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Décisions

AMF, 21 septembre 2009, n° SAN-2009-32

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Membres :

Mm. Jalenques De Labeau, M. Hanus

Président :

Mme Cohen-Branche

AMF n° SAN-2009-32

20 septembre 2009

Vu le Code monétaire et financier, notamment ses articles L. 621-14 et L. 621-15 ainsi que ses articles R. 621-38 à R. 621-40 ;
Vu les articles 611-1, 621-1, 622-1, 622-2 du Règlement général de l’AMF ;
Vu les notifications de griefs adressées à MM. A, B, C, D et E le 8 août 2006 ;
Vu la décision du Président de la Commission des sanctions du 5 octobre 2006 désignant M. Pierre LASSERRE, membre de la Commission des sanctions, en qualité de Rapporteur ;
Vu la décision du Président de la Commission des sanctions du 24 janvier 2007 désignant M. Joseph THOUVENEL, membre de la Commission des sanctions, en qualité de Rapporteur ;
Vu les observations écrites présentées le 28 août 2006 par M. A, le 11 octobre 2006, par Maître Olivier BARATELLI, pour le compte de M. B, 17 octobre 2006 par M. le Bâtonnier Francis TEITGEN, pour le compte de M. C, le 18 octobre 2006, par Maître Jean-
Philippe SAULNIER ARRIGHI, pour le compte de M. D, le 17 octobre 2006 et le 12 septembre 2007 par Maître Hervé TEMIME, pour le compte de M. E ;
Vu les procès-verbaux des auditions effectuées par le Rapporteur ;
Vu le rapport de M. Joseph THOUVENEL en date du 15 octobre 2007 ;
Vu les lettres de convocation à la séance de la Commission des sanctions du 25 octobre 2007,
auxquelles était annexé le rapport signé du Rapporteur, adressées à MM. A, B, C, D, E ;
Vu les observations écrites présentées le 6 novembre 2007 par Maître Hervé TEMIME, pour le compte de M. E ; le 8 novembre 2007 par Maître Olivier BARATELLI et Maître Céline ASTOLFE, pour le compte de M. B, le 12 novembre 2007 par Maître Jean-Philippe SAULNIER ARRIGHI, pour le compte de M. D, le 7 novembre 2007 par M. A et le 30 novembre par Maître Francis TEITGEN, pour le compte de M. C ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu au cours de la séance du 21 septembre 2009 :
- M. le Rapporteur en son rapport ;
- Mme Catherine LE RUDULIER, Commissaire du Gouvernement, qui a indiqué de pas avoir
d’observations à formuler ;
- M. Jean-Philippe PONS-HENRY, représentant le Collège de l’AMF ;
- M. E,
- Maître Hervé TEMIME, conseil de M. E, assisté de Maître François de CASTRO ;
- M. D,
- Maître Arié ALIMI, conseil de M. D, assisté de Maître Franck FISCHER-BERTEAUX ;
- M. C,
- M. le Bâtonnier Francis TEITGEN, conseil de M. C ;
- M. B,
- Maître Olivier BARATELLI, conseil de M. B ;
- M. A,
- Maître Olivier SCHNERB, conseil de M. A, assisté de Maître Adrien PERROT ;
les personnes mises en cause ayant eu la parole en dernier.
1 FAITS ET PROCEDURE
1.1. LES FAITS
La société GECINA est une société foncière française soumise au régime des sociétés d’investissements immobiliers cotées (SIIC). Les actions de cette société, admises aux négociations sur le compartiment A de l’Eurolist d’EURONEXT PARIS, ont fait l’objet d’une offre publique d’achat alternative déposée le 15 mars 2005 par les sociétés MORGAN STANLEY & CO INTERNATIONAL Ltd et CALYON, agissant pour le compte de la société de droit espagnol METROVACESA. Par cette offre publique alternative, la société METROVACESA s’est engagée à acquérir les actions de la société GECINA au prix unitaire de 89,75 €, payable le 30 décembre 2005, ou au prix de 87,65 €, payable comptant à la date de livraison des actions apportées. La société METROVACESA détenait alors 18 630 552 actions de la société GECINA, soit 30 % du capital et 31,49 % des droits de vote, acquises la veille du dépôt de l’offre publique, auprès de filiales des AGF et AZUR-GMF au même prix unitaire de 89,75 € payable au 30 décembre 2005. Ce jour-là, à 15h27, EURONEXT Paris suspendait la cotation des actions et des warrants GECINA à la demande de la société. Le 24 mars 2005, à la reprise de la cotation du titre GECINA, l’action cotait
88,05 €, soit une hausse de 11,81 % sur le dernier cours.
Dans les semaines qui ont précédé cette suspension, la Surveillance des marchés de l’AMF a observé une forte concentration des volumes négociés sur le titre GECINA « auprès de membres du marché basés à Londres, ainsi que la présence, avant l’annonce de l’opération, d’intervenants non-résidents liés aux banques conseils de METROVACESA et de GECINA ».
C’est dans ce contexte que, le 13 juillet 2005, le Secrétaire général de l’AMF a décidé d’ouvrir une enquête sur « le marché de l’action GECINA et de tout titre qui lui serait lié, à compter du 1er janvier 2005 ». Un rapport a été établi le 20 juin 2006 par la Direction des Enquêtes et de la Surveillance des Marchés de l’AMF (DESM) et examiné par la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF,
constituée en application de l’article L. 621-2 du Code monétaire et financier, lors de sa séance du 6 juillet 2006.
1.2. LA PROCEDURE
1.2.1. Les notifications de griefs du 8 août 2006
Par lettres recommandées avec demandes d’avis de réception en date du 8 août 2006, accompagnées du rapport d’enquête, le Président de l’AMF, sur décision prise par la Commission spécialisée n° 1 du Collège de l'AMF le 6 juillet 2006, a notifié les griefs qui leur étaient reprochés à MM. A, B, C, D et E, en les informant, d’une part, de la transmission des lettres de notification au Président de la Commission des sanctions pour attribution et désignation d’un Rapporteur et, d’autre part, du délai d’un mois dont ils disposaient pour présenter des observations écrites en réponse aux griefs énoncés dans ces lettres, ainsi que de la possibilité de se faire assister de ou représenter par toute personne de leur choix et de prendre connaissance et copie des pièces du dossier dans les locaux de l’AMF.
Sur le fondement « des articles 611-1, 621-1 et 622-2 du Règlement général de l’AMF et des articles L. 621-14, dans sa version antérieure à la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, et L. 621-15 du Code monétaire et financier », il est fait grief aux personnes mises en cause d’avoir utilisé une information privilégiée relative « au probable rachat de la participation des AGF [dans la société foncière GECINA] par la société METROVACESA à un prix supérieur au cours de bourse ».
1.2.2. La saisine de la Commission des sanctions par le Président de l’AMF et la désignation du Rapporteur Copie des notifications de griefs a été transmise par le Président de l’AMF au Président de la Commission des sanctions, en application de l’article R. 621-38 du Code monétaire et financier, par lettre du 8 août 2006.
En application de l’article R. 621-39 du Code monétaire et financier, le Président de la Commission des sanctions a désigné, par une décision du 5 octobre 2006, M. Pierre LASSERRE en qualité de Rapporteur, puis, par une décision du 24 janvier 2007, il a désigné M. Joseph THOUVENEL en remplacement. Les personnes mises en causes ont été informées par lettres recommandées avec demandes d’avis de réception des 9 octobre 2006 et 30 janvier 2007 de ces désignations en leur rappelant la possibilité d’être chacune entendue à leur demande.
1.2.3. La procédure contradictoire
Des observations écrites ont été présentées par les personnes mises en cause :
- M. A a écrit le 28 août 2006 au Président de la Commission des sanctions de l’AMF ;
- M. B, assisté de Maître Olivier BARATELLI, a déposé des observations datées du 11 octobre 2006 ;
- M. C, assisté de M. le Bâtonnier Francis TEITGEN, a déposé des observations datées du
17 octobre 2006 ;
- M. D, assisté de Maître Jean-Philippe SAULNIER ARRIGHI, a déposé des observations
datées du 18 octobre 2006 ;
- M. E, assisté de Maître Hervé TEMIME, a déposé des observations datées du 17 octobre
2006.
M. B ayant demandé à être entendu par le Rapporteur, M. Joseph THOUVENEL a procédé, le 4 juillet 2007, à son audition, assisté de Maître Olivier BARATELLI. A la suite de cette audition, M. B a transmis à M. Joseph THOUVENEL les 31 juillet 2007 et 14 septembre 2007 copies de deux courriers ainsi qu’une liste d’actionnaires.
Par ailleurs, M. Joseph THOUVENEL a écrit le 3 août 2007 au Directeur de la DESM afin de lui demander de lui adresser des documents et de lui fournir des justifications, ce qui fût fait par courrier du 10 septembre 2007.
Les mis en cause ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions du 6 décembre 2007 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 25 octobre 2007 à laquelle était annexé le rapport signé par le Rapporteur en date du 15 octobre 2007.
Des observations en réponse au rapport ont été présentées le 6 novembre 2007 par Maître Hervé TÉMIME, pour le compte de M. E. Des observations en réponse au rapport ont été présentées le 7 novembre 2007 par M. A et le 5 décembre 2007 par Maître Olivier SCHNERB pour le compte de M. A.
Des observations en réponse au rapport ont été présentées le 8 novembre 2007 par Maître Olivier BARATELLI et Maître Céline ASTOFLE, pour le compte de M. B, et des conclusions in limine litis ont été déposées pour la séance du 6 décembre 2007 par Maître Olivier BARATELLI.
Des observations en réponse au rapport ont été présentées le 12 novembre 2007 par Maître Jean-Pierre SAULNIER ARRIGHI pour le compte de M. D.
Des observations en réponse au rapport ont été présentées le 30 novembre 2007 par Maître Francis TEITGEN pour le compte de M. C.
A l’issue de la séance tenue le 6 décembre 2007, la Commission des sanctions a décidé que « les exceptions de procédures » soulevées par les personnes mises en cause « seraient jointes au fond qui n’a pas été abordé lors de cette séance et qui sera examiné lors d’une séance ultérieure à laquelle les personnes mises en cause seront convoquées dans les formes prévues par l’article R. 621-39 III ».
1.2.4. La demande de récusation du Rapporteur
Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 2 octobre 2008, les mis en cause ont été informés, en application de l’article 2 du décret n° 2008-893 du 2 septembre 2008, de ce qu’ils disposaient de la faculté de demander la récusation du Rapporteur dans un délai d’un mois et dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-2, R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du Code monétaire et financier.
