Cass. 2e civ., 1 décembre 1993, n° 92-16.613
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (cour d'appel d'Aix-en-Provence, 31 mars 1992) et les productions, que Mme X..., notaire, a fait l'objet d'une mesure disciplinaire, prononcée par un précédent arrêt devenu définitif, pour avoir effectué un prélèvement personnel sur la trésorerie de l'office notarial dont elle est titulaire, étant retenu par cet arrêt qu'il était démontré par les pièces produites que ce prélèvement avait porté atteinte à la règle de la couverture minimale des " comptes clients " par cette trésorerie ;
qu'ultérieurement, Mme X... a saisi le président d'un tribunal de grande instance d'une requête tendant à voir désigner un expert avec mission d'examiner la comptabilité de l'office notarial et de préciser si, à la date du prélèvement ayant motivé la sanction disciplinaire, la couverture des " comptes clients " était ou non insuffisante ; que cette requête a été rejetée par une ordonnance dont Mme X... a interjeté appel ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de n'avoir pas accueilli la demande d'expertise de Mme X... alors que, d'une part, le droit à un procès équitable emporte celui d'obtenir du juge une expertise in futurum, afin d'établir la preuve qu'une pièce décisive à la solution d'un précédent litige a été retenue jusqu'alors par une autre partie et permettre l'ouverture et le succès d'un procès en révision ; qu'en refusant, en l'espèce, à Mme X..., le droit à une expertise comptable afin de lui permettre d'établir que des pièces décisives de comptabilité, retenues par le fait de son associé, partie au procès disciplinaire, établissaient que le manque de trésorerie des comptes clients n'était pas dû au prélèvement personnel qui lui avait été reproché disciplinairement, la cour d'appel aurait violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 145 et 593 et suivants du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, il aurait appartenu à la cour d'appel de rechercher, comme elle y était invitée, si l'expertise comptable complémentaire, jugée nécessaire lors de l'introduction de la procédure disciplinaire, avait été " diligentée " et si Mme X... n'avait pas été privée, et ne restait pas encore privée de tout accès à la comptabilité de son étude, ce qui lui interdisait d'intenter un procès en révision, sur la base d'éléments comptables essentiels et jusqu'alors non discutés, tant qu'une expertise comptable n'était pas " diligentée " ; qu'en se bornant à affirmer, pour rejeter sa requête, que la demande de Mme X... tendait à obtenir une mesure exploratoire destinée à évaluer l'opportunité d'un éventuel recours en révision par un nouvel examen d'éléments déjà discutés à l'occasion du litige précédent, la cour d'appel aurait entaché son arrêt d'un manque de base légale au regard des articles 145 et 593 et suivants du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les mesures d'instruction légalement admissibles ne peuvent être demandées, dans les conditions prévues par l'article 145 du nouveau Code de procédure civile, qu'avant tout procès ;
Qu'en retenant que la demande ne visait pas à l'établissement ou à la conservation d'une preuve dont pourrait dépendre la solution d'un litige mais tendait à obtenir l'instauration d'une mesure destinée à apprécier l'opportunité d'un recours en révision à l'occasion du litige précédent, la cour d'appel, hors de toute violation des textes précités, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.