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Décisions

Cass. com., 11 janvier 2023, n° 21-20.437

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Paris, du 8 juin 2021

8 juin 2021

Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2021), la société Saint-Gobain Isover, qui a pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation, sous la marque « Isover », enregistrée depuis 1937, de systèmes d'isolation, permettant de traiter les parties extérieures et intérieures des bâtiments, associant des laines minérales à performances thermiques, phoniques et ignifuges, des membranes assurant l'étanchéité à l'air des parois, ainsi que des ossatures et accessoires nécessaires à leur mise en oeuvre, est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous la dénomination sociale Saint-Gobain Isover depuis le 7 juillet 2006 pour exercer une activité de fabrication, d'achat et de vente de tous produits d'origine minérale, organique ou végétale destinés à l'isolation, et exploite son activité sous le nom commercial et l'enseigne Saint-Gobain Isover et Isover Saint-Gobain ainsi que sur internet.

Elle est titulaire :

- de la marque française semi-figurative en couleurs : déposée le 19 février 1999 sous le n° 99776398, pour désigner les produits suivants en classes 17 et 19 : « Matières servant à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matériaux isolants à base de laine minérale ou fibres minérales sous forme de laine en vrac, bandes, voiles, feutres, nappes, panneaux, plaques, bourrelets, coquilles, tuyaux, rouleaux et pièces moulées, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à l'étanchéité. Matériaux isolants revêtus d'un surfaçage. Dispositifs de fixation en plastique pour matériaux de construction ; dispositifs de fixation en plastique pour produits d'isolation et d'étanchéité. Matériaux de construction non métalliques. Produits bitumineux, ossatures non métalliques pour la construction ; dispositifs de fixation non métalliques pour la construction ; panneaux, plaques, rouleaux, surfacés ou non, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à la protection contre l'humidité et le feu utilisés dans la construction des murs, cloisons, plafonds, sous-plafonds, sols, toitures, sous-toitures, bardages et complexes d'isolation sous étanchéité » ;

- de la même marque semi-figurative en couleurs de l'Union européenne déposée le 7 juin 1999 sous le n° 1196948, et sous priorité de la marque française précitée, pour désigner les mêmes produits.

Elle est également titulaire des noms de domaine « Isover.com » et « Isover.fr », enregistrés respectivement le 11 décembre 1996 et le 21 septembre 1999.

Le 5 avril 2016, MM. [U], [Y] et [J] ont déposé une demande de marque française semi-figurative en couleurs : sous le n° 4262247, pour désigner, en classes 16, 17 et 27, les « produits de l'imprimerie ; articles de papeterie ; papier ; feuilles métalliques isolantes ; tentures murales non en matières textiles ; papiers peints ».

Au mois de juillet 2016, la société Saint-Gobain Isover a constaté que M. [J] exploitait la dénomination « Isocover », notamment sur le site internet http://www.isocover.fr (devenu https://isocover.fr) dont il a enregistré le nom de domaine le 15 avril 2016, pour proposer à la vente des papiers peints isolants.

La dénomination était utilisée seule sous la forme « IsocoverTM » ou associée à un logo et au slogan « Isolation wallpaper for radio frequency identification ».

La société Saint-Gobain Isover a assigné MM. [U], [Y] et [J] en contrefaçon de ses marques « Isover », atteinte à la marque renommée, concurrence déloyale et nullité de la marque « Isocover » et a sollicité diverses mesures accessoires.

Moyens

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses troisième à huitième branches, sur le deuxième moyen, pris en ses première et troisième branches, sur le quatrième moyen et sur le cinquième moyen, ci-après annexés

Motivation


8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

9. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par la marque n° 4262247 « Isocover », alors :

« 1°/ que l'appréciation globale du risque de confusion entre deux marques se fonde sur l'impression d'ensemble qu'elles produisent sur le consommateur moyen des produits ou des services tels que désignés dans leurs demandes d'enregistrement, indépendamment des produits ou services effectivement commercialisés sous les marques en présence ; que la demande d'enregistrement des marques "Isover" visait : "Matières servant à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matériaux isolants à base de laine minérale ou fibres minérales sous forme de laine en vrac, bandes, voiles, feutres, nappes, panneaux, plaques, bourrelets, coquilles, tuyaux, rouleaux et pièces moulées, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à l'étanchéité. Matériaux isolants revêtus d'un surfaçage. Dispositifs de fixation en plastique pour matériaux de construction ; dispositifs de fixation en plastique pour produits d'isolation et d'étanchéité. Matériaux de construction non métalliques. Produits bitumineux, ossatures non métalliques pour la construction ; dispositifs de fixation non métalliques pour la construction ; panneaux, plaques, rouleaux, surfacés ou non, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à la protection contre l'humidité et le feu utilisés dans la construction des murs, cloisons, plafonds, sous-plafonds, sols, toitures, sous-toitures, bardages et complexes d'isolation sous étanchéité", tandis que la demande d'enregistrement de la marque "Isocover" visait : "Produits de l'imprimerie ; articles de papeterie ; papier ; feuilles métalliques isolantes ; tentures murales non en matières textiles ; papiers peints" ; qu'en énonçant, pour affirmer que les publics de référence des produits en cause étaient différents, que les premiers étaient des "produits isolants traditionnels" et les seconds des "solutions d'isolation très spécifiques", la cour d'appel, qui s'est référée, non aux produits visés dans la demande d'enregistrement de la marque "Isocover", qui ne présentent pas de spécificité, mais aux produits effectivement commercialisés sous cette marque, qui répondent à des demandes spécifiques, a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009 ;

2°/ qu'en toute hypothèse, en se bornant, pour rejeter l'action en contrefaçon, à affirmer que les publics de référence des produits en cause n'étaient pas identiques, celui des produits visés par les marques de la société Saint-Gobain Isover étant essentiellement composé de professionnels du bâtiment de second oeuvre et de particuliers entreprenant des travaux de construction et d'isolation, et celui des produits visés par la marque contestée étant constitué de professionnels de l'aménagement intérieur ou de solutions d'isolation très spécifiques, ainsi que des particuliers amateurs de décoration d'intérieur, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les publics de référence ne se recoupaient pas au moins partiellement, le second oeuvre s'entendant des travaux de finition, lesquels rejoignent l'aménagement intérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009. »

Motivation

Réponse de la Cour

10. Après avoir énoncé que le risque de confusion doit s'apprécier globalement par référence au contenu des enregistrements des marques vis-à-vis du public pertinent des produits tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte de ceux effectivement exploités sous la marque, l'arrêt relève, par motifs adoptés, que la locution anglaise « Isolator wallpapers for radio frequency identification », présente dans la marque semi-figurative « Isocover », permet de préciser le domaine des produits concernés par celle-ci puis retient que le public de référence est constitué, pour les produits visés dans l'enregistrement des marques « Isover », de professionnels du bâtiment de second oeuvre et de particuliers entreprenant des travaux de construction et d'isolation et, pour les produits visés par la marque « Isocover », de professionnels de l'aménagement intérieur ou de solutions d'isolation très spécifique, à la différence des produits isolants traditionnels visés dans le dépôt de la marque première, ainsi que de particuliers amateurs de décoration intérieure.

11. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a apprécié concrètement le public pertinent au regard des produits visés respectivement dans l'enregistrement des marques en présence, sans se référer aux produits effectivement commercialisés sous la marque « Isocover », et qui, ayant procédé à la recherche qui lui était demandée, a considéré que, contrairement à ce que soutenait la société Saint-Gobain Isover, le public pertinent n'est pas strictement identique, a fait une exacte application des articles L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, interprété à la lumière de l'article 5 de la directive n° 2008/95, et de l'article 9 du règlement n° 207/2009.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Moyens

Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

13. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par l'usage du terme et du logo « Isocover », alors « que pour exclure le risque de confusion entre les marques "Isover" et le terme et le logo "Isocover", la cour d'appel s'est référée à l'analyse des ressemblances entre les marques "Isover" et "Isocover" ; que la censure à intervenir sur le premier moyen entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Motivation

Réponse de la Cour

14. Le rejet du premier moyen rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence.

Moyens

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par l'usage du nom de domaine « isocover.fr », alors « que la cour d'appel a exclu tout risque de confusion entre les marques "Isover" et le nom de domaine "isover.fr" "pour les mêmes raisons que développées précédemment" ; que la censure à intervenir sur les deux premiers moyens entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Motivation

Réponse de la Cour

Le rejet des deux premiers moyens rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence.

Moyens

Sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité de la marque française semi-figurative n° 4262247 « Isocover », alors :
« 1°/ que pour exclure que la marque "Isocover" porte atteinte aux marques antérieures "Isover" ou à la marque renommée éponyme, la cour d'appel a énoncé que, "comme indiqué précédemment, eu égard à l'absence de similitudes visuelles, sonores et conceptuelles entre les signes et de risque de confusion en conséquence pour le public concerné, l'atteinte à la marque "Isover" par la marque seconde n'est pas constituée" ; que la censure à intervenir sur les premier et quatrième moyens de cassation entraînera la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que la société Saint-Gobain Isover invoquait, au soutien de sa demande d'annulation de la marque "Isocover", l'atteinte à l'ensemble des "signes distinctifs lui appartenant", incluant ses noms de domaine "isover.fr" et "isover.com" ainsi que l'enseigne "Isover", et sollicitait l'annulation de la marque litigieuse notamment en tant qu'elle portait atteinte aux noms de domaine "isover.fr" et "isover.com" et à l'enseigne "Isover" ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande en nullité de la marque "Isocover", à rechercher si la marque litigieuse portait atteinte aux marques, à la dénomination sociale et au nom commercial de la société Saint-Gobain Isover, sans répondre au chef de conclusions tiré de l'atteinte à ses noms de domaine et à son enseigne, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Motivation

Réponse de la Cour

D'une part, le rejet des premier et quatrième moyens rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence.

D'autre part, en dépit de la formule générale du dispositif qui « rejette la demande en nullité de la marque semi-figurative française "Isocover" n° 164262247 », la cour d'appel n'a pas statué sur le chef de demande tiré des atteintes alléguées aux droits antérieurs constitués des noms de domaine « isover.com » et « isover.fr » ainsi que de l'enseigne de la société Saint-Gobain Isover, dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision qu'elle les ait examinées.

L'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable.

Dispositif

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Saint-Gobain Isover aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Saint-Gobain Isover et la condamne à payer à MM. [Y], [J] et [U] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.