Par acte en date du 15 octobre 2008, remis contre récépissé au secrétariat de la Commission des sanctions le 20 octobre 2008, conformément à l’article R. 621-39-4 du Code monétaire et financier, M. A a demandé la récusation de M. Joseph THOUVENEL en indiquant les motifs de cette demande et en l’accompagnant des pièces propres, selon lui, à la justifier, rendant ainsi cette demande recevable. M. A a fondé sa demande sur la circonstance que M. Joseph THOUVENEL, « Secrétaire général de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens » (CFTC) et un des rédacteurs des statuts de la
Confédération, avait pris des positions qui étaient en contradiction avec les exigences de l’article 1 er de la Constitution de 1958 aux termes duquel la France « est une République (...) laïque...».
Conformément aux articles R. 621-39-5 à R. 621-39-7 du Code susmentionné, le secrétariat de la Commission des sanctions a communiqué le 21 octobre 2008 copie de la demande de récusation à M. Joseph THOUVENEL, dont il est acquis qu’il s’est, dès lors, abstenu de tout acte dans la procédure concernée, et qui a fait connaître par lettre en date du 29 octobre 2008, soit dans les huit jours de la communication qui lui avait été faite, les motifs pour lesquels il s’opposait à cette demande.
M. A, auteur de la demande de récusation, a été informé, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 8 décembre 2008 de ce que cette demande serait examinée le 22 janvier 2009 par la Commission des sanctions, ainsi que de la possibilité qui lui serait donnée de présenter des observations orales.
La 1ère section de la Commission des sanctions, ayant examiné, au cours de sa séance du 22 janvier
2009, la demande de récusation de M. Joseph THOUVENEL formulée par M. A, a rejeté cette demande.
1.2.5. La demande de récusation des membres de la Commission appelés à délibérer
Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception en date du 7 avril 2009, les personnes mises en cause ont été convoquées à la séance de la Commission des sanctions du 26 mai 2009, rappel leur étant fait que le rapport du rapporteur leur avait été adressé en date du 25 octobre 2007. Les mêmes lettres les informaient de la composition de la formation de la Commission des sanctions lors de cette séance et de ce qu’ils disposaient de la faculté de demander la récusation de l’un des Membres de ladite
formation, en application des articles R. 621-39-2 et suivants du Code monétaire et financier.
Par acte en date du 10 avril 2009, dont il a été délivré récépissé le 14 avril 2009 par la Commission des sanctions, M. A a demandé la récusation des membres de la 1e section de la Commission des sanctions ayant délibéré sur la demande de récusation qu’il avait formée à l’encontre du Rapporteur, M. Joseph THOUVENEL, au motif que Mme Marielle COHEN-BRANCHE et MM. Jean-Claude HANUS et Guillaume JALENQUES de LABEAU, appelés à délibérer sur les griefs notifiés, à l’issue de la séance devant se tenir le 26 mai 2009, ne pouvaient participer au délibéré, du fait qu’ils avaient préalablement statué sur la demande de récusation du Rapporteur.
Le secrétariat de la Commission des sanctions a communiqué le 15 avril 2009 copie de la demande de récusation à Mme Marielle COHEN-BRANCHE et à MM. Guillaume JALENQUES de LABEAU et Jean-Claude HANUS qui ont chacun fait connaître, par lettres du 22 avril 2009, les motifs pour lesquels chacun d’eux s’opposait à sa propre récusation.
M. A a été informé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 22 avril 2009 de ce que cette demande serait examinée le 12 mai 2009 par une nouvelle formation de la Commission des sanctions ainsi que de la possibilité qui lui serait donnée de présenter des observations orales lors de cette séance.
Une formation ad hoc relevant de la 2ème section de la Commission des sanctions, composée de MM. Jean-Claude HASSAN, Alain FERRI et Jean-Jacques SURZUR, a examiné, au cours de sa séance du 12 mai 2009, la demande de récusation formulée par M. A et a rejeté cette demande.
Les mis en cause ont été avisés le 20 mai 2009 du report à une date ultérieure de la séance de la 1ère section de la Commission des sanctions initialement prévue pour le mardi 26 mai 2009.
Ils ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions du 21 septembre 2009 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 7 juillet 2009. Ce courrier leur indiquait que la Commission des sanctions se réunirait à cette date dans la même composition que celle qui leur avait été notifiée par lettre du 7 avril 2009. Cette dernière lettre, leur avait rappelé que le rapport du rapporteur leur avait été adressé le 25 octobre 2007. Leur était également ouvert un délai de quinze jours francs pour faire connaître, le cas échéant, de nouvelles observations sur ce rapport. 1.2.6. L’ordonnance de non-lieu rendue par le juge d’instruction
Par courriers en date du 14 septembre 2009, du 15 septembre 2009, et du 17 septembre 2009, M. A, M. C et M. E ont fait parvenir à la Commission des sanctions de l’AMF une copie de l’ordonnance rendue par M. X, juge d’instruction près le TGI de Paris, disant n’y avoir lieu à suivre du chef de délit d’initié à l’encontre des personnes auxquelles le grief de manquement d’initié a été notifié, ainsi qu’une copie du réquisitoire du Parquet aux fins de non-lieu, dans cette même affaire, en date du 22 mai 2009.
La transmission de ces documents conduisait la défense à demander à la Commission des sanctions de l’AMF de reconnaître l’autorité de la chose jugée au pénal, demande étayée par des observations de M. A en date du 18 septembre 2009.
2 MOTIFS
2.1. LES TEXTES APPLICABLES
Considérant que les faits mentionnés dans les notifications de griefs du 8 août 2006, sont antérieurs à la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, ils doivent être appréciés au regard des dispositions combinées des articles L. 621-15, II et L. 621-14, I du Code monétaire et financier dans leur rédaction antérieure à cette loi, dont il résulte que la Commission des sanctions peut prononcer une sanction à l’encontre de toute personne auteur des pratiques contraires aux dispositions législatives ou réglementaires, lorsque ces pratiques sont de nature à porter atteinte aux droits des épargnants ou ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché, de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu’ils n’auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l’égalité d’information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d’intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ; que les articles 611-1, 621-1 et 622-2 du Règlement général de l’AMF n’ayant pas été modifiés par des dispositions plus douces susceptibles de recevoir une application rétroactive, il sera fait application de ces articles dans leur rédaction issue de l’arrêté du 12 novembre 2004, paru au Journal officiel du 24 novembre 2004 et applicable à compter du 25 novembre 2004 ;
2.2. LA REGULARITE DE LA PROCEDURE
1. Considérant que contrairement à ce que soutiennent M. B et M. A, le recours par le législateur au terme « sanctions » pour dénommer comme « commission des sanctions » l’organe indépendant chargé au sein de l’AMF de rechercher si les personnes auxquelles des manquements sont reprochés encourent ou non des « sanctions », selon les termes mêmes des articles L. 621-15 et L. 621-17 du Code monétaire et financier, ne saurait être regardé sérieusement comme constitutif d’une atteinte aux principes d’impartialité et de présomption d’innocence ;
2. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier, après ouverture d’une procédure de sanction, la Commission des sanctions « désigne un rapporteur parmi ses membres » et qu’aux termes du IV du même article L. 621-15 « la commission des sanctions statue (...) hors la présence du rapporteur » ; que M. B ne saurait raisonnablement déduire de ce que M. Joseph THOUVENEL - désigné comme rapporteur et appartenant à la section de la Commission des sanctions appelée à statuer sur cette affaire - méconnaîtrait les dispositions précitées du IV de l’article L. 621-15 au seul motif que son nom figure dans la décision n° 135 du 29 mai 2006 fixant la composition des sections constituées par la Commission des sanctions. En effet, si le rapporteur est choisi parmi les membres de la Commission des sanctions, il ne participe jamais aux délibérations de la Commission sur le dossier qu’il a instruit ; que la circonstance que le rapporteur a proposé une sanction, loin de porter atteinte au procès équitable, permet au contraire un plein exercice du principe de la contradiction ;
3. Considérant que si M. A - qui n’avait pas souhaité être assisté d’un conseil lors de son audition du 17 octobre 2005 pendant l’enquête et était assisté de Maître Olivier SCHNERB lors de son audition du 3 mai 2006 par les enquêteurs - entend critiquer les conditions dans lesquelles se sont déroulées ces auditions, les procès-verbaux de celles-ci, signés par lui, ne font apparaitre aucune irrégularité ; qu’en tout état de cause, les critiques relatives aux circonstances dans lesquelles a été conduite l’enquête, à les supposer établies, visent une période antérieure à la saisine de la Commission des sanctions, et sont donc sans effet sur la régularité de la procédure contradictoire suivie devant elle ;
4. Considérant que si le rapport d’enquête a, au vu des premières constatations, décidé de ne pas « approfondir les investigations sur les transactions effectuées » par les investisseurs institutionnels, et si, conformément aux propositions du rapport d’enquête, la Commission spécialisée du Collège n’a pas notifié de griefs à d’autres personnes que celles mises en cause dans la présente procédure, elle a simplement exercé une faculté qui lui est reconnue, dans le cadre de son pouvoir d’opportunité d’ouverture d’une procédure de sanctions, d’arrêter les griefs ainsi que de déterminer les personnes devant être mises en cause, sans que la Commission des sanctions ait à se prononcer sur cette décision ;
 5. Considérant que si une personne poursuivie devant la Commission des sanctions peut refuser de répondre lorsqu’elle estime cette attitude plus conforme aux intérêts de sa défense, ce droit ne fait pas obstacle à celui, pour les membres de la Commission, de tirer de cette attitude de silence et plus encore d’assertions volontairement inexactes, toute conséquence utile à la formation de leur jugement ;

Considérant qu’en outre, ne peut être accueillie la justification selon laquelle certains des mis en cause auraient nié devant les enquêteurs avoir détenu des comptes en Israël du fait qu’ils auraient craint que l’AMF transmette cette information à l’administration fiscale, leur faisant ainsi perdre « le privilège de spécialité » ; qu’en effet, il résulte de l’application combinée des articles L. 621-4 et L. 621-31 du Code monétaire et financier, que tant les membres que les préposés et les personnels de l’AMF, ainsi que les experts nommés dans les commissions consultatives, sont tenus au secret professionnel, lequel est opposable à l’administration fiscale ; qu’en effet, cette dernière ne dispose d’aucun droit de communication vis-à-vis de l’AMF ;
6. Considérant que si ce n’est que le 1er août 2006 que l’Israel Securities Authority a autorisé l’AMF à divulguer aux autorités judiciaires les informations et documents qu’elle lui avait antérieurement transmis, ces informations avaient été préalablement et régulièrement reçues par l’AMF sur le fondement d’un accord bilatéral conclu le 27 mars 2006, soit antérieurement aux dates auxquelles les mis en cause ont été entendus durant l’enquête ; que, partant, les divers arguments relatifs à l’utilisation non fondée à l’encontre de mis en cause de pièces transmises par les autorités israéliennes ne sauraient être retenus ;
qu’en tout état de cause, aucun grief relatif à l’attitude des mis en cause pendant l’enquête ne pouvait être notifié, une telle appréciation, ne relevant, le cas échéant, que du juge pénal ; considérant par ailleurs qu’aucune allégation concernant l’absence d’impartialité ou d’apparence d’impartialité du rapporteur n’ayant été établie, aucune remise en cause de la régularité de la procédure ne peut intervenir de ce chef ;
7. Considérant que le recours à la méthode du faisceau d’indices ne conduit pas à opérer un
renversement de la charge de la preuve et ne méconnaît aucun principe fondamental, dès lors que sont assurés les droits de la défense et que des indices concordants sont de nature à établir que seule la détention d’une information privilégiée permet d’expliquer les interventions de la personne mise en cause sur l’instrument financier concerné ;
8. Considérant ensuite que la procédure engagée devant la Commission des sanctions de l’AMF, distincte de celle pouvant être poursuivie devant la juridiction pénale, n’est pas subordonnée à l’issue de la procédure pénale, ainsi que l’ont confirmé les juridictions de recours ; que dès lors, aucune demande de sursis à statuer dans l’attente de la décision pénale ne pouvait être accueillie ;
9. Considérant que la circonstance, invoquée en dernier lieu, selon laquelle le dossier pénal, transmis par l’AMF, aurait été incomplètement constitué, n’est pas de nature à affecter la régularité de la procédure suivie devant la Commission des sanctions ;
Considérant en particulier, s’agissant de l’absence alléguée d’une pièce au dossier pénal, que l’examen  des pièces du dossier incontestablement transmises à l’autorité judiciaire, pour figurer dans les annexes attachées au rapport d’enquête, montre que le contenu du courrier litigieux (cote D65), établissant l’antériorité de la décision de METROVACESA d’interrompre, le 14 février 2005, les négociations avec les vendeurs potentiels d’actions GECINA, figure expressément en cote R385 ;
Considérant dès lors que l’allégation, par l’un des représentants de la défense, de « déloyauté des services d’enquête de l’AMF » doit être écartée ;
10. Considérant enfin que le Conseil d’Etat, statuant sur l’incidence d’une ordonnance de non-lieu rendue par un juge d’instruction sur la procédure suivie devant une Cour d’appel administrative (CE 22 février 2008, n° 277392, Bernard P.) a énoncé que « l’autorité de la chose jugée en matière pénale ne s’attache qu’aux décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l’action publique ; que tel n’est pas le cas des ordonnances de non-lieu que rendent les juges d’instruction, quelles que soient les constatations sur lesquelles elles sont fondées ; qu’ainsi la Cour d’appel [administrative] n’a pas commis d’erreur de droit en ne reconnaissant pas l’autorité de chose jugée à l’ordonnance de non-lieu dont a bénéficié M. P » ;
Considérant, en effet, que l’autorité de la chose jugée au pénal, s’agissant d’une ordonnance de non-lieu d’un juge d’instruction, ne vaut que pour la seule voie pénale, et à condition que le non-lieu soit motivé en droit ;

