Cass. crim., 24 juin 2015, n° 13-87.972
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
M. Raybaud
Avocat général :
M. Le Baut
Avocats :
Me Le Prado, SCP Didier et Pinet
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 8, 388, 495-7 à 495-14, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique et déclaré M. A... coupable de violences volontaires ayant entraîné une ITT de plus de huit jours, sur conjoint, et de menaces de mort réitérées et l'a condamné pénalement et civilement ;
" aux motifs que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont rejeté l'exception de prescription soulevée par l'avocat du prévenu, le soit-transmis délivré par le parquet de Meaux le 23 mars 2009 visant à localiser le prévenu pour lui délivrer une convocation en CRPC constituant sans conteste un acte de l'instruction, la Cour de cassation considérant comme tel « les actes qui pour objet de constater une infraction, d'en rassembler les preuves ou d'en rechercher les auteurs » ;
" 1°) alors qu'une convocation en vue d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ne peut constituer un acte de poursuite dès lors qu'elle ne tend pas à la réalisation de l'un des actes de poursuite visés par l'article 388 du code de procédure pénale et que seul le jugement d'homologation peut être considéré comme un acte de poursuite, au sens des articles 7 et 8 du code de procédure pénale ; qu'intervenant alors que le parquet estime les preuves suffisantes pour imputer les faits à la personne mise en cause, une telle convocation ne peut être assimilée à un acte d'instruction ; que ne peut constituer un acte de poursuite et d'instruction, un soit-transmis destiné à localiser une personne mise en cause aux fins de lui délivrer une convocation pour une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, un tel acte intervenant à un moment où les éléments de preuve de l'infraction ont été rassemblés et son auteur identifié, son adresse resterait-elle en question, et que la convocation en vue d'initier la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité n'est pas un acte de poursuite, qu'elle peut ne pas aboutir à une reconnaissance de culpabilité et que le parquet n'est pas tenu de poursuivre la personne mise en cause en cas d'échec de ladite procédure ; que, dès lors, en jugeant que le soit-transmis du 23 mai 2009 visant à localiser le prévenu pour lui délivrer une convocation en CRPC constituait un acte de poursuite, la cour d'appel a méconnu les articles précités ;
" 2°) alors qu'en tout état de cause, l'article 495-14 du code de procédure pénale interdisant de conserver les éléments d'information sur une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, aucun élément du dossier ne permet de s'assurer que le parquet a effectivement mis en oeuvre cette procédure, le soit-transmis aux fins de convocation pour une telle procédure ne suffisant dès lors pas à établir l'intention de poursuivre les faits " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. A..., ayant relevé appel du jugement du 22 novembre 2011 rendu par le tribunal correctionnel le condamnant des chefs de violences aggravées et de menaces de mort réitérées, a invoqué l'exception de prescription de l'action publique, plus de trois ans s'étant écoulés entre la clôture de l'enquête et sa citation devant ledit tribunal ;
Attendu que, pour écarter cette exception, les juges du second degré retiennent que le délai de prescription a été interrompu par un soit-transmis adressé, le 23 mars 2009, par le procureur de la République aux services d'enquête en vue de rechercher l'adresse du prévenu et de lui remettre une convocation en justice ;
Attendu qu'en cet état, la cour a justifié sa décision ;
Qu'en effet, les instructions données par le procureur de la République à l'effet de procéder à des recherches pour découvrir l'adresse du prévenu en vue de sa comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, constituent un acte tendant à la poursuite des infractions à la loi pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-11 et 222-12, 6°, du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de violences volontaires ayant entraîné une ITT de plus de huit jours, par conjoint, et l'a condamné à une peine de huit mois d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve et s'est prononcé sur les intérêts civils ;
" aux motifs que Mme Linda X... a déclaré que le 7 mai 2006, M. A... l'avait poussée violemment contre une porte, lui occasionnant ainsi une fracture de la clavicule lui ayant valu quatre-vingt jours d'ITT ; qu'elle est restée constante dans ses déclarations, tant lors de l'enquête que devant le tribunal et la cour ; que les constatations médico-légales corroborent sa version des faits ; que le prévenu, en dépit des déclarations fluctuantes visant à amoindrir sa responsabilité, ne conteste pas l'avoir poussé volontairement ; qu'il en résulte que la réalité matérielle des faits allégués par la victime ne peut être contestée ; qu'il est acquis que les parties étaient partenaires de PACS au moment des faits ; qu'enfin, l'élément intentionnel de l'infraction se déduit de la colère du prévenu, qui n'a pas supporté la remarque de sa compagne, étant observé par ailleurs qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier ou des débats, que son discernement ait été altéré ou aboli au moment des faits ;
" alors que constituent des violences les coups portés à une personne ou tout autre acte de nature à causer un choc émotif, dont l'auteur avait l'intention de commettre tant l'acte que de causer un dommage ou de créer un tel choc ; que, pour retenir la culpabilité du prévenu, la cour d'appel constate, notamment, que ce dernier avait lui-même admis avoir poussé la partie civile et qu'il avait agi en étant en colère ; qu'en l'état de tels motifs, quand un tel geste ne constitue pas en lui-même un acte de violence s'il n'est pas établi que son auteur cherchait sinon à blesser la victime, au moins à créer un choc émotif, ce qui ne résulte aucunement des termes de l'arrêt, la colère n'impliquant pas elle-même une telle intention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-17 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable de menaces de mort réitérées et l'a condamné pénalement et civilement ;
" aux motifs que Mme X... a déclaré que le 7 mai 2006 et en juillet de la même année, son compagnon l'avait menacée à plusieurs reprises, tant directement que par téléphone ; qu'elle a évoqué des faits précis et répétés, l'intéressé lui ayant promis de " l'égorger si elle parlait ", de la " tuer si elle reprenait son travail " et lui promettant " qu'elle ne dépasserait pas la quarantaine " ; que " les dénégations du prévenu sur ce point ne sauraient emporter la conviction de la cour face au témoignage du voisin de la victime, M. Y..., qui a attesté de ce que l'intéressé la menaçait de mort et lui avait notamment dit qu'il allait l'éclater contre le mur ; que Mme Z..., collègue de Mme X..., chez qui celle-ci s'était réfugiée quelques jours en juillet 2006, a rédigé une attestation produite aux débats indiquant que M. A... avait laissé plusieurs messages de mort sur sa messagerie téléphonique " ;
" alors que tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ; qu'en retenant que les menaces de morts réitérées étaient établies par le témoignage d'un voisin du couple, qui faisait état du fait que le prévenu avait notamment dit qu'il « allait l'éclater contre le mur » et par une attestation faisant état de menaces de morts, sans préciser ce qu'étaient ces prétendues menaces réitérées, une seule menace étant retranscrite et en quoi le témoignage et l'attestation corroboraient les menaces dont faisait état la partie civile, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits de violences aggravées et menaces de mort réitérées dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que les moyens, qui reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.