Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 8 février 2023, n° 20/04557

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Pizza Center France (SAS), Domino's Pizza France (SAS), Fra-Ma-Pizz (SAS)

Défendeur :

Semper Fi (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

Mme Brun-Lallemand, Mme Depelley

Avocats :

Me Guyonnet, Me Bretzner, Me Richard, Me Bonaldi, Me Le Goff

T. com. Rennes, du 31 janv. 2020, n° 201…

31 janvier 2020

FAITS ET PROCEDURE

Le réseau de restaurants Pizza Sprint, détenu jusqu'au 25 janvier 2016 par le groupe Pizza Sprint, a pour activité la fabrication et la distribution de pizzas sur le marché de la livraison à domicile ou à emporter.

Le groupe était composé de trois filiales détenues par la société holding Food Court Finances dirigée par M. [U] [S] :

- la société FraMaPizz (ci-après « le franchiseur ») qui a exploité des points de vente ou concédé l'exploitation de l'enseigne par la conclusion de contrats de franchise ;

- la société Pizza Center France (ci-après « le fournisseur ») qui était la centrale d'approvisionnement en produits alimentaires et non alimentaires du réseau ;

- la société Somainmag qui avait été constituée pour réaliser l'aménagement des points de vente du réseau et n'est plus en activité.

Le 17 janvier 2011, la société Semper Fi a conclu un contrat de franchise avec la société FraMaPizz en vue d'exploiter un fonds de commerce de restauration rapide sous l'enseigne « Pizza Sprint » à [Localité 4].

Monsieur [M] [G] est le dirigeant et unique actionnaire de la société HK Finances, elle-même dirigeante et unique actionnaire de la société Semper Fi.

Madame [O] [T] épouse [G] est salariée de la société Semper Fi.

Le 26 janvier 2016, la société Domino's Pizza France (ci-après "la société Domino's Pizza"), exploitant dans le même secteur le premier réseau de franchise français en nombre de points de vente, s'est portée acquéreur auprès de la société Food Court Finance de 100 % des titres composant le capital social des sociétés FraMaPizz et Pizza Center France, à l'exclusion de la société Somainmag.

A la suite de cette cession de contrôle, certains franchisés ont accepté de conclure de nouveaux contrats de franchises et d'exploiter sous l'enseigne « Domino's Pizza », d'autres ont préféré demeurer au sein du réseau « Pizza Sprint » comme la société Semper Fi malgré les relations tendues avec le franchiseur.

Le contrat de franchise du 17 janvier 2011 est arrivé à son terme à l'issue d'une durée contractuellement prévue de 10 ans à compter de l'ouverture effective du point de vente, soit le 27 juillet 2021.

Les relations entre les parties ont définitivement pris fin à compter de cette date.

Par acte extrajudiciaire du 4 mai 2016, puis du 19 septembre 2018, la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [T] ont assigné les sociétés FraMaPizz et Pizza Center France, puis la société Domino's Pizza France, devant le tribunal de commerce de Rennes pour demander la nullité du contrat de franchise « initialement pour vice du consentement, puis à raison de clauses créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dont la nullité aurait pour effet de vider le contrat de sa substance » et, subsidiairement, pour faire prononcer sa résiliation aux torts exclusifs du franchiseur ; et obtenir les restitutions et indemnisations consécutives.

Ces deux instances ont été jointes.

Par jugement du 31 janvier 2020, le tribunal de commerce de Rennes a :

- Déclare irrecevables les demandes de Monsieur [M] [G], de Madame [O] [G] et de la société Semper Fi tendant à :

Déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre de l'Economie ;

Y faire droit en tous points ;

Déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire principale des concluants ;

Joindre les instances engagées par les Franchises a l'instance enrôlée sous le n° 2017 F 00131 ;

Annuler ou résilier le Contrat de Franchise aux torts de Pizza Center France.

- Déclarer irrecevables les demandes de FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France tendant à :

- Rejeter la demande de jonction de l'instance engagée par les Franchisés avec l'instance initiée par le Ministre (RG n° 2017 F 00131) ;

- Constater que l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief a l'encontre des défenderesses dans la mesure ou- ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacre- respectivement par (i) la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

- Constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442- 6, I, 2° du Code de commerce ;

- Constater que les demandes fondées non pas avec une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société FraMaPizz ne saurait relever de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

- Constater l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce.

Et :

- Prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de FraMaPizz et Domino's Pizza France.

En conséquence :

- Condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France :

- A rembourser à Semper Fi les redevances de franchise versées au titre des années 2017, 2018, 2019 et 2020 ;

- A verser à Semper Fi la somme de 297.099,80 € au titre de la perte de valeur de son fonds ;

- A verser à Monsieur [M] [G] la somme de 15.000 € et à Madame [O] [G] la somme de 15.000 € également, au titre du préjudice moral.

En outre :

- Ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l'article 1343-2 du Code civil ;

- Condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France aux entiers dépens de l'instance, parmi lesquels seront compris l'ensemble des frais d'exécution (y compris les émoluments de l'huissier en application de l'article A. 444-32 du Code de commerce) ;

- Condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France à verser à Monsieur [M] [G], Madame [O] [G] et la société Semper Fi la somme de 15.000 euros chacun au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.

Enfin :

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes, et notamment de celles relatives à l'exécution provisoire ;

- Liquidé les frais de greffe a la somme de 133,40 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du CPC.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 2 mars 2020, les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France ont interjeté appel de ce jugement.

Parallèlement, entre 2013 et 2016, la DGCCRF a mené une enquête sur les relations commerciales entre partenaires au sein du réseau « Pizza Sprint » à l'issue de laquelle plusieurs franchisés ont dénoncé des pratiques susceptibles de constituer des entraves au libre jeu de la concurrence.

La DGCCRF a considéré que les contrats de franchise du réseau « Pizza Sprint » contenaient des clauses qui, par leur objet ou par leurs effets, limitaient la liberté et l'autonomie commerciale des franchisés de manière telle qu'elles étaient porteuses d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens L. 442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version applicable.

Par actes des 9, 13 et 15 mars 2017, le ministre de l'économie et des finances (ci-après « le Ministre » ou « le Ministre de l'économie ») a assigné les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France, Domino's Pizza France, Food Court Finance et Somainmag devant le tribunal de commerce de Rennes au visa des anciens articles L. 442-6, I, 2° et L. 442-6, I, 1° du code de commerce.

A cette instance sont volontairement intervenues, à titre principal, des sociétés franchisées et leurs gérants et à titre accessoire, la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [T] épouse [G].

Ces dernières ont sollicité en vain la jonction de l'ensemble des instances devant le tribunal de commerce de Rennes qui a donc statué séparément sur chacune d'elles.

Par jugement du 22 octobre 2019, rendu dans le cadre de l'action du Ministre, le tribunal de commerce de Rennes, s'agissant des clauses litigieuses soumises à son appréciation au visa de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version applicable, a notamment :

- prononcé la nullité des clauses relatives à l'intuitu personae,

- prononcé la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation,

Par un arrêt du 5 janvier 2022, rendu sur appel du jugement susvisé, la cour d'appel de Paris,

Pour les contrats de franchises versés aux débats, dont celui conclu avec la société Semper Fi, a notamment décidé que :

- seules les clauses intuitu personae et de résiliation dans les contrats antérieurs à 2012 sont annulées ;

- les clauses d'approvisionnement et de stocks minimum ne sont pas annulées mais il a été enjoint aux sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza, au titre d'un déséquilibre significatif, de cesser la pratique consistant à insérer au contrat de franchise une clause de stock minimum couplée à une clause d'approvisionnement formellement non exclusive mais permettant par des règles de contrôle d'imposer de fait un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif auprès d'un fournisseur appartenant au même groupe de sociétés que le franchiseur ;

- les clauses d'aménagement initial des points de vente, les clauses de résiliation des contrats postérieurs à 2012 n'ont pas été annulées ni sur le fondement du déséquilibre significatif ni sur le fondement de l'avantage sans contrepartie ;

- les pratiques relatives à la mise en œuvre du contrôle des points de vente, à la fixation des prix de vente, à la maîtrise des actions promotionnelles, à la facturation de la formation et autres frais accessoires, n'ont pas été jugées en elles-mêmes comme générant un déséquilibre significatif ou un avantage sans contrepartie.

Le 10 janvier 2022, un pourvoi n° R2210314 a été formé contre cet arrêt devant la Cour de cassation.

Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 24 octobre 2022, les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France demandent à la Cour de :

Vu les articles 2, 9, 30 et suivants, 122, 132 et 132 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1101, 1116, 1134, 1147, 1152, 1178, 1184, 1224, 1304 alinéa 1, 1353 alinéa 1 et 2044 du Code civil,

Vu les articles L. 110-4, L. 511-1 et suivants du Code de commerce,

Vu les articles L. 442-6, I, 1° et L. 442-6, I, 2° et L. 442-6, III (ancien) du Code de commerce,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

Il est demande à la Cour d'appel de PARIS de :

- DECLARER les sociétés Domino's Pizza France, FraMaPizz et Pizza Center France recevables et bien fondées en l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- DIRE ET JUGER irrecevable et mal fondé l'appel interjeté par la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [T], épouse [G], et en conséquence débouter la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [T], épouse [G], de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

Ce faisant :

- INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Rennes le 31 janvier 2020 en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables les demandes de FraMaPizz, Domino's Pizza France et Pizza Center France tendant à :

- rejeter la demande de jonction de la présente instance avec l'instance initiée par Mr le Ministre de l'Economie et des Finances (RG n° 2017 F 00131) ;

- constater que l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief a l'encontre des défenderesses dans la mesure ou- ce texte n'observe pas le principe de l’égalité des délits et des peines consacre- respectivement par (i) la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

- constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

- constater que les demandes fondées non pas avec une clause, mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société FraMaPizz ne saurait relever de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

- constater l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

Et

- prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de FraMaPizz et Domino's Pizza France ;

En conséquence :

- condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France :

- à rembourser à Semper Fi les redevances de franchise versées au titre des années 2017, 2018, 2019 et 2020 ;

- à verser à Semper Fi la somme de 297.099,80 € au titre de la perte de valeur de son fonds

- à verser à Monsieur [M] [G] la somme de 15.000 € et a Madame [O] [G] la somme de 15.000 € également, au titre du préjudice moral ;

En outre :

- ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l'article 1343-2 du Code civil ;

- condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France aux entiers dépense de l'instance, parmi lesquels seront compris l'ensemble des frais d'exécution (y compris les émoluments de l'huissier en application de l'article A. 444-32 du Code de commerce) ;

- condamné in solidum FraMaPizz et Domino's Pizza France à verser à la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] la somme de 10.000 € chacun au titre des dispositions de l'article 700 du CPC ;

Enfin :

- déboute les sociétés FraMaPizz, Domino's Pizza France et Pizza Center France du surplus de leurs demandes, notamment de celles relatives aux fins de non-recevoir, aux incidents soulevés, aux demandes reconventionnelles, ainsi qu'au titre de l'article 700 du CPC et aux dépense.

- CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Rennes le 31 janvier 2020 en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables les demandes de la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] tendant à :

- Déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre de l'Economie ;

- y faire droit en tous points ;

- Déclarer recevable et bien fondée leur intervention volontaire principale ;

- joindre les instances engagées par eux a l'instance enrôlée sous le n° 201700131

- annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France ;

- débouté la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] du surplus de leurs demandes.

Et, statuant a nouveau :

I/ sur les incidents :

- Constater que la société Dominos Pizza France n'a pas qualité pour défendre ;

- Constater que la société Pizza Center France n'a pas qualité pour défendre ;

En conséquence,

- Déclarer irrecevables les demandes formulées a l'encontre des sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France ;

- Constater que la demande d'annulation du contrat de franchise relatif au point de vente de [Localité 4] conclu le 17 janvier 2011 par la société Semper Fi avec la société FraMaPizz est prescrite, l'assignation ayant été délivrée le 4 mai 2016 ;

En conséquence,

- Déclarer irrecevables les demandes de la société Semper Fi, de Monsieur [M] [G] et de Madame [O] [G] fondées sur l'annulation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz relatif au point de vente de [Localité 4] ;

- Constater que Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] n'ont pas intérêt a agir, faute de préjudice direct, personnel et distinct ;

En conséquence,

- Déclarer irrecevables les demandes de Monsieur [M] [G] et de Madame [O] [G] ;

II/ sur ce, au fond :

II.A/ Sur les demandes des franchisés

A titre préalable, si par extraordinaire la Cour d'appel de Céans considérait que les sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France ont qualité pour défendre dans le cadre de la présente instance, il lui est demande de :

- Constater que les conditions de mise en cause de la responsabilité de la société mère pour les faits de sa filiale ne sont pas remplies et que le principe de l'autonomie de la personnalité morale fait, en toute hypothèse, obstacle a la mise en cause de la responsabilité de la société mère et / ou d'une autre société du groupe ;

En conséquence,

- Débouter les Franchises de leur demande de condamnation in solidum à l'encontre des sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France ;

II. A. 1/ Sur le rejet des demandes d'annulation des clauses sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce (déséquilibre significatif).

A titre principal,

- Constater que l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief a l'encontre des Concluantes dans la mesure ou- ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacre- respectivement par (i) la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par (ii) le Pacte civil relatif aux droits politiques ;

En conséquence,

- Débouter les franchises de leurs demandes formulées a ce titre ;

A titre subsidiaire,

- Constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2°du Code de commerce ;

En conséquence,

- Débouter les franchises de leurs demandes fondées sur L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

Si la Cour d'appel de Paris venait à considérer que la démonstration de l'existence d'une soumission ou tentative de soumission exigées par l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce est caractérisée :

- Constater que les demandes des franchises fondées non sur une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société FraMaPizz ne sauraient relever de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

- Constater que l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce en ce qui concerne :

- la clause d'aménagement des points de vente ;

- la clause d'approvisionnement ;

- la clause sur le stock minimum ;

- la prétendue surfacturation des actions commerciales ;

-  la prétendue facturation hors contrat du « forfait marketing », des « frais divers » et des « frais de port et de conditionnement » ;

- les modalités de contrôle des points de vente (contrôles qualité et hygiène, des tests de « client-mystère » et visites des animateurs réseau) ;

- le prétendu défaut de formation continue des franchises et la prétendue double facturation de la formation initiale ;

- la clause sur la gestion et administration du personnel ;

- la clause sur la gestion et l'administration de l'activité commerciale (outils informatiques);

- la clause sur le respect de l'évolution du réseau ;

- la clause sur l'information du franchiseur ;

- la clause de non-concurrence applicable pendant la durée du contrat de franchise ;

- la clause sur l'obligation d'assurances ;

- la clause sur l'obligation de confidentialité et discrétion ;

- la clause de non-concurrence post-contractuelle ;

En conséquence,

- Débouter les franchises de l'ensemble de leurs demandes fondées sur L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

II. A. 2/ Sur le rejet de la demande d'annulation du contrat de franchise,

A titre principal,

- Constater l'impossibilité pour la société Semper Fi de solliciter l'annulation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

En conséquence,

- Débouter la société Semper Fi de sa demande d'annulation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce ;

A titre subsidiaire,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans considérait que la société Semper Fi a la faculté de solliciter l'annulation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce :

- Constater que la demande d'annulation du contrat de franchise ne saurait uniquement résulter de la nullité de clauses de ce contrat, si nombreuses soient elles, faute pour la société Semper Fi de démontrer que ces clauses ont constitué la volonté impulsive et déterminante du consentement des parties à contracter ;

En conséquence,

- Débouter la société Semper Fi de sa demande d'annulation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz ;

II. A. 3/ Sur le rejet de la demande de résiliation du contrat de franchise,

- Constater l'absence de manquement de la société FraMaPizz dans le cadre de la transmission du savoir-faire et l'absence de disparition du savoir-faire Pizza Sprint ;

- Constater l'absence de manquement de la société FraMaPizz a ses obligations contractuelles ;

En conséquence,

- Débouter la société Semper Fi de sa demande de résiliation du contrat de franchise conclu avec la société FraMaPizz aux torts exclusifs de FraMaPizz ;

I.A. 4/ A toutes fins utiles sur le rejet des demandes des franchisées sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 1° du code de commerce (avantage sans contrepartie).

- Constater l'absence d'avantage sans contrepartie au sens de l'article L. 442-6, I, 1° du Code de commerce ;

En conséquence,

-Débouter les franchises de l'ensemble de leurs demandes fondées sur L. 442-6, I, 1° du Code de commerce ;

II. A. 5/ Sur le rejet des demandes financières des franchisés.

A titre préalable,

- Dire et juger que Domino's Pizza France est totalement étrangère aux faits qui fondent les griefs formulés par la Société franchisée et ses dirigeants, de sorte qu'aucune demande de condamnation « in solidum » ne peut être formulée à son encontre ;

En conséquence,

- Rejeter la demande de condamnation in solidum formulée à l'encontre de la société Domino's Pizza France ;

Dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour d'appel de Céans prononcerait l'annulation du Contrat de Franchise, il lui est demandé de :

- Considérer que les sommes dues par FraMaPizz au titre de la restitution en nature se compensent totalement avec les sommes dues par la société Semper Fi au titre de la restitution par équivalent ;

En conséquence,

- Prononcer la compensation entre les sommes que FraMaPizz et la société Semper Fi pourraient se devoir en exécution de l'arrêt a intervenir ;

Dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour d'appel de céans prononcerait la résiliation du Contrat de Franchise aux torts de FraMaPizz, il lui est demandé de :

- Considérer que la résiliation ne procède que pour l'avenir, c'est-à-dire pour la période postérieure à la date de résiliation du Contrat de Franchise ;

En conséquence,

- Débouter la société Semper Fi de sa demande de remboursement des sommes versées antérieurement a la date de résiliation du Contrat de Franchise ;

En toutes hypothèses :

- Constater que la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] ne justifient pas le fondement de leurs demandes d'indemnisation (nullité ou résiliation) ;

- Constater que la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] échouent dans la preuve d'une faute de FraMaPizz, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute invoquée et le préjudice allégué ;

En conséquence,

- Rejeter l'ensemble des demandes financières formulées par la société Semper Fi, Monsieur [M] [G] et Madame [O] [G] ;

II. B/ Sur les demandes reconventionnelles des concluantes

- Constater qu'en intentant la présente procédure, la société Semper Fi et Monsieur [M] [G] ont commis un abus manifeste du droit d'ester en justice qui doit être sanctionné ;

En conséquence,

- Condamner in solidum la société Semper Fi et Monsieur [M] [G] au paiement de la somme de 100.000 euros aux sociétés FraMaPizz et Pizza Center France au titre de la procédure abusive engagée a leur encontre et de la somme de 3.000 euros au titre d'une amende civile ;

II. C/ En toute hypothèse

- Rejeter l'ensemble des prétentions et demandes des franchisés non rejetées par le jugement dont il est fait appel du Tribunal de commerce de RENNES 31 janvier 2020 (RG n° 2016 F 00191) ;

- Condamner in solidum la société Semper Fi et Monsieur [M] [G] à verser a FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner in solidum la société Semper Fi et Monsieur [M] [G] a supporter les dépenses de l'instance, dont distraction au profit de la SCP AFG, aux offres de droit.

Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 7 octobre 2022, la société Semper Fi ainsi que M et Mme [G] demandent à la Cour de :

- Déclarer recevable et bien fondée l'appel incident de la Société Semper Fi et de M. et Mme [G] ;

Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- Déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [G] et de la Société Semper Fi tendant à :

- Déclarer recevable et bien fondée la demande du Ministre de l'Economie ;

- Y faire droit en tous points ;

- Déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire principale des concluants ;

- Joindre les instances engagées par les concluants a l'instance enrôlée sous le n° 2017F00131 ;

- Débouté la Société Semper Fi et M. et Mme [G] de leurs demandes ;

Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- Déclarer irrecevables les demandes de FraMaPizz, Domino's PIZZA France et Pizza Center France tendant à :

- Rejeter la demande de jonction de la présente instance avec l'instance initiée par M. le Ministre de l'Economie et des Finances (RG n° 2017 F 00131) ;

- Constater que l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief a l'encontre des défenderesses dans la mesure ou- ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacre- respectivement par (i) la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et (ii) par le pacte civil relatif aux droits politiques ;

- Constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce ;

- Constater que les demandes fondées non pas avec une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société FraMaPizz ne sauraient relever de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce ;

- Constater l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce ;

- Débouté les sociétés FraMaPizz, Domino's Pizza France et Pizza Center France de leurs demandes ;

- Constaté la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de FraMaPizz et Domino's Pizza France ;

Statuant à nouveau, en conséquence :

- Prononcer l'annulation de chacune des clauses affectées d'un déséquilibre significatif, au sens de l'article L. 442-6 I 2° du Code de commerce ;

- Constater que l'annulation de l'ensemble de ces clauses vident les contrats de leur substance et, en conséquence, annuler les contrats de franchise,

A défaut,

- Prononcer leur résiliation aux torts exclusifs de la Société FraMaPizz ;

- Débouter les sociétés Pizza Center France, FraMaPizz, Domino's Pizza France, Food Court Finances et Somainmag de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause :

(1) Concernant la Société Semper Fi.

Au titre de la restitution du droit d'entrée

- Condamner in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France a lui verser la somme de 10.000 €,

Au titre de la restitution des redevances,

- Condamner in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France a lui verser la somme de 126.735 €,

Au titre de pertes de marge sur les approvisionnements,

- Condamner in solidum les Socie'te's Pizza Center France, FraMaPizz et Domino's Pizza France a lui verser la somme de 261.351 €,

Au titre des prestations de marketing,

- Condamner in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France a lui verser les sommes de 13.500 € et 41.589 €,

Au titre de la perte de la valeur du fonds,

- Condamner in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France a lui verser la somme de 569.441 €, ou, subsidiairement, la somme de 300 083 € (2) et (3) Concernant M et Mme [G]

Au titre de la perte des apports,

- Condamner in solidum les Socie'te's FraMaPizz et Domino's Pizza France a verser a M. [G] la somme de 75.000 €,

Au titre de la perte de revenus,

- Condamner in solidum les Socie'te's FraMaPizz et Domino's Pizza France a verser a M. [G] la somme de 187.356 €,

- Condamner in solidum les Socie'te's FraMaPizz et Domino's Pizza France a verser a Mme [G] la somme de 48.845 €,

Au titre du préjudice moral

- Condamner in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France a verser a M. et Mme [G] la somme de 30.000 €

- Ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément a l'article 1343-2 du Code civil, a dater de l'assignation ;

-Condamner in solidum les Socie'te's Pizza Center France, FraMaPizz et Domino's Pizza France a verser a chacun des concluants la somme de 50.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-Les condamner in solidum aux dépenses, parmi lesquels seront compris l'ensemble des frais d'exécution (y compris les émoluments de l'huissier en application de l'article A. 444-32 du Code de commerce).

L'ordonnance de clôture a été rendue le 08 novembre 2022.

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

I- Sur la qualité à défendre des sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France

Les sociétés Pizz Center France et Domino's Pizza, au visa des articles 32 et 122 du code de procédure civile, font valoir qu'elles n'ont pas qualité pour se défendre face aux demandes d'annulation ou de résiliation du contrat de franchise et des demandes indemnitaires subséquentes, en sorte que les prétentions formulées à leur encontre sont irrecevables. Elles soutiennent qu'elle sont totalement étrangères aux faits qui fondent les griefs des franchisés, puisqu'elles n'ont pas conçu les contrats litigieux, ni participé aux discussions qui ont précédé leur conclusion, ni apposé leur signature sur ces contrats et qu'elles n'ont accompli aucune des actions propres à permettre de leur imputer un rôle dans la violation de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, ni même avoir eu un 'rôle actif- directement ou indirectement aux manquements contractuels allégués. Elles rappellent que le principe d'autonomie des personnes morales membres d'un même groupe ne cède que s'il est démontré qu'il n'existe en réalité qu'une seule personne morale et/ou une confusion des patrimoines.

Réponse de la Cour,

Selon l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

Les sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France ne soulèvent aucun moyen relatif à leur droit d'agir à l'encontre des prétentions émises par les franchisés à leur égard sur le fondement d'une part des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce interdisant certaines pratiques restrictives ou d'autre part d'une responsabilité dans les manquements contractuels invoqués, c'est-à- dire à leur qualité à se défendre à une telle action.

En effet les moyens invoqués par les Domino's Pizza et Pizza Center France ne tendent en réalité qu'à critiquer le bien-fondé des prétentions des franchisés, à savoir si les éléments constitutifs des pratiques restrictives alléguées ou des manquements contractuels invoqués sont caractérisés à leur égard.

Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à défendre des sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France sera rejetée.

Le jugement sera confirmé sur ce point sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes du franchisé et de M et Mme [G] en ce qu'elles tendent à annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France.

II-Sur la demande d'annulation du contrat de franchise

La société franchisée a été déboutée de sa demande d'annulation du contrat de franchise par le tribunal de commerce qui, se référant à sa décision rendue dans l'instance initiée par le ministre de l’Économie, a considéré que la nullité des seules clauses relatives à l'intuitu personae et aux modalités de résiliation et cession du contrat au titre du déséquilibre significatif ne permet pas de vider de sa substance le contrat.

Au titre de leur appel incident, la société Semper Fi et M et Mme [G] demandent l'infirmation du jugement sur ce point et sollicitent de la Cour aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions de :

- Prononcer l'annulation de chacune des clauses affectées d'un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce

- Constater que l'annulation de l'ensemble de ces clauses vident les contrats de leur substance et, en conséquence, annuler les contrats de franchise,

Ils font valoir pour l'essentiel d'une part que l'impossibilité pratique pour eux de fixer librement leurs prix de vente justifie le prononcé de la nullité du contrat de franchise (point 87 des conclusions) et d'autre part qu'un grand nombre de clauses du contrat de franchise doivent être annulées sur le fondement du déséquilibre significatif ou de l'avantage sans contrepartie et que l'annulation de toutes ces clauses vidant le contrat de sa substance, celui-ci doit être annulé.

A cet effet, il est soutenu que sont nulles les clauses suivantes du contrat :

- la clause d'intuitu personae,

- la clause de résiliation et la clause relative à la cessation du contrat de franchise,

- la clause relative à l'aménagement du point de vente des franchisés,

- la clause d'approvisionnement exclusif,

- la clause imposant de détenir un stock minimum,

- la mise en œuvre du contrôle des points de vente,

- la fixation des prix de vente et la maîtrise des actions promotionnelles par FraMaPizz,

- les facturations de frais accessoires non justifiées.

En réplique, les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza relèvent d'abord que l'article L. 442-6, I , 2° sur lequel la société franchisée fonde sa demande de nullité de contrat offre uniquement la possibilité pour un plaideur d'obtenir l'annulation des clauses générant un déséquilibre significatif et non l'annulation mécanique de l'intégralité du contrat.

Ensuite, elles soutiennent que l'action de la société franchisée est prescrite en ce que le point de départ de la prescription est la conclusion du contrat de franchise en application de l'article 2224 du code civil.

Sur le fond, elles font essentiellement valoir que les conditions d'application de l'article L. 442-6, I 2° précité ne sont pas réunies pour les clauses et pratiques litigieuses, d'une part l'élément de soumission n'est pas démontré dans le cadre du contrat de franchise et d'autre part aucun déséquilibre significatif n'est démontré dans les droits et obligations des parties pour aucune des clauses ou pratiques litigieuses. Elles soutiennent que les conditions d'application de l'article L. 442-6, I, 1° ne sont pas davantage remplies. Elles ajoutent qu'en toute hypothèse, il n'est pas démontré que les clauses litigieuses aient été essentielles et déterminantes du consentement de la société cocontractante au contrat de franchise.

Réponse de la Cour,

*sur la prescription de l'action en annulation

Dans le dernier état de ses écritures, la société Semper Fi sollicite l'annulation du contrat de franchise, non plus au titre d'un vice du consentement, mais en ce que plusieurs clauses contractuelles doivent être annulées au titre de pratiques restrictives de concurrence vidant ainsi le contrat de sa substance (conclusions points 200 et suivants).

S'agissant de la durée de la prescription, celle-ci est fixée à cinq années par l'article L. 110-4 du code de commerce.

S'agissant de la détermination du point de départ du délai de prescription, il y a lieu d'appliquer l'article 2224 du code civil qui dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Comme le font valoir à juste titre les sociétés appelantes, le point de départ de l'action en nullité d'un contrat est la date de conclusion du contrat. La société Semper Fi n'apporte pas d'élément précis la concernant permettant d'établir qu'elle n'était pas en mesure d'apprécier à cette date la validité des clauses contractuelles dont elle réclame l'annulation, étant précisé qu'elle fait valoir un certain nombre de pratiques dont elle aurait pris la mesure avec l'enquête diligentée par le ministre de l’Économie mais qui ne se rattachent à aucune clause particulière du contrat (les prix, contrôle des points de vente, frais...)

Dès lors l'action en annulation du contrat de franchise conclu le 17 janvier 2011et introduite le 4 mai 2016 devant le tribunal est prescrite et partant irrecevable.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

III-Sur les manquements au titre du contrat de franchise.

Pour prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts de la société FraMaPizz et la condamner in solidum avec la société Domino's Pizza France à payer diverses indemnités, le tribunal a retenu qu'à compter de 2017, à la suite du rachat de la société FraMaPizz par Domino's Pizza France, le savoir-faire n'a plus été transmis, voire est devenu inexistant.

La société franchisée soutient que la société FraMaPizz a été défaillante dans l'exécution de ses obligations et notamment :

- n'a pas respecté ni garantie l'indépendance des franchisés dans la gestion de leurs activités,

- n'a pas assuré son obligation d'assistance,

- a été défaillante dans la transmission et l'actualisation de son savoir-faire,

- a laissé périr l'enseigne,

- a surfacturé de nombreux frais injustifiés.

Elle fait valoir que l'ensemble de ces manquements et pas seulement ceux postérieurs à la cession - engage la responsabilité contractuelle de la société FraMaPizz, et sollicite la résiliation du contrat de franchise à ses torts exclusifs outre des dommages et intérêts en réparation des préjudices causés par ces fautes. Soutenant que la société Domino's Pizza France a contribué de façon indirecte à la réalisation du dommage, il est sollicité sa condamnation in solidum au paiement des sommes réclamées en réparation des préjudices invoqués.

La société FraMaPizz conteste l'ensemble des manquements allégués. Elle fait valoir pour l'essentiel qu'elle a respecté ses obligations de franchiseur, notamment de transmission du savoir-faire, et tout particulièrement après le rachat par la société Domino's Pizza France, la poursuite du contrat de franchise Sprint Pizza ayant été assurée jusqu'à son terme.

La société Domino's Pizza France conteste toute faute de nature à engager sa responsabilité, et en particulier les griefs relatifs à l'opération d'acquisition. Elle fait notamment valoir qu'elle est totalement étrangère aux faits qui fondent les griefs de la société franchisée et de son gérant et met en avant le principe de l'autonomie des personnes morales.

1- Sur grief tiré du respect de l'indépendance du franchisé dans la gestion de ses activités.

La société franchisée et ses dirigeants dénoncent, en divers points de leurs dernières conclusions, des pratiques du franchiseur FraMaPizz limitant de manière abusive leurs facultés à déterminer seuls la gestion de leur activité à savoir la fixation des prix, la maîtrise des actions promotionnelles, l'aménagement et le contrôle du point de vente.

Cependant la Cour constate que la société franchisée et ses dirigeants n'invoquent ces pratiques qu'au soutien de leur demande d'annulation du contrat de franchise et qu'elles ne sont explicitement alléguées ni au titre de la résiliation du contrat de franchise (points 212 à 251 des conclusions), ni au titre de l'indemnisation d'un préjudice particulier (points 256 et suivants des conclusions).

Aussi l'examen de la Cour se limitera au grief tiré de l'obligation d'approvisionnement, seul celui-ci est spécifiquement invoqué au titre de la demande de résiliation du contrat et de l'indemnisation d'un préjudice particulier de pertes sur marge.

*sur l'obligation d'approvisionnement,

La société franchisée et ses dirigeants font principalement valoir que le réseau Pizza Sprint fonctionnait avec une centrale d'achat la société Pizza Center exerçant sous l'enseigne Logis Pizza, conçue au seul profit du groupe franchiseur au détriment du franchisé. Ils expliquent que le nom et l'existence de cette centrale d'achat ne figurait ni dans le DIP ni dans le contrat de franchise dans lequel il était seulement indiqué que le franchiseur sélectionnait chaque année des listes de produits et de fournisseurs. Ils relèvent qu'en réalité, seule Logis Pizza était retenue et que le franchisé de fait été tenu de s'approvisionner auprès de cette société, au travers de divers contrôle ou menace de résiliation du contrat de la part du franchiseur. Or, ils soutiennent que cette centrale d'achat fonctionnait "à l'envers", en ce qu’au lieu de permettre au franchisé de bénéficier d'économies d'échelle liées au groupement des achats, il était au contraire contraint de s'approvisionner à des prix 40 % supérieurs au niveau du marché, remettant en cause la rentabilité du point de vente. Ils font observer que cette pratique confinait à la fraude concernant le pâton, indispensable à la fabrication des pizzas.

Les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza répliquent pour l'essentiel d'une part qu'il ne pèse aucune obligation d'approvisionnement exclusif sur la société franchisée auprès des fournisseurs référencés par le franchiseur. Elles précisent que la clause d'approvisionnement du contrat de franchise offre la possibilité au franchisé, s'il le souhaite de s'approvisionner auprès de fournisseur extérieur sous réserve de respecter la procédure contractuellement fixée, faculté que le franchisé a fait le choix de ne pas mettre en œuvre pendant de nombreuses années. D'autre part, elles soutiennent que les prix pratiqués par Pizza Center France étaient cohérents au regard des prix du marché sans pratique de marge excessive et qu'il n'est versé aux débats aucun élément de nature à prouver l'existence de prix supérieurs pratiqués par Pizza Center France ou Transgourmet, outre que, pour qu'une telle comparaison soit possible, il conviendrait de comparer des produits précisément identifiés et qui seraient réellement comparables. Elles précisent qu'il a bien existé une recette de pâton spécifique fourni à titre exclusif par grain d'orgel à FraMaPizz jusqu'à l'année 2017.

Réponse de la Cour,

Le contrat de franchise stipule au titre de l'approvisionnement que :

Au chapitre 6.2 Assistance technique et commerciale communication du savoir-faire.

(...)

Article 6.2.4 Gestion et administration de l'activité commerciale.

(...)

- Stock

Le Franchisé s'engage à détenir en permanence un stock minimum d'encours de fabrication disponible d'une semaine d'exploitation environ soit pour une valeur minimum comprise entre 3.000 et 5.000 HT selon l'évaluation du Franchiseur ;

Approvisionnement,

Le franchiseur sélectionne, chaque année, des listes de produits et de fournisseurs correspondants aux normes de qualité et de traçabilité du réseau, décrites dans la bible.

Le Franchisé s'engage à respecter les critères définis.

Il est cependant libre de s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs, dès lors que les produits intègrent l'ensemble des critères définis dans la bible et notamment :

- les caractéristiques de qualité et de traçabilité fixées,

- les caractéristiques de conservation et de stockage,

- les compositions qui doivent être strictement identiques à celles visée dans la Bible,

- le fait que les fabricants des produits qui doivent être les mêmes que ceux éventuellement visés dans la Bible, le Franchisé conservant de s'approvisionner auprès du fournisseur revendeur de son choix si l'ensemble des critères de la Bible sont respectés

Le franchisé s'interdit expressément de s'approvisionner auprès de fournisseurs n'assurant pas le transport des produits sous température dirigée.

Le Franchisé s'engage à communiquer et tenir à disposition du Franchiseur les fiches techniques des produits qu'il achète, ainsi que les conditions de vente applicables.

La Cour relève que la clause d'approvisionnement telle que rédigée ne prévoit pas un approvisionnement exclusif. Il est organisé une sélection de produit par le franchiseur suivant des normes de qualité et de traçabilité définies dans la « bible que le franchisé s'engage à respecter soit en s'approvisionnant chez les fournisseurs référencés par le franchiseur, soit auprès du fournisseur choisi par le franchisé à condition de respecter les critères définis dans la bible, et de communiquer une fiche technique au franchiseur ».

Outre le fait que la clause d'approvisionnement insérée au contrat ne prévoit pas expressément un approvisionnement exclusif, il y a lieu de rappeler que le DIP ne contenait pas non plus d'information particulière sur l'organisation de l'approvisionnement, ni sur l'existence de la société Pizza Center France. Il n'apparaît pas que le candidat à la franchise disposait de la Bible avant la signature du contrat de franchise.

Or, il ressort des éléments versés aux débats par la société franchisée, notamment :

- des auditions par la DGCCRF de franchisés (pièce PC n° 50),

- des auditions du responsable opérationnel de la société Pizza Center France (pièce DGCCRF n° 23 visées dans les conclusions point n° 17 et extraits repris dans l'arrêt du 5 janvier 2022 versé aux débats pièce n° 131)

- des échanges de courriels au sein du réseau entre franchisés et franchiseur (pièce PC n° 3,19,20,25)

Et des rapports de visite des animateurs cités par la société FraMaPizz dans ses conclusions (points 196 et suivants, pièces PC 3.1 à 3.7)

Que contrairement à ce que laissait présager la rédaction de la clause d'approvisionnement, en pratique, la société Pizza Center France était non seulement le seul fournisseur référencé par le franchiseur mais également les franchisés devaient s'approvisionner exclusivement ou quasi-exclusivement auprès de ce fournisseur qui était en lien direct avec le franchiseur pour appartenir au même groupe,

Que l'exclusivité de l'approvisionnement n'était pas un libre choix de la part du franchisé mais le résultat d'une forte pression, voir de menace de résiliation, de la part du franchiseur, notamment M. [S], et mise en œuvre par un contrôle étroit des animateurs de réseau chargés principalement de cette mission,

Que l'approvisionnement théoriquement 'libre- auprès de fournisseurs autres que Logis Pizza, se heurtait en réalité à des critères dissuasifs pour les franchisés, à savoir des fiches techniques des produits achetés et conditions de vente applicables à transmettre pour validation préalable du franchiseur et quasiment jamais obtenue ainsi que des contrôles visuels des animateurs réseau et des alertes informatiques en cas d'absence de commande par Logis Pizza.

Il n'est en outre pas démontré de la part de la société FraMaPizz que les produits sélectionnés par le fournisseur Pizza Center, notamment les produits alimentaires destinés à la confection des pizzas, avaient une spécificité au regard du savoir-faire Pizza Sprint ou répondaient à des critères de qualité ou de sécurité particuliers. Ainsi, il ressort des pièces versées aux débats par le franchisé (pièces PC n° 25, 26, 27, 98, 99, 101) que le pâton, indispensable pour la fabrication de pizza, ne pouvait être acheté ailleurs que chez Logis Pizza au motif d'une recette spécifique dont la réalité et l'utilité pour le savoir-faire du réseau n'ont pas été concrètement démontrés par les sociétés FraMaPizz et Pizza Center France (pièces PC n° 3.14).

La société franchisée établit également (pièces PC n° 22 et 23) qu'elle était astreinte de faire une commande minimum de 20 colis par famille de produits secs/surgelés et que si des commandes n'étaient pas suffisantes le franchisé était relancé par Logis Pizza. Par ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté par la société Pizza Center, que celle-ci était la seule bénéficiaire des remises commerciales négociées sur la base d'engagements de volume d'achat et de mise en avant des produits.

De plus, les tableaux comparatifs de prix établis par les franchisés (pièce PC n° 26, 74 à 80, 102) et de ratios de marges (pièce PC n° 24- enquête DGCCRF) mettent en évidence que :

- les marges (opérationnelle, brute et nette) réalisées par la société Pizza Center sur les produits vendus au réseau Pizza Sprint étaient substantiellement supérieures à celles réalisées par d'autres entreprises intervenant dans le même secteur d'activité,

- des prix, notamment des produits alimentaires pour la confection des pizzas tels que le pâton, plus élevés sur toute la période 2015 à octobre 2017, que ceux pratiqués par d'autres acteurs équivalents sur le marché ou Transgourmet à compter de mai 2018,

Enfin, il ressort des pièces versées aux débats par le franchisé, qu'il était soumis par la tête de réseau, d'une part à une très forte incitation à suivre une politique tarifaire de vente unique dans le réseau (pièces PC n° 28 , n° 29 à 40, 104 et 105, pièce FraMaPizz n° 5 Mail de M. [G]) d'autre part à l'utilisation d'un système informatique ne permettant pas d'établir lui-même ses prix (article 6.2.4 du contrat de franchise, pièce PC n° 41 et 50 du franchisé), contraignant davantage la gestion commerciale de son point de vente.

Certes les sociétés FraMaPizz et Pizza Center France produisent des études et relevés de prix (pièce PC n° 10, 3.11 et 3.12) démontrant que les pièces produites par le franchisé ne permettent pas d'établir des prix pratiqués par Logis Pizza supérieurs de 30 % à 40 % à celui du marché. Néanmoins, il ressort des éléments du débat que la stratégie d'approvisionnement exclusif ou quasi-exclusif auprès de Logis Pizza menée par la tête de réseau permettait de générer une rentabilité certaine de la société Pizza Center, filiale du groupe Pizza Sprint, sans pour autant qu'il soit sérieusement démontré que cette politique produise un avantage concurrentiel pour les franchisés en termes de prix d'achat ou soit nécessaire à la préservation de l'identité et la réputation du réseau.

L'ensemble de ces éléments, non seulement a été jugé par la Cour de céans dans son arrêt du 5 janvier 2022 comme caractérisant une pratique restrictive de concurrence créant un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations du franchisé, mais en outre dans la présente situation de la société Semper Fi constitue aussi une exécution déloyale du contrat de concert avec la société Pizza Center France de nature à engager leur responsabilité contractuelle à l'égard de la société Semper Fi.

2- Sur le grief tiré du non-respect des obligations relatives à la transmission et actualisation du savoir-faire, l'assistance et le maintien de l'importance du réseau.

La société franchisée et ses dirigeants font principalement valoir qu'à la suite de l'acquisition de l'ensemble des titres composant le capital social des sociétés FraMaPizz et Pizza Center par la société Domino's Pizza France le 26 janvier 2016, l'intention de cette dernière était à court terme la conversion du réseau Sprint Pizza à l'enseigne Domino's Pizza. Selon les franchisés, bien que l'annonce ait été faite de la poursuite des contrats de franchise pour ceux qui ne souhaitaient pas rejoindre le réseau concurrent Domino's Pizza, la stratégie n'en demeurait pas moins de faire disparaître le réseau Sprint Pizza. Ils relèvent à cet effet un nombre restreint d'animateurs de réseau sans expérience suffisante, l'absence de plan marketing ou de projet de développement de la communication sur les réseaux sociaux, un savoir-faire ne faisant plus l'objet d'une actualisation, à savoir l'évolution du site internet, la diversification des modes de distribution ou la mise au point de nouvelles recettes, confinant à sa disparition. Ils observent que le franchiseur ne s'est plus employé à développer son réseau et que celui-ci est passé de janvier 2016 à juillet 2018 de 89 magasins à 9. Ils ajoutent qu'ils ont rencontré des difficultés logistiques à la suite de la reprise de la centrale d'achat par la société Transgourmet et qu'ils n'ont plus bénéficié de l'assistance du franchiseur. Ils en déduisent que le franchiseur a ainsi manqué à ses obligations contractuelles de nature à engager sa responsabilité.

Les sociétés Les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza répliquent pour l'essentiel que le franchiseur a bien respecté ses obligations contractuelles jusqu'à la cessation des contrats de franchise, à savoir l'obligation de formation continue, l'obligation de marketing/communication par diverses campagnes de publicités, l'obligation d'assistance telle que l'organisation de comité de pilotage, la possibilité de commander en ligne et le maintien de l'usage de l'enseigne et des signes distinctifs. Elles soutiennent que le savoir-faire n'a pas disparu, qu'il a toujours été transmis et que le nombre de points de vente composant le réseau de franchise est indifférent au savoir-faire. En revanche elles prétendent que le franchiseur n'est pas tenu à une obligation d'actualisation du savoir-faire ni de maintenir l'importance du réseau. Elles insistent sur le fait qu'aucun changement d'enseigne n'a été imposé aux franchisés, que les conversions constatées se sont toujours faites sur la base du volontariat.

Réponse de la Cour,

Comme l'expose le franchiseur lui-même dans ses conclusions (points 160 et suivants), la franchise répond à un schéma économique particulier. Elle repose sur un savoir-faire, développé par les investissements du franchiseur et dont il est proposé la réitération à des partenaires indépendants-les franchisés- avec lesquels il va collaborer pour créer un réseau de franchise. Par la conclusion du contrat de franchise permettant la transmission du savoir-faire du franchiseur, son assistance, et l'utilisation de son enseigne à laquelle est déjà attachée une clientèle, le franchisé va bénéficier d'un avantage concurrentiel.

En l'espèce, la Cour constate que dans le préambule du contrat signé par la société Semper Fi, il est expressément rappelé que le franchiseur a mis au point un savoir-faire et une méthode spécifique de fabrication, de commercialisation, de distribution et de livraison de pizzas à domicile expérimentée avec succès depuis 1992 et que le franchisé a conclu le contrat, convaincu de l'originalité et de l'intérêt de ce savoir-faire et de l'expérience du franchiseur. L'objet du contrat de franchise stipule que le franchiseur concède au franchisé, qui l'accepte, le droit d'exploiter la franchise Pizza Sprint dans le cadre de son activité de fabrication, de vente à emporter et de livraison à domicile de pizzas, le droit d'utiliser les signes distinctifs et le savoir-faire développés par le franchiseur et de bénéficier de son assistance commerciale et technique. Ainsi le franchiseur s'est engagé à assurer une formation non seulement initiale mais aussi continue (article 6.2.2.1) notamment sur les méthodes commerciales et marketing nouveaux produits en établissant chaque année civile un calendrier précisant les dates et objets des formations retenues et auxquelles doivent assister le franchisé ou ses collaborateurs. En contrepartie de l'accès au réseau, et de la mise à disposition de savoir-faire et de l'assistance apportée par le franchiseur, le franchisé doit s'acquitter d'un droit d'entrée et des redevances mensuelles (article 6.6).

Comme l'a relevé le tribunal, le franchiseur s'est en outre expressément engagé à faire évoluer la franchise. En effet l'article 6.3 intitulé « Respect de l'évolution du réseau- stipule que :

Le franchisé sera tenu de respecter la cohésion et l'image du réseau à l'égard de la clientèle.

A cet égard, et compte tenu de l'obligation que s'impose le Franchiseur de faire évoluer la Franchise, le Franchisé s'engage à se conformer aux directives et instructions qui seront nécessaires à cette évolution, et notamment à modifier la présentation et le graphisme des signes distinctifs et /ou les conditions d'exercice de son activité »

Il s'ensuit que par la signature de ce contrat et du paiement des redevances, le franchisé entend bien bénéficier pour son activité d'un avantage concurrentiel tiré du savoir-faire et de l'expérience du franchiseur ainsi que de la notoriété du réseau. Aussi, tant le savoir-faire que la notoriété du réseau, sont des moyens mis au service de la constitution et de la préservation de cet avantage concurrentiel. Il appartient donc au franchiseur d'actualiser ce savoir-faire aux évolutions du secteur d'activité considéré et de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer de l'image et de la notoriété du réseau.

Or, à la suite de l'acquisition par la société Domino's France des titres composant le capital social des sociétés FraMaPizz et Pizza Center France, la Cour relève les éléments suivants :

Au moment de cette acquisition en janvier 2016, le projet à très court terme était la conversion du réseau Pizza Sprint à l'enseigne Domino's Pizza (pièces franchisé PC n° 61, 63, 64). Aux termes du contrat de franchise, le franchiseur Pizza Sprint n'avait aucune obligation d'information du franchisé qui n'avait effectivement pas été mis au courant de ce projet de cession et des conséquences sur le devenir du réseau, alors même que le contrat de franchise de la société Semper Fi signé pour une durée de 10 années ne devait se terminer qu'en juillet 2021. Le franchisé a été mis devant le fait accompli lors d'un séminaire du 13 octobre 2015 qui ne comportait pas cette information à l'ordre du jour (pièce franchisé PC n° 58 - invitation au séminaire du 13 octobre 2015). Alors que le franchisé n'avait aucune information juridique et financière concrète sur le devenir de son contrat de franchise Pizza Sprint et de son activité (pièce PC n° 50), la conversion de l'enseigne était confirmée pour février 2016 par un courrier de M. [S] le 23 octobre 2015, en ces termes :

« Il s'agit désormais de travailler ensemble à tourner la page Pizza Sprint (...) Des dates précises vont maintenant rythmer le passage à la nouvelle enseigne Domino's (...) Enfin, au mois de février 2016, l'ensemble des points de vente en propre Pizza Sprint basculeront sous enseigne Domino's Pizza. Ces points de vente deviendront alors vos centres de formation en support supplémentaire à l'académie Domino's Pizza située à [Localité 7]. »

Le site AC Franchise, dans son article consacré à la franchise Pizza Sprint indiquait (PC franchisé n° 63) :

« La franchise Pizza Sprint, née en 1998, est une enseigne de pizza en livraison et à emporter qui a connu un développement conséquent. De 3 restaurants Pizza Sprint en 1998, le réseau est passé à 90 points de vente Pizza Sprint en 2015.

L’enseigne a été rachetée par Domino s Pizza fin 2015 et les points de vente passeront sous enseigne Domino s pour la plupart. Le 5 février 2016, l’enseigne nous a écrit "L’enseigne Pizza Sprint ne développe plus son réseau, car en effet elle fusionne et est absorbée par Domino s Pizza". C’est donc auprès de Domino s Pizza que vous pouvez candidater désormais.

Le site Pizza Sprint renvoyait les internautes vers le site Domino s Pizza (PC franchisé n° 64).

Au motif avancé de conditions financières peu attractives au sein du réseau Domino's Pizza, un certain nombre de franchisés Pizza Sprint, dont la société Semper Fi, n'ont pas souhaité la conversion de leur enseigne et exigé la poursuite de leur contrat de franchise Pizza Sprint en cours. Du fait de ce rachat, les clauses contractuelles ne permettaient pas non plus aux franchisés de résilier par anticipation leur contrat sans pénalité et ils étaient tenus à une obligation de non-concurrence post-contractuelle.

La poursuite de la société franchiseur FraMaPizz a finalement été confirmée en mars 2016 avec la présentation d'un nouvel organigramme et interlocuteur à la suite des inquiétudes manifestées par les franchisés n'ayant pas souhaité rejoindre le réseau Domino's Pizza, dont M. [G] (pièce franchiseur n° 5).

Certes, la société FraMaPizz produit aux débats divers documents (pièces PC, 4.9 à 4.29, 5.1 à 5.34) attestant du maintien d'une présence opérationnelle minimum du franchiseur pour assurer :

- des audits de performance, des examens annuels des chiffres du réseau, et la communication au réseau de ces analyses (notamment PC n° 5.2, 5.7, 5.8),

- des synthèses des visites des clients mystères (PC n° 5.3, 5.9, 5.16, 5.31),

- la préparation et tenue régulière de comité de pilotage Copil (PC n° 5.11, 5.12, 5.18), - de la tenue d'un site internet et de l'animation d'une page facebook (PC n° 4.10, 4.11, 4.21),

En revanche, la Cour constate, notamment à la lecture des bilans annuels (notamment PC n° 5.18,5.32) et des comptes-rendus de Copil, que sur la période 2016 à 2020 :

- les actions marketing se sont limitées chaque année à des campagnes nationales de Pizzas spéciales suivant le même dispositif d'action (guide campagne PC n° 4.9 et suivantes) et de format publicitaire standard (affiche en magasin, e-mailing, une page Facebook et site WEB)

- une newsletter en 2018,

- en quatre années, il est noté l'organisation de trois jeux et loterie, d'un menu spécial coupe du monde et d'un partenariat "planète sauvage" ou "spectacle Roméo et Juliette",

- d'un programme de fidélisation de commande en ligne,

- aucune évolution de la carte, seul le bilan de 2018 faisant état de "l'intégration d'une nouvelle bouteille d'eau gazeuse",

- l'animation sur les réseaux sociaux s'est limitée à un site internet et une page Facebook,

Au titre de la formation continue, il n'est présenté aucun plan annuel de formation tel que prévu au contrat de franchise. Il est justifié d'une formation "logiciel Talc" en 2017 (PC n° 5.13) et d'un courriel évoquant l'accueil au sein d'un magasin en 2018 d'une personne pour une formation "accueil client et prise de commande Talc" (pièce PC n° 5.27).

La société franchisée fait observer, sans être sérieusement contredite, que le site internet Pizza Sprint n'a pas évolué depuis 2015, que le franchiseur n'a pas cherché à faire évoluer ses méthodes commerciales, tels que des plans de communication sur les réseaux sociaux, le développement d'une application pour passer des commandes en ligne sur un téléphone, le renouvellement des produits et des recettes, ou toute autre adaptation aux nouvelles attentes de la clientèle depuis 2016, et ce en comparaison de ce qui a été développé sous l'enseigne Domino's Pizza (PC n° 110).

A compter de 2018, les franchisés ont rencontré des difficultés pour l'assistance commerciale et technique de la part du franchiseur (PC n° 69, n° 123 et 124, Mail de M. [G]). Le réseau n'était plus référencé courant 2020 (PC n° 123).

Enfin, il n'est pas contesté que le réseau Pizza Sprint qui comptait 89 magasins en 2016, a été réduit à 35 magasins en 2017, puis à 11 magasins en juillet 2018, puis à 4 magasins en 2020. Si le franchiseur fait état de ce que le franchisé a continué à exploiter, jusqu'à la cessation du contrat, son magasin sous l'enseigne et les signes distinctifs Pizza Sprint, force est de constater que ces signes de ralliements de la clientèle ne pouvaient avoir qu'un impact commercial réduit au regard de la notoriété déclinante voir "moribonde" du réseau dès l'année 2016.

Il ressort de l'ensemble de ces constatations, qu’à compter de l'année 2016, le franchiseur a manqué à ses obligations contractuelles en ne fournissant plus d'effort d'actualisation de son savoir-faire, en ne respectant pas son obligation de formation et d'assistance sur les méthodes commerciales et marketing nouveaux produits, et en contribuant à la dégradation de la notoriété du réseau.

Ces manquements caractérisant une inexécution partielle du contrat de franchise sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchiseur.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

3- Sur la responsabilité de la société Domino's Pizza France :

Dans sa documentation financière semestrielle pour la période allant jusqu'au 1er janvier 2017 (pièce franchisé PC n° 65), la société Domino's Pizza annonçait que la fin de la conversion du réseau Pizza Sprint était attendue à la fin de l'année fiscale 2017, soit le 30 juin 2017. Dans le rapport de gestion au président DPF 2018 (Pièce franchisé PC n° 109), il est indiqué :

- Au titre de l'exercice en cours qui sera clos le 30 juin 2019, nous prévoyons de continuer notre progression tant en nombre de points de vente qu'en chiffre d'affaires par magasin. Nous prévoyons également de continuer la conversion des magasins sous enseigne Pizza Sprint sous l'enseigne Domino's Pizza.

- Il ressort du rapport du commissaire aux comptes sur les comptes DPF 2018 (pièce franchisé PC n° 92) que la majeure partie des activités des sociétés FraMaPizz et Pizza Center France a été transférée à la société Domino's Pizza France après leur acquisition.

Aussi, de par sa propre stratégie de développement, la société Domino's Pizza France a contribué aux manquements contractuels de la société franchiseur FraMaPizz et des préjudices en découlant à compter de 2016.

Ces agissements sont de nature à engager la responsabilité extracontractuelle de la société Domino's Pizza France qui sera condamnée in solidum avec la société FraMaPizz à la réparation de ces préjudices.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

IV- Sur les demandes indemnitaires de la société Semper Fi.

1- Sur la demande au titre de la restitution du droit d'entrée.

La société franchisée réclame la somme de 10 000 euros au titre du remboursement du droit d'entrée.

L'annulation du contrat de franchise n'ayant pas été prononcée, et aucun manquement n'ayant été retenu au titre de l'accès proprement dit au réseau, la société franchisée sera déboutée de cette demande et le jugement confirmé sur ce point.

2-Sur la demande au titre des redevances.

Au titre de l'article 6.6 du contrat de franchise, en contrepartie de la mise à disposition du savoir-faire et de l'assistance apportée par le franchiseur pendant toute l'exécution du contrat, le franchisé était tenu au versement d'une redevance hors taxes de 3,5 % de son chiffre d'affaires HT.

La société franchisée demande la condamnation in solidum des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France à lui payer la somme de 126 735 euros au titre de la restitution des redevances versées depuis le début du contrat de franchise.

L'annulation du contrat de franchise n'a pas été prononcée, en sorte que la société franchisée ne peut demander la restitution de l'intégralité des redevances payées.

En revanche, il a été relevé des manquements contractuels de la société FraMaPizz ayant conduit au non-respect partiel des obligations du franchiseur en contrepartie desquelles la société franchisée lui a versé des redevances à compter du 1er janvier 2016.

La Cour évalue le préjudice en résultant à 50% du montant des redevances versées depuis 2016 à la société FraMaPizz jusqu'à la fin du contrat.

Il résulte des pièces produites par la société Semper Fi (n° 10 et 20) qu'elle a versé la somme de 78619 euros HT au titre de la redevance pour les années 2016 à 2020. Le préjudice est estimé à 39 309,50 euros.

La sociétés FraMaPizz sera condamnée à restituer à la société Semper Fi la somme de 39 309,50 euros au titre des redevances.

La société Semper Fi sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre et de sa demande de condamnation in solidum de la société Domino's Pizza qui n'a pas perçu ces redevances.

Le jugement sera infirmé sur le montant du préjudice.

3- sur le préjudice de pertes de marge sur les approvisionnements

Au motif d'une surmarge pratiquée de 40 % du prix du marché, la société Semper Fi réclame la somme de 261 351 euros, représentant 40 % du prix de ses achats (596 130 euros) auprès de la société Pizza Center depuis le début du contrat de franchise. Elle fait valoir que cette pratique de surmarge résulte du comportement de la société FraMaPizz et a été comptablement perçue par la société Pizza Center et FraMaPizz, en sorte que ces sociétés doivent être condamnées in solidum à réparer son préjudice.

La société FraMaPizz soutient pour l'essentiel que, outre le fait que les manquements allégués au titre de l'obligation d'approvisionnement ne sont pas démontrés, les pièces de la société franchisée ne permettent pas non plus d'établir que la société Pizza Center France aurait pratiqué une surfacturation de l'ordre de 30 à 40 % par rapport aux concurrents et sur des produits substituables.

Réponse de la Cour,

Des motifs qui précédent, il ressort que de concert, la société Pizza Center France en sa qualité de société fournisseur du franchisé et la société FraMaPizz en sa qualité de franchiseur ont engagé leur responsabilité contractuelle dans la mise en œuvre de la clause d'approvisionnement du contrat de franchise de manière déloyale et source d'un déséquilibre significatif, et ce au préjudice de la société franchisée.

Il n'est effectivement pas démontré par la société franchisée une surfacturation dans une proportion de 40 % des prix du marché.

Néanmoins, au vu des éléments soumis aux débats (notamment Pièce franchisé PC n° 26), la Cour évalue le préjudice subi au titre de ces pratiques à un surcoût de 15 % des achats effectués par le franchisé auprès de la société Pizza Center France.

Il ressort du récapitulatif des achats HT réalisés par la société Semper Fi (pièce n° 11) de 2011 à 2017 (fin de l'approvisionnement auprès de la société Pizza Center France) un montant total d'achat pour cette période de 596 130 euros auprès de Logis Pizza, soit un préjudice évalué à la somme de 89 419,50 euros.

Dès lors, les sociétés FraMaPizz et Pizza Center France seront condamnées in solidum à payer à la société Semper Fi la somme de 89 419,5 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en œuvre fautive de l'obligation d'approvisionnement.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

4- Sur la demande au titre des prestations marketing.

La société franchisée fait valoir qu'une somme de 150 euros par mois était facturée au titre d'un pack marketing, alors que la prestation était incluse dans le contrat de franchise de base, soit l'équivalent de 13 500 euros sur la durée du contrat et qu'en outre cette prestation a été sur-facturée à hauteur de 41 589 euros. Elle demande la condamnation in solidum des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France à lui payer ces sommes.

Toutefois la société franchisée ne produit aux débats aucun élément permettant de mettre en évidence une surfacturation ou le paiement de somme ne correspondant à aucune prestation.

La société franchisée sera déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé sur ce point.

5-Sur la demande au titre de la perte de la valeur du fonds.

La société franchisée fait valoir qu'en l'absence de contrat de franchise, le fonds de commerce perd toute sa valeur. Elle sollicite la condamnation in solidum des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France à une indemnisation égale au ratio de valorisation appliqué lors de l'acquisition du réseau Pizza Sprint par Domino's Pizza France - soit 115 % de son chiffre d'affaires réalisé en 2017 et, subsidiairement, égale au ratio pratiqué lors de cessions individuelles de fonds de commerce au sein du réseau Pizza Sprint - soit 87 % du chiffre d'affaires annuel moyen.

La société Semper Fi réclame une indemnisation à titre principal de 569 441 euros, soit l'équivalent de 115 % de son chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice 2017-2018 (495 166 x 115 %).

Subsidiairement, la société Semper Fi fait valoir d'une part que les données de l'administration fiscale évaluent la valeur d'un fonds de commerce de pizzeria entre 50 et 100 % du chiffre d'affaires et que d'autre part lorsque le réseau existait les cessions de fonds étaient réalisées sur une base de 80 à 85 % du chiffre d'affaires. Or, elle relève qu'elle a difficilement obtenu une promesse d'achat de son fonds de commerce pour la somme de 98 000 euros, alors que la valorisation espérée du fonds était de 87 % du chiffre d'affaires annuel sur les trois derniers exercices de 2019 à 2021 (457 567 euros), soit la somme de 398 083 euros. Elle demande subsidiairement l'indemnisation de la différence à hauteur de 300 083 euros.

En réplique, les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France rappellent les principes de réparation intégrale du préjudice et de répartition de la charge de la preuve, et prétendent que les sociétés franchisées ne démontrent pas l'existence d'une perte de valeur de leur fonds, ni n'apportent d'éléments probants au soutien de leur évaluation de cette perte de valeur. Elles soutiennent que leur préjudice n'est certain ni pour les sociétés qui n'ont pas cédé leur fonds - puisque la perte de valeur n'est alors pas acquise, ni pour celles qui l'ont cédé - puisque le prix obtenu est alors cohérent avec leur valeur intrinsèque. En toute hypothèse, elles entendent produire un document démontrant que les praticiens considèrent que le prix de cession d'un fonds de commerce de restauration rapide dans le secteur de pizzas peut être évalué en appliquant au chiffre d'affaires de la société concernée un coefficient multiplicateur compris entre 40 et 80 %.

Elles précisent qu'en toute hypothèse aucun lien de causalité ne saurait être établi entre une faute imputable au franchiseur et une hypothétique perte de valeur de ces fonds.

Réponse de la Cour,

La valorisation du fonds de commerce à hauteur de 115 % du chiffre d'affaires est dépourvue de pertinence.

La Cour relève que la société Semper Fi produit au débat une promesse d'achat du fonds de commerce en date du 7 mars 2022 pour un prix de 98 000 euros, soit 21,5 % de la moyenne des chiffres d'affaires de ses exercices 2019, 2020 et 2021. Il ressort des pièces du débat que la société Semper Fi a poursuivi une activité de vente de pizza à domicile après la fin du contrat de franchise Pizza Sprint en 2021 sous l'enseigne Hektor's et a enregistré une nette baisse du chiffre d'affaires depuis 2019.

Ces éléments révèlent une dévalorisation certaine du fonds de commerce pendant la période où, comme il a été constaté dans les motifs qui précèdent, l'activité du réseau Pizza Sprint était particulièrement réduite en raison des agissements fautifs des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France.

A partir des fourchettes de valeurs de commerce de pizzeria données par les parties (pièces franchisé PC n° 129 et 130, pièce n° 7 du franchiseur), la Cour retient un minimum de valorisation à 50 % du chiffre d'affaires annuel moyen des trois derniers exercices précédant la cession (457 567 x0,50), soit une perte de valeur de 130 783, 50 euros (228 783,5 -98 000).

Dès lors, les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France seront condamnées in solidum à payer à la société Semper Fi la somme de 130 783, 50 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

V- Sur les demandes indemnitaires de M et Mme [G].

1- sur la demande de M. [G] au titre de pertes des apports.

M. [G] expose avoir réalisé des apports à hauteur de 75 000 euros et que la société Semper Fi, 6 ans après le démarrage de son activité n'est pas en mesure de lui restituer ces sommes. Il réclame la condamnation in solidum des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France à l'indemniser de ce préjudice.

Comme le relèvent à juste titre les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France, M. [G] ne justifie ni du montant de ses apports ni de leur perte. Il sera débouté de sa demande de ce chef de préjudice.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2- Sur les demandes de M et Mme [G] au titre de pertes de revenus.

M. [G] expose qu'entre 2008 et 2010, il était salarié dans un magasin et a perçu un revenu moyen annuel de 40 170 euros. Il constate que son activité dans le cadre du contrat de franchise lui a procuré un revenu moindre. Il évalue une baisse cumulée de revenu à 187 356 euros de 2011 à 2020 en comparaison de son revenu perçu dans le cadre de son activité salariée avant 2011.

Comme le relèvent à juste titre les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France, il ne peut être soutenu l'existence d'une 'perte de revenu- sans point de référence pertinent pour établir une comparaison. En effet, il n'est pas pertinent de comparer un revenu perçu en qualité de salarié sur une année, avec la rémunération que s'est versée M. [G] sur 10 années d'activité en qualité de gérant de société.

M. [G] sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement sera confirmé sur ce point.

Mme [G] expose qu'entre 2009 à 2011, elle occupait un emploi lui procurant un revenu annuel moyen de 26 528 euros. Elle constate que son activité salariée au sein de la société Semper Fi lui a procuré un revenu moindre. Elle évalue une baisse cumulée de revenu à 48 845 euros de 2012 à 2020 en comparaison avec son revenu antérieur à 2012.

Comme le relèvent à juste titre les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France, il ne peut être retenue l'existence d'une perte de revenu- sans point de référence pertinent pour établir une comparaison. En effet, il n'est produit aux débats aucun élément pertinent de nature à permettre d'apprécier les conditions du précédent emploi salarié à partir duquel la perte de revenus est calculée. Mme [G] sera déboutée de sa demande de ce chef et le jugement sera confirmé sur ce point.

3- Sur la demande au titre du préjudice moral de M et Mme [G].

M et Mme [G], en leur qualité de gérant et salarié de la société Semper Fi, exposent que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. [S], son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de leur activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, leur ont causé à chacun à titre personnel un préjudice moral à hauteur de 30 000 euros chacun.

Les difficultés récurrentes auxquelles ont été confrontés Met Mme [G] tout au long du contrat de franchise (notamment pièces PC n° 38, 86, 123 et 124) et telles que constatées au titre des manquements des sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza, ont été de nature à leur causer un préjudice moral que le tribunal a justement évalué à la somme de 15 000 euros chacun.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza à verser à M et Mme [G] chacun la somme de 15 000 euros.

VI- Sur la demande de capitalisation des intérêts,

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil.

VII- Sur les demandes au titre d'une procédure abusive,

Compte tenu du sens de la décision rendue, les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France seront déboutées de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et de voir prononcer une amende civile au titre d'un abus d'ester en justice.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

VIII- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza France aux dépens de première instance, et à payer à M et Mme [G] et à la société Semper Fi la somme de 10 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France, succombant en leur appel, seront condamnées aux dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France seront déboutées de leurs demandes et condamnées in solidum à payer à M et Mme [G] et à la société Semper Fi la somme de 5 000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables les demandes de la société Semper Fi et de M et Mme [G] en ce qu'elles tendent à annuler ou résilier le contrat de franchise aux torts de Pizza Center France,

- débouté la société Semper Fi ainsi que M et Mme [G] de leur demande tendant à annuler le contrat de franchise,

- débouté la société Semper Fi de sa demande au titre des pertes de marge sur les approvisionnements,

- condamné in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza à rembourser à Semper Fi les redevances de franchise versée au titre des années 2017, 2018, 2019, 2020.

- condamné in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza à verser à Semper Fi la somme de 297 099,80 euros au titre de la perte de valeur de son fonds,

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare recevables les prétentions formulées par la société Semper Fi ainsi que M et Mme [G] à l'encontre des sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France ;

Déclare irrecevable comme prescrite l'action en annulation du contrat de franchise de la société Semper Fi ;

Condamne in solidum les sociétés FraMaPizz et Pizza Center France à payer à la société Semper Fi la somme de 89 419,50 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la mise en œuvre fautive de l'obligation d'approvisionnement ;

Condamne la sociétés FraMaPizz à verser la somme de 39 309,50 euros à la société Semper Fi au titre de la restitution partielle des redevances pour les années 2016 à 2020 ;

Condamne in solidum les sociétés FraMaPizz et Domino's Pizza à verser à la société Semper Fi la somme de 130 783, 5 euros au titre de la perte de valeur de son fonds,

Condamne in solidum les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France aux dépens d'appel ;

Condamne in solidum les sociétés FraMaPizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France à payer à la société Semper Fi ainsi qu'à M et Mme [G] la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.