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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 28 janvier 2010, n° 08/07626

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Locabat Béthune (SARL)

Défendeur :

Cool Jet (SAS), Natiocrédimurs (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Besse

Conseillers :

Mme Boucly-Girerd, Mme Dabosville

Avoués :

SCP Bommart Minault, SCP Keime Guttin Jarry, SCP Debray-Chemin

Avocats :

Me Campagne, Me Debeine, Me El Assad

T. com. Nanterre, 4e ch., du 19 sept. 20…

19 septembre 2008

Par acte en date du 7 mars 1990, un contrat de crédit-bail immobilier a été entre la SNC NATIOCREDIMURS et la SARL LOCABAT BETHUNE (ci-après SARL LOCABAT) portant sur un immeuble à usage industriel et commercial sis à Lillers, dans lequel la société Transports Calonne & Fils exerçait son activité.

Ce contrat prenait effet rétroactivement au 9 décembre 1988, pour une durée de 20 ans.

Ce contrat comporte par nature une promesse unilatérale de vente.

Par deux actes en date du 8 décembre 2000 la SARL LOCABAT :

- a consenti à la société de transports Edouard Dubois et Fils, devenue ABX Logistics, un bail commercial sur l'immeuble,

- a conféré à la société de transports Edouard Dubois et Fils, devenue ABX Logistics, 'la faculté de demander ou non la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail', cette promesse expirant le 1er décembre 2006

Par actes en date du 31 mars 2005, la SA ABX Logistics a cédé la partie messagerie de son fonds de commerce à la SAS COOL JET, et par acte séparé du même jour :

- a transféré à la SAS COOL JET tous les droits qu'elle détient sur le bail commercial aux termes de l'acte de cession du fonds de commerce

- a consenti que la SAS COOL JET la remplace vis à vis de la SARL LOCABAT dans la faculté de demander ou non la cession de la totalité de ses droits au contrat de crédit-bail.

A partir du 8 juin 2005, date d'une signification que la SNC NATIOCREDIMURS a fait délivrer à la SAS COOL JET, celle-ci a payé directement le crédit-bailleur en application de la délégation des loyers de sous-location prévue au contrat de crédit-bail.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 4 août 2006, la SAS COOL JET a demandé à la SARL LOCABAT 'la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail ', et l'a priée en conséquence d'en informer la SNC NATIOCREDIMURS par lettre recommandée, et de solliciter auprès d'elle la cession à son profit du crédit-bail et de la promesse de vente.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 16 août 2006, la SARL LOCABAT a adressé à la SNC NATIOCREDIMURS une demande de levée d'option anticipée d'achat de l'immeuble à son profit.

Par ordonnnance de référé en date du 13 février 2007, le Président du Tribunal de commerce de Nanterre a interdit à titre conservatoire à la SNC NATIOCREDIMURS de céder l'immeuble litigieux, et à la SARL LOCABAT de l'acquérir, dans l'attente d'un jugement sur le fond.

La présente instance été introduite par la SAS COOL JET qui a fait assigner la SARL LOCABAT et la SNC NATIOCREDIMURS par actes d'huissier délivrés les 9 et 10 mai 2007.

Par jugement en date du 19 septembre 2008, le Tribunal de commerce de Nanterre a :

- débouté la société LOCABAT BETHUNE de son exception d'incompétence,

- dit que la société COOL JET est bénéficiaire de la promesse de cession de contrat de crédit-bail signée le 8 décembre 2000 par la société LOCABAT BETHUNE et que cette promesse est valide,

- ordonné à la société LOCABAT BETHUNE de demander à la société NATIOCREDIMURS la cession du crédit-bail signé le 7 mars 1990 au profit de COOL JET avec astreinte de 1.500 euros par jour de retard à compter du trentième jour après la signification du jugement, le Tribunal se réservant la liquidation éventuelle de ladite astreinte.

- dit que la société COOL JET devra s'acquitter entre les mains de la société NATIOCREDIMURS du montant de la soulte, soit 91.469,41 euros et que le versement de cette somme éteindra à due concurrence

1- la dette de la société LOCABAT BETHUNE envers la société NATIOCREDIMURS au titre du crédit-bail,

2- la dette de COOL JET envers LOCABAT BETHUNE au titre de la levée d'option d'achat du crédit-bail, le surplus éventuel devant être reversé à LOCABAT BETHUNE sous déduction de la différence entre les loyers de sous-location payés par la société COOL JET et les loyers du crédit-bail à compter du 9 décembre 2006 qui devra revenir à la société COOL JET,

- dit que la société NATIOCREDIMURS devra retenir la date du 6 septembre 2007 comme point de départ du délai de prévenance prévu à l'article O du Titre II du contrat du 7 mars 1990 pour l'exercice de l'option d'achat de l'immeuble,

- débouté la société NATIOCREDIMURS de sa demande au titre de dommages et intérêts,

- condamné la société LOCABAT BETHUNE à payer à la société COOL JET la sommede 15.000 euros et à la société NATIOCREDIMURS la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et débouté la société COOL JET du surplus de sa demande.

- dit n'y avoir à ordonner l'exécution provisoire.

La SARL LOCABAT a interjeté appel de ce jugement, et a signifié des conclusions le 23 septembre 2009 dont le dispositif est le suivant :

> Déclarer la société LOCABAT recevable et bien fondée en son appel

> Déclarer la Société NATIOCREDIMURS recevable mais mal fondée en son appel

> Dire incompétente territorialement la juridiction de NANTERRE pour connaître du présent litige au profit de la juridiction civile statuant en matière commerciale du Tribunal de Grande Instance de BETHUNE,

> En conséquence, de déclarer nul et non avenu le jugement entrepris et de renvoyer les parties devant ladite juridiction,

Subsidiairement,

> Vu l'accord ferme et définitif entre LOCABAT et NATIOCREDIMURS en date des mois de mars et avril 2006, de dire qu'en vertu de l'article 1583 du Code Civil, la levée d'option pratiquée par LOCABAT a conclu la vente définitive entre les sociétés LOCABAT et NATIOCREDIMURS, et en conséquence de débouter la société COOL JET.

Subsidiairement.

> Vu les articles 32 et 117 du CPC, vu l'article 1589-2, 1690 et 1165 du Code Civil, de dire la cession du contrat intitulé promesse de cession de contrat, datée du 8 décembre 2000, en date du 31 mars 2005 de la Société ABX LOGISTICS au bénéfice de la Société COOL JET nulle et non avenue.

> de dire et juger que cette cession est nulle en l'absence d'enregistrement et de signification à la Société LOCABAT,

> de dire en tout état de cause cette cession inopposable à la Société LOCABAT, laquelle ne saurait en être tenue.

