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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 31 mars 2011, n° 09/10879

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Chaboisseau

Défendeur :

Pereire Capital (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mme Touzery-Champion, Mme Pomonti

Avoués :

SCP Arnaudy et Baechlin, SCP Monin d’Auriac de Brons

Avocats :

Me Santana, Me Benelli

T. com. Paris, du 28 avr. 2009, n° 20070…

28 avril 2009

Monsieur Chaboisseau est l'actionnaire majoritaire et le Président d'un groupe de sociétés de télécommunication dénommée SCT dont il est le fondateur.

Souhaitant procéder à la cession ou «effectuer une opération juridique financière et économique assimilable» de toutes ses participations, qu'il détient directement et indirectement dans les sociétés du groupe SCT, il a confié, le 7 septembre 2005, à la société Pereire Capital, conseil en rapprochement d'entreprises, un  mandat de l'assister dans la réalisation de cette opération, de préparer la documentation de présentation des sociétés, d'approcher, de lui présenter les sociétés susceptibles d'être intéressées par cette opération et de l'assister pour la négociation avec l'ensemble d'entre elles. Ce mandataire devait recevoir comme rémunération une commission calculée sur le prix de vente obtenu.

La société Pereire Capital a ainsi présenté à Monsieur Chaboisseau diverses entreprises intéressées par l'opération et particulièrement la société Astorg Partners. Au printemps 2007, M.Chaboisseau a décidé de tenir à l'écart de la finalisation de l'opération la société Pereire Capital. Par lettre du 17 avril 2007 il a résilié le mandat donné à la société Pereire Capital, laquelle en a accusé réception, en lui précisant que ce mandat prendrait fin au 7 septembre 2007 et qu'il n'était pas dispensé du règlement de la rémunération convenue dont le montant proportionnel est fixé à l'article 4 du mandat.

Estimant que la commission convenue lui était due en raison de la signature par Monsieur Chaboisseau et ses coactionnaires d'un protocole global de cession du groupe SCT avec la société Astorg Partners ayant réuni des partenaires financiers dans une technique classique de LBO/OBO, la Sarl Pereire Capital a fait assigner, par acte du 24 septembre 2007, Monsieur Chaboisseau devant le tribunal de commerce de Paris, lequel par jugement du 28 avril 2009 a:

- condamné Monsieur Chaboisseau à payer à la Sarl Pereire Capital la somme de 2.070.564,51 euros HT soit 2.476.395,15 euros TTC avec intérêts au taux légal compter du :

- 24 septembre 2007 pour la somme de 2.380.040 euros TTC

- 2 février 2008 pour la somme de 96.355,15 euros TTC,

- débouté la Sarl Pereire Capital de sa demande en dommages et intérêts,

- condamné Monsieur Chaboisseau à payer à la SARL Pereire Capital la somme de 30.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Par conclusions récapitulatives signifiées le 7 janvier 2011, Monsieur Chaboisseau, appelant, demande de  :

- le déclarer recevable en son appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 28 avril 2009, le recevoir en son appel et statuant à nouveau,

à titre principal,

- faire droit à l'exception de nullité du contrat du 7 septembre 2005 qu'il soulève,

- juger en conséquence que la société Pereire Capital n'est pas fondée à recevoir une quelconque rémunération de sa part,

à titre subsidiaire,

- prononcer la résolution judiciaire du contrat de mandat du 7 septembre 2005,

- condamner en conséquence la société Pereire Capital à lui payer des dommages et intérêts d'un montant égal à celui de la rémunération qui lui sera éventuellement reconnue ou qui sera confirmée par la cour,

à titre très subsidiaire,

- prononcer la réduction judiciaire de la rémunération de la société Pereire Capital dans les proportions qu'il appartiendra à la cour de décider,

- si la cour confirme le principe de la condamnation au paiement d'une commission calculée sur les bases contractuelles limiter le montant maximal de la rémunération de cette dernière à la somme de 1.785.030 euros par application du contrat du 7 septembre 2005,

en tout état de cause,

- débouter la société Pereire Capital de toutes ses prétentions,

- la condamner à lui payer, si le jugement entrepris vient à être réformé, la somme de 1.153.051,78 euros qui a été réglée au titre de l'exécution du jugement de première instance, outre intérêts au taux légal à compter du versement qui en a été fait ou à tout le moins à compter de la date de la signification des présentes conclusions, application étant faite des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la société Pereire Capital à lui payer, si le jugement entrepris n'était que partiellement réformé, au paiement de la différence entre le montant de la condamnation qui lui serait accordée et la somme de 1.153.051,78 euros, outre intérêts au taux légal à compter du versement qui en a été fait ou à tout le moins à compter de la date de la signification des présentes conclusions, application étant faite des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la société Pereire Capital à lui verser le montant des frais de caution bancaire qu'il a dû exposer soit 6.075 euros, outre une somme de 50.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives signifiées le 26 janvier 2011, la société Pereire Capital intimée formant appel incident, demande de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur Chaboisseau à lui verser la somme de 2.070.564,51 euros HT, soit 2.476.395,15 euros TTC avec intérêts de retard, à compter du 24 septembre 2007, pour la somme de 2.380.040 euros TTC et à compter du 2 février 2008 pour la somme de 96.355,17 euros TTC,

- y ajoutant, condamner Monsieur Chaboisseau à lui régler des pénalités de retard calculées à un taux égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de sept points de pourcentage, ainsi qu'une somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur Chaboisseau à lui payer la somme de 30.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et lui allouer une nouvelle indemnité sur ce même fondement d'un montant de 30.000 €,

- débouter Monsieur Chaboisseau de toutes ses demandes.

La Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la nullité du mandat du 7 septembre 2005

Considérant que Monsieur Chaboisseau soulève la nullité du mandat du 7 septembre 2005 en ce qu'il ne respecte ni les dispositions de l'article 7 de la loi d'ordre public du 2 janvier 1970, dite loi Hoguet, comme ne comportant pas une limitation de ses effets dans le temps ni l'article 78 du décret d'application du 20 juillet 1972, dès lors que les clauses d'exclusivité et de garantie de commission ne sont pas en caractères très apparents; qu'il prétend donc que le mandat confié à la société Pereire Capital, qui exerce cette activité de manière habituelle, entre dans le champ d'application de cette loi en ce qu'il porte sur la vente de parts sociales non négociables représentatives du capital de sociétés à responsabilité limitée, propriétaires de leurs fonds de commerce et n'appartenant pas à un groupe au sens juridique du terme ;

Considérant que la société Pereire Capital objecte que les sociétés de conseil en rapprochement d'entreprises ne prêtent leur concours qu'à des opérations de cession de droits d'associés qui sont toujours des actions et non des parts de société à responsabilité limitée et considère que son activité n'est pas soumise à la loi du 2 janvier 1970. Elle fait également valoir que le mandat du 7 septembre 2005 n'entre pas dans le champ d'application de ladite loi, parce que l'objet de l'intervention n' était pas « les douze sociétés énumérées à l'annexe 1 » mais « le groupe SCT » entendu globalement, parce que les seuls titres cédés lors de la réalisation effective de l'opération sont des actions et non des parts sociales, et enfin parce que les différentes sociétés, qui avaient initialement la forme de SARL n'avaient pas de clientèle et, partant, pas de fonds de commerce ;

Considérant que le champ d'application de la loi Hoguet est défini en son article premier ainsi qu'il suit :

' les dispositions de la loi s'appliquent aux personnes physiques ou morales qui d'une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours, même à titre accessoire, aux opérations portant sur les biens d'autrui et relatives à (..)

5) l'achat, la vente de parts sociales non négociables lorsque l'actif social comprend un immeuble ou un fonds de commerce';

Qu'il convient d'abord de rechercher si l'objet du mandat inclut ou non la cession de parts sociales non négociables ;

Que le mandat a été confié à la société Pereire Capital, en qualité de conseil en rapprochement d'entreprises, par 'M.Chaboisseau, agissant en son nom personnel en tant qu'actionnaire de sociétés énumérées dans l'annexe 1 (cf définition du 'GROUPE SCT'); que l'annexe 1 intitulée 'Définition et périmètre du groupe SCT' précise que le 'groupe SCT est constitué des sociétés suivantes' et suit une liste comprenant deux sociétés anonymes : SCT Télécom (avec trois agences: siège du groupe: La Plaine Saint Denis, Agence de Surenes en Ile de France, Agence de Marseille), SET Télécom ( comprenant quatre agences), une SAS: SCT Réseaux (comprenant deux agences), puis dix Sarl ;

Que le mandant a confié au mandataire la mission de ' l'assister dans la réalisation de l'opération de transmission des sociétés' définie en page 1 par une cession ou une opération juridique financière ou économique assimilable de toutes participations que M.Chaboisseau détient directement ou indirectement dans les sociétés du groupe SCT ;

Qu'il est également précisé que 'le mandant souhaite par ailleurs proposer à l'ensemble des actionnaires de chacune des sociétés (ci-après dénommés les co-actionnaires) de participer à l'opération qu'il envisage dans le cadre du présent mandat ou de se substituer à eux après avoir acheté leurs parts';

Que par conséquent, au moment même où M.Chaboisseau confie ce mandat à un conseil en entreprises (profession non réglementée), l'emploi du terme vague 'opération de transmission des sociétés' et l'alternative (cession ou opération similaire) démontrent, contrairement à ce que soutient l'appelant, que les contours de cette intervention à réaliser n'étaient pas exactement définis ; qu'il ne peut donc prétendre que la cession envisagée au 7 septembre 2005 impliquait nécessairement la cession de parts sociales de SARL, lesquelles ne sont pas négociables, en application de l'article L 223-12 du code de commerce ;

Qu'en revanche au moment de la cession, il n'est pas contesté que le groupe SCT était alors constitué d'une société mère et de filiales à 100 % et que seules les actions de la société mère ont été cédées à la société Astorg (avec temporairement quelques actions de la SAS SCT Réseaux) ; que les seuls titres cédés lors de la réalisation effective de l'opération ont en conséquence été des actions et non des parts sociales ;

Que de surcroît M.Chaboisseau ne peut prétendre qu'il souhaitait une cession de parts sociales alors que le régime fiscal de la vente d'actions est beaucoup plus avantageux que celui de la cession de parts sociales, et ce d'autant plus que les sommes en jeu étaient importantes; qu'il ressort du mail du 19 décembre 2006 envoyé par la société Pereire Capital à M.Chaboisseau que l'optimisation fiscale était un élément clef indispensable pour la réussite de l'opération, qui avait été convenue entre le mandant et son mandataire ;

Que ce seul élément tenant à la cession d'actions suffit à retenir que la loi Hoguet n'est pas applicable en l'espèce ;

Que l'exception de nullité sera donc rejetée.

Sur la demande de résolution judiciaire du mandat du 7 septembre 2005

Considérant que Monsieur Chaboisseau fait valoir que sur le fondement des articles 1184 et 1147 du Code civil le mandat doit être résolu eu égard à la gravité des manquements contractuels de la société Pereire Capital qui non seulement n'a pas satisfait à une bonne exécution des diligences lui incombant, mais a commis un grave manquement en dissimulant l'offre Barclays et en invoquant des justifications infondées ; qu'il soutient également que dès qu'il a été en mesure de réaliser les manquements de son mandataire, il les a dûment formalisés et a ensuite, en toute bonne foi, demandé à ce dernier de proposer les mesures destinées à régulariser la situation, ce à quoi celui-ci s'est refusé, mettant ainsi de lui-même un terme à son intervention ;

Que la société Pereire Capital conteste la dissimulation reprochée, qu'elle soutient que Monsieur Chaboisseau a été parfaitement informé de l'offre de la société Barclays dont il connaissait les termes, que les intérêts de ce dernier ont été parfaitement défendus et qu'il a lui-même fait preuve de déloyauté en prétendant qu'il n'avait pas reçu copie de l'offre non engageante formalisée en janvier; qu'elle estime avoir pleinement satisfait à son obligation au regard de son rôle, qui était de créer un document de présentation homogène et attrayant du groupe SCT., que M Chaboisseau avait reconnu en première instance la qualité de ses des prestations ;

Considérant que la mission de la société Pereire Capital consistait à :

- préparer une documentation de présentation des sociétés pour déterminer un niveau de prix,

- tenir le mandant régulièrement informé de l'évolution de son activité,

- soumettre au mandant une liste de personnes (les cibles) susceptibles d'acquérir

- contacter confidentiellement les cibles retenues,

- présenter au mandant les cibles intéressées et l'assister pour la négociation ;

Qu'il ne saurait être tiré du rapport de M.Baloteaud, expert amiable choisi par M.Chaboisseau, qui décrit de manière idéale les principales phases du processus devant être pratiquées par les conseils en rapprochement d'entreprises conformément à l'éthique, la preuve de l'absence de diligences de la société Pereire Capital; que les manquements allégués ne peuvent être examinés qu'au regard de la mission limitée précitée ;

Qu'il ne peut être reproché à cette société de n'avoir pas rédigé le 'business plan', de n'avoir fait aucun apport intellectuel dans le cadre de l'établissement de la documentation, de n'avoir pas produit d'analyse permettant de déterminer un niveau de prix , dès lors qu'il était prévu que la documentation de présentation devait être soumise 'pour accord exprès ou tacite au mandant' et que le niveau de prix devait être 'déterminé d'un commun accord' ; qu' après avoir donné son accord, à tout le moins tacite, puisque la mission s'est poursuivie jusqu'au 17 avril 2007, M.Chaboisseau ne peut remettre en cause le travail de présentation accompli; que de même, le prix plancher de 70.000.000 euros pour le groupe avait été fixé avec son consentement ;

Que M.Chaboisseau prétend également que la société Pereire Capital n'avait pas les moyens humains nécessaires à l'accomplissement de sa mission, de sorte qu'il a été contraint de contracter avec la société MP2 Consulting pour l'élaboration de la documentation de présentation des sociétés ;

Mais considérant qu'il apparaît de la lecture des mails échangés entre la société MP2 Consulting, dirigée par M.Perez, ancien directeur administratif et financier du groupe SCT et la société Pereire, que cette première société avait pour mission de rassembler les données commerciales, comptables, sociales et financières, selon les instructions de la seconde, afin de permettre à cette dernière de remplir sa mission; que de l'attestation de M.Perez il ressort que son rôle a changé en février 2007 en raison de l'absence de la société Pereire, qu'il précise la teneur de toutes les missions dont il a alors eu la charge et qui étaient auparavant réalisées par la société Pereire ; que la preuve est ainsi apportée que leurs missions étaient initialement complémentaires, l'une fournissant à l'autre la matière nécessaire à l'élaboration de la documentation de présentation, que le travail de société MP2 Consulting ne suppléait donc pas à la carence de la société Pereire, contrairement aux allégations de l'appelant ;

Que M.Taureau (recruté par la société Pereire pour l'aider à accomplir son mandat) atteste que dans le cadre de sa mission il a organisé des rendez-vous entre M.Chaboisseau et des managers ayant réussi leur opération LBO, afin que ceux-ci expliquent à ce dernier le mécanisme complexe du LBO, son intérêt et l'intérêt de ses actionnaires pour ce type d'opération; que de surcroît l'appelant reconnaît avoir eu communication le 5 février 2007 d'un' power Point explicatif des OBO' que dans ces conditions, il ne peut sérieusement invoquer un manquement de la société Pereire à l'obligation de conseil sur le fonctionnement d'une opération de LBO ;

