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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 26 janvier 2017, n° 14/09200

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Sources Holding (SARL)

Défendeur :

Richemond Conseil et Finance (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Boisselet

Conseillers :

Mme Bazet, Mme Derniaux

TGI Nanterre, 6e ch., du 7 nov. 2014, n°…

7 novembre 2014

FAITS ET PROCÉDURE

La société Richemond Conseil et Finance (ci-après la société RCF) gérée par M. Nuss, exerce les activités de conseiller en investissements financiers, démarcheur bancaire et financier, courtier en assurance et négociateur dans le domaine du rapprochement d'entreprises.

M. B. est fondateur de la société Sources, qui a pour activité principale le traitement des eaux usées et potables. En 2010, il était actionnaire majoritaire à plus de 99 % de cette société, le reste des actions appartenant à son épouse. Il avait pour projet de vendre 100 % de ses titres.

A cette fin, il a consenti à la société RCF un mandat de cession pour une durée de six mois à compter du 18 novembre 2010. Le mandat prévoyait la vente des actions de la société Sources en deux tranches de 30 % et 70 %, et une rémunération du mandataire en deux fois, à l'issue de chacune des étapes.

C'est dans ce cadre que la société RCF a mis en relation M. B. avec la société BNP Paribas Private Equity (BNP PE) à la fin de l'année 2010.

Celle-ci a proposé d'acquérir 30 % des titres.

M. B. et son épouse ont alors fait apport de l'intégralité de leurs titres de la société Sources à une holding familiale, la société Sources Holding.

Celle-ci a finalement cédé 30 % de ses actions à deux fonds d'investissement affiliés à la société BNP PE, par actes du 29 juin 2011.

Par courrier du 4 juin 2011 la société Sources Holding a demandé à RCF de lui adresser sa facture 'selon notre accord du 15 février dernier'.

Le 11 juillet 2011, la société RCF a émis une facture de ses honoraires d'un montant de 104.817 euros calculés sur la base d'un prix global de cession d'un montant de 3.066.000 euros.

Par mise en demeure du 24 juillet 2011 réitérée à trois reprises, dont la dernière fois le 8 septembre 2011, la société RCF a sollicité le paiement de sa facture auprès de M. B..

Par courrier de son avocat en date du 14 octobre 2011, la société Sources Holding a proposé de régler à la société RCF une somme de 34.000 euros HT pour solde de tout compte.

La société RCF a refusé et a fait assigner M. B. et la société Sources Holding en référé.

Par ordonnance du 24 mai 2012, le juge des référés a ordonné la condamnation in solidum de M. B. et la société Sources Holding à payer à la société RCF à titre de provision, la somme de 104.817,44 euros et celle de 2.000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 24 mars 2013, la cour d'appel de Versailles a partiellement confirmé l'ordonnance sauf en ce qu'elle a condamné la société Sources Holding et M. B. in solidum à payer la somme de 104.817,44 euros. La société Sources Holding a été condamnée, seule, à s'acquitter d'une somme de 35.880 euros à titre de provision avec intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2012, aux dépens et à une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La cour a dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus.

La société RCF a alors saisi le tribunal de grande instance de Nanterre statuant au fond pour obtenir le paiement de sa facture.

Par jugement du 7 novembre 2014, le tribunal a :

•         débouté la société RCF de toutes ses demandes à l'encontre de M. B.,

•         condamné la société Sources Holding à payer à la société RCF la somme de 49.564 euros HT à titre d'honoraires,

•         dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2011,

•         ordonné la capitalisation des intérêts,

•         dit que les intérêts échus pour une année entière depuis la demande en justice (5 juin 2013) produiront eux-mêmes intérêts à compter du 5 juin 2014,

•         condamné la société Sources Holding à payer à la société RCF la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

•         rejeté toutes demandes plus amples ou contraires,

•         ordonné l'exécution provisoire,

•         condamné la société Sources Holding aux entiers dépens.

La société Sources Holding a interjeté appel de cette décision.

