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Décisions

Cass. com., 9 juin 1992, n° 90-13.400

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Hatoux

Rapporteur :

Mme Pasturel

Avocat général :

Mme Le Foyer de Costil

Avocats :

Me Cossa, SCP Le Griel

Versailles, du 25 janv. 1990

25 janvier 1990

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans la procédure de redressement judiciaire des sociétés Sporteus, Soraim, Clemag et Relci, le Tribunal, par jugement du 5 février 1988, a arrêté un plan de redressement organisant la cession des entreprises au profit de la société Soreval international (société Soreval), en ordonnant la reprise par le cessionnaire des contrats de franchise en cours ; que deux franchisés ayant interjeté appel de cette décision, la société Soreval a formé à son tour un appel incident et a retiré sa proposition d'acquisition des actifs en se fondant sur les dispositions de l'article 21, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985 ; que par arrêt du 23 juin 1988, la cour d'appel, après avoir accueilli l'appel principal des franchisés et prononcé la nullité du jugement à leur égard, a déclaré d'office irrecevable l'appel incident de la société Soreval aux motifs, d'une part, que cet appel, en tant que fondé sur la présence dans le plan de cession de charges autres que les engagements souscrits par le cessionnaire était tardif et, d'autre part, que l'existence d'un vice du consentement sur lequel la société Soreval s'appuyait pour demander l'annulation de la décision entreprise relevait de la procédure spécifique de rétractation des jugements prévue lorsque sont épuisées les voies de recours de droit commun ; que cette décision a été cassée par arrêt de la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de Cassation en date du 2 octobre 1990, mais seulement du chef de l'irrecevabilité de l'appel incident formé sur le premier fondement, la cour d'appel ayant statué sans inviter les parties à présenter leurs observations ; que la société Soreval ayant été, à son tour, mise en liquidation judiciaire le 3 novembre 1988 sans qu'aient été passés les actes nécessaires à la réalisation de la cession, M. Jeanne, commissaire à l'exécution du plan, a rendu compte au Tribunal de cette situation en vue du prononcé d'une résolution ; que M. X..., liquidateur de la société Soreval, a soutenu que le plan était devenu sans objet par suite du retrait de l'offre d'acquisition formulée par cette société et qu'il n'y avait donc pas lieu d'en prononcer la résolution ; que, la gestion du fonds de commerce de la société Sporteus ayant été assurée par la société Soreval durant la période postérieure au jugement ayant arrêté le plan de cession, et s'étant soldée par un déficit, il a demandé au Tribunal de fixer le montant de la créance dont la société Soreval était titulaire de ce chef sur la société Sporteus ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le liquidateur de la société Soreval fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la " résolution " du plan, alors, selon le pourvoi, qu'en vertu de l'article 21 de la loi du 25 janvier 1985, l'auteur de l'offre tendant au maintien de l'activité, ne demeure lié au-delà de la décision du Tribunal arrêtant le plan et, notamment en cas d'appel, que s'il y consent ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article susvisé, après avoir constaté que deux cocontractants du cessionnaire ayant interjeté appel du jugement arrêtant le plan avaient obtenu que celui-ci soit déclaré nul à leur égard, en considérant, pour statuer de la sorte, que cet appel ne remettait pas en cause le plan de cession et n'ouvrait pas la faculté de renonciation ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 62, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985 que le repreneur dont l'offre a été retenue par le jugement arrêtant le plan de cession de l'entreprise en redressement judiciaire est tenu d'exécuter ce plan ; qu'il ne peut donc, en cas d'appel interjeté par l'une des personnes mentionnées à l'article 174, alinéa 2, de la loi précitée, se prétendre délié de son offre en vertu des dispositions de l'article 21, alinéa 2, de cette loi, qui lui sont, sur ce point, inapplicables ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux, inopérants, de la cour d'appel, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 87, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, selon lequel, dans l'attente de l'accomplissement des actes nécessaires à la réalisation de la cession, l'administrateur peut, sous sa responsabilité, confier au cessionnaire la gestion de l'entreprise cédée ;

Attendu que, pour débouter le liquidateur de la société Soreval de sa demande tendant à la fixation de la créance de cette société sur la société Sporteus mise par le jugement entrepris en liquidation judiciaire, l'arrêt retient qu'en prenant possession de l'entreprise cédée, la société Soreval a exploité à ses risques et périls en exécution de la chose jugée avec son plein consentement et qu'elle ne peut prétendre avoir agi sous la responsabilité de l'administrateur de la société Sporteus qu'elle est précisément venue remplacer de son plein gré dans la poursuite de l'exploitation ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater l'existence dans le jugement arrêtant le plan de cession d'une disposition prévoyant la prise de possession immédiate de l'entreprise sous la responsabilité du cessionnaire, par dérogation au texte précité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande du liquidateur de la société Soreval tendant à la fixation de la créance de cette société sur la société Sporteus, l'arrêt rendu le 25 janvier 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.