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Décisions

Cass. com., 21 juin 2011, n° 10-21.928

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

M. Le Dauphin

Avocats :

SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan

Colmar, du 25 mai 2010

25 mai 2010

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 mai 2010), que pour les besoins de l'exercice de leur profession de médecin, MM. X... et Y... ont, en 1991, constitué une société civile de moyens (la SCM) ; qu'en 2006, un tiers des parts représentant le capital de la SCM a été cédé à Mme Z... ; que faisant état de l'inexécution de ses obligations par cette dernière ainsi que de la mésentente entre les associés, paralysant le fonctionnement de la société, MM. X... et Y... ont demandé sa dissolution anticipée pour justes motifs ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ que la mésentente entre associés n'est une cause de dissolution de la société que dans la mesure où elle a pour effet d'en paralyser le fonctionnement ; qu'en l'espèce, pour prononcer la dissolution, la cour d'appel n'a relevé que des motifs impropres à caractériser la paralysie du fonctionnement de la société, que ce soit les désaccords entre associés au sujet des charges à payer, de la présentation de la clientèle ou du comportement d'une salariée, l'existence de procédures judiciaires en cours et le fait que Mme Z... ne se soit pas présentée à deux assemblées générales dont elle contestait la régularité ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les dispositions de l'article 1844-7 5° du code civil ;

2°/ que les associés d'une société civile qui sont à l'origine de la mésentente qui s'est instaurée entre associés ne peuvent invoquer celle-ci à titre de juste motif leur permettant de solliciter la dissolution judiciaire de la société ; qu'en l'espèce, pour accueillir la demande de dissolution, la cour d'appel a retenu la mésentente entre associés préjudiciable au bon fonctionnement de la société, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de Mme Z..., si MM. Y... et X... n'étaient pas à l'origine de la mésentente invoquée ; que ce faisant, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1844-7 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que le conflit qui opposait MM. X... et Y... à Mme Z... relativement à la contribution de cette dernière aux charges de la SCM avait dégénéré à la fin de l'année 2008, Mme Z... ayant émis des propos quelque peu agressifs à l'égard de ses associés qui ont décidé de la faire poursuivre disciplinairement, l'arrêt constate que le fonctionnement de la société constituée entre les trois praticiens est complètement et définitivement bloqué ; qu'il relève que la réunion d'une assemblée générale extraordinaire n'a pas été possible en l'absence de Mme Z... dès lors que les statuts prévoient la réunion des trois quarts des parts sociales ; que l'arrêt ajoute que le secrétariat n'est plus organisé en commun, que Mme Z... ne paye plus sa part de charges et que de nombreuses procédures inévitablement assez longues et d'un coût élevé opposent les parties ; que l'arrêt relève encore qu'au lieu de chercher une solution en participant aux assemblées générales, Mme Z... fait défaut et demande l'annulation des assemblées tenues hors sa présence ; qu'en l'état de ces constatations, desquelles il résulte que le fonctionnement de la société civile de moyens était paralysé tant en raison de l'inexécution de ses obligations par Mme Z... que de la mésentente entre les associés, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche visée à la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que Mme Z... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à faire prononcer l'annulation des " délibérations prises " au cours des assemblées générales des 22 juillet et 19 août 2009, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des constatations des juges du fond qu'en vertu des statuts de la SCM, le quorum nécessaire pour une première convocation à une assemblée générale est de 3/ 4 des associés, tandis qu'il suffit lors de la seconde convocation que deux associés soient présents ou représentés ; qu'en l'espèce, si le 22 juillet 2009, l'assemblée générale a constaté qu'elle ne pouvait délibérer à défaut de quorum, cette constatation a entraîné la deuxième convocation du 3 août 2009, qui a permis à deux associés seulement de délibérer sur les comptes et les résultats, en l'absence de Mme Z... ; qu'en déboutant néanmoins celle-ci de sa demande d'annulation de la première assemblée en raison d'un défaut d'intérêt à l'obtenir, alors que l'annulation de la première assemblée générale entraînait nécessairement celle de la seconde, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ qu'ainsi que Mme Z... le faisait valoir dans ses conclusions d'appel, elle avait contesté par une lettre recommandée AR du 17 août 2009, qu'elle produisait aux débats, " avoir reçu les documents et pièces prévus par la réglementation en vigueur " qui auraient dû lui être adressés avec la convocation à l'assemblée générale du 19 août 2009 ; qu'en rejetant la demande de nullité au motif qu'elle n'aurait jamais contesté la régularité de la convocation avant toute procédure, sans s'expliquer sur la lettre de contestation de Mme Z... du 17 août 2009, adressée deux jours avant la tenue de l'assemblée générale du 19 août 2009, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni des conclusions ni de l'arrêt que Mme Z... ait soutenu devant la cour d'appel l'argumentation développée par la première branche ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que Mme Z... faisait défaut et demandait l'annulation des assemblées tenues hors sa présence, l'arrêt constate qu'elle " s'est cantonnée dans une attitude d'opposition systématique " ; qu'ayant ainsi fait ressortir que les irrégularités alléguées n'avaient pu faire grief à Mme Z... dés lors que celle-ci avait décidé de ne pas participer aux décisions collectives, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit qu'irrecevable comme nouveau et mélangé de droit et de fait en sa première branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.