Considérant dès lors que la Commission des sanctions de l’AMF, qui, non seulement n’appartient pas à l’ordre judiciaire pénal, mais, de surcroît, n’est pas une juridiction, ne peut être liée, dans sa démarche de caractérisation d’un manquement administratif, par les termes d’une ordonnance de non-lieu rendue par un juge d’instruction ;
Considérant, en conséquence, que la demande de mise hors de cause des personnes ayant reçu une notification de griefs, au motif de l’existence d’une telle ordonnance, doit être rejetée ;
3. LES MANQUEMENTS RELATIFS AUX OPERATIONS D’INITIE
3.1. L’EXISTENCE D’UNE INFORMATION PRIVILEGIEE
Considérant qu’il résulte de l’article 621-1, alinéa 1 du Règlement général de l’AMF qu’« une information privilégiée est une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d’instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers qui leur sont liés » ;
Considérant qu’en l’espèce, le 17 janvier 2005, une réunion s’est tenue par l’entremise de MERRILL LYNCH Espagne entre des représentants de la société METROVACESA et M. Laurent MIGNON, directeur général des AGF, sur l’éventualité d’une cession des titres GECINA par le groupe AGF ; que le même jour, la société METROVACESA a signé, d’une part, un accord de confidentialité avec MORGAN STANLEY et, d’autre part, a modifié le mandat conclu avec la société CALYON en octobre 2004, afin de permettre à d’autres banques de l’assister dans ses recherches d’une SIIC en France ; qu’à partir de cette date, les négociations se sont poursuivies entre les différentes parties en présence sans succès immédiat ; que le 16 février 2005, les AGF ont décidé de mandater BNP PARIBAS afin de les assister ; que le 17 février 2005, les négociations se sont interrompues jusqu’au 21 février 2005, la société METROVACESA annonçant publiquement abandonner la France pour se tourner vers la Belgique ; que ce n’est qu’à compter du 22 février 2005 que les travaux au sein de MORGAN STANLEY ont repris ; que le 8 mars 2005, un accord de principe entre les AGF et METROVACESA sur le rachat des actions GECINA par METROVACESA a été trouvé, des discussions sur la « gouvernance » future s’engageant alors et permettant, à partir du 9 mars 2005, de finaliser l’ensemble de la documentation d’offre ;
3.1.1. Le caractère précis de l’information Considérant que l’article 621-1, alinéa 2 du Règlement général de l’AMF indique qu’« une information est réputée précise si elle fait mention d’un ensemble de circonstances ou d’un événement qui s’est produit ou qui est susceptible de se produire et s’il est possible d’en tirer une conclusion quant à l’effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés » ;
Considérant qu’il en résulte que le caractère précis de l’information s’apprécie objectivement,
indépendamment de la façon dont elle a été transmise à la personne mise en cause ; qu’en l’espèce, il existait une information précise dès le 17 janvier 2005 ; qu’en effet, même s’il n’y avait aucune certitude de trouver un accord à cette date, le rachat de la participation des AGF dans le titre GECINA par METROVACESA était « susceptible de se produire » au sens des dispositions de l’article 621-1, alinéa 2 du Règlement général de l’AMF et il était possible d’en tirer une conclusion quant à l’effet possible de cet événement sur le cours du titre GECINA ;