> de dire au surplus que le contrat promesse de cession de contrat en date du 8 Décembre 2000 ne fait pas partie du fonds de commerce acquis puis cédé par la Société ABX LOGISTICS à la Société COOL JET,

> En conséquence, de dire que la Société COOL JET n'a pas acquis le bénéfice de son contrat par l'effet de l'acquisition du fonds de commerce sis à LILLERS (62), et de dire que la Société COOL JET n'est pas cessionnaire du contrat de promesse,

> Vu les articles 1589-2 et 1131 du Code Civil, de dire que le contrat de promesse de cession de contrat en date du 8 décembre 2000 constitue un contrat unilatéral et à titre gratuit, et de le dire en conséquence nul et non avenu en l'absence d'enregistrement conformément aux dispositions de l'article 1589-2 du Code Civil,

> A titre subsidiaire, pour le cas où le contrat de promesse serait déclaré synallagmatique, de le dire derechef nul et non avenu faute de contre partie au sens des dispositions de l'article 1131 du Code Civil, la soulte de 600 000 Frs ne constituant pas une contre partie à l'engagement du promettant,

> de dire en conséquence que l'obligation du promettant est dénuée de cause au jour de sa conclusion, et de dire nulles et non avenues les obligations de la Société LOCABAT en résultant,

En conséquence,

> de dire la société COOL JET mal fondée et de la débouter de ses demandes, fins et conclusions,

> de dire que la SNC NATIOCREDIMURS et la SARL LOCABAT peuvent librement procéde entre elles à la vente de l'immeuble litigieux,

> d'ordonner la radiation et la mainlevé de toute publication de l'ordonnance au Registre de la publicité foncière et bureau des hypothèques de Béthune,

> à titre subsidiaire de dire que la SAS COOL JET ne justifie d'aucun préjudice en réparation de sa perte de chance d'acquérir l'immeuble, et de la débouter de sa demande de dommages et intérêts,

> en toute hypothèse de condamner la SNC NATIOCREDIMURS solidairement avec elle à réparer le préjudice de la SAS COOL JET,

> En toute hypothèse, de condamner la SAS COOL JET à lui payer la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

La SAS COOL JET a fait signifier le 7 octobre 2009 des conclusions dont le dispositif est le suivant :

Confirmer le jugement entrepris et rejeter l'exception d'incompétence soulevée par LOCABAT et se déclarer compétente ;

A titre principal :

De dire que la promesse de cession du Crédit-bail, ensemble avec le Bail commercial, constitue une promesse synallagmatique de cession de contrat de crédit-bail ces deux actes étant indivisibles et conclus en exécution d'une seule et même opération juridique globale et synallagmatique convenue entre les parties aux termes de la lettre du 11 septembre 2000 ;

De dire que la promesse de cession du Crédit-bail n'avait pas à être enregistrée faute de constituer une cession de promesse unilatérale de vente d'un immeuble, d'un droit immobilier, d'un fonds de commerce, d'un droit à un bail, aux termes de l'article 1589-2 du Code civil ;

De dire que la promesse de cession du Crédit-bail n'est pas dépourvue de cause puisqu'en contrepartie une soulte doit être versée lors de la réalisation de la cession et que cette promesse a été consentie en contrepartie du bail commercial et du montant des loyers au bail commercial;

De dire que la cession de la promesse de cession de contrat de Crédit-bail n'avait pas à être signifiée à LOCABAT, s'agissant de cessions de contrat et non de cessions de créance, et de dire que la cession de la promesse de cession de crédit-bail a été acceptée tacitement par LOCABAT;

De dire qu'en vertu de la promesse de cession du Crédit-bail, LOCABAT ne pouvait de bonne foi lever l'option d'achat de l'immeuble contenue dans le Crédit-bail ;

De dire que COOL JET a levé l'option d'achat du crédit-bail par lettre reçue par LOCABAT le 12 août 2006 soit antérieurement à la levée d'option d'achat de l'immeuble par LOCABAT en date du 16 août 2006 ;

De dire que suite à la signature de la promesse de cession du Crédit-bail, portée à la connaissance de la société NATIOCREDIMURS préalablement à toute publicité d'une cession de l'immeuble objet du Crédit-bail par NATIOCREDIMURS à LOCABAT, NATIOCREDIMURS ne peut valablement céder ledit immeuble à la société LOCABAT ;

De dire que, suite à la signature de la promesse de cession du Crédit-bail, LOCABAT était tenue envers COOL JET de satisfaire à ses obligations envers NATIOCREDIMURS aux termes du Crédit-bail, et en particulier payer ses redevances de crédit-bail, afin que rien ne s'oppose à la cession du Crédit-bail à laquelle elle s'est engagée envers COOL JET ;

De dire qu'à défaut de paiement de l'arriéré de loyer concomitamment à la levée de l'option d'achat de l'immeuble que prétend avoir opéré LOCABAT le 16 août 2006, ni même depuis cette levée de l'option, cette prétendue levée d'option n'a produit aucun effet ;

De dire que la levée d'option d'achat du Crédit-bail opérée par COOL JET le 04 août 2006 est valable et oblige LOCABAT à demander à NATIOCREDIMURS la cession du Crédit-bail au profit de COOL JET ;

De dire que l'arrêt à intervenir vaudra cession du Crédit-bail par LOCABAT à COOL JET à effet du 08 décembre 2006, veille de la date du versement semestriel 2006 prévu au contrat de crédit-bail immobilier ;

De dire que COOL JET a valablement notifié par lettre en date du 06 septembre 2007 la levée d'option d'achat de l'immeuble en fin de contrat de crédit-bail à effet du 08 décembre 2008 et, par conséquent, dire que la cession de l'immeuble par NATIOCREDIMURS à COOL JET prendra effet au 08 décembre 2008 conformément à l'article O du Titre II du Crédit-bail ;

D'ordonner à COOL JET de s'acquitter du prix de la levée d'option du Contrat de Crédit-bail, savoir 91 469,41 €, directement entre les mains de NATIOCREDIMURS et dire que le versement de cette somme éteindra à due concurrence : (i) la dette de LOCABAT envers NATIOCREDIMURS au titre du Crédit-bail et le prix de la levée d'option d'achat de l'immeuble en fin de contrat de crédit-bail, savoir une somme totale de 47 189,41 € TTC (ii) la dette de COOL JET envers LOCABAT au titre de la levée d'option d'achat du Crédit-bail,

la différence de 44 280 € devant être reversée à LOCABAT par NATIOCREDIMURS sous déduction de la différence entre les loyers de sous-location payés par la société COOL JET à compter du 09 décembre 2006 jusqu'au 08 décembre 2008 et les loyers du Crédit-bail à compter du 09 décembre 2006 jusqu'au 08 décembre 2008, cette dernière différence étant d'un montant de 22494,90 € TTC qui devra être versé par NATIOCREDIMURS à COOL JET ;

