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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 5, 1 février 2023, n° 19/11805

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Total Consortium Clayton (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sentucq

Conseillers :

Mme Thévenin-Scott, Mme Pélier-Tétreau

Avocats :

Me Belot, Me Meplain

CA Paris, du 19 févr. 2019

19 février 2019

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L], ci-après les époux [L] qui résident aux Etats-Unis à [Localité 8], [Localité 8], sont propriétaires d'un appartement situé [Adresse 3], acquis le 10 septembre 2010.

Le 31 mars 2011, ils ont commandé pour cet appartement à la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON (ci-après « TCC »), dont l'objet social est « la vente, la décoration, l'ameublement et l'installation de cuisines et de salles de bain haut de gamme », une cuisine sur mesure, entièrement équipée de marque SOFACEM, pour la somme totale de 17 769,70 euros TTC.

Le 5 juin 2012, les époux [L] ont assigné en référé la société T.C.C. afin de faire désigner un expert judiciaire par le président du tribunal de grande instance de PARIS, invoquant des malfaçons et non-façons.

Par ordonnance du 4 juillet 2012, Madame [B] a été désignée en qualité d'expert.

Le rapport d'expertise a été déposé en l'état le 6 septembre 2013 après refus par les époux [L] de verser une provision complémentaire.

Par acte du 13 mai 2016, les époux [L] ont assigné la société T.C.C. devant le tribunal de grande instance de PARIS.

Par jugement contradictoire du 27 mars 2018, le dit tribunal a :

- rejeté la demande formée aux fins de remplacement de la cuisine livrée ;

- prononcé la résiliation du contrat de vente conclu entre les parties selon devis accepté n° 483/1/2, accepté le 31mars 2011 ;

- condamné la SAS T.C.C à payer à Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] la somme de 14 892, 78 € en restitution ;

- condamné la SAS T.C.C à payer à Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] la somme de 6 371,65 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SAS T.C.C aux dépens, en ce compris les frais d'expertise à hauteur de 3 508 €  

- ordonné l'exécution provisoire ;

- débouté les parties de leurs autres demandes.

La SAS TCC a interjeté appel selon déclaration reçue au greffe de la cour le 16 mai 2018.

Par ordonnance du 19 février 2019, l'affaire a été radiée du rôle par le magistrat de la mise en état, au visa des dispositions de l'article 526 du code de procédure civile.

Au vu des conclusions signifiées le 12 juin 2019 par la SAS TCC et du règlement de la somme de 24 843,86 euros par la société TCC par virement sur le compte CARPA du conseil de l'appelante, l'affaire a été remise au rôle le 12 juin 2019.

Par conclusions signifiées le 8 décembre 2020 par voie électronique la SAS TCC demande à la cour de :

Vu le Jugement rendu le 27 mars 2018 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS,

Vu l'acte d'appel de la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON,

Vu les articles 1102,1134, 1604, 1611 du Code civil,

Vu les jurisprudences citées,

Vu les pièces régulièrement communiquées, et notamment le rapport d'expertise judiciaire du

6 septembre 2013 ;

 

DECLARER la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON recevable et bien fondée en son

appel, et en l'ensemble de ses demandes ;

INFIRMER le Jugement du Tribunal de grande instance de PARIS en date du 27 mars 2018  

En conséquence,

A titre principal,

DIRE ET JUGER que la Société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON n'a pas manqué à son devoir d'information et de conseil précontractuel à l'égard des consorts [L],

CONSTATER la réception de la cuisine par les Consorts [L], sans réserve, le 18 mai

2011,

Ainsi,

DEBOUTER les consorts [L] de l'ensemble de leurs demandes ;

A titre subsidiaire,

ENTERINER les conclusions déposées par l'Expert judiciaire le 6 septembre 2013,

DIRE ET JUGER que les non-conformités constatées par l'Expert judiciaire dans dans son rapport du 6 septembre 2013, ne sont pas telles qu'elles justifieraient une résolution judiciaire du contrat de vente,

CONSTATER que les consorts [L] sont redevables du solde de la facture de travaux à hauteur de 3 000 € TTC,

Ainsi,

LIMITER la condamnation de la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à payer aux

consorts [L] la somme totale de 251,58 €, correspondant au paiement de la somme de 1 650€ TTC (soit 1 500 € HT) fixée dans le rapport d'expertise pour la reprise des désordres, augmentée de la somme de 1 601,58 € correspondant au remboursement du lave-linge et du micro-ondes ; et à laquelle il convient de déduire la somme de 3 000 € TTC correspondant au solde de la facture restant due par les époux [L] ;

A titre infiniment subsidiaire,

Si la Cour confirmait la résolution judiciaire de la vente, il est sollicité :

LA RESTITUTION à la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON de l'intégralité des meubles, éléments mobiliers et appareils électro ménagers vendus,

CONDAMNER les Consorts [L] à laisser libre l'accès à l'appartement situé au [Adresse 6]

[Adresse 6] [Localité 1], à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour ;

En tout état de cause,

CONDAMNER les consorts [L] à payer à la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON la somme de 3 000 € par application de l'article 700 du CPC,

CONDAMNER les Consorts [L] aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 7 septembre 2020 Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] demandent à la cour de :

Vu les articles 1602, 1604, 1610 et 1611 du Code civil,  

Vu l'article L.111-1, L. 217-9 et L. 217-10 du Code de la consommation,  

Vu la jurisprudence citée,  

A titre principal,  

CONSTATER que la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON a violé son obligation d'information et de conseil à l'égard des époux [L] ;  

CONSTATER que la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON a violé son obligation de délivrance conforme aux stipulations contractuelles ;  

CONSTATER que la cuisine posée au [Adresse 3] par la société TCC souffre de défauts, malfaçons et irrégularités de nature à justifier son remplacement ;

En conséquence,  

CONFIRMER le jugement rendu le par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 27 mars 2018 en ce qu'il a :  

PRONONCE la résiliation du contrat de vente conclu entre les parties selon devis accepté n° 483/1/2, accepté le 31 mars 2011 ;  

CONDAMNE la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à payer à Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] la somme de 6.371,65 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;  

CONDAMNE la SAS TOTAL CONSORTIUM CLAYTON aux dépens, en ce compris les frais d'expertise à hauteur de 3 508,00€ ;  

INFIRMER partiellement le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 27 mars 2018 en ce qu'il a :  

FIXE à la somme de 14 892,78€ la somme devant être restituée aux époux [L] et la fixer à la somme de 21 043,64€ correspondant à la restitution du prix de la cuisine à hauteur de 16 369,70€ HT (19 643,64€ TTC) outre la somme de 1.400€ pour l'installation.  

A titre subsidiaire, à défaut de nullité de la vente,  

ORDONNER la dépose de la cuisine actuellement installée dans l'appartement des époux [L] [Adresse 3], aux frais de la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON ;  

ORDONNER le remplacement de la cuisine délivrée par la cuisine initialement choisie, de modèle « Initiale C-CE » couleur Merisier 301 ;  

En tout état de cause,

CONDAMNER la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à verser aux époux [L] la somme de 2 500,00€ chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral ;  

CONDAMNER la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à verser aux époux [L] la somme de 7 000,00€ à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier ;  

CONDAMNER la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à verser la somme de 3 000,00€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel.  

La clôture a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.

 

SUR QUOI,

LA COUR,

 

1- Sur l'obligation d'information et de conseil du vendeur

Le tribunal a constaté que les époux [L] ne font pas la preuve de la non conformité à la commande du matériel livré dans la mesure où le bon de commande du 31 mars 2011 qui fait la loi des parties, fait référence, pour le modèle de la cuisine à installer au devis n°483-1-2 sur lequel Monsieur [L] a sollicité un certain nombre de modifications établissant qu'il a pu procéder à une analyse suffisamment minutieuse du devis et y consentir ainsi que son épouse de manière suffisamment éclairée. Ensuite de ces constatations, le tribunal a rejeté les demandes tendant au remplacement de la cuisine.

