, rappelant que le montant du loyer mensuel de 820€ retenu par l'expert date de 2018 et doit être réévalué puisque le loyer d'un bien identique est désormais de 1150€ par mois. Ils soutiennent également que le tribunal ne pouvait rejeter leur demande relative au coût d'une assurance dommages-ouvrage au motif qu'elle n'avait pas été souscrite lors de la construction alors que les travaux de reprise constituent la réalisation d'un ouvrage, ce qui implique la souscription de cette assurance en application de l'article L242-1 du code des assurances.

Les sociétés MMA font observer que les maîtres d'ouvrage ne peuvent prétendre à une réévaluation du montant du loyer lié à leur relogement alors qu'ils ont reçu les fonds dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement et pouvaient faire réaliser les travaux.

L'expert a rappelé que la maison de plain-pied est entièrement carrelée, toutes les pièces étant équipées d'un plancher chauffant. Il s'en déduit que les travaux nécessaires à la reprise des désordres qui doivent être réalisés en une fois, remettent en cause l'occupation de la maison. La demande de M et Mme [S] au titre des frais de déménagement et de garde-meubles pendant leur durée pour un montant respectif de 2220€TTC et de 1296€ est justifiée.

L'expert a évalué le coût de location sur la base d'un loyer de 820€ en 2018. Les époux [S] versent aux débats deux attestations d'agences immobilières des 20 et 23 octobre 2021, qui font état d'une valeur locative comprise désormais entre 1000 et 1200€. Les appelantes ne peuvent leur opposer le défaut d'exécution des travaux malgré le paiement des condamnations assorties de l'exécution provisoire, dès lors que le jugement date de juillet 2021, que les sommes ont été réglées fin juillet, qu'à cette période il n'était pas possible d'organiser rapidement l'exécution des travaux et le déménagement. Ceux-ci seraient donc nécessairement intervenus au plus tôt fin d'année 2021, à une période où le montant du loyer correspondait déjà aux valeurs énoncées par les agences. La demande de réévaluation est donc justifiée. Il leur sera accordé une somme de 7900€ pour tenir compte en plus des frais de location. Le jugement est réformé en ce sens.

En ce qui concerne le coût de souscription d'une assurance dommages-ouvrage, il est constant que M et Mme [S] peuvent prétendre à la réparation intégrale de leurs préjudices.

Les travaux nécessaires à la reprise des désordres décrits en page 20 du rapport d'expertise, impliquent la réfection au-delà du revêtement de sol, de la chape du plancher chauffant, des réseaux, de l'isolant. Ils entraînent également des interventions sur le système de chauffage par le remplacement de la sonde et des commandes intérieures de la pompe à chaleur, la mise en place d'un dispositif de sécurité en sortie de cet équipement et celle de plusieurs entreprises strictement organisée, autant d'éléments qui caractérisent la réalisation d'un ouvrage de construction relevant de l'obligation de souscrire une assurance dommages-ouvrage. L'indemnisation de son coût conséquence directe du désordre ne peut être exclue au motif que les époux [S] n'avaient pas souscrit cette assurance lors de la construction. Son montant fixé sur la base de 4% du coût des travaux n'est pas critiqué par les constructeurs et les assureurs. Il sera retenu pour un montant de 2677,90€TTC. Le jugement est réformé en ce sens.'

En conséquence, la somme de 66947,51€TTC indexée sur l'évolution de l'indice BT01 entre la date de dépôt du rapport d'expertise et celle de l'arrêt pour tenir compte de l'augmentation du coût des matériaux et des frais annexes d'un montant total de 14093,90€ (2677,90+7900+2220+1296) seront supportés in solidum par M. [T], la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA assurances Mutuelles, dès lors que les constructeurs par leurs manquements respectifs ont contribué à l'entier dommage.

Les préjudices immatériels :

Le préjudice de jouissance :

M et Mme [S] forment appel incident sur le montant accordé par le tribunal et demandent la prise en compte de la persistance de ce préjudice depuis le jugement jusqu'à l'arrêt'. Ils indiquent qu'ils sont obligés d'être vigilants dans leurs déplacements ce depuis plusieurs années, situation difficile à supporter et qui justifie une évaluation à 70% de la valeur locative de l'immeuble prise comme base de calcul.

M [T] demande la réduction de l'indemnisation accordée à ce titre dès lors que la maison est demeurée totalement habitable.

La société Generali estime qu'il n'y a pas lieu d'indemniser la période de relogement des époux [S].

La société Jean-Marc Tual s'en rapporte sur l'évaluation de ce préjudice, ce qui doit être analysé comme une contestation.

L'expert a relevé que les fissures entraînaient des désaffleurements, ce qui impliquait de prendre des précautions pour éviter des blessures, situation qui existe depuis plus de six ans. Cependant, au-delà de ce risque toutefois limité, il apparaît que les époux [S] ont pu continuer à utiliser l'ensemble des espaces de leur maison sans contrainte majeure. Dans la mesure où la maison n'a jamais eu de vocation locative, l'évaluation de ce préjudice de jouissance sur la base de la valeur locative n'est pas justifiée. En revanche, la reprise des désordres impose aux maîtres de l'ouvrage de quitter leur maison pour une durée de six mois, ce qui affecte significativement leur droit de jouir de leur bien.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, l'indemnisation accordée par le premier juge est excessive et doit être réduite à 8000€. Cette somme sera supportée in solidum pour des raisons identiques à celles appliquées au préjudice matériel par M. [T], la société Jean-Marc Tual et la société Generali.