Satisfaire la demande de Natiocredimurs d'ordonner à COOL JET de lui verser 47 189,41 €TTC en contrepartie de la cession de l'immeuble ;

Dire que l'arrêt à intervenir vaudra vente à effet du 08 décembre 2008 par NATIOCREDIMURS à COOL JET de l'immeuble objet du Crédit-bail, et par conséquent (i) ordonner à NATIOCREDIMURS de reverser à COOL JET les loyers qu'elle a perçus de cette dernière depuis le 09 décembre 2008 en vertu de la délégation de loyer, (ii) ordonner la transcription sur le fichier immobilier de la conservation des hypothèques de la cession de l'immeuble objet du Crédit-bail par NATIOCREDIMURS à COOL JET à effet du 08 décembre 2008, étant ici précisé pour les besoins de la publication que le bien est sis [...], qu'il figure au cadastre rénové de la ville de Lillers section AY sous les numéros 598 pour quarante sept ares quinze centiares, 604 pour quarante et un ares quatre vingt seize centiares, 601 pour dix sept ares quarante et un centiares et qu'il a été acquis par la société NATIOCREDIMURS de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE BETHUNE par acte du 09 décembre 1988 reçu par Maître Jean Bosquet, notaire à la résidence de LILLERS ;

Condamner LOCABAT BETHUNE à verser à COOL JET une somme de 1 225 199 € correspondant à la perte de marge entraînée pour COOL JET du fait de la violation de ses obligations contractuelles par LOCABAT ou, subsidiairement, nommer tel Expert qu'il plaira aux fins d'estimer ce préjudice ;

De rejeter toutes les demandes de LOCABAT BETHUNE ;

De condamner la société LOCABAT à verser à la société COOL JET la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du CPC pour l'appel et confirmer la condamnation prononcée de ce chef en première instance contre LOCABAT ;

De condamner la société LOCABAT aux entiers dépens, de première instance et d'appel ;

A titre subsidiaire :

Si la Cour ne rendait pas un arrêt valant cession du Crédit-bail et de l'immeuble, confirmer le jugement dont appel en le complétant et le précisant s'agissant des comptes entre les parties par la mention des sommes figurant dans la demande de COOL JET à titre principal, ordonner à NATIOCREDIMURS de restituer à COOL JET les loyers versés par cette dernière après le 08 décembre 2008 comme demandé à titre principal, et ordonner la publication du jugement à intervenir sur le fichier immobilier de la conservation des hypothèques sous les références précédemment indiquées ;

A titre très subsidiaire :

De dire que la réalisation de la cession de l'immeuble objet du contrat de Crédit-bail par NATIOCREDIMURS à LOCABAT engage leur responsabilité civile vis à vis de COOL JET et par conséquent condamner solidairement LOCABAT et NATIOCREDIMURS à verser à COOL JET 1 844 729,59 €, s'agissant de LOCABAT sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, et s'agissant de NATIOCREDIMURS sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, ou,

Si le Tribunal ne s'estimait pas suffisamment éclairé par l'évaluation ainsi faite par COOL JET, de nommer tel expert qu'il lui plaira aux fins d'évaluer ledit préjudice ;

De condamner la société LOCABAT à verser à la société COOL JET la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du CPC pour l'appel et confirmer la condamnation prononcée de ce chef en première instance contre LOCABAT ;

De rejeter toutes les demandes de LOCABAT BETHUNE ;

La SNC NATIOCREDIMURS a fait signifier le 6 octobre 2009 des conclusions dont le dispositif est le suivant :

Sur l'appel de la société LOCABAT BETHUNE

DONNER acte à la société NATIOCREDIMURS qu'elle s'en remet à justice sur le bien fondé de l'appel de la société LOCABAT BETHUNE.

Sur l'appel de la société NATIOCREDIMURS

En cas de confirmation du jugement frappé d'appel :

- CONDAMNER la société COOL JET à payer à la société NATIOCREDIMURS la somme de 47.189,41 euros TTC.

- DIRE que la société COOL JET devra supporter tous les droits, frais et honoraires afférents à la mutation.

- DIRE que la société COOL JET devra garantir la société NATIOCREDIMURS de toute réclamation qui pourrait lui être notifiée jusqu'à la signature effective de l'acte constatant la levée d'option à son profit et concernant notamment les taxes foncières,

- Dans tous les cas, REJETER la demande très subsidiaire de la société COOL JET,

- REJETER la demande de la société LOCABAT BETHUNE sollicitant la condamnation solidaire de la société NATIOCREDIMURS,

- Condamner tout succombant à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 CPC.

DISCUSSION

- Sur la compétence territoriale

La SARL LOCABAT demande que le jugement soit infirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence territoriale, et demande à la cour :

- de dire incompétente territorialement la juridiction de NANTERRE pour connaître du présent litige au profit de la juridiction civile statuant en matière commerciale du Tribunal de Grande Instance de BETHUNE,

- en conséquence, de déclarer nul et non avenu le jugement entrepris et renvoyer les parties devant ladite Juridiction.

La SARL LOCABAT soutient que l'action de la SAS COOL JET est dirigée contre elle, dont le siège social est dans le ressort du tribunal de Béthune, que c'est artificiellement que la SAS COOL JET a attrait dans la cause la SNC NATIOCREDIMURS, qu'il n'y a pas de lien d'instance suffisant avec cette société, et que dans ces conditions l'article 42 du Code de procédure civile ne doit pas s'appliquer.

La SAS COOL JET réplique que l'action concerne la mise en oeuvre du contrat de crédit-bail immobilier dont la SNC NATIOCREDIMURS est crédit-bailleur, et que cette dernière est intéressée au litige au même titre que la SARL LOCABAT. Elle en déduit qu'elle a régulièrement porté le litige devant le tribunal de Nanterre dans le ressort duquel la SNC NATIOCREDIMURS a son siège social.

- Sur ce :

Considérant que l'exception d'incompétence n'est recevable qu'à charge par celui qui la soulève d'indiquer la juridiction territorialement compétente ;

Considérant que le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Nanterre n'est pas nul, mais a épuisé la première instance de l'action intentée par la SAS COOL JET en exécution du contrat de crédit-bail immobilier ;

Considérant que le litige ne peut en conséquence être renvoyé devant le tribunal de Béthune ;

Considérant que faute d'indiquer la juridiction d'appel compétente, l'exception d'incompétence est irrecevable.