La société TCC fait valoir que les époux [L] n'apportent pas la preuve qu'ils auraient, selon leurs allégations, choisi le modèle du premier devis et non celui du second alors qu'ils ont signé le second, très explicite au vu des plans annexés et que Monsieur [L] a interrogé à de nombreuses reprises la société TCC sur ce second devis avant la pose de la cuisine.

Les époux [L] opposent dans le cadre de leur appel incident, au visa de l'article 1602 du code civil, que contrairement à ce qui a été jugé, il était impossible sans catalogue de vérifier le contenu des devis, que Madame [L] ne pouvait en toute bonne foi imaginer que le modèle concerné avait changé entre le premier devis non signé et le second qu'ils ont accepté. Ils poursuivent leur argumentaire par l'exposé des malfaçons affectant les élément livrés : le lave-linge avait à la livraison, un sens d'ouverture inverse à celui de la porte du meuble dans lequel il était encastré ce qui a été constaté par l'expert judiciaire, les corniches des meubles hauts de la cuisine étaient trop longues, le plan de travail en granit commandé au sous-traitant de la société TCC n'était toujours pas posé le jour de la visite de l'expert judiciaire soit le 10 septembre 2012, plus d'un an après la date de livraison prévue au bon de commande au plus tard le 21 août 2011.

Ils soulignent que les propositions de modifications mineures faites par la société TCC ne sont pas à la hauteur de la gravité des problématiques affectant la cuisine et que leur mauvaise foi ne peut sérieusement être soutenue quand il est établi par les échanges de courriels que ceux-ci ont tenté à de nombreuses reprises de trouver une solution et que leur opposition à la pénétration dans leur appartement du poseur du plan de travail temporaire le 14 janvier 2013, n'était liée qu'au souci d'éviter toute confrontation entre leur fils et celui-ci qui avait fait montre d'une attitude agressive.

Réponse de la cour :

Selon les dispositions de l'article 1602 du code civil : « Le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur. »

Monsieur et Madame [L] ont signé le 31 mars 2011 un bon de commande pour l'achat d'une cuisine hors pose, selon le devis annexé n°483/1/2 paraphé et signé le même jour de marque SOFACEM dite « Initiale P » finition façade 141 Ancien clair brossé vernis mat, finition chant façade CCH Chêne, finition côté visible MCH Chêne au prix de 16 369,70 euros TTC outre une somme de 1 400 euros pour l'installation.

Ils produisent un autre devis à l'enseigne de la société TTC référence 474/1/1 portant sur une cuisine dite « Initiale C » 301 P merisier patiné, habillages/pilastres en mélaminé non signé, non paraphé en date du 28 janvier 2011 dont l'examen et a fortiori l'acceptation n'est corroboré par aucun élément.

Ensuite de la commande du 31 mars 2011, Monsieur [L] a sollicité par courriel le 14 avril 2011 auprès de la société TCC des précisions indiquant s'être aperçu « en étudiant le devis qu'il n'y avait que deux spots prévus alors qu'il en faudrait 5 » et sollicitant des précisions sur la disposition des éclairages.

Le certificat de fin de travaux prévoyant la livraison et la pose le 18 mai 2011 a été signé sans autre réserve que celle-ci : « Reste à finir le cadre du micro-onde, chèque de caution à ne pas encaisser. »

Ce n'est que le 5 juillet 2011 par courriel que Monsieur [L] a manifesté pour la première fois au représentant de la société TCC sa déception indiquant s'être aperçu ' après l'installation, de problèmes sérieux, (...) S'exprimant ainsi : « Nous pensons que la cuisine qui a été livrée et installée dans notre appartement ne correspond pas à celle que nous avons commandée (Cambridge en couleur merisier platine). En plus il y a des problèmes majeurs de qualité de fabrication, (variation de couleurs beaucoup trop importantes, variations de dimension, discordance entre la couleur de façade et celle de l'intérieur) mais aussi une pose non conforme à notre commande et aux spécifications techniques de l'électroménager ».

Le manquement au devoir de conseil imputable au vendeur ne peut se déduire de la seule affirmation des époux [L] selon laquelle la cuisine livrée ne serait pas conforme à celle commandée ensuite de la confusion opérée avec un autre devis quand cette affirmation, formée près de deux mois après la livraison et l'installation des éléments commandés, est contredite par les mentions parfaitement claires du devis signé auquel renvoie le bon de commande par lesquelles les intimés n'ont pas été mis en mesure de vérifier et d'identifier précisément les spécificités du modèle de cuisine choisi, les références, les nuances des teintes de finition et la nature des matériaux.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que les époux [L] ont consenti de manière éclairée au contrat de vente.

2- Sur l'obligation de délivrance et la demande en remplacement de la cuisine

Le tribunal a constaté l'acceptation du devis 474-1-1 du 28 janvier 2011 par les époux [L], la conformité du modèle posé à la commande et a rejeté pour ce motif la demande de remplacement de la cuisine.

La société TCC ne remet pas en cause le jugement de ce chef hormis pour le plan de travail au sujet duquel elle indique n'être débitrice d'aucune obligation de délivrance, celui-ci ayant été acquis directement par les époux [L] auprès de la société UDM, contrairement à ce qui a été jugé.

Les époux [L] opposent, au rappel des articles 1604 et 1610 du code civil, L 217-9 et L 217-10 du code de la consommation qu'ils ont signé un devis au vu de l'exposition dans le showroom de la société TCC du modèle ' Initiale C-CE couleur merisier 301 au prix de 15 534,70 euros', que Madame [L] est venue dans les locaux du vendeur le 31 mars 2011 pour finaliser la commande et que le commercial présent sur place, Monsieur [J], a fait une erreur et a commandé le modèle 'Initiale P couleur chêne'.

L'expert ayant refusé de vérifier la conformité de la cuisine livrée au bon de commande, ils indiquent qu'il ne peut leur être imputé comme une faute alors qu'ils résident à l'étranger et n'ont pu réceptionner les éléments de cuisine de ne pas s'être aperçus à la livraison que les coloris et le modèle ne correspondaient pas aux instructions données. Ils soulignent qu'à l'heure actuelle ils ne sont toujours pas livrés du plan de travail alors qu'ils ont acquitté 1 523,08 euros de ce chef, que la couleur des caissons est différente de la couler des façades des portes alors qu'elle était la même sur le modèle de cuisine exposé dans le showroom, que les non conformités sont loin d'être mineures contrairement à ce qui est soutenu par l'appelante et justifient le remplacement de la cuisine par la cuisine initialement choisie dans le premier devis du 28 janvier 2011.

Réponse de la cour :

Selon les dispositions de l'article 1604 du code civil : « La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et la possession de l'acheteur ».

Selon les dispositions de l'article 1610 du même code : « Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur. »

Il a été vu que les éléments de cuisine ont été livrés conformément à la commande selon les spécificités mentionnées au devis signé par les époux [L] et sur lesquelles ceux-ci dûment informés ont pu consentir de manière éclairée. La cour constate également que les époux [L] n'ont pas manifesté lors de la livraison des éléments de la cuisine ou dans un temps proche de celle-ci, leur désapprobation, au regard de la confusion entre les deux modèles, objet de deux devis différents et n'ont évoqué celle-ci, ainsi qu'il a été rappelé plus haut, que près de deux mois après l'installation, en des termes laissant apparaître un doute et ouvrant la discussion avec le vendeur, Monsieur [L] indiquant : ' Nous pensons que la cuisine qui a été livrée et installée dans notre appartement ne correspond pas à celle que nous avons commandée (Cambridge en couleur merisier patine)'.

Cependant ni le devis ni le bon de commande ne font mention de la fourniture du plan de travail lequel, de manière constante, a été réglé directement à une société tierce par les époux [L] qui ne sont donc pas fondés à imputer sa non livraison à la société TCC quand au demeurant il leur appartenait d'appeler à la cause la société débitrice de cette obligation, ce qu'ils n'ont pas fait.  

C'est donc à la suite d'une appréciation erronée des faits que le tribunal a mis à la charge de la société TCC ce manquement étant observé qu'il ne peut être tiré aucune conséquence du geste manifestement purement commercial par lequel la société TCC a pris en charge la pose d'un plan de travail provisoire dans un souci évident de satisfaire ses clients.  

Par conséquent l'obligation de délivrance a bien été respectée et l'exigence de remplacement du modèle de la cuisine livré conformément à la commande n'est pas fondée. Le jugement, par substitution de motifs sera confirmé de ce chef.

3- Sur la résolution de la vente

Le tribunal, constatant la non livraison du plan de travail avant le 31 août 2011 et au vu des non conformités imputables à la société TCC relatives aux teintes différentes affectant les éléments en bois, au défaut de conception de l'emplacement de la hotte, au sens de l'ouverture du lave-linge inversé par rapport à l'ouverture de la porte du caisson, à la non conformité à la commande du micro-onde livré, à la non conformité des tablettes livrées en bois au lieu d'être vitrées, a prononcé la résolution de la vente.  

La société TCC souligne que les époux [L] sont taisants sur les règles du mandat et l'acceptation de la livraison donnée par leur représentant qui n'a émis d'autre réserve que celle relative à l'achèvement de l'installation du micro-onde. Elle fait valoir que le tribunal ne s'est pas prononcé sur la réception que la cour devra constater sans réserve. Sur les non conformités, la société TCC relève que la plaque de cuisson a été livrée dès le 13 mai 2011, et que l'expert qui n'a constaté que des non conformités mineures conclut que les griefs recensés relèvent essentiellement de l'esthétique, ne compromettent pas la solidité de la cuisine qui semble être en conformité avec les règles de l'art, le matériel en place apparaissant en 1ère analyse être globalement celui de la commande contractuelle de sorte que la résolution n'est pas justifiée.

Les époux [L], au rappel des moyens précédemment soulevés au soutien des non conformités nombreuses affectant la cuisine, sollicitent à titre principal la confirmation du jugement et à titre subsidiaire le prononcé de la nullité de la vente et la condamnation de la société TCC à leur restituer la somme de 14 769,70 euros versée, outre la somme de 1 523,08 euros versée à la société UDLM pour le plan de travail en granit commandé par la société TCC.

Réponse de la cour :  

Selon les dispositions de l'article 1184 du code civil dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance du 10 février 2016, applicable au litige, : 'La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Il suit de ce texte que la résolution judiciaire du contrat ne peut être prononcée qu'autant qu'une inexécution grave est démontrée par celui qui s'en prévaut.

En l'espèce le procès-verbal de constat dressé par Maître [X], huissier de justice à [Localité 7] le 26 septembre 2011 et les constatations de l'expert judiciaire, Madame [D] [B] reprises en page 7/11 de son rapport, se rejoignent pour caractériser les malfaçons et inachèvements ainsi :

'- point 3, le micro-onde livré n'est pas celui prévu (différence de cotes)

- point 5, la hotte doit être repositionnée avec la pièce de finition n°20 et recalage des éléments hauts

- point 6, l'inversion de la porte du lave-linge étant impossible sur ce modèle, le modèle devra être remplacé

- point 9, remplacement des tablettes de verre par des tablettes de bois du fait de la non conformité des éléments vitrés

- point 10, pose de l'élément décoratif n°5, recalage de l'ensemble des éléments bas (travaux non réalisés)

- point 11, pose du plateau, côtes à prendre une fois les éléments recalés après la pose de la pièce 5 en meuble bas (non exécuté)

- point 12, remplacement du verre des spots cassés ( finitions)

- point 13, la grille basse de l'appareil encastrable peut être reposés sur la plinthe (finitions)

- point 14, les travaux de branchement et raccordement des lave-linge/lave-vaisselle/réfrigérateur sont à réaliser à la charge de Monsieur et Madame [L] par plombier et électricien.