Le préjudice moral':

Les époux [S] portent leur demande à ce titre à 8000€ arguant des soucis et de l'anxiété générés par le litige.

M.[T] et la société Generali estiment que cette demande est excessive et doit être réduite.

La survenance du désordre évolutif puis les investigations et les procédures qui ont dû être menées pour en obtenir la réparation, la nécessité d'organiser un déménagement ont occasionné aux maîtres d'ouvrage des tracas et possiblement été source d'anxiété, dont l'indemnisation a été justement évaluée par le tribunal. La somme de 5000€ sera supportée in solidum par M. [T], la société Jean-Marc Tual et la société Generali, qui ne discute pas garantir ce poste de préjudice au titre des dommages immatériels.

-Sur le partage de responsabilité et les recours en garantie':

L'expert a relevé que la société Jean-Marc Tual ne pouvait remplacer la chape ciment initialement prévue par une chape anhydrite sans en avertir le maître d'œuvre et le chauffagiste, dès lors que la mise en œuvre de cette chape demandait des précautions particulières de phasage pour sa mise en place, son séchage, la mise en service du plancher chauffant et la pose du carrelage. Il a également relevé que la chape ne disposait d'aucune armature en méconnaissance du DTU alors que celle-ci était nécessaire pour éviter les fissurations et que les joints de fractionnement n'avaient pas été correctement réalisés.

Il a en revanche imputé à M. [T] une défaillance dans la coordination et la direction des travaux s'étonnant qu'il ait été dans l'incapacité de produire la moindre pièce en lien avec le suivi de l'avancement des travaux.

Il se déduit de cette analyse que la société Jean-Marc Tual a une part prépondérante dans la survenance des désordres. L'expert a précisé qu'en l'absence d'information de l'entrepreneur sur la modification de la nature de la chape, M. [T] ne pouvait adapter le phasage de la réalisation du plancher chauffant. En revanche, il est établi qu'un suivi régulier sur le chantier lui aurait permis de relever l'absence des joints de fractionnement indispensables, défaut visible qu'il aurait pu faire corriger et qui a contribué également à la fissuration du revêtement.

Compte tenu de l'importance des manquements respectifs des constructeurs, il n'y a pas lieu de majorer la part de responsabilité de M. [T] comme le demande la société Generali, le partage de responsabilité appliqué par le tribunal à hauteur de 10% à la charge de M. [T] et 90% pour la société Jean-Marc Tual sera confirmé.

M.[T] sera condamné à garantir les sociétés MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles d'une part et la société Generali d'autre part des condamnations mises à leur charge respectivement au titre des dommages matériels et immatériels dans la limite de 10%.

-Sur les demandes annexes':

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont réformées.

Devant la cour M et Mme [S] ne présentent de demande au titre des frais de procédure que contre les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, lesquelles seront condamnées à leur verser une indemnité de 7000€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Les autres demandes à ce titre sont rejetées.

M. [T], la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles et la société Generali seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais de référé et d'expertise et seront supportés à hauteur de 10% par M. [T] et de 90% par la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles et la société Generali répartis entre les assureurs à hauteur de 90% à la charge des sociétés MMA et de 10% à la charge de la société Generali.

Par ces motifs’ :

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort,

Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré le rapport d'expertise opposable à M. [T]'; déclaré M. [T] et la société Jean-Marc Tual responsables in solidum sur le fondement décennal des désordres affectant l'immeuble, dit que la clause d'exclusion de solidarité contenue dans le contrat de maîtrise d'œuvre n'était pas opposable à M et Mme [S], dit que la société Jean-Marc Tual sera garantie par les MMA dans les limites de la police souscrite, fixé la partage de responsabilité à hauteur de 10% à la charge de M. [T] et 90% à la charge de la société Jean-Marc Tual, condamné M. [T] à garantir les sociétés MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles des condamnations mises à leur charge dans la limite de 10%,

Infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, la société MMA IARD et la société MMA Assurances Mutuelles à verser à M et Mme [S] au titre de leur préjudice matériel':

*la somme de 66947,51€ TTC indexée sur l'évolution de l'indice BT 01 entre la date de dépôt du rapport d'expertise et celle de l'arrêt,

*la somme de 14093,90€ au titre des frais annexes,

Déclare que les franchises contractuelles des sociétés MMA ne sont pas opposables à M et Mme [S],

Condamne in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual et la société Generali à verser à M et Mme [S]':

*la somme de 8000€ en réparation de leur préjudice de jouissance,

*la somme de 5000€ en réparation de leur préjudice moral';

Condamne les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à M et Mme [S] une indemnité de 7000€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Rejette les autres demandes à ce titre,

Condamne in solidum M. [T], la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles et la société Generali Assurances IARD aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais de référé et d'expertise et seront supportés à hauteur de 10% par M. [T] et de 90% par la société Jean-Marc Tual, les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles et la société Generali Assurances IARD répartis entre les assureurs à hauteur de 90% à la charge des sociétés MMA et de 10% à la charge de la société Generali.