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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 7, 9 février 2023, n° 20/13093

PARIS

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Bell France (SAS), Groupe Coop (Sté), Bell Food Group AG (SA), Maison de Savoie (SAS), Salaison Polette et Cie (SAS), Bell France Holding (SAS)

Défendeur :

Fleury Michon (SA), Charcuteries Cuisinées du Plélan (SAS), Fleury Michon LS (SAS), Société Holding de Contrôle et de Participations (SAS), Société d'innovation Culinaire (SAS), Brocéliande ALH (SAS), Cooperl Arc Atlantique (SCA), Compagnie Financière et de Participations Roullier (SA), Nestlé Entreprises (SAS), Nestlé (SA), Herta (SAS), Société Civile des Mousquetaires (Sté), Les Mousquetaires (SAS), SCO (SAS), Salaisons Celtiques (SAS), Souchon d'Auvergne (SAS), Luissier Bordeau Chesnel (SAS), Savencia Holding (SCA), Loste (SAS), Sapresti Traiteur (SAS), CA Animation (SA), Aoste (SNC), Campofrio Food Group Holding SL (Sté), Campofrio Food Group SAU (Sté), Campofrio Food Group France Holding (SAS), Aubret (SAS), Autorité de la concurrence, Ministre chargé de l'Economie

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Schmidt

Conseillers :

M. Barbier, Mme Tréard

Avocats :

Me Boccon Gibod, Me Guibert, Me Gavoty, Me Billard, Me Lallement, Me Bélot, Me Koehler de Montblanc, Me Marchal, Me Teytaud, Me Jalabert-Doury, Me Grappotte-Benetreau, Me Grall, Me Illouz, Me Khayat, Me Baechlin, Me Trabucchi, Me Lee, Me Guyonnet, Me Gransard, Me Helfer, Me Zelenko, Me Blutel

CA Paris n° 20/13093

8 février 2023

Vu la décision de l'Autorité de la concurrence n° 20-D-09 du 16 juillet 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des achats et ventes des pièces de porc et de produits de charcuterie ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 18 septembre 2020 par les sociétés Fleury Michon, Charcuteries cuisinées du Plélan, Fleury Michon LS, Société holding de contrôle et de participations, Société d'innovation culinaire ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 18 septembre 2020 par les sociétés Groupe Coop Société Coopérative, Bell Food Group AG, Bell France Holding, Maison de Savoie, Salaison Polette et Cie, Bell France, Le Saloir de [Localité 58], Le Saloir de [Localité 66] et Val de [Localité 56] ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 24 septembre 2020 par les sociétés Brocéliande - ALH et Cooperl Arc Atlantique ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 28 septembre 2020 par les sociétés Souchon d'Auvergne, Savencia Holding et Luissier Bordeaux Chesnel ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 30 septembre 2020 par les sociétés CA Animation, [Adresse 54], CA Traiteur et Salaisons, [Adresse 51] et Sapresti Traiteur ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 30 septembre 2020 par les sociétés Herta, Nestlé Entreprises et Nestlé ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 2 octobre 2020 par les sociétés Aoste, Campofrio Food Group France Holding, Campofrio Food Group Holding S.L. et Campofrio Food Group S.A.U. ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 2 octobre 2020 par les sociétés Les Mousquetaires et la société civile des Mousquetaires ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 2 octobre 2020 par les sociétés Salaisons Celtiques et Salaisons du Guémené ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 2 octobre 2020 par la société S.C.O. ;

Vu la déclaration de recours déposée au greffe de la Cour le 5 octobre 2020 par la société Compagnie Financière et de Participations Roullier ;

Vu la déclaration d'intervention volontaire déposée au greffe de la Cour le 19 octobre 2020 par la société Aubret ;

Vu la déclaration de recours incident déposée au greffe de la Cour le 25 novembre 2020 par les sociétés Brocéliande - ALH et Cooperl Arc Atlantique ;

Vu l'ordonnance du délégué du premier président de la Cour du 31 mars 2021 ayant ordonné la jonction des recours précités ;

Vu les conclusions des sociétés Groupe Coop Société Coopérative, Bell Food Group AG, Bell France Holding, Maison de Savoie, Salaison Polette et Cie, Bell France, Le Saloir de [Localité 58], Le Saloir de [Localité 66] et Val de [Localité 56] demandant la protection du secret des affaires, déposées au greffe le 10 janvier 2023 ;

Vu le courriel adressé au greffe le 19 janvier 2023 par lequel les sociétés Aoste, Campofrio Food Group France Holding, Campofrio Food Group Holding S.L. et Campofrio Food Group S.A.U. ont indiqué à la Cour qu'elles ne présenteront pas d'observations s'agissant des demandes relatives au secret des affaires ;

Vu le courriel adressé au greffe le 25 janvier 2023 par lequel le ministre chargé de l'économie a informé la Cour de ce qu'il n'entendait pas présenté d'observations ;

Vu le courriel adressé au greffe le 27 janvier 2023 par lequel l'Autorité de la concurrence a informé la Cour de ce qu'elle ne s'opposait pas à cette demande ;

Vu les courriels adressés au greffe les 30 janvier et 1er février 2023 par lesquels les sociétés Cooperl ARC Atlantique et Broceliande ALH, d'une part, et les sociétés Herta, Nestlé Entreprises et Nestlé, d'autre part, ont informé la Cour de ce qu'elles ne s'opposaient pas à cette demande ;

Vu le courriel adressé au greffe le 30 janvier 2023 par lequel le conseil des sociétés Souchon d'Auvergne, Savencia Holding et Luissier Bordeaux Chesnel a informé la Cour de ce qu'il n'entendait pas présenté d'observations sur cette demande ;

Vu le courriel adressé au greffe le 2 février 2023 par lequel le conseil de la société Aubret a informé la Cour de ce qu'il n'entendait pas présenter d'observations sur cette demande ;

Vu le courriel adressé au greffe le 2 février 2023 par lequel le conseil des sociétés Les Mousquetaires, Salaisons Celtiques aux droits de Salaisons du Guémene, Salaisons celtiques, S.C.O et de la société Civile des Mousquetaires a informé la Cour de ce qu'il n'entendait pas présenter d'observations sur cette demande ;

Vu l'article R. 153-4 du code de commerce autorisant le juge à statuer, sans audience, sur la communication ou la production de la pièce et ses modalités ;

L'affaire ayant été transmise au ministère public et les autres parties à l'instance n'ayant transmis aucune observation sur la demande de protection de secret des affaires ;

Par la décision n° 20-D-09 du 16 juillet 2020 (ci-après la décision attaquée), l'Autorité a sanctionné plusieurs sociétés actives dans le secteur des achats et ventes des pièces de porcs et de produits de charcuterie, pour avoir mis en œuvre trois pratiques d'entente, contraires aux articles L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne (ci-après le TFUE) :

en s'accordant et se concertant, au travers d'échanges bilatéraux, pour défendre une position commune sur les variations de prix d'achat hebdomadaire du jambon sans mouille dans leurs négociations avec les abatteurs (grief n° 1) ;

en s'accordant et se concertant pour la commercialisation de produits crus de charcuterie sous marques de distributeurs ou premier prix, d'une part, pour coordonner leurs demandes d'augmentation de prix auprès des enseignes de la grande distribution, d'autre part, pour organiser leurs réponses, notamment en prix, aux appels d'offres des enseignes de la grande distribution (grief n° 2) ;

en s'accordant et se concertant pour la commercialisation de produits de charcuterie cuits sous marques de distributeurs ou premier prix pour organiser leurs réponses, notamment en prix, aux appels d'offres des enseignes de la grande distribution (grief n° 3).

Les sociétés Group Coop Société Coopérative, Bell Food Group AG, Bell France Holding, et ses filiales françaises opérationnelles les sociétés Maison de Savoie M.D.S, Salaison Polette et Cie, Bell France, Le Saloir de [Localité 58], le Saloir de [Localité 66] et Val de [Localité 56] (ci-après le groupe Coop) ont formé un recours contre cette décision, qui a retenu leur responsabilité au titre du grief n° 2 et a prononcé une amende totale de 6.009.000 euros, solidaire entre elles.

Aux termes de sa demande de protection du secret des affaires, le groupe Coop demande de :

restreindre à la Cour, à l'Autorité, ainsi qu'au ministre chargé de l'économie, en leur version confidentielle, l'accès aux données et pièces suivantes :

- données financières présentées aux paragraphes 141, 157, 158, 159, 160, 161, 165, 166, 167, 169, 170, 171 et 177 de leur exposé complet des moyens en date du 10 janvier 2023 ;

- pièces n° 1, n° 2, n° 5-1, n° 5-2 et n° 6 ;

Juger que la motivation de la décision et les modalités de publicité de celle-ci seront adaptées aux nécessités de la protection du secret des affaires.

Le groupe Coop expose que ce sont des éléments destinés à apprécier la situation financière de leurs filiales françaises, qu'ils sont confidentiels, fondés sur des données commerciales sensibles et concernent les perspectives stratégiques de ces sociétés.

La Cour, par courriel du 16 janvier 2023, dont elle a informé le ministère public le même jour, a invité les parties, l'Autorité et le ministre chargé de l'économie à faire part de leur position sur cette demande, au plus tard le 31 janvier 2023. Aucune observation s'opposant à la protection sollicitée n'a été déposée au greffe dans le délai imparti.

Sur ce, la Cour

A titre liminaire, la Cour relève que l'exposé des moyens n° 2 déposé le 10 janvier 2023 a restructuré et complété l'exposé des moyens initial et qu'une nouvelle numérotation a été appliquée à certaines des pièces versées aux débats.

Il n'en demeure pas moins, comme cela résulte de l'arrêt rendu par cette Cour le 20 mai 2021, que sont déjà couverts par la protection à nouveau demandée :

les paragraphes 157 (anciennement 109 dans l'exposé des moyens initial), 158 (anciennement 110), 159 (anciennement 112), 160 (anciennement 113), 169 (anciennement 114), 161 (anciennement 115) et 177 (anciennement 119) ;

les pièces n° 1 (rapports établis par EY communiqué en réponse au rapport des services d'instruction), n° 2 (réponse au questionnaire relatif à la capacité contributive des entreprises communiqué aux services d'instruction en réponse au rapport), n° 3 (courriel des conseils de Bell Food à l'Autorité du 14 mai 2020, anciennement pièce n° 4).

S'agissant des éléments figurant aux autres paragraphes visés par la demande (141, 165, 166, 167,170, et 171) et des autres pièces n° 5.1 (rapport établi par [G] & [H] le 15 décembre 2022 relatif aux difficultés financières des sociétés françaises de Bell Food Group (Belle France)), n° 5.2 (comptes annuels des mêmes sociétés pour les années 2019 à 2022) et n° 6 (preuve du paiement de la sanction en date du 15 février 2021), la Cour relève qu'ils portent sur la situation financière et les capacités contributives des filiales et remplissent, ce point n'étant pas contesté, les critères énoncés à l'article L. 151-1 du code de commerce.

Ces éléments venant au soutien d'un moyen tendant à adapter le montant de la sanction à leurs capacités contributives et étant sans aucune incidence sur l'exercice des droits de la défense des autres parties à l'instance, il y a lieu de faire droit à cette demande.

PAR CES MOTIFS

La Cour :

CONSTATE, dans l'exposé des moyens n° 2, que les paragraphes 157 (anciennement 109 dans l'exposé des moyens initial), 158 (anciennement 110), 159 (anciennement 112), 160 (anciennement 113), 169 (anciennement 114), 161 (anciennement 115) et 177 (anciennement 119), ainsi que les pièces annexées n° 1 (rapports établis par EY communiqué en réponse au rapport des services d'instruction), n° 2 (réponse au questionnaire relatif à la capacité contributive des entreprises communiqué aux services d'instruction en réponse au rapport), n° 3 (courriel des conseils de Bell Food à l'Autorité du 14 mai 2020, anciennement pièce n° 4 de l'exposé des moyens initial) sont déjà couverts par une protection au titre des secrets d'affaire qui poursuit ses effets dans le cadre de la présente instance ;

DIT que l'accès aux pièces n° 5.1, 5.2 et 6 et à la version confidentielle de l'exposé des moyens n° 2 portant sur les paragraphes 141, 165, 166, 167, 170 et 171 sera restreint à la Cour, à l'Autorité de la concurrence, au ministre chargé de l'économie et au ministère public ;

DIT que la motivation de la décision à intervenir sur le fond et les modalités de publicité de celle-ci seront adaptées aux nécessités de la protection du secret des affaires accordée à ces pièces et extraits de l'exposé des moyens ;

RÉSERVE les dépens.