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Décisions

Cass. 2e civ., 14 novembre 2013, n° 12-26.930

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

M. Adida-Canac

Avocat général :

M. Mucchielli

Avocats :

SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Waquet, Farge et Hazan

Douai, du 13 sept. 2012

13 septembre 2012

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'alléguant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme qu'elle imputait aux sociétés Atout services (ATS) et ATS Nord, sociétés du groupe ATS, exerçant comme elle une activité de transport et d'affrètement d'urgence, ainsi qu'à d'anciens salariés dont MM. X... et Y..., récemment embauchés au sein de ce groupe, la société Taxicolis a obtenu, le 25 novembre 2010, du président d'un tribunal de commerce, statuant sur requête, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, la désignation d'un huissier de justice et d'un expert pour rechercher dans les locaux de la société ATS Nord tous documents de nature à établir, au cours des trois années écoulées, l'existence de relations contractuelles avec six clients nommément désignés ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 145, 232 à 284-1 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rétracter l'ordonnance sur requête, prononcer la nullité de la procédure poursuivie en exécution de cette ordonnance et notamment le pré-rapport du 9 décembre 2010 et ordonner la remise à la société ATS Nord des différents documents, supports, matériels informatiques remis, copiés, reproduits ou produits à l'occasion de l'exécution de l'ordonnance sur requête rétractée, l'arrêt retient que la société Taxicolis ne se contente pas de demander des mesures clairement identifiées et déterminées ; qu'indépendamment de celles-ci qui visent cinq clients, elle a aussi sollicité et obtenu que l'huissier soit habilité à se rendre « en tout autre lieu où serait assurée la gestion administrative et/ou l'exploitation de la société ATS Nord, y compris hors de sa compétence territoriale », à « se faire communiquer tout document de nature à établir le cas échéant à l'origine de cette relation (devis, acompte, échange de mails, fax, courriers, contrats etc¿), entre la société ATS et chacun des clients listés » à « avoir accès à l'ensemble des serveurs et postes informatiques se trouvant sur place », à « avoir accès à tous supports externes et internes de données informatiques ou documents susceptibles de contenir lesdits fichiers, listing ou courriels, aux fins de rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de sa mission », à « prendre des photographies et/ou des copies sur support papier et/ou informatique des éléments identifiés », à « effectuer des copies complètes des disques magnétiques et autres supports de données associés aux dits moyens, après avoir restauré si possible les données qui auraient été déplacées ou effacées pour s'assurer de l'exhaustivité des éléments copiés pour les besoins de la présente mesure », et « en cas de nécessité, à procéder ou à faire procéder, postérieurement à l'appréhension des éléments, s'il s'avérait que le tri ne puisse être effectué sur place » ; que l'autorisation donnée à l'huissier de justice d'exécuter cette mission générale excéde manifestement les limites et prévisions de l'article 145 du code de procédure civile ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des productions que la mission d'investigation donnée à l'huissier était circonscrite aux faits de concurrence déloyale dénoncés par la société Taxicolis dont pouvait dépendre la solution du litige, qu'elle était limitée géographiquement aux seuls locaux de la société ATS Nord, qu'elle était également limitée aux seules relations contractuelles de cette société avec un nombre limité de clients sur une durée déterminée, de sorte que, ne portant atteinte à aucune liberté fondamentale, elle constituait un mode de preuve légalement admissible, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu les articles 16, 145, 495, alinéa 3, et 503 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rétracter l'ordonnance sur requête, prononcer la nullité de la procédure poursuivie en exécution de cette ordonnance et notamment le pré-rapport du 9 décembre 2010 et ordonner la remise à la société ATS Nord des différents documents, supports, matériels informatiques remis, copiés, reproduits ou produits à l'occasion de l'exécution de l'ordonnance sur requête rétractée, l'arrêt retient que ladite ordonnance n'a été signifiée qu'à la société ATS Nord, alors que la mission confiée à l'huissier de justice concerne plus largement la société ATS, MM. Y... et X..., salariés de cette dernière, ce qui constitue une atteinte aux droits de la défense ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société ATS Nord, à qui la notification avait été faite, ne pouvait se prévaloir d'un défaut de notification à l'égard d'autres personnes, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité et la fin de non-recevoir élevées par la société ATS Nord, déclaré irrecevable la demande de communication de pièces formulée par la société Taxicolis, et rejeté la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société ATS Nord, l'arrêt rendu le 13 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée.