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Décisions

Cass. 3e civ., 8 février 2023, n° 21-20.271

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

MMA IARD assurances mutuelles (Sté), MMA IARD (Sté), Scheiber (Sté)

Défendeur :

Gervot Stéphane (Sté), MMA IARD (Sté), MMA IARD (Sté), Maaf assurances (Sté), Rexel France (Sté), Zurich Global Corporate France (Sté), Vim (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

M. Maunand

Avocat général :

M. Burgaud

Avocats :

SARL Le Prado-Gilbert, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Cabinet Munier-Apaire, SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Foussard et Froger

Rennes, ch. 4, du 27 mai 2021

27 mai 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 27 mai 2021), M. et Mme [E] ont confié à la société Gervot Stéphane, assurée auprès des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, le lot « électricité - ventilation » de la construction d'une maison d'habitation.

2. La société Gervot Stéphane a fourni une ventilation mécanique contrôlée (VMC) qui lui avait été vendue par la société Rexel France, assurée auprès de la société Zurich Global Corporate France (la société Zurich), et qui avait été fabriquée par la société Vim. La VMC était notamment composée d'une carte électronique fabriquée par la société Scheiber, assurée auprès des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles.

3. Après la réception, intervenue le 27 juillet 2001, un incendie s'est déclaré dans les combles de la maison.

4. Après expertise, M. et Mme [E] ont assigné leur assureur multirisques, la société Maaf assurances, ainsi que les sociétés Gervot Stéphane, Rexel France, Zurich, Vim, Scheiber et MMA IARD. La société MMA IARD assurances mutuelles est intervenue volontairement à l'instance.

Examen des moyens,

Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé,

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen du pourvoi incident, rédigés en termes similaires, réunis

Enoncé des moyens,

6. Par leur premier moyen, les sociétés Scheiber, MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles font grief à l'arrêt de les condamner à garantir la société Vim des condamnations mises à sa charge, dans la limite de la franchise et du plafond de garantie prévu par la police d'assurance MMA IARD, alors « que l'action en garantie des vices cachés, qui devait être exercée dans un bref délai à compter de la découverte du vice, est également enfermée dans le délai de prescription fixé par l'article L. 110-4 du code de commerce, lequel court à compter de la vente initiale ; qu'en décidant au contraire que le point de départ de cette prescription serait suspendu jusqu'à la date de l'assignation de la société Vim, fabriquant du groupe VMC litigieux, par la société Rexel, revendeur, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce ensemble l'article 1648 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005. »

7. Par leur moyen, les sociétés Rexel France et Zurich font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à garantir la société Gervot Stéphane et les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles de l'intégralité des condamnations mises à leur charge, alors « que l'action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans un bref délai suivant la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de prescription prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente conclue entre les parties ; qu'en affirmant, au contraire, pour déclarer recevables les appels en garantie formés par l'entrepreneur et ses assureurs à l'encontre du fournisseur du groupe VMC, que le point de départ du délai de prescription était l'assignation délivrée contre l'entrepreneur, et que le délai de l'article L. 110-4 du code du commerce était suspendu jusqu'à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce, ensemble l'article 1648 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005. »

Réponse de la Cour,

8. Pour les ventes conclues antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, il est jugé que les vices affectant les matériaux ou les éléments d'équipement mis en œuvre par un constructeur ne constituent pas une cause susceptible de l'exonérer de la responsabilité qu'il encourt à l'égard du maître de l'ouvrage, quel que soit le fondement de cette responsabilité et que, sauf à porter une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge, le constructeur dont la responsabilité est ainsi retenue en raison des vices affectant les matériaux qu'il a mis en œuvre pour la réalisation de l'ouvrage, doit pouvoir exercer une action récursoire contre son vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés sans voir son action enfermée dans un délai de prescription courant à compter de la vente initiale.

9. Il s'ensuit que, l'entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabricant avant d'avoir été lui-même assigné par le maître de l'ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti par l'article 1648, alinéa 1er, du code civil est constitué par la date de sa propre assignation et que le délai de l'article L. 110-4, I, du code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu'à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l'ouvrage (3e Civ., 16 février 2022, pourvoi n° 20-19.047, publié).

10. Dès lors que le vendeur peut voir, ainsi, sa garantie recherchée par le constructeur et qu'il ne peut, non plus, agir avant d'avoir été assigné, le recours contre son propre vendeur ne peut, pas plus, être enfermé dans le délai de prescription de droit commun courant à compter de la vente initiale. La prescription de ce recours est elle-même suspendue jusqu'à ce que la responsabilité de son auteur soit recherchée.

11. La cour d'appel a relevé que la société Gervot Stéphane et son assureur avaient été assignés par la société Maaf assurances, subrogée dans les droits des maîtres de l'ouvrage, le 11 décembre 2014 et qu'ils avaient notifié leurs demandes de garantie à la société Rexel France et à son assureur le 22 novembre 2015.

12. Elle a, ensuite, relevé que la société Rexel France et son assureur, assignés par M. et Mme [E] le 19 juin 2014, avaient assigné la société Vim en garantie le 9 février 2015, laquelle avait assigné à son tour la société Scheiber le 29 mai 2015.

13. Ayant constaté que les actions en garantie des vices cachés de la société Gervot Stéphane et de la société Vim avaient été exercées contre la société Rexel France, la société Scheiber et leurs assureurs dans le délai prévu par l'article 1648, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005, et ayant retenu, à bon droit, que la prescription de droit commun enfermant ces actions était suspendue jusqu'à ce que leurs auteurs fussent assignés, elle en a exactement déduit que les demandes n'étaient pas prescrites.

14. Les moyens ne sont donc pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les sociétés Scheiber, MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles aux dépens du pourvoi principal et les sociétés Rexel France, Zurich Global Corporate France aux dépens du pourvoi incident ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille vingt-trois.