- Sur le contrat du 8 décembre 2000 de promesse de cession du contrat de crédit-bail immobilier au regard de la formalité de l'enregistrement

Par deux actes en date du 8 décembre 2000 la SARL LOCABAT :

- a consenti à la société de transports Edouard Dubois et Fils, devenue ABX Logistics, un bail commercial sur l'immeuble,

- a conféré à la société de transports Edouard Dubois et Fils, devenue ABX Logistics, 'la faculté de demander ou non la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail', cette promesse expirant le 1er décembre 2006

La SARL LOCABAT soutient que le second contrat en date du 8 décembre 2000, portant promesse de céder la totalité des droits au contrat de crédit-bail du 7 mars 1990, est nul en l'absence d'enregistrement, par application des dispositions de l'article 1589-2 du Code civil, s'agissant d'une promesse unilatérale de vente. Elle critique le jugement pour avoir dit que cet article n'était pas applicable pour les motifs erronés, d'une part qu'il s'agissait d'une promesse synallagmatique, et d'autre part que le contrat de bail commercial et le contrat de promesse de cession du contrat de crédit-bail étaient interdépendants. Elle fait notamment valoir à ce propos :

- que la SA ABX Logistics avait 'la faculté de demander ou non' l'exécution de la promesse de cession, et donc que seule la SARL LOCABAT a consenti une promesse unilatérale de cession, la SA ABX Logistics ne prenant aucun engagement,

- que, sur l'interdépendance, le contrat de bail commercial est passé entre la SARL LOCABAT et la SA ABX Logistics, alors que le contrat de promesse de cession de crédit-bail intéresse en outre la SNC NATIOCREDIMURS, et donc que les parties ne sont pas les mêmes,

- que les parties ont voulu séparer les deux contrats en passant deux actes différents,

- qu'il n'y a aucun renvoi d'un contrat à l'autre, et que chacun des contrats est indépendant et peut s'exécuter indépendamment l'un de l'autre,

- que la SAS COOL JET soutient inexactement que les loyers du bail commercial sont supérieurs aux loyers du marché pour intégrer le coût d'acquisition de l'immeuble, alors que le montant des loyers a été fixé par la simple indexation prévue au bail, et était inférieur au prix du marché,

- que si la SA ABX Logistics avaient voulu procéder à une opération unique, elle aurait directement acheté l'immeuble à la SNC NATIOCREDIMURS,

- que le contrat de promesse de cession précise par une clause expresse que la SARL LOCABAT devait être à jour du paiement des redevances au jour de la demande de cession par la SA ABX Logistics,

- que c'est à tort que le tribunal a estimé, pour en tirer argument en faveur de l'interdépendance des contrats, que la clause devait s'entendre en ce sens que la SA ABX Logistics devait être à jour du paiement des loyers du bail commercial pour pouvoir mettre en oeuvre la promesse de cession,

- que c'est également à tort que le tribunal a tiré argument du fait que les loyers du bail commercial étaient directement versés à la SNC NATIOCREDIMURS, ce paiement direct n'étant que l'exécution de la clause de délégation de paiement incluse dans le contrat de crédit-bail,

La SAS COOL JET soutient que le bail commercial et la faculté de demander ou non la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail constitue des contrats interdépendants. Elle fait valoir à ce propos :

- que l'intention de la SA ABX Logistics a été de prendre en location l'immeuble dans la perspective d'en acquérir la propriété,

- que cette intention ressort de la lettre de la SA ABX Logistics en date du 11 septembre 2000 qui lie en une opération unique la location pour 4.573,47 € H.T. par mois et la possibilité ouverte 'à tout moment de faire l'acquisition de l'immeuble ou de prendre la suite du crédit-bail moyennant une soulte de 91.469,41 €',

- que les deux contrats passés simultanément le 8 décembre 2000 entre la SARL LOCABAT et la SA ABX Logistics consacrent l'accord des parties sur l'opération unique, telle qu'elle a été exposée le 11 septembre 2000 et donc sur l'interdépendance existant entre ces deux contrats,

- que cette interdépendance résulte encore du fait que les loyers du bail commercial (419.156 € sur 7 ans) étaient supérieurs aux redevances du crédit-bail (356.417 € sur 7 ans), et intégraient donc l'acquisition progressive de l'immeuble,

- que la promesse de cession de crédit-bail est une promesse sygnallagmatique.

- Sur ce :

Considérant qu'un contrat de crédit-bail contient par définition une promesse unilatérale de vente ;

Considérant que le contrat passé entre la SARL LOCABAT et la SA ABX Logistics (alors dénommée Edouard Dubois et Fils), le 8 décembre 2000, donne à cette dernière 'la faculté de demander ou non la cession de la totalité de ses droits au contrat de crédit-bail' pour une durée expirant au 1er décembre 2006 ;

Considérant qu'il s'agit donc d'une promesse de cession du contrat de crédit-bail incluant la clause d'option d'achat ;

Considérant que la SARL LOCABAT promet à la SA ABX Logistics de lui céder le contrat de crédit-bail, mais en donnant à cette dernière la faculté de demander ou non l'exécution de cette promesse ; que la promesse de la SARL LOCABAT est donc unilatérale et non synallagmatique ;

Considérant qu'au regard de la formalité de l'enregistrement, ce caractère unilatéral est sans conséquence ; qu'en effet la promesse unilatérale de cession d'un contrat de crédit-bail immobilier n'est pas soumise à la formalité de l'enregistrement prévue par l'article 1589-2 du Code civil car elle porte sur un contrat contenant un ensemble d'obligations contractuelles réciproques dont l'option d'achat n'est que l'une d'elles, pour constituer une opération de financement de l'acquisition d'un bien immobilier ;

Que la SARL LOCABAT doit en conséquence être déboutée de sa demande fondée sur l'absence d'enregistrement du contrat du 8 décembre 2008, pour cette première raison ;

Considérant en outre que les deux contrats passés entre la SARL LOCABAT et la SA ABX Logistics le 8 décembre 2008 sont interdépendants entre eux car ils concourrent à une opération unique, acceptée par la SARL LOCABAT et consistant pour la SA ABX Logistics à obtenir la jouissance de l'immeuble avec la possibilité d'en devenir propriétaire ; que le montant des loyers du bail commercial et de la 'soulte' due à la SARL LOCABAT, s'ajoutant au montant de l'option d'achat due à la SNC NATIOCREDIMURS, ont été fixés entre les parties en considération des avantages que chacune d'elles retirait de cette opération ;

Considérant que pour cette seconde raison, tenant à l'interdépendance entre le contrat de bail commercial et le contrat de promesse de cession de crédit-bail, la formalité de l'enregistrement n'était pas obligatoire ;

- Sur le contrat du 8 décembre 2000 de promesse de cession du contrat de crédit-bail immobilier au regard de l'absence de cause

Pour le cas où la cour estimerait que le contrat de cession du 8 décembre constitue une promesse synallagmatique de vente, la SARL LOCABAT soutient que ce contrat serait, alors, dépourvu de cause, car il n'existerait aucune contrepartie à l'obligation de céder l'immeuble.