Le 20 mai 2015, la société RCF a fait assigner en appel provoqué M. B..

Aux termes de conclusions du 22 novembre 2016, la société Sources Holding et M. B. demandent à la cour de :

•         confirmer la mise hors de cause de M. B. et débouter la société RCF de toutes ses demandes dirigées à son encontre,

•         déclarer la société RCF irrecevable en ses demandes nouvelles tendant à voir condamnés M. B. et la société Sources Holding:

•         à lui verser la somme de 164.980 euros H.T. à titre principal, 158.560 euros à titre subsidiaire, et 105.168 euros à titre infiniment subsidiaire,

•         à lui verser la somme de 100.000 euros pour l'avoir prétendument empêché d'exécuter sa mission,

•         à titre subsidiaire, débouter la société RCF de l'ensemble de ses demandes,

•         infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Sources Holding à payer à la société RCF la somme de 49.564 euros,

•         fixer les honoraires de la société RCF à la somme de 30.000 euros HT,

•         infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a assorti la condamnation en paiement de la société Sources Holding du taux d'intérêt légal à compter du 8 septembre 2011 et de la capitalisation des intérêts, en l'absence de mise en demeure adressée à la société Sources,

•         confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société RCF de sa demande d'octroi de la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts au titre d'une prétendue résistance abusive à paiement,

•         infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Sources Holding à payer à la société RCF la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

•         condamner la société RCF à leur payer la somme de 6.500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

•         condamner la société RCF aux entiers dépens de la présente instance avec recouvrement direct.

Par conclusions du 23 novembre 2016, la société Richemond Conseil et Finance demande à la cour de :

•         dire la société Sources Holding et M. B. irrecevables et mal fondés,

•         les débouter de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions qui sont autres et/ou contraires à celles de la société RCF,

•         infirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions lui faisant grief, le confirmer pour le surplus,

•         puis, statuant à nouveau et y ajoutant :

•         condamner in solidum M. B. et la société Sources Holding, à titre principal sur le fondement des articles 1134 et suivants du code civil et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 1184 du code civil, au paiement :

•         à titre principal d'une somme de 197.976 euros TTC

•         à titre subsidiaire d'une somme de 190.272 euros TTC

•         et encore plus subsidiairement d'une somme 105.168 euros TTC, au titre des honoraires de transaction avec intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2011 et capitalisation des intérêts à compter du 5 juin 2013 en application de l'article 1154 du code civil,

•         condamner in solidum M. B. et la société Sources Holding à lui payer une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

•         condamner in solidum M. B. et la société Sources Holding aux entiers dépens avec recouvrement direct.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 novembre 2016.

SUR CE,

Le tribunal a jugé qu'il n'était fait état par la société RCF d'aucune stipulation contractuelle désignant M. B. comme personnellement débiteur des honoraires, et qu'en l'absence d'une telle clause, elle n'établissait pas l'existence d'une obligation à la charge de M. B. qui devait donc être mis hors de cause.

Il a rappelé que l'objet du mandat initial portait sur la vente de la totalité des titres de la société Sources, la première tranche de la cession devant porter sur une quotité de 30 %, la seconde sur le solde après 2013 sur des bases irrévocables, arrêtées lors de la cession des 30 %, que M. B. ayant finalement choisi de poursuivre la négociation avec la société BNP PE, les parties s'étaient entendues sur un nouvel objet du mandat sans pour autant fixer précisément d'un commun accord la rémunération du mandataire et qu'il convenait donc d'examiner si la facture émise par la société RCF comportait un prix manifestement abusif eu égard aux prestations exécutées et aux usages de la profession.

Après avoir constaté qu'une rémunération de 4 % pour des affaires d'un enjeu compris entre 1.500.000 euros et 3.000.000 euros était conforme aux usages de la profession et que M. B. avait en outre accepté initialement le principe d'un honoraire forfaitaire de 45.000 euros HT en rémunération des démarches relatives à la cession de 30 % des actions, le tribunal a jugé que dès le mandat initial, les parties étaient convenues d'exclure de l'assiette de calcul de l'intéressement la trésorerie excédentaire. Il a fait droit à l'argumentaire subsidiaire de la société Sources Holding qui soutenait que la trésorerie excédentaire de la société Sources était de 3.100.000 euros en mai 2011 et en a déduit qu'une quotité de 30 % de cette trésorerie (930.000 euros) devait être déduite du prix de cession avant calcul de l'intéressement, aboutissant ainsi à des honoraires de 49.564 euros 'HT', soit une rémunération fixe de 45.000 euros HT et une rémunération variable'de 4 % x (3 044 100 ' 2 000 000 ' 930 000) = 4 564 euros HT.

Les appelants font valoir que M. B. n'a contracté aucune obligation à l'égard de la société RCF, laquelle échoue à démontrer qu'il serait personnellement débiteur d'honoraires, que le mandat du 18 novembre 2010 a été partiellement révoqué pour modification de son objet, ce qui a été accepté par la société RCF, que par suite les parties ont résilié les modalités de fixation des honoraires de la société RCF, telles que fixées par le contrat en date du 18 novembre 2010, que la société RCF ne rapporte pas la preuve de ce que le nouvel accord intervenu entre les parties sur sa rémunération reprendrait à l'identique les conditions initialement prévues au contrat du 18 novembre 2010, révoqué. Ils soutiennent que les parties se sont accordées pour fixer la rémunération de la société RCF à la somme de 30.000 euros HT, lequel accord est matérialisé par le courrier en date du 15 février 2011.

Ils rappellent que la société Sources Holding ne s'est jamais opposée au paiement des services de la société RCF mais en a juste contesté le montant, de sorte qu'il n'y a pu avoir résistance abusive à paiement.

Ils observent enfin que le premier juge a refusé de prendre en considération l'accord du 15 février 2011 pour la fixation des honoraires de RCF alors que dans le même temps c'est en se fondant sur ce courrier qu'il a appliqué le barème Euralia et qu'il y a là une manifeste contradiction.

La société RCF ne nie pas l'existence de discussions entre les parties sur un avenant au mandat du 18 novembre 2010, mais conteste formellement qu'un accord soit intervenu sur ce point. Compte tenu de la décision de la cour d'appel statuant sur l'ordonnance de référé, et de celle du tribunal de grande instance qui ont considéré que le mandat tel que signé le 18 novembre 2010 n'était plus en vigueur, elle en prend acte mais soutient qu'il convient de juger que la résiliation est imputable au mandant, qu'elle lui est préjudiciable et qu'elle n'a pas à être lésée par les choix de M. B.. Elle calcule donc sa rémunération sur la base de la partie fixe acceptée dès l'origine (45.000 euros HT) et d'une partie variable calculée sur la partie du prix de cession supérieure au minimum de 2 millions d'euros à partir du barème Euralia, utilisé par le tribunal mais mal appliqué par celui-ci, puisqu'il n'a pas tenu compte du fait qu'il prévoyait des cumuls de tranches.

***

Il était indiqué en page 4 du mandat à l'article 6 'rémunération et commission de succès' : Ces honoraires seront réglés par la ou les parties définies dans le protocole d'accord. RC&F s'interdisant toute négociation complémentaire de commission avec le repreneur ou un tiers, sous peine de nullité du présent protocole. Ces honoraires figureront au protocole d'accord dans les conditions suspensives et seront réglés par le mandant ou toute société interposée.

S'il est constant que M. B., en tant que détenteur de 99 % des titres de la société Sources, est bien personnellement signataire du mandat avec RCF, il est non moins constant que la totalité des titres de la société Sources ayant été cédée par M. B. et son épouse à la société Sources Holding, cette société s'est interposée et est devenue la débitrice des éventuelles honoraires de négociation. L'argumentaire de RCF selon lequel le terme 'ou' dans la phrase 'ces honoraires ...seront réglés par le mandant ou toute société interposée' ne constituerait qu'une alternative qui ne dégagerait pas M. B. de son obligation est dépourvu de portée dans la mesure où c'est d'abord la partie 'définie dans le protocole d'accord' qui est désignée comme le payeur des honoraires, cette partie ne pouvant être que le cessionnaire des titres puisque précisément la suite de l'article 6 exclut que le repreneur puisse être le payeur.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a mis hors de cause M. B..