Que M.Chaboisseau se plaint plus particulièrement d'un grave manquement de son mandataire tenant à la dissimulation de l'offre de la société Barclays du 8 janvier 2007 ; Mais considérant que ce dernier était parfaitement informé de l'existence de cette offre et de son exacte teneur par un mail du 18 décembre 2006 que lui avait envoyé par M.Taureau ainsi libellé:' Toujours pas d'offre écrite, mais ils devraient nous confirmer ce qu'ils m'ont redit ce soir, à savoir: Valeur d'entreprise =55 à 60 millions d'euros + 5 millions d'euros (si REX atteint) donc 60 millions ou 65 millions + la tréso soit un total de 75 millions d'euros. Réinvestissement dans la nouvelle holding de reprise jusqu'à 45/50 %. Possibilité de BSA (équivalent stock options) pour environ 7 % du capital si résultats 2007 2008 atteints (et bien sûr avec un Tri mini de 30 % pour eux';

Que M.Taureau concluait ainsi 'Un peu déçu par Barclays', ce à quoi M.Chaboisseau répondait le même jour 'Merci pour les infos et effectivement déçu par Barclays'; qu'il ne peut donc soutenir que son mandataire n'avait pas à se faire juge des offres reçues pour le compte de son mandant, puisqu'il avait lui-même donné son avis sur cette offre ;

Que l'offre écrite du 8 janvier 2007 de la société Barclays n'a pas été améliorée par rapport aux indications données en décembre 2006; qu'en revanche sa nouvelle offre du 9 février 2007 portée à 90 millions d'euros a permis de la mettre en concurrence avec celle de la société Astorg ;

Qu'il est ainsi démontré que la non communication officielle de l'offre du 8 janvier 2007 n'a eu aucune incidence dans la mise en concurrence des diverses offres, que la société Pereire Capital a parfaitement rempli sa mission et défendu les intérêts de M.Chaboisseau, en poursuivant ses négociations pendant tout le mois de janvier avec la société Barclays puisqu'elle a obtenu une offre supérieure à celle initialement proposée ;

Qu'il ressort de l'échange de mails versés aux débats que le mandataire a rendu compte très régulièrement de sa mission à son mandant, contrairement aux allégations de ce dernier ;

Qu'enfin, il n'est pas sans intérêt de constater que l'examen des courriels échangés et la teneur des entrevues entre les parties fait apparaître que leur véritable désaccord en février 2007 s'est cristallisé sur le montant de la commission due à la société Pereire Capital, ce qui a conduit M.Chaboisseau en avril à résilier unilatéralement le mandat par lettre non motivée du 17 avril 2007; que ce n'est donc pas le mandataire qui a mis un terme à son intervention ;

Qu'en définitive, M.Chaboisseau et les coactionnaires ont contracté le 21 septembre 2007 avec le fonds de placement et d'investissement Astorg, présentée par la société Pereire Capital, pour le prix négocié par cette dernière, après mise en concurrence d'autres offres ;

Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Pereire Capital a rempli la mission qui lui avait été confiée, a satisfait à l'ensemble de ses engagements, de sorte que la demande en résolution formée par M.Chaboisseau sur le fondement de l'article 1184 ne peut prospérer ;

Qu'il en est de même de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 1147 du code civil, dès lors que les manquements reprochés à la société Pereire Capital n'ont pas fait l'objet d'une démonstration.

Sur la réduction du montant des commissions

Considérant que Monsieur Chaboisseau fait valoir que le montant exceptionnel des rémunérations prévues procède du très important travail que doit normalement accomplir le mandataire s'il respecte ses obligations; que la rémunération contractuellement prévue se trouve disproportionnée au regard du travail réellement fourni par la société Pereire Capital, si l'on prend en considération l'intégralité de l'opération de LBO ;

Considérant que la Sarl Pereire Capital rétorque que compte tenu de l'ampleur et de la qualité des prestations fournies, reconnues par Monsieur Chaboisseau le 25 janvier 2007, compte tenu de l'excellent résultat obtenu en conséquence de son intervention, la condamnation prononcée à l'encontre de Monsieur Chaboisseau n'est en aucune façon excessive et il n'y a aucune raison de la réduire judiciairement; qu'elle réclame donc la somme de 2.476.395,15 € TTC assortie des intérêts au taux légal et de pénalités de retard ;

Considérant qu'il était prévu au mandat, en cas de réalisation de l'opération, une commission de succès de 2 % HT du montant de la transaction jusqu'à un montant valorisant la transaction à 80 millions d'euros et à partir d'un montant de vente minimum de 70 millions d'euros, de 3 % HT sur la tranche valorisant la transaction comprise entre 80 et 100 millions d'euros, de 4 % HT sur la tranche valorisant la transaction au-delà de 100 millions d'euros; qu'il était également prévu que cette rémunération sera due au mandataire en cas de réalisation définitive de l'opération avec toute personne présentée dans le cadre du mandat dans les conditions de montant et de délai, telles que stipulées en annexe 2 selon diverses modalités de dégressivité ;

Considérant qu'un principe général du droit reconnaît aux juge un pouvoir modérateur, dans les contrats de service en présence d'une faute du mandataire ou même lorsque la rémunération paraît excessive par rapport aux services rendus ;

Qu'en l'espèce, si la société Pereire Capital a accompli des diligences du 7 septembre 2005 au 17 avril 2007, soit pendant environ 17 mois, sans d'ailleurs qu'elle en précise l'ampleur journalière et le nombre de personnes qui s'y consacrait, elle n'a néanmoins pas participé à l'intégralité du processus, et notamment n'a pas - M.Chaboisseau ayant mis fin prématurément à son mandat- assisté ce dernier pour la négociation finale, de février à octobre 2007, qui requerrait de solides compétences en matière financière, de sorte qu'elle a pu consacrer ce temps à d'autres clients ;

Que par ailleurs pour établir la documentation de présentation , elle a reçu l'aide active et efficace de la société de MP2 Consulting, dont les honoraires ont été réglés par M.Chaboisseau ;

Qu'il ressort de l'ensemble des ces éléments et eu égard aux pièces produites, notamment les documents de présentation pour partie factuels, la Cour estime la rémunération réclamée de 2.476.395,15 € hors de proportion avec le nombre d'heures de travail accompli et la compétence développée; que la somme de 1.153.051,78 € qui a été allouée au titre de l'exécution provisoire correspond aux diligences effectuées et au temps passé;

que la société Pereire Capital ne conteste pas que ladite somme lui a déjà été réglée au titre de l'exécution provisoire ; que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2007, date de l'assignation valant mise en demeure ;

Considérant que la société Pereire Capital n'est pas fondée à réclamer le paiement de pénalités de retard en application des dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, dans la mesure où elle ne justifie pas disposer de conditions de règlement pour son activité professionnelle ;

Considérant qu'il ne saurait être fait droit à la demande de M.Chaboisseau tendant à voir condamner la société Pereire Capital Capital à lui rembourser les frais de caution bancaire, alors qu'il restait redevable d'une commission à son égard ;

Considérant que la société Pereire Capital sollicite également le paiement d'une somme de 100.000 € au titre du préjudice résultant de l'atteinte portée à sa réputation ;

Mais considérant que cette demande, qui n'est étayée par aucune pièce, ne saurait être accueillie ;

Considérant en revanche que l'équité commande en vertu de l'article 700 du code de procédure civile d'allouer à cette dernière une indemnité de 12.000 € pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement dont appel, sauf en ce qu'il a rejeté la demande en dommages et intérêts et de pénalités de retard formée par la société Pereire Capital et condamné M. Chaboisseau aux dépens,

Statuant à nouveau,

Condamne M.Chaboisseau à verser à la société Pereire Capital la somme de 1.153.051,78 €, en deniers ou quittances, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2007,

Condamne M. Chaboisseau à verser à la société Pereire Capital la somme de 12.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute les parties du surplus de toutes leurs demandes ,

Condamne M.Chaboisseau aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.