- Sur ce :

Considérant que la cour, puisqu'elle estime qu'il n'y a pas promesse synallagmatique de vente, n'est pas saisie de ce moyen de nullité pour absence de cause qui n'est que subsidiaire ;

- Sur le contrat du 31 mars 2005

La SARL LOCABAT soulève la nullité et subsidiairement l'inopposabilité de la cession intervenue entre la SA ABX Logistics et la SAS COOL JET le 31 mars 2005. Elle fait notamment valoir à ce propos :

- que ce contrat devait, à peine de nullité, être enregistré dans les dix jours, par application des dispositions de l'article 1589-2 du Code civil,

- que la formalité de l'enregistrement n'a été faite que le 25 avril 2005, hors du délai de dix jours,

- que le contrat de cession ne lui a jamais été signifié conformément aux dispositions de l'article 1690 du Code civil est lui est donc inopposable,

- qu'elle n'a jamais eu connaissance de la cession de la promesse de cession du contrat de crédit-bail, et ne l'a donc pas accepté tacitement.

La SAS COOL JET expose :

- que le 31 mars 2005, la SA ABX Logistics a cédé ses établissements de messagerie à la SAS COOL JET, dont l'établissement litigieux de Lillers,

- que par un second contrat du même jour, la SA ABX Logistics :

. a transféré à la SAS COOL JET tous les droits qu'elle détient sur le bail commercial,

. a consenti que la SAS COOL JET la remplace vis à vis de la SARL LOCABAT dans la faculté de demander ou non la cession de la totalité de ses droits au contrat de crédit-bail,

- que ce second contrat a été enregistré le 25 avril 2005,

- que la SARL LOCABAT a facturé les loyers du bail commercial à la SAS COOL JET, dès le 1er juin 2005, et a donc été avisée de la cession des contrats,

- que la SNC NATIOCREDIMURS a également été avisée de la cession des contrats, car, dès le 8 juin 2005, elle a fait délivrer à la SAS COOL JET une signification de délégation de paiement des loyers à son profit,

- qu'à partir de cette date, la SAS COOL JET a versé les loyers directement à la SNC NATIOCREDIMURS, réduisant ainsi la dette de la SARL LOCABAT vis à vis de cet établissement financier, et arrêtant la procédure de résiliation du contrat de crédit-bail immobilier.

- Sur ce :

Considérant que la SARL LOCABAT ne peut invoquer le caractère intuitu personnae du contrat pour s'opposer à son engagement de céder ce contrat, alors que seul le cocontractant qui se voit imposée une cession de contrat peut invoquer le caractére intuitu personnae de ce contrat ;

Considérant au surplus que le contrat de crédit-bail immobilier n'est pas un contrat intuitu personnae ; que la SNC NATIOCREDIMURS ne le prétend pas ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, s'agissant de la promesse de cession d'un contrat de crédit-bail, la formalité de l'enregistrement n'est pas obligatoire ; que de plus le contrat du 31 mars 2005 comporte la cession du bail commercial et la promesse de cession du contrat de crédit-bail, et n'est pas soumis à la formalité de l'enregistrement en raison de l'interdépendance des obligations des cocontractants ; qu'en conséquence le non respect du délai de dix jours pour qu'il soit procédé à l'enregistrement n'a pas de portée juridique ;

Considérant que le contrat du 31 mars 2005 constitue une cession de contrats et non une cession de créance, et n'est pas soumis à l'obligation de signification au débiteur prévue par l'article 1690 du Code civil ;

Considérant que la SAS COOL JET a remplacé la SA ABX Logistics dans l'exécution des obligations de cette dernière, en pleine connaissance de la SARL LOCABAT ; qu'en effet, dès le 1er juin 2005, la SARL LOCABAT a adressé à la SAS COOL JET les factures de loyers qu'elle adressait auparavant à la SA ABX Logistics, acceptant ainsi tacitement le remplacement de l'une par l'aute, et donc la cession des contrats ;

Considérant que la SNC NATIOCREDIMURS a eu connaissance de ce changement de locataire puisqu'elle a mis en oeuvre la clause de délégation de paiement des loyers, auprès de la SAS COOL JET, dès le 8 juin 2005 ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la cession de contrats intervenue le 31 mars 2005 entre la SA ABX Logistics et la SAS COOL JET est valable et se trouve opposable à la SARL LOCABAT ; que la demande de la SARL LOCABAT en nullité et en inopposabilité de ce contrat sera rejetée ;

- Sur la levée de l'option d'achat par la SARL LOCABAT

La SARL LOCABAT soutient qu'elle a levé l'option d'achat avant que la SAS COOL JET ne lui fasse part de son intention au mois d' août 2006, et en déduit que cette dernière ne peut qu'être déboutée de ses demandes, et qu'au contraire la cour constatera la vente de l'immeuble à son profit. Elle fait notamment valoir à ce propos :

- qu'au début de l'année 2006, elle a trouvé un accord avec la SNC NATIOCREDIMURS pour mettre fin au litige sur le retard de paiement des redevances du crédit-bail,

- que le 15 mars 2006 la SNC NATIOCREDIMURS lui a demandé si elle entendait acquérir l'immeuble,

- que le 3 avril 2006, elle a avisé la SNC NATIOCREDIMURS de son intention de lever l'option d'achat par anticipation, en sollicitant un délai pour recourir à l'emprunt,

- que l'accord a été conclu à cette date, les échanges suivants permettant de confirmer le prix le 16 août 2006,

- que cette confirmation est postérieure à la connaissance, le 22 août 2006, par la SARL LOCABAT de l'intention de la SAS COOL JET de mettre à exécution la promesse de cession du contrat de crédit-bail, le 12 août n'étant que la date de présentation de la lettre du 4 août 2006, et non la date de retrait de la lettre,

- que les procédures engagées ensuite par la SAS COOL JET ont suspendu la signature de l'acte notarié définitif, la SNC NATIOCREDIMURS préférant attendre le résultat de ces procédures, et la SARL LOCABAT maintenant le financement nécessaire auprès de la SOCIETE GENERALE,

- que la SAS COOL JET, étrangère au contrat de crédit-bail, n'a pas la faculté d'exercer l'option d'achat qui n'appartient qu'à la SARL LOCABAT,

- que la SARL LOCABAT n'a souscrit qu'une promesse de présenter à la SNC NATIOCREDIMURS la société qui lui succédait,

- que l'inexécution de cette promesse se résout par la condamnation à des dommages et intérêts, au titre de la perte de chance, conformément aux dispositions de l'article 1142 du Code civil,

- que la SAS COOL JET ne démontre pas avoir subi un préjudice, et en tout cas ne fait pas la preuve du préjudice considérable qu'elle invoque,

- que si une condamnation à dommages et intérêts devait intervenir, elle devrait être prononcée solidairement avec la SNC NATIOCREDIMURS.