L'appelante soutient que les demandes de RCF sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel au motif qu'elles ne sont plus fondées sur l'application des dispositions du mandat, alors qu'en première instance elle sollicitait le règlement de sa facture d'un montant de 104.817,44 euros.

En application des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Tel est bien le cas en l'espèce, la société RCF sollicitant toujours, au travers des demandes formées en appel, le paiement de sa prestation, même si, prenant acte de la décision du tribunal qui a remis en cause la validité du mandat du 18 novembre 2010, elle a modifié le mode de calcul de ses prétentions, principale et subsidiaire.

En conséquence, les demandes en paiement formées au titre de sa rémunération par la société RCF, aussi surprenantes soient-elles dès lors qu'elles l'amènent en appel à solliciter une somme supérieure à celle qu'elle a facturée, sont recevables.

Il convient d'observer que le mandat a été conclu le jour où la société RCF a présenté à M. B. les représentants de BNP PE.

Dans ces conditions, RCF, professionnelle de la cession d'entreprise, ne saurait sérieusement soutenir que c'est par la faute de M. B. que la cession n'a porté que sur 30 % des titres. En effet, RCF qui a fait le choix de présenter BNP PE à M. B. ne pouvait ignorer qu'elle présentait à son mandant une société qui n'avait aucune intention d'acquérir la totalité des titres. Les fonds d'investissement gérés par BNP PE, de par leur statut même, ne peuvent pas prendre de participations de cette importance.

Dès lors qu'elle a accepté de présenter l'offre de BNP PE à son mandant, elle savait que la cession ne serait que partielle, l'acquéreur exigeant, comme c'est souvent le cas, que le dirigeant ne vende pas ses titres pendant la durée de son placement, la cession ayant lieu avec intention à échéance de 5 ans pour BNP PE et M. B. de céder tous leurs titres.

D'ailleurs, RCF n'a à aucun moment élevé de protestation sur le projet de vente des titres à BNP PE, et pour cause, puisqu'ainsi qu'il vient d'être dit, c'est elle qui est à l'origine de cette cession partielle.

Ses allégations actuelles sur une autre offre d'achat de 100 % des titres qu'aurait formée une société MBO, offre que M. B. aurait écartée, ne sont pas corroborées par la moindre pièce. En effet, si cette société MBO a signé le 21 janvier 2011 l'engagement de confidentialité, préalable nécessaire à l'étude du dossier par l'investisseur, aucun élément ne permet de considérer que cette société aurait envisagé d'acquérir 100 % des titres de la société Sources.

Ainsi, aucun élément ne permet de considérer, comme le soutient RCF, que le mandat a été résilié par la faute de M. B..

La société Sources Holding soutient qu'elle a procédé à une révocation partielle du mandat compte tenu de la modification substantielle de son objet et que cette révocation a été acceptée par RCF.

Cette dernière ne conteste pas 'l'existence de discussions entre les parties sur un avenant au mandat du 18 novembre 2010'.

Il faut à cet égard rappeler que M. B. a adressé le 8 février 2011 à RCF un mail faisant référence à un 'mode de collaboration qui ne tue pas vos intérêts', prévoyant une mission durant jusqu'à la sortie de BNP PE , indiquant qu'à défaut d'accord, en cas de cession effective à BNP PE, il réglerait 15.000 euros HT, et sollicitant une réponse si possible avant 16 h. Manifestement un nouveau mandat ou un avenant au mandat d'origine avait été établi par M. B. puisqu'il précise en fin de mail : 'si vous êtes OK, imprimez la version définitive, signez la et mettez moi deux exemplaires dans ma boîte, [...]. Je vous en remettrai un signé et ce souci sera soldé'.