3.1.2. Le caractère non public de l’information et son éventuelle influence sensible sur le cours du titre Considérant que l’article 621-1, alinéa 3 du Règlement général de l’AMF mentionne qu’une « information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement » ;
Considérant, d’une part, que l’information relative aux chances raisonnables de rachat de la participation des AGF dans le capital de GECINA était susceptible d’influencer de façon sensible le cours de l’action GECINA, dès lors qu’un investisseur raisonnable aurait utilisé cette information comme l’un des fondements de sa décision ; que cet investisseur était en effet fondé à considérer qu’une telle opération -qui devait nécessairement être rendue publique en application des dispositions relatives au franchissement de seuil - ne pourrait se faire qu’à un prix supérieur au cours de bourse pour avoir des chances d’être acceptée ; qu’en outre, elle était susceptible d’entraîner le dépôt d’une offre publique d’achat sur l’ensemble des actions GECINA, événement qui s’est finalement réalisé et a effectivement, ainsi qu’il était prévisible, conduit au renchérissement du cours du titre ;
Considérant, d’autre part, que les informations publiques relatives au titre GECINA ne permettaient pas de savoir, avant le 15 mars 2005, soit le lendemain de la suspension de la cotation des actions et des warrants GECINA et le jour de l’annonce du dépôt de l’offre publique d’achat alternative, que les AGF allaient vendre leur participation dans GECINA ;
Considérant, en définitive, que l’information en cause, précise quant à son objet à partir du 17 janvier 2005, est restée non publique jusqu’au 15 mars 2005 et qu’elle aurait été susceptible d’avoir une influence sur le cours du titre GECINA si elle avait été rendue publique entre le 17 janvier et le 15 mars 2005 ;
3.2. LA DETENTION ET L’UTILISATION DE L’INFORMATION PAR LES PERSONNES MISES EN CAUSE
Considérant, d’une part, que la détention de l’information privilégiée doit être établie, à l’égard des personnes mises en cause, soit par une preuve tangible, soit, à défaut, par un faisceau d’indices concordants desquels il résulte que seule la détention de l’information privilégiée peut expliquer les opérations auxquelles la personne mise en cause a procédé ;
Considérant, d’autre part, que pèse sur le détenteur d’une information privilégiée une obligation d’abstention d’utiliser une telle information ;
Considérant qu’avant de vérifier l’application de ces principes au cas de chacune des personnes mises en cause, il y a lieu, à titre liminaire, de relever trois séries de considérations qui leur sont communes ;
Considérant, en premier lieu, que si le rapport d’enquête indique qu’il n’a pas été possible de déterminer l’identité de la personne ayant initialement transmis l’information concernant l’opération en cours sur le titre GECINA, cette circonstance ne fait pas obstacle à la constitution du manquement ; qu’en effet, l’article 622-2 du Règlement général de l’AMF dispose que les obligations d’abstention « s’appliquent (...) à toute (...) personne détenant une information privilégiée et qui sait ou qui aurait dû savoir qu’il s’agit d’une information privilégiée » ; qu’il en résulte que le manquement n’exige pas, pour être constitué, que
soit formellement établie l’identité de la personne par l’intermédiaire de laquelle l’information a été obtenue ; qu’il faut et il suffit de démontrer que la personne détenait l’information et savait ou aurait dû savoir qu’il s’agissait d’une information privilégiée, cette condition pouvant être établie par un faisceau d’indices concordants ;
Considérant, en second lieu, que si MM. A, B, C, D et E affirment avoir acquis, directement ou indirectement, des titres GECINA pour des montants importants, à hauteur respectivement de 8,7 millions €, 3 millions €, 2,8 millions €, 4,9 millions € et 157 000 €, sur le fondement de leur propre analyse, ces personnes entretiennent directement ou indirectement des liens d’amitié ou professionnels ;