Le coût du changement du lave-linge et du micro-onde n'a pu être chiffré par l'expert en l'absence de consignation complémentaire versée par les époux [L] tandis que l'expert indique en page 8/11 de son rapport que : « la société TCC se tient à disposition pour terminer ses finitions qui satisferont intégralement à la conformité au devis. » L'expert a estimé approximativement à 2 journées de travail l'intervention totale de reprise des 8 points outre le petit matériel hors coût de remplacement de l'électroménager.

Les malfaçons et inachèvements précités ne sont pas constitutifs d'une inexécution grave justifiant le prononcé de la résolution judiciaire aux torts exclusifs de la société TCC quand celle-ci, au demeurant dès le 20 juillet 2011, avait par courrier dressé la liste des reprises qu'elle s'engageait à réaliser pour satisfaire à son obligation de délivrance et, au vu des constatations de l'expert, a réitéré sa volonté d'achever sa prestation conformément au devis.

Cependant les époux [L] ne forment aucune demande subsidiaire au soutien d'une inexécution partielle laquelle aurait pu être résolue par une obligation de faire à la charge de la société TCC qui le propose ou par l'allocation de dommages et intérêts en application des dispositions de l'article 1147 du code civil que les intimés ne demandent pas.

Par conséquent le jugement sera réformé du chef de la résiliation de la vente prononcée et les époux [L] déboutés de l'intégralité de leurs demandes, en ce compris la demande de nullité formée subsidiairement sans qu'aucun moyen en droit et en fait ne soit développé au soutien de cette demande, tandis qu'il a été largement établi par les motifs précités de l'arrêt, la validité du consentement donné au devis.

4- La demande en paiement de la société TCC

La société TCC sollicite le règlement de la somme de 3 251,58 euros correspondant au coût total de remplacement du micro-onde et du lave-linge et demande que soit ordonnée la compensation entre ce montant restant dû et le préjudice évalué par l'expert.

Les époux [L] ne répondent pas spécifiquement sur ce point si ce n'est en concluant au débouté de toutes les demandes des appelants.

Réponse de la cour :

La compensation ne peut être ordonnée au vu des dispositions de l'article 1289 du code civil dans sa version applicable au litige, qu'ensuite de l'extinction simultanée des obligations des parties entre des créances fongibles, certaines, liquides et exigibles. Or en l'espèce le montant de la créance des époux [L] au titre du remplacement de l'électroménager n'est pas déterminé autrement que par les seules affirmations de la société TCC tandis que les époux [L] de leur côté n'invoquent aucune créance à titre de dommages et intérêts pour réparer les inexécutions imputées à la société appelante.

La société TCC ne peut par conséquent prospérer en sa demande de compensation et de paiement et en sera déboutée.

5- Les frais irrépétibles

Sur infirmation du jugement Monsieur et Madame [L], succombants, seront condamnés aux dépens de première instance et y ajoutant, aux dépens d'appel ainsi qu'au au règlement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.

 

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement en ce qu'il a :

- prononcé la résiliation du contrat de vente conclu entre les parties selon devis accepté n° 483/1/2, accepté le 31 mars 2011 ;

- condamné la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à payer à Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] la somme de 14 892, 78 euros en restitution ;

- condamné la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON à payer à Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] la somme de 6 371,65 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON aux dépens, en ce compris les frais d'expertise à hauteur de 3 508 euros.

Statuant à nouveau,

DEBOUTE Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] de l'intégralité de leurs demandes ;

 

DEBOUTE la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON de sa demande en paiement ;

CONDAMNE Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] à régler à la société TOTAL CONSORTIUM CLAYTON une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [G] [L] et Madame [P] [U] épouse [L] aux dépens.