La seule réponse à cette proposition est un mail du même jour de M. Nuss de RCF ainsi rédigé : 'Ok, j'y réfléchirai. Mais là je suis sur une préparation d'un RDV très important et ne pourrai vous répondre avant 16h. J'ajourne donc ma réponse de 24h. Merci de votre compréhension'.

Bien que RCF soit intervenue jusqu'à la signature effective de la cession des titres à BNP PE, et qu'elle ait tout à fait admis la nécessité de revoir les termes du mandat s'agissant de sa rémunération, elle n'a jamais apporté de réponse à la proposition de modification du mandat que lui avait soumis M. B..

Et si l'on ne peut que s'étonner de ce silence sur une question aussi importante, la société Sources Holding ne démontre cependant pas que RCF aurait accepté fût-ce tacitement les termes d'un nouveau mandat tels qu'elle les a précisés dans un courrier daté du 15 février 2011 en l'absence de preuve formelle de réception de ce courrier par RCF, même s'il est exact qu'elle a bien reçu le courrier ultérieur daté du 4 juin 2011, qui fait expressément référence à l'accord du 15 février 2011.

Dans ces conditions, le tribunal ne pouvait à la fois dire que RCF n'avait pas donné son accord aux nouvelles conditions de rémunérations qui figuraient dans le courrier du 15 février 2011 faute de preuve qu'elle les ait reçues et faire application pour évaluer cette rémunération du barème que citait M. B., non pas d'ailleurs pour la rémunération de son travail dans le cadre de la cession à BNP PE, mais dans l'hypothèse où RCF suivrait le dossier pour 'assurer la sortie de BNP dans 5 ans', ce qui, donc, n'a pas été accepté par RCF dont l'intervention s'est limitée à la cession de 30 % des titres à BNP PE.

Dans ce contexte, RCF n'ayant pas accepté de poursuivre sa relation avec Sources Holding comme le proposait ce courrier du 8 février 2011, il convient de se reporter, pour apprécier la rémunération qui lui est due, aux termes du mandat du 18 novembre 2010, considérant qu'il n'a reçu qu'une exécution partielle, puisque seule la première phase en a été réalisée, à savoir la vente immédiate de 30% des titres de la société Sources. L'article 6 relatif à la rémunération prévoyait s'agissant des honoraires les modalités suivantes :

- 45.0000 euros HT au paiement de la tranche ferme de cession (portant sur 30 % des titres) majoré d'un intéressement de 4 % du prix de vente obtenu supérieur au minimum fixé à l'article 3 (soit 2.000.000 euros hors trésorerie excédentaire),

- 95.000 euros HT au paiement de la seconde tranche (portant sur les 70 % de titres restant), majoré d'un intéressement de 4 % sur le montant de la vente supérieure au minima fixé à l'article 3.

La cession de 30 % s'est réalisée le 29 juin 2011 au prix de 3.044.100 euros ainsi qu'en atteste la pièce 23 produite par les appelants (et non au prix de 3.066.000 euros comme le soutient RCF, sans pièce probante), soit 1.044.100 euros de plus que le minima qui était de 2.000.000 euros.

La rémunération de la première phase du mandat nécessite d'évaluer le montant de la trésorerie excédentaire qui doit être déduite de cette somme de 1.044.100 euros.

Les parties s'opposent sur l'existence même d'un excédent de trésorerie.

La société Sources Holding soutient que l'excédent de trésorerie est de 3.100.000 euros (soit pour 30 % des titres, 930.000 euros) ainsi qu'il résulte de l'attestation établie le 24 décembre 2012 par son expert comptable, la société Sofitec, selon laquelle : 'la SA Sources détient une trésorerie excédentaire, réelle et non forcée, durant la période d'audit de BNP Paribas Equity à la date du 10 mai 2011 de 3.100.000 euros'.

RCF quant à elle indique qu'il n'y a pas d'excédent de trésorerie, sauf à considérer que la société fonctionne sans besoin de fonds de roulement et verse aux débats une analyse réalisée le 26 février 2014 par son propre expert comptable, la société Astria, selon laquelle : 'il n'apparaît pas que la société Sources présentait une trésorerie qualifiable d'excédentaire au regard de la moyenne des ratios de trésorerie d'entreprises de même taille et du même secteur, de son passif exigible à court terme tel que figurant au bilan 2010, des besoins en fonds de roulement attachés à ce type d'activité et du plan de développement présenté au repreneur.

Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'attestation du propre expert comptable de la société Sources n'a pas une valeur probante supérieure à celle établie par l'expert de RCF, chacune des parties s'étant tournée vers son propre expert-comptable, étant observé que l'attestation de Sofitec est pour le moins lapidaire, alors que la question de l'excédent de trésorerie est âprement discutée, et qu'il aurait été nécessaire qu'elle soit plus explicite et motivée, ou complétée par un témoignage des acquéreurs des 30 % de la société Sources qui eux aussi auraient pu attester de l'existence et de la valeur de cette trésorerie, cette donnée ayant forcément été évoquée dans le cadre de la détermination du prix de cession.

L'analyse de la société Astria est en revanche plus argumentée.

Si l'excédent comptable, égal à la différence entre (i) les valeurs mobilières de placement et la trésorerie et (ii) les dettes financières, est bien de l'ordre de 3.000.000 euros dans le bilan arrêté au 31 décembre 2010, RCF fait valoir que l'excédent de trésorerie doit être évalué au regard des besoins de l'exploitation.

Après analyse des pièces produites, il convient de considérer que les dividendes distribués préalablement à la vente (910.000 euros, distribution votée par l'assemblée du 6 juin 2011, soit avant la cession et après le 10 mai 2011 date à laquelle Sofitec chiffre la trésorerie excédentaire à 3.100.000 euros) constituent bien cet excédent de trésorerie non nécessaire à l'exploitation.

Dans ce cadre, la trésorerie résiduelle après paiement de dividendes, soit 3.000.000 - 910.000 = 2.090.000 euros constitue la trésorerie nécessaire à l'exploitation et non une trésorerie excédentaire.

La trésorerie de la société post distribution de dividendes constitue donc une trésorerie d'exploitation non déductible du prix de cession.

En conséquence, RCF percevra une rémunération complémentaire de :

4 % de 1.044.100 euros = 41.764 euros.

Ajoutée à la rémunération fixe de 45.000 euros, c'est donc une somme de 86.764 euros HT, qui devra être augmentée de la TVA applicable au jour de l'arrêt, qui sera mise à la charge de la société Sources Holding.

Cette somme ne produira pas intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2011 date de la mise en demeure que RCF a adressée, non pas à la société Sources Holding qui est sa seule débitrice, mais à M. B., qui a été mis hors de cause.

En application des dispositions de l'article 1153 du code civil, les intérêts courront donc à compter du 22 mars 2012 date de l'assignation en référé délivrée à la société Sources Holding.

Les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2, la société RCF ne contestant pas le point de départ correspondant à la demande en justice fixée par le tribunal à la date de placement de l'assignation et non pas à la date de sa délivrance par l'huissier.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté RCF de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, disposition qu'elle n'a pas entendu remettre en cause dans le cadre de son appel incident.

La société Sources Holding, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

La société Sources Holding versera une somme de 2.000 euros à la société RCF une indemnisation au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare recevables les demandes en paiement formées par la société Richemond Conseil et Finance,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Sources Holding à payer à la société Richemond Conseil et Finance la somme de 49.564 euros HT à titre d'honoraires, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2011 avec capitalisation,

Le confirme en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

Condamne la société Sources Holding à payer à la société Richemond Conseil et Finance la somme de 86.764 euros augmentée de la TVA en vigueur au jour de l'arrêt,

Dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2012,

Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

Condamne la société Sources Holding aux dépens de première instance et d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Sources Holding à payer à la société Richemond Conseil et Finance la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.