que cette circonstance, qui établit la plausibilité d’un circuit de transmission de l’information, doit être appréciée, pour en établir la portée, à l’aulne des indices de détention de l’information par ailleurs relevés ;
Considérant, en troisième lieu, qu’à la période des faits ici examinés, le secteur des sociétés foncières cotées était notoirement considéré comme particulièrement porteur, et ce, en raison d’un contexte fiscal particulièrement avantageux ; qu’elles étaient également perçues comme étant des valeurs refuges dans une période de forte volatilité des titres ; qu’il est ainsi établi que l’ensemble des foncières cotées a crû, entre le 1er janvier et le 16 février 2005, de 15 % environ, alors que l’indice du CAC 40 ne croissait, dans le même temps, que de 3,77 % ;
3.2.1. La détention et l’utilisation de l’information par M. A
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, M. A aurait détenu l’information privilégiée en cause, en raison d’indices concordants, relatifs en particulier à la date et à l’importance du montant des achats qu’il a effectués, à l’obstacle mis aux investigations de l’AMF par la communication de renseignements inexacts, ou encore à la composition des portefeuilles investis en titres GECINA et au fait que certaines de ses acquisitions ont été effectuées pour le compte de sociétés établies dans des États dont il pouvait penser qu’ils ne coopéreraient que difficilement à l’enquête ;
Considérant, tout d’abord, que l’information ainsi donnée sur la réunion du 14 février 2005 dans les locaux de la banque MORGAN STANLEY, conseil de METROVACESA, établit seulement qu’y a été arrêtée une « tactique : faire passer le message que le deal est mort » (Cote R385) ;
Considérant que loin d’empêcher la caractérisation du grief notifié, cette information montre seulement la volonté de METROVACESA, en position d’acheteur, de laisser croire aux vendeurs potentiels, afin de peser sur les négociations en cours pour l’acquisition de GECINA, qu’elle n’était plus intéressée, cette tactique étant destinée à stabiliser les exigences de prix formulées par ces vendeurs ;
Considérant ainsi que M. PONSOLLE, Président de MORGAN STANLEY France, banque conseil de METROVACESA pour l’opération, a déclaré en audition lors de l’enquête que « dès que BNP PARIBAS a été mandatée [par les AGF susceptibles d’être vendeurs], la stratégie que nous avions retenue avec METROCAVESA consistait à dire aux AGF que nous avions refermé le dossier. Notre vue était que c’était aux AGF et à leur banque conseil BNP PARIBAS de revenir vers nous » ; que, dans la réalité, METROVACESA n’avait donc nullement renoncé à l’opération mais avait déployé une stratégie ayant conduit à ce que les AGF prennent l’initiative auprès de METROVACESA, pour permettre de trouver un accord sur le prix ;
Considérant que, si la décision tactique d’arrêter les négociations a été prise par METROVACESA et ses banques conseils le 14 février 2005, elle n’a été signifiée aux AGF que le 17 février suivant et n’a été rendue publique par METROVACESA que le vendredi 18 février 2005 (Cote R725) ; qu’à la reprise de la cotation le lundi suivant, le cours du titre GECINA a commencé à baisser ;
Considérant, en conséquence, que la circonstance que M. A ait continué à acheter des titres GECINA jusqu’au 16 février inclus, pour sa deuxième série d’acquisition, n’est pas incompatible avec la caractérisation du grief ;
Considérant qu’il résulte cependant des circonstances particulières de l’espèce que, au moment des faits, M. A a également investi sur d’autres sociétés foncières, attestant ainsi de son intérêt pour un secteur qui était notoirement considéré comme étant particulièrement porteur en cette période ; qu’au surplus, les interventions auxquelles M. A a alors procédé étaient conformes à ses habitudes d’investissement à risque, notamment par l’utilisation fréquente de sa part de l’effet de levier sur un délai bref ;

Considérant, dans ces conditions, que ne subsiste à charge que le seul indice retenu par la notification de griefs concernant les informations inexactes communiquées aux enquêteurs par M. A sur la détention de comptes à l’étranger ;
Considérant que, sans préjudice de l’appréciation qui peut être portée sur un tel comportement, ne peut être constitué, dès lors que ne demeure que cette seule circonstance, le faisceau d’indices nécessaire à la caractérisation du manquement ;
Considérant en conséquence qu’il n’est pas démontré que seule la détention d’une information privilégiée pouvait ici expliquer les interventions de M. A sur le marché des titres GECINA ;
3.2.2. La détention et l’utilisation de l’information par M. B
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, M. B aurait détenu l’information privilégiée en cause, en raison d’indices concordants relatifs en particulier à la date et au montant des achats qu’il a effectués, à l’obstacle mis aux investigations de l’AMF par la communication de renseignements inexacts, à la composition des portefeuilles investis en titres GECINA et au fait que certaines de ses acquisitions ont été effectuées pour le compte de sociétés établies dans des États dont il pouvait penser qu’ils ne coopéreraient que difficilement à l’enquête ;
Considérant cependant qu’il ressort des pièces du dossier et des explications apportées par M. B en séance de la Commission des sanctions, que les modalités d’acquisition des titres GECINA ne sont pas atypiques pour cet investisseur ;
Considérant de surcroît que le secteur des sociétés foncières cotées apparaissait comme notoirement porteur à l’époque des faits et que le choix de GECINA n’était pas incohérent, au regard des analyses financières ;Considérant dans ces conditions, que subsiste essentiellement l’indice résultant de ce que M. B a communiqué des informations inexactes enquêteurs sur sa détention de comptes à l’étranger, qu’il a tenté de justifier par des motifs fiscaux infondés ;
Considérant que, sans préjudice de l’appréciation qui peut être portée sur un tel comportement, ne peut être constitué, dès lors que ne demeure que cette seule circonstance, le faisceau d’indices nécessaire à la caractérisation du manquement ;
Considérant en conséquence, qu’il n’est pas démontré que seule la détention d’une information privilégiée pouvait expliquer les interventions de M. B sur le marché des titres GECINA ;
3.2.3. La détention et l’utilisation de l’information par M. C
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, M. C aurait détenu l’information privilégiée en cause, en raison d’indices concordants relatifs en particulier à la date et au montant des achats qu’il a effectués, au fait que son compte, celui de son frère et celui de la société C SA ont été rendus instantanément débiteurs du fait des achats de titres GECINA, et au fait qu’il connaissait M. B ;
Considérant cependant que les acquisitions de titres GECINA par M. C, au demeurant spécialiste du marché immobilier, n’apparaissent pas pouvoir être qualifiées d’atypiques, en particulier au regard des capacités financières de M. C et de son groupe et au vu des modalités de financement desdites acquisitions ;
Considérant qu’il résulte des pièces produites que M. C justifie avoir recherché un équilibre des acquisitions de titres pour le compte de son père, de son frère et pour lui-même, au travers de structures de sociétés en procédant à une répartition tripartite des investissements effectués, ce qui a été également établi au regard des pratiques antérieurement suivies ;

Considérant, en outre, qu’il n’est pas inhabituel pour M. C et son groupe d’investir des montants importants sur des sociétés foncières, attestant ainsi de leur intérêt pour un secteur qui était notoirement considéré, à l’époque des faits, comme étant particulièrement porteur ;
Considérant, en conséquence, qu’il n’est pas démontré que seule la détention d’une information privilégiée pouvait expliquer les interventions de M. C sur le marché des titres GECINA ;
3.2.4. La détention et l’utilisation de l’information par M. D
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, M. D aurait détenu l’information privilégiée en cause, en raison d’indices relatifs à la date et au montant des achats de titres GECINA qu’il a effectués, et plus particulièrement, à l’insuffisance des liquidités disponibles dont il disposait, ainsi que, enfin, au fait qu’il avait des liens indirects avec MM. A et B ;
Considérant tout d’abord qu’il ressort des circonstances de l’espèce que la réalisation d’opérations à risques, pour un investisseur tel que M. D, n’était pas atypique, dans la mesure où il recourait fréquemment à la technique de l’effet de levier, sous forme notamment de contrats CFD (Contract for difference) ; qu’une telle pratique est dès lors de nature à expliquer un moindre besoin de liquidités de sa part pour procéder à l’investissement considéré ;
Considérant, en outre, que sa qualité professionnelle de spécialiste du marché immobilier, le conduisait naturellement, à cette période, à manifester un intérêt pour le secteur des sociétés foncières cotées, qui était notoirement considéré, à l’époque des faits, comme étant particulièrement porteur ;
Considérant, dans ces conditions, qu’il n’est pas démontré que seule la détention d’une information privilégiée pouvait expliquer les interventions de M. D sur le marché des titres GECINA ;
3.2.5. La détention et l’utilisation de l’information par M. E
Considérant qu’aux termes de la notification de griefs, M. E aurait détenu l’information privilégiée en cause, en raison d’indices concordants relatifs en particulier à la date et au montant des achats qu’il a effectués, à l’obstacle mis aux investigations de l’AMF par la communication de renseignements inexacts, et au fait que certaines de ses acquisitions ont été effectuées pour le compte de sociétés établies dans des États dont il pouvait penser qu’ils ne coopéreraient que difficilement à l’enquête ;
Considérant, à titre liminaire, que le montant des acquisitions de M. E pour compte personnel doit être retenu pour 157 050 euros et non 250 000 euros, comme indiqué par erreur dans la notification de griefs ;
Considérant tout d’abord que le secteur des sociétés foncières cotées apparaissait comme notoirement porteur à l’époque des faits ;
Considérant que le montant de cette acquisition n’est en outre pas atypique pour M. E, qui établit avoir eu accès à l’analyse financière particulièrement explicite publiée avant ses interventions par FORTIS BANK, celle-ci précisant notamment que l’action GECINA est « l’action immobilière la mieux placée » ;
Considérant, dans ces conditions, que ne subsiste à charge que le seul indice retenu par la notification de griefs concernant les informations inexactes communiquées aux enquêteurs par M. E sur la détention de comptes à l’étranger ;
Considérant que, sans préjudice de l’appréciation qui peut être portée sur un tel comportement, ne peut être constitué, dès lors que ne demeure que cette seule circonstance, le faisceau d’indices nécessaire à la caractérisation du manquement ;
Considérant en conséquence qu’il n’est pas démontré que seule la détention d’une information privilégiée pouvait expliquer les interventions de M. E sur le marché des titres GECINA ;

4. LA PUBLICATION
Considérant que l’article L. 621-15-V du Code monétaire et financier dispose que « la commission des sanctions peut rendre publique sa décision dans les publications, journaux ou supports qu'elle désigne, à moins que cette publication ne risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées » ; que, par ces dispositions, le législateur a entendu permettre à la Commission de tenir compte des exigences d’intérêt général relatives à la loyauté du marché, à la transparence des opérations et à la protection des épargnants qui fondent son pouvoir de sanction ainsi que de l’intérêt qui s’attache
pour la sécurité juridique de l’ensemble des opérateurs à ce que ceux-ci puissent, en ayant accès à ses décisions, connaître son interprétation des règles qu’ils doivent observer ; qu’aucune circonstance de l’espèce n’est de nature à faire obstacle à ce que la décision à intervenir soit publiée dans des conditions garantissant l’anonymat des personnes mises hors de cause ;
PAR CES MOTIFS,
Et après en avoir délibéré sous la présidence de Mme Marielle COHEN-BRANCHE, par
MM. Guillaume JALENQUES de LABEAU et Jean-Claude HANUS, Membres de la Commission des sanctions, en présence du Secrétaire de séance,
DECIDE DE :
- renvoyer pour examen par la Commission des sanctions, qui statuera lors d’une séance ultérieure, le grief complémentaire notifié le 17 juillet 2007 à M. E sur le fondement de l’article 321-24 du Règlement général de l’AMF, repris en substance, à compter du 1 er novembre 2007, à l’article 315-73 du Règlement général de l’AMF ;
- mettre hors de cause MM. A, B, C, D et E ;
- publier la présente décision au « Bulletin des annonces légales obligatoires », ainsi que sur le site internet de l’AMF et dans le recueil annuel des décisions de la Commission des sanctions, dans des conditions garantissant l’anonymat des personnes mises hors de cause.