La SAS COOL JET soutient qu'elle a levé l'option d'achat avant que la SARL LOCABAT ne l'a fait. Elle fait notamment valoir à ce propos :

- par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 août 2006 la SAS COOL JET a demandé à la SARL LOCABAT 'la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail' et a invité la SARL LOCABAT à se rapprocher de la SNC NATIOCREDIMURS pour organiser la réalisation de la cession du crédit-bail,

- l'accusé de réception a été signé le 12 août 2006 par Monsieur Delelis, gérant de la SARL LOCABAT

- c'est postérieurement, le 16 août 2006 que la SARL LOCABAT a adressé à la SNC NATIOCREDIMURS une lettre de levée d'option d'achat,

- le 11 septembre 2006, la SAS COOL JET a écrit à la SARL LOCABAT et à la SNC NATIOCREDIMURS pour leur faire interdiction de procéder à la levée anticipée d'option d'achat,

- la SAS COOL JET a ensuite intenté une procédure de référé le 18 octobre 2006 devant le Président du Tribunal de grande instance de Nanterre, puis une procédure de référé devant le Président du Tribunal de commerce de Nanterre qui, par ordonnance en date du 13 février 2007, a fait interdiction, à titre conservatoire, à la SNC NATIOCREDIMURS et à la SARL LOCABAT de procéder à la vente anticipée de l'immeuble entre elles,

- la SAS COOL JET a adressé à la SNC NATIOCREDIMURS le 6 septembre 2007 une lettre de levée d'option d'achat à la date du 8 décembre 2008, date d'expiration du contrat de crédit-bail, pour le cas où il serait fait droit à ses demandes en justice.

- Sur ce :

Considérant que le contrat de crédit-bail règle dans son titre 2 les conditions de la promesse unilatérale de vente (article O et P), et les conditions de la levée d'option anticipée (article P) ; qu'il résulte de ces dispositions :

- que la levée d'option d'option d'achat en fin de crédit-bail, et la levée d'option d'achat anticipée, supposent que le preneur en avise le bailleur au moins un an à l'avance, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception,

- que la réalisation de la promesse de vente est subordonnée à la parfaite exécution par le preneur de toutes ses obligations,

- que le prix de vente sera payé comptant à la signature de l'acte authentique ;

- que l'acquisition ne pourra prendre effet, chaque année, qu'à la date anniversaire de la prise d'effet du présent contrat ;

Considérant que la SARL LOCABAT soutient qu'elle a levé l'option d'achat le 16 août 2006, mais ne prétend pas avoir avisé la SNC NATIOCREDIMURS le 16 août 2005, ni même le 7 décembre 2005, mais seulement le 3 avril 2006 ; qu'au 16 août 2006, la SARL LOCABAT restait devoir à la SNC NATIOCREDIMURS la somme d'environ 80.000 € et n'était donc pas à jour de ses obligations ; qu'en outre l'acquisition ne pouvait produire effet, dans le meilleur des cas que le 8 décembre 2007 ;

Considérant que les conditions de la levée de l'option d'achat par la SARL LOCABAT n'était donc pas remplies le 16 août 2006, ni le 22 août 2006, date à laquelle celle-ci reconnaît avoir retiré la lettre recommandée de la SAS COOL JET en date du 4 août 2006, lui demandant :

- de procéder à la cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail du 7 mars 1990, dont la promesse unilatérale de vente consentie par la SNC NATIOCREDIMURS dans ce contrat,

- d'en informer la SNC NATIOCREDIMURS par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dans les 15 jours, et de solliciter la cession du crédit-bail et de la promesse de vente au profit de la SAS COOL JET ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que la promesse de cession du contrat de crédit-bail bénéficiant à la SAS COOL JET est opposable à la SARL LOCABAT qui a souscrit cette promesse le 8 décembre 2000 ; que la SARL LOCABAT, ayant connaissance de l'intention de la SAS COOL JET d'obtenir la cession du crédit-bail et de la promesse de vente, ne pouvait, sans méconnaître son engagement, lever l'option d'achat à son profit, après le 22 août 2006 ;

Considérant que la SARL LOCABAT doit en conséquence être déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que la levée d'option d'achat a conclu la vente de l'immeuble entre elle-même et la SNC NATIOCREDIMURS ;

Considérant que la SARL LOCABAT doit également être déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé qu'elle peut librement procéder à l'acquisition de l'immeuble auprès de la SNC NATIOCREDIMURS ;

- Sur l'exécution de la promesse de cession du contrat de crédit-bail entre la SARL LOCABAT et la SAS COOL JET

La SARL LOCABAT soutient que la promesse de cession du contrat de crédit-bail constitue une obligation de faire dont l'inexécution se résout en dommages et intérêts, par application des dispositions de l'article 1142 du Code civil. Elle soutient que la SAS COOL JET ne fait pas la preuve de son préjudice.

La SAS COOL JET demande :

- à titre principal, en raison du caractère synallagmatique de la promesse de cession du contrat de crédit-bail, de dire que le présent arrêt vaudra cession du crédit-bail par la SARL LOCABAT à la SAS COOL JET, à effet au 8 décembre 2006,

- subsidiairement, de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la société LOCABAT BETHUNE de demander à la société NATIOCREDIMURS la cession du crédit-bail signé le 7 mars 1990 au profit de COOL JET avec astreinte de 1.500 euros par jour de retard,

- Sur ce :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit la promesse donnée par la SARL LOCABAT n'est pas synallagmatique ; que la SAS COOL JET doit être déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que le présent arrêt constate la cession du crédit-bail par la SARL LOCABAT à la SAS COOL JET, à effet au 8 décembre 2006,

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit :

- la SARL LOCABAT est tenue d'exécuter la promesse de cession du contrat de crédit-bail contenant l'option d'achat de l'immeuble

- cette promesse donnée à l'origine à la SA ABX Logistics a été cédée à la SAS COOL JET ;

- cette cession est opposable à la SARL LOCABAT ;

Considérant qu'il s'en déduit que la SARL LOCABAT est tenue par sa promesse de cession du contrat de crédit-bail, au profit de la SAS COOL JET ;

Considérant que la SAS COOL JET accepte cette promesse et en demande l'exécution ;

Considérant que l'acceptation de la promesse vaut rencontre des consentements des cocontractants, et en conséquence cession du contrat de crédit-bail, y compris de l'option d'achat, dans les relations entre la SARL LOCABAT et la SAS COOL JET ;

Considérant que, dans leurs relations réciproques, la SAS COOL JET devient crédit preneur et la SARL LOCABAT perd sa qualité de crédit preneur, et donc de bailleur de la SAS COOL JET, cette dernière jouissant de l'immeuble en sa qualité de crédit preneur ;

Considérant que l'acceptation de la promesse de cession de la totalité des droits au contrat de crédit-bail ayant été portée à la connaissance de la SARL LOCABAT le 22 août 2006, la SAS COOL JET a remplacé la SARL LOCABAT dans ces droits, le 8 décembre 2006 ;

