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Décisions

Cass. com., 23 octobre 2007, n° 05-19.092

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

M. Pietton

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

Me Luc-Thaler, SCP Gatineau

Poitiers, du 24 mai 2005

24 mai 2005

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société en participation Les Hauts de Cocraud (la SEP) a été constituée entre trente propriétaires de lots composant un ensemble hôtelier ; que la gérance a été confiée à la SARL Maeva Les Hauts de Cocraud (la SARL Maeva) ; qu'une consultation écrite des associés, intervenue le 15 décembre 1999, a proposé la modification de trois dispositions statutaires en prévoyant la prorogation de la durée de la société au-delà de dix ans par tacite reconduction d'un an renouvelable, la nomination du gérant pour un mandat d'une année, avec renouvellement proposé à l'assemblée générale ordinaire appelée à statuer sur les comptes de l'exercice précédent et décidé après le vote du quitus, et les modalités de représentation d'un associé lors de la prise des décisions collectives ; que le résultat de cette consultation a fait l'objet d'un procès-verbal du 17 janvier 2000 par lequel le gérant, après avoir rappelé que la majorité requise pour modifier les statuts était celle de trois-quarts des voix des associés, a constaté qu'une telle majorité n'étant pas réunie, les résolutions n'étaient pas approuvées; que plusieurs associés de la SEP, considérant que l'article 11 des statuts, aux termes duquel, dans son alinéa 3, les décisions extraordinaires sont prises "à la majorité des trois quarts des associés" et dans son alinéa 4, "les décisions dites ordinaires ne sont valablement prises qu'autant qu'elles ont été adoptées par les associés représentant plus de la moitié des droits" devait être interprété comme fixant les règles de majorité, en cas d'assemblée extraordinaire, non en nombre de droits mais par tête, ont saisi le tribunal de commerce aux fins de voir juger que la résolution avait été adoptée ; que d'autres associés de la SEP, la SARL MPF, l'EURL Maringe investissement et la SCI Les Hauts de Cocraud sont intervenus dans l'instance pour s'opposer à cette demande ; qu'une autre consultation écrite des associés a eu lieu le 30 septembre 2002 et a fait l'objet d'un procès-verbal de la gérance du 15 novembre 2002 ; que la SARL MPF, l'EURL Maringe investissement et la SCI Les Hauts de Cocraud (les associés) ont saisi le tribunal de commerce pour voir prononcer la nullité de cette consultation au motif, d'une part, que la SARL Maeva était dépourvue de qualité à agir en tant que gérant de la SEP et, d'autre part, que les dispositions statutaires délimitant les compétences entre assemblée générale ordinaire et assemblée générale extraordinaire n'avaient pas été respectées; qu'après jonction de ces instances, le tribunal de commerce a jugé que le vote du 15 décembre 1999, objet du procès-verbal du 17 janvier 2000 était contraire aux dispositions statutaires et l'a annulé et que les conclusions du vote du 30 septembre 2002, objet du procès-verbal du 15 novembre 2002, étaient conformes aux statuts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les associés font grief à l'arrêt d'avoir dit que les conclusions du vote des associés de la SEP du 15 décembre 1999, objet du procès-verbal du 17 janvier 2000 étaient contraires aux dispositions statutaires alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des termes clairs et précis de l'article 11, alinéa 5, des statuts de la société en participation SEP Les Hauts de Cocraud, qui ne distinguent pas entre assemblées générales extraordinaires et assemblées générale ordinaires, que "chaque associé dispose d'un nombre de voix égal à celui des droits qu'il possède" ; qu'il résulte des termes tout aussi précis de l'article 6 desdits statuts que les droits des associés sont déterminés proportionnellement à la quote-part de chacun dans les biens mis à la disposition de la société ; que les votes aux assemblées générales extraordinaires comme aux assemblées générale ordinaires, sont donc décomptés par voix égale aux droits possédés ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a dénaturé les articles 6 et 11 des statuts de la SEP Les hauts de Cocraud et violé par voie de conséquence les articles 1134 et 1843-2, alinéa 1er, du code civil ;

2°/ qu'une pratique, qui est une manière habituelle d'agir, ne peut résulter d'un fait isolé ; qu'en déduisant de ce que, lors de la seule assemblée générale extraordinaire de la société en participation SEP Les Hauts de Cocraud du 7 mai 1997, appelée à statuer sur des modifications statutaires, les votes avaient été décomptés en nombre d'associés et non pas en droits l'existence d'une pratique selon laquelle les décisions prises en assemblée générale extraordinaire doivent être décomptées en nombre d'associés de la SEP, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1315 du code civil ainsi que les articles 6 et 11 des statuts de la SEP Les Hauts de Cocraud ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de toute dénaturation, que la cour d'appel a retenu que les décisions relevant de l'assemblée générale extraordinaire, adoptées à la majorité des associés, devaient être décomptées par tête, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil, ensemble l'article 8 des statuts ;

Attendu que pour juger que la SARL Maeva avait qualité pour procéder à la consultation écrite du 15 septembre 2002, l'arrêt retient, d'une part, que le renouvellement du gérant, nommé pour une durée d'une année, est proposé lors de chaque assemblée générale appelée à statuer sur les comptes annuels et décidé après le vote du quitus, ce qui induit son maintien jusqu'à ladite assemblée, d'autre part, que lors de l'assemblée générale du 28 mars 2002, les associés ont donné quitus au gérant pour 2001 et approuvé le budget prévisionnel pour 2002 et que, du fait des événements sociaux, notamment la demande de consultation écrite confiée au gérant, le mandat de celui-ci s'est tacitement poursuivi, au moins jusqu'au vote du quitus sur les comptes 2002 ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que lors de l'assemblée générale du 28 mars 2002, appelée à statuer sur les comptes de l'exercice 2001, les associés avaient décidé à l'unanimité, compte tenu des circonstances, de ne proroger le mandat du gérant que jusqu'au 30 septembre 2002, à charge pour lui de convoquer une assemblée générale extraordinaire pour le 26 septembre 2002 et qu'en l'absence d'allégation d'une réunion d'une assemblée générale appelée à statuer sur le maintien du gérant au-delà du 30 septembre 2002, les fonctions de gérant de la SARL Maeva avaient pris fin lors de la consultation écrite, objet du procès-verbal du 15 novembre 2002, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen :

Vu les articles 1134 et 1844-7 1° du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant à faire juger que la SEP était dissoute par l'arrivée de son terme, l'arrêt retient que l'annulation du vote du 15 décembre 1999 prévoyant la poursuite de la société par reconduction tacite d'un an renouvelable, n'entraîne pas la dissolution de la SEP par arrivée de son terme au motif que celle-ci a été constituée en 1993 pour une durée de dix ans, soit jusqu'en 2003 et que la possibilité de prorogation a été prévue au-delà ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de toute prorogation expresse ou tacite de sa durée, la SEP a été dissoute par arrivée de son terme, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement ayant dit que les conclusions du vote du 15 décembre 1999 faisant l'objet du procès-verbal de la gérance du 17 janvier 2000 étaient contraires aux dispositions statutaires et étaient annulées, l'arrêt rendu le 24 mai 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée.