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Décisions

Cass. 3e civ., 18 décembre 1984, n° 83-13.650

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Monegier du Sorbier

Rapporteur :

M. Chevreau

Avocat général :

M. Girard

Avocat :

Me Le Bret

Cass. 3e civ. n° 83-13.650

17 décembre 1984

PREMIER MOYEN DE CASSATION

PRIS DE CE QUE l'arrêt attaqué a prononcé la résiliation du bail des locaux appartenant à M. TANGUY et dans lesquels les époux LE BRENNER exploitent un commerce de débit de boissons, ordonné leur expulsion sous astreinte et les a condamnés à payer au bailleur diverses sommes à titre de dommages-intérêts, d'indemnité d'occupation, de frais de constats et de frais irrépétibles;

 AUX MOTIFS QUE les constats dressés à la requête de TANGUY montrent que des bruits provenant du café troublent la tranquilité des occupants du premier étage de l'immeuble et que la situation ne s'est pas modifiée depuis que la procédure a été introduite bien que les époux LE BRENNER auraient dû prendre les dispositions nécessaires pour éviter les bruits excessifs; que le constat du 1er avril 1980 montre que la cloison qui séparait la salle et l'arrière-salle a été supprimée et que la pièce du rez-de-chaussée qui était une pièce d'habitation sert de réserve pour l'exploitation du café, qu'une douche a été installée dans la pièce de l'entresol et que le plancher est pourri à proximité du bac à douche; que les preneurs ont contrevenu aux clauses 3º et 5º du bail et à leur obligation d'user des lieux loués conformément à la destination prévue au bail; que tous ces manquements sont suffisamment graves pour justifier la résiliation de la location;

ALORS, D'UNE PART, QUE saisie de conclusions soutenant que le caractère excessif des bruits litigieux, constatés dans l'appartement du bailleur situé au premier étage juste au-dessus de la salle du café et seulement séparé de celle-ci par un plancher et une couche de plâtre sur bois, était dû au fait que l'isolation phonique n'était pas adaptée aux exigences nouvelles de l'exploitation d'un débit de boissons moderne comportant notamment un "juke-box", et soulignant encore qu'il appartenait au bailleur de réaliser les travaux d'insonorisation qui se sont révélés nécessaires au cours de l'exécution du bail pour que la chose louée soit en état de servir à l'usage auquel elle est destinée, la Cour, qui a statué par une simple affirmation sans donner aucun motif de nature à justifier qu'il aurait appartenu aux preneurs de prendre les dispositions nécessaires pour éviter les bruits excessifs, a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1719 et 1720 du Code Civil;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le bail ne comportant aucune indication relative à la destination de la pièce du rez-de[1]chaussée, la Cour qui, saisie de conclusions soutenant que cette pièce avait une destination commerciale, s'est bornée à une simple affirmation sans danner aucun motif de nature à justifier que ladite pièce eût été à usage d'habitation, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil;

ALORS ENFIN QU'en s'anstenant de répondre aux conclusions des épeux LE BRENNER, soulignant que la suppression de la cloison entre salle et arrière-salle ainsi que l'installation de la douche et le pourrissement consécutif du parquet étaient réalisés antérieurement à leur entrée dans les lieux de sorte que, le manquement contractuel du cédant ne pouvant être opposé aux cessionnaires du bail, ces infractions ne leur étaient pas imputables, la Cour a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et violé l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

PRIS DE CE QUE, additant au jugement, l'arrêt attaqué a condamné les époux LE BRENNER à payer à M. TANGUY Document Lamy Liaisons soumis au respect des Conditions Générales d’Utilisation et des Conditions Générales de Vente des produits et services Lamy Liaisons. 1 / 3 10.000 F de dommages-intérêts;

AUX MOTIFS QU'il doit être fait droit à la demande additionnelle présentée par TANGUY en cause d'appel en raison du préjudice qu'il a subi depuis le jugement;

ALORS QU'en statuant ainsi, sans préciser la nature du préjudice qu'eile entendait réparer, la Cour, qui consacre un cumul de réparation pour les mêmes infractions au bail, a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et violé l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Sur quoi, LA COUR, en l'audience publique de ce jour.

Sur le premier moyen:

Attendu que les époux Le Brenner, exerçant un commerce de débit de boissons dans un immeuble appartenant à M. Tanguy, font grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 17 mars 1983) d'avoir prononcé la résiliation du bail, en retenant à leur charge divers manquements aux obligations résultant du contrat, alors, selon le moyen, "d'une part, que saisie de conclusions soutenant que le caractère excessif des bruits litigieux, constatés dans l'appartement du bailleur situé au premier étage juste au-dessus de la salle du café et seulement séparé de celle-ci par un plancher et une couche de plâtre sur bois, était dû au fait que l'isolation phonique n'était pas adaptée aux exigences nouvelles de l'exploitation d'un débit de boissons moderne comportant notamment un "juke-box", et soulignant encore qu'il appartenait au bailleur de réaliser les travaux d'insonorisation qui se sont révélés nécessaires au cours de l'exécution du bail pour que la chose louée soit en état de servir à l'usage auquel elle est destinée, la Cour d'appel, qui a statué par une simple affirmation sans donner aucun motif de nature à justifier qu'il aurait appartenu aux preneurs de prendre les dispositions nécessaires pour éviter les bruits excessifs, a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1719 et 1720 du Code civil; alors, d'autre part, que le bail ne comportant aucune indication relative à la destination de la pièce du rez-de-chaussée, la Cour d'appel qui, saisie de conclusions soutenant que cette pièce avait une destination commerciale, s'est bornée à une simple affirmation sans donner aucun motif de nature à justifier que ladite pièce eût été à usage d'habitation, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134, du Code civil; alors enfin qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions des époux Le Brenner, soulignant que la suppression de la cloison entre la salle et arrière-salle ainsi que l'installation de la douche et le pourrissement consécutif du parquet était réalisés antérieurement à leur entrée dans les lieux de sorte que, le manquement contractuel du cédant ne pouvant être opposé aux cessionnaires du bail, ces infractions ne leur étaient pas imputables, la Cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile"; Mais attendu qu'après avoir relevé que les constats dressés à la requête de M. Tanguy montraient que des bruits provenant du café