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Décisions

Cass. crim., 9 juin 1998, n° 97-80.843

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme Simon

Avocat général :

M. le Foyer de Costil

Avocat :

SCP Piwnica et Molinié

Versailles, 9e ch., du 12 déc. 1996

12 décembre 1996

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 175 ancien du Code pénal, 432-12 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Antoine Z... coupable, en sa qualité de maire, du délit de prise illégale d'intérêt et l'a condamné de ce chef ;

"aux motifs que la lettre de l'architecte-conseil émettant des réserves sur le permis de construire sollicité par la société "les Beaux Sites" a été reçue en mairie le 26 septembre 1989 et adressée à Antoine Z..., maire, à l'attention de Jean-Pierre X..., fonctionnaire municipal;

qu'Antoine Z... a reconnu avoir la lettre en ses mains, avoir eu un entretien avec l'architecte à ce sujet concernant les diverses dérogations et une conversation avec Jean-Pierre X... sur les problèmes que signalait cette lettre;

qu'Antoine Z... n'a pas cherché à régulariser la procédure;

qu'il a reconnu lui-même s'être enquis en septembre 1989 de ce que devenait de dossier;

qu'il y a au moins "surveillance" au sens de la loi;

qu'Antoine Z... ne peut se défausser de sa responsabilité d'élu en disant qu'il avait demandé à Jean-Pierre X..., fonctionnaire territorial de préparer le travail, celui-ci étant de par sa qualité soumis hiérarchiquement à l'élu;

que la surveillance de fait exercée par le prévenu sur l'instruction de la demande en cause avait placé le fonctionnaire en état de subordination directe vis-à-vis du maire et qu'au surplus hormis le permis de construire lui-même signé par M. Y..., tous les actes concernant ce permis ont été signés par Antoine Z..., ès-qualités de maire ;

"alors que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, constater que le permis de construire a été délivré le 19 octobre 1989 sous la signature du maire-adjoint, M. Y..., qui bénéficiait d'une délégation permanente l'habilitant à signer un tel document et déclarer néanmoins Antoine Z..., en sa qualité de maire, coupable du délit d'ingérence pour avoir pris un intérêt dans un acte dont il avait la surveillance, le dit acte étant caractérisé par la délivrance du permis de construire;

que la décision est ainsi privée de toute base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, incomplètement reproduites au moyen, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, et répondant aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'ingérence dont elle a déclaré Antoine Z... coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond, des faits et des circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 131-26, 132-17, 132-21, 432-12 et 432-17 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit d'ingérence et l'a notamment condamné à une peine d'inéligibilité pendant une durée de cinq années ;

"aux motifs que cette peine est, au-delà de l'emprisonnement avec sursis, de droit pour un délinquant primaire, la plus appropriée à ce type d'infraction ;

"alors que selon les dispositions de l'article 132-21 du Code pénal, l'interdiction de tout ou partie des droits civiques, civils et de famille parmi lesquels figure l'inégibilité ne peut être prononcée de plein droit eu égard à la nature de l'infraction reprochée;

qu'en se prononçant ainsi, les juges d'appel n'ont pas motivé la peine complémentaire prononcée et privé de base légale leur décision" ;

Attendu que les juges ont la faculté de prononcer, sans motivation spéciale, la peine complémentaire d'inégibilité pour une durée de 5 ans, à l'encontre d'un prévenu déclaré coupable d'ingérence;

que le moyen n'est, dès lors, pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.