Considérant qu'il s'en déduit qu'à partir du 8 décembre 2006, la SARL LOCABAT n'a plus l'obligation de payer les redevance du crédit-bail, que la SAS COOL JET n'a plus l'obligation de payer les loyers du bail commercial, et que la SAS COOL JET a l'obligation de payer à la SARL LOCABAT la soulte de 91.469,41 € ;

Considérant qu'il convient en conséquence :

- de condamner la SARL LOCABAT à payer à la SAS COOL JET la différence entre les loyers payés et les redevances du crédit-bail dues, payées à la SNC NATIOCREDIMURS par la SAS COOL JET, à compter du 9 décembre 2006, avec les intérêts au taux légal à compter de chaque paiement,

- de condamner la SAS COOL JET à payer à la SARL LOCABAT la somme de 91.469,41 €, avec les intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2006 ;

- Sur la levée de l'option d'achat par la SAS COOL JET

La SAS COOL JET demande qu'il soit jugé qu'elle a valablement levé l'option d'achat par lettre adressée à la SNC NATIOCREDIMURS le 6 septembre 2007, et qu'il soit jugé en conséquence que la cession de l'immeuble à son profit a pris effet le 8 décembre 2008, et que le présent arrêt vaudra vente à cette date.

La SNC NATIOCREDIMURS demande que la SAS COOL JET soit condamnée:

- à lui payer la somme de 47.189 € T.T.C.,

- à supporter tous les frais et honoraires afférents à la mutation,

- à la garantir de toute réclamation qui pourrait lui être notifiée jusqu'à la signature effective de l'acte constatant la levée d'option et notamment les taxes foncières,

- Sur ce :

Considérant que la SNC NATIOCREDIMURS réclame à la SAS COOL JET le paiement des sommes dues au titre du contrat de crédit-bail, et au titre de la levée de l'option d'achat ;

Considérant qu'il s'en déduit que la SNC NATIOCREDIMURS accepte la cession du contrat de crédit-bail, et la levée de l'option d'achat par la SAS COOL JET, à la condition que cette dernière s'acquitte des obligations du crédit preneur jusqu'à la date d'expiration du crédit-bail, le 8 décembre 2008 ;

Considérant qu'il ressort de l'acceptation par la SNC NATIOCREDIMURS de la levée de l'option d'achat, que la vente de l'immeuble au profit de la SAS COOL JET est parfaite, à la date du 8 décembre 2008, sous les conditions suspensives du respect par cette dernière des obligations du crédit preneur, et de la régularisation par acte notarié ;

- Sur les conséquences pécuniaires de la cession du contrat de crédit-bail et de la levée de l'option d'achat

La SARL LOCABAT demande que la SAS COOL JET soit déboutée de toutes ses demandes. Elle critique le jugement en ce qu'il a jugé que la SAS COOL JET devra s'acquitter entre les mains de la SNC NATIOCREDIMURS du montant de la soulte, soit 91.469,41 €, et que le versement de cette somme éteindra par compensation, à due concurrence :

1- la dette de la SARL LOCABAT envers la SNC NATIOCREDIMURS au titre du crédit-bail,

2- la dette de la SAS COOL JET envers la SARL LOCABAT au titre de la levée d'option d'achat , le surplus éventuel devant être reversé à la SARL LOCABAT, sous déduction de la différence entre les loyers du bail commercial et les redevances du crédit-bail, à compter du 9 décembre 2006.

La SAS COOL JET demande :

- qu'il lui soit ordonné de payer la soulte de 91.469,41 € à la SNC NATIOCREDIMURS, bien que cette somme soit due à la SARL LOCABAT,

- que la SNC NATIOCREDIMURS sera ainsi payée de la somme de 47.189,41 € qui lui est dûe pour solde des redevances de crédit-bail arrêté au 8 décembre 2008,

- que la SNC NATIOCREDIMURS versera le solde de 44.280 € :

. à la SAS COOL JET pour 22.494,90 € représentant la différence entre les loyers payés et les redevances dues pour la période du 9 décembre 2006 au 8 décembre 2008,

. à la SARL LOCABAT la somme de 21.785,10 €,

- que la SNC NATIOCREDIMURS soit condamnée à lui restituer toutes les sommes qu'elle lui a payées après le 8 décembre 2008 ;

La SNC NATIOCREDIMURS demande que la SAS COOL JET soit condamnée:

- à lui payer la somme de 47.189 € T.T.C.,

- à supporter tous les frais et honoraires afférents à la mutation,

- à la garantir de toute réclamation qui pourrait lui être notifiée jusqu'à la signature effective de l'acte constatant la levée d'option et notamment les taxes foncières,

- Sur ce :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, dans les rapports entre la SARL LOCABAT et la SAS COOL JET, les conséquences de la cession des droits du crédit-bail sont que :

- la SARL LOCABAT doit payer à la SAS COOL JET la différence entre les loyers payées à la SNC NATIOCREDIMURS par la SAS COOL JET et les redevances du crédit-bail dues, pour les paiements effectués à compter du 9 décembre 2006, les intérêts courant au taux légal à compter de chaque paiement,

- la SAS COOL JET doit payer à la SARL LOCABAT la somme de 91.469,41 €, avec les intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2006 ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, dans les rapports entre la SNC NATIOCREDIMURS et la SAS COOL JET :

- la SNC NATIOCREDIMURS demande le paiement des redevances jusqu'au 8 décembre 2008, les frais et honoraires de la vente de l'immeuble et le remboursement des sommes qu'elle aurait été amenée à payer avant la signature de la vente,

- la SAS COOL JET réclame à la SNC NATIOCREDIMURS le remboursement des sommes payées après le 8 décembre 2008 ;

Considérant que les éléments du dossier ne permettent pas d'établir le compte entre les parties ; qu'il convient d'ordonner la réouverture des débats sur ce point ;

- Sur la demande de dommages et intérêts de la SAS COOL JET

La SAS COOL JET demande que la SARL LOCABAT soit condamnée à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 1.225.199 €, ou subsidiairement qu'un expert soit désigné pour donner son avis sur le montant de son préjudice. La SAS COOL JET reproche à la SARL LOCABAT de ne pas avoir déféré à la demande qu'elle a formée par lettre du 4 août 2006 d'inviter la SNC NATIOCREDIMURS à lui céder l'immeuble, en exécution de la promesse de cession de crédit-bail du 8 décembre 2008.

La SAS COOL JET indique que dès le mois de juillet 2006, elle a obtenu de l'établissement chargé de l'aménagement de la zone, l'autorisation de s'aggrandir sur les terrains voisins, en portant de 327 à 627 le nombre de ses positions. Elle calcule que son chiffre d'affaires aurait augmenté de 2.354 K€ en 2008 et de 2.411 K€ en 2009, perdant ainsi un résultat d'exploitation de 605 K€ et de 620 K€, pour un total de 1.225.199 €.

- Sur ce :

Considérant que SARL LOCABAT a résisté à la demande de la SAS COOL JET en faisant une interprétation de ses droits qui s'appuie sur des moyens juridiques non dénués de sérieux ; que la SARL LOCABAT n'a commis aucun faute en obligeant la SAS COOL JET à soumettre à l'appréciation du tribunal puis de la cour cette interprétation ; que la SAS COOL JET ne démontre pas la faute contractuelle qu'elle invoque et sera déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

- Sur les demandes en paiement de dommages et intérêts contre la SNC NATIOCREDIMURS

La SARL LOCABAT demande à la cour de juger 'qu'en tout état de cause, la SNC NATIOCREDIMURS sera condamnée solidairement avec la SARL LOCABAT à la réparation de l'entier préjudice de la SAS COOL JET'.

La SAS COOL JET demande à titre très subsidiaire que la SNC NATIOCREDIMURS soit condamnée solidairement avec la SARL LOCABAT à lui payer la somme de 1.844.729,59 € à titre de dommages et intérêts.

- Sur ce :

Considérant que la SNC NATIOCREDIMURS n'a commis aucune faute, se trouvant contrainte d'attendre le résultat de l'instance pour connaître qui, de la SARL LOCABAT ou de la SAS COOL JET était titulaire du contrat de crédit-bail et de son option d'achat ; que la SARL LOCABAT doit être déboutée de sa demande tendant à ce que la SNC NATIOCREDIMURS soit tenue solidairement, avec elle, de la réparation du préjudice de la SAS COOL JET ;

Considérant que la demande de la SAS COOL JET est subsidiaire ; que la cour n'en est pas saisie, dès lors qu'il a été fait droit à la demande principale de la SAS COOL JET ;

- Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

Considérant qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SARL LOCABAT à payer sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, la somme de 15.000 € à la SAS COOL JET, et la somme de 5.000 € à la SNC NATIOCREDIMURS, sans qu'il y ait lieu de faire droit aux demandes formées de ce chef en cause d'appel ;

Considérant que la SNC NATIOCREDIMURS a subi la procédure et doit être indemne des dépens ; que la SARL LOCABAT sera condamnée aux dépens de la SNC NATIOCREDIMURS ;

Considérant que, les moyens et les demandes de la SAS COOL JET ne sont que partiellement accueillis ; qu'il convient de faire application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile, et de dire que la SAS COOL JET supportera ses propres dépens d'appel ;

Considérant que le surplus des dépens sera à la charge de la SARL LOCABAT ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et AVANT DIRE DROIT,

Déclare irrecevable l'exception d'incompétence au profit du Tribunal de grande instance de Béthune,

Confirme le jugement rendu le 19 septembre 2008 par le Tribunal de commerce de Nanterre dans ses dispositions non contraires au présent arrêt,

Dit que la promesse de cession de contrat de crédit-bail donnée par la SARL LOCABAT le 8 décembre 2000 est unilatérale, et déboute la SAS COOL JET de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que cette promesse est synallagmatique, ainsi que de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que le présent arrêt vaut cession de l'immeuble,

Déboute la SARL LOCABAT de sa demande en annulation des contrats passés le 8 décembre 2000 avec la SA ABX Logistics,

Déboute la SARL LOCABAT de sa demande en annulation du contrat intervenu entre la SA ABX Logistics et la SAS COOL JET le 31 mars 2005,

Déboute la SARL LOCABAT de sa demande en inopposabilité à son égard du contrat intervenu entre la SA ABX Logistics et la SAS COOL JET le 31 mars 2005,

Déboute la SARL LOCABAT de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé qu'elle a levé l'option d'achat et que la vente de l'immeuble est intervenue à son profit,

Dit que la SARL LOCABAT doit exécuter la promesse de cession du contrat de crédit-bail au profit de la SAS COOL JET,

Dit que l'acceptation par la SAS COOL JET de la promesse qui lie la SARL LOCABAT vaut rencontre des consentements et cession du contrat de crédit-bail y compris la clause d'option d'achat de l'immeuble, entre les deux sociétés, à la date du 8 décembre 2006,

Constate que la SAS COOL JET est, depruis cette date, titulaire des droits et obligations du crédit preneur, à charge pour elle de payer à la SARL LOCABAT la soulte d'un montant de 91.469,41 €,

Constate que la SAS COOL JET a levé l'option d'achat le 6 septembre 2007, à effet au 8 décembre 2008,

Dit que l'acceptation par la SNC NATIOCREDIMURS de la levée de l'option d'achat vaut vente parfaite de l'immeuble, à la date du 8 décembre 2008, sous les conditions suspensives que la SAS COOL JET respecte les obligations du crédit preneur, et que la vente fasse l'objet d'un acte notarié,

Ordonne à la SNC NATIOCREDIMURS de régulariser l'acte notarié de vente de l'immeuble à la SAS COOL JET, dans les conditions prévues au crédit-bail du 7 décembre 1990,

Avant dire droit sur le compte entre les parties, ordonne la réouverture des débats et invite les parties à fournir les éléments d'appréciation permettant d'établir ce compte et en particulier :

- le montant des sommes impayées à la date du 8 décembre 2006, au titre des loyers du bail commercial et au titre des redevances de crédit-bail,

- les montants des loyers et des redevances après le 8 décembre 2006, et leur évolution,

- le montant des sommes versées et reçues par les parties après le 8 décembre 2006,

- le montant de la différence des sommes payées par la SAS COOL JET à titre de loyers après le 8 décembre 2006, et des sommes dues au titre des redevances de crédit-bail à partir de cette date,

- le montant des sommes dues à la SNC NATIOCREDIMURS par la SAS COOL JET pour la levée de l'option d'achat le 8 décembre 2008,

- le montant des sommes dont la SAS COOL JET réclame le remboursement à la SNC NATIOCREDIMURS,

- tous autres éléments qui peuvent être utiles à l'établissement des comptes entre les parties,

Dit que l'audience des plaidoiries aura lieu le 25 mars 2010,

Déboute la SAS COOL JET de sa demande en paiement de la somme de 1.225.199 € à titre de dommages et intérêts, pour le retard dans l'augmentation du nombre des positions,

Déboute la SARL LOCABAT de sa demande tendant à ce que la SNC NATIOCREDIMURS soit tenue solidairement, avec elle, de la réparation du préjudice de la SAS COOL JET,

Rejette les demandes que les parties ont formées en appel sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Dit que la SAS COOL JET supportera les dépens qu'elle a engagés en appel,

Condamne la SARL LOCABAT à payer le surplus des dépens de première instance et d'appel, et accorde aux avoués à la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.