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Décisions

Cass. com., 8 février 2023, n° 21-14.189

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Bélaval

Avocat général :

Mme Henry

Avocat :

SCP Thouin-Palat et Boucard

Cass. com. n° 21-14.189

7 février 2023

Reprise d'instance
 
1. Il est donné acte à la société SAS Les Parcs du Sud (la société LPS), la société De Saint-Rapt et Bertholet, en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société LPS et la société Spagnolo Stephan, en qualité de mandataire judiciaire de la même société, de leur reprise d'instance.
 
Faits et procédure
 
2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 novembre 2020), le 17 mai 2017, la société LPS, dont le capital était détenu à 43,09 % par M. [E], a été mise en redressement judiciaire, la société De Saint-Rapt et Bertholet étant désignée administrateur avec la mission d'assurer seule et entièrement l'administration de l'entreprise.
 
3. Le 20 décembre 2017, le tribunal de commerce a arrêté le plan de redressement de la société LPS, prévoyant l'apurement du passif selon deux options, dit que M. [J], autre actionnaire de la société LPS, était tenu d'exécuter le plan conformément à ses engagements écrits joints au plan de redressement et maintenu l'administrateur en fonction aux fins de régulariser la procédure visée aux articles L. 631-9-1 et R. 631-34-6 du code de commerce.
 
4. Par une ordonnance de référé du 23 janvier 2018, le président du tribunal a désigné l'étude Balincourt, en la personne de M. [F], avec la mission de convoquer l'assemblée compétente de la société LPS pour statuer au plus tard le 31 mai 2018 sur la décision à prendre conformément aux dispositions de l'article L. 225-248 du code de commerce à la suite de la constatation des capitaux propres devenus inférieurs à la moitié du capital social, la réduction du capital social à zéro, et une augmentation du capital en numéraire en deux temps réservée à M. [J] et à un autre actionnaire, la société M. Capital Partners.
 
Examen du moyen
 
Sur le moyen, pris en sa première branche
 
Enoncé du moyen
 
 5. M. [E] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa tierce-opposition tendant à la rétractation du jugement du 20 décembre 2017 ayant arrêté le plan de redressement de la société LPS, alors « que la décision arrêtant le plan de redressement est susceptible de tierce-opposition ; que l'actionnaire d'une société est recevable à former tierce-opposition contre un jugement ayant adopté le plan de redressement judiciaire de cette société s'il invoque une fraude à ses droits ou un moyen qui lui est propre ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la tierce-opposition formée par M. [D] [E], la cour d'appel a retenu que celui-ci était représenté par le représentant légal de la société car il n'avait pas d'intérêt distinct de celui de la société dans le cadre du plan de redressement arrêté par le jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 20 décembre 2017, quand M. [E] soutenait que le plan de redressement arrêté par ledit jugement portait atteinte à sa qualité d'associé et à son droit de vote qui y était attaché, de sorte qu'il invoquait un moyen qui lui était propre, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 661-3 du code du commerce. »
 
Réponse de la Cour
 
Vu l'article 583 du code de procédure civile :
 
6. Il résulte de ce texte que si l'associé est, en principe, représenté, dans les litiges opposant la société à des tiers, par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce-opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s'il invoque une fraude à ses droits ou un moyen qui lui est propre.

7. Pour déclarer irrecevable la tierce-opposition formée par M. [E], l'arrêt retient, d'abord, qu'il était représenté par le représentant légal de la société qui n'avait pas d'intérêt distinct de celui de la société, lors de l'examen du plan de redressement qui a été arrêté par le tribunal. Il retient ensuite que le jugement du 20 décembre 2017 a arrêté le plan de redressement de la société LPS suivant les modalités figurant dans le projet de plan et en a récapitulé les modalités essentielles, sans mentionner la recapitalisation et la nécessité de nommer un mandataire ad hoc, que la reconstitution des capitaux propres ne peut être imposée par le tribunal et qu'elle est décidée par l'assemblée générale extraordinaire de la société anonyme, que c'est par une décision différente, à savoir l'ordonnance du 26 septembre 2018, que le juge des référés a désigné un mandataire ad hoc avec la mission de convoquer cette assemblée générale. Il en déduit que M. [E], qui développe uniquement des moyens portant sur les modifications du capital social et la désignation d'un mandataire ad hoc, ne justifie d'aucune fraude ou d'un moyen qui lui serait propre concernant l'arrêté d'un plan qui ne porte sur aucun de ces sujets.

8. En statuant ainsi, alors que M. [E] soutenait que le plan de redressement prévoyait la désignation d'un mandataire ad hoc ayant pour mission d'exercer ses droits de vote aux fins d'approuver une réduction à zéro du capital social suivie d'une augmentation de ce capital réservée à d'autres associés que lui, dont l'un, M. [J], tenu d'exécuter le plan conformément à ses engagements écrits joints au plan, devenait ainsi un associé presque unique, de sorte que M. [E] invoquait un moyen qui lui était propre, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
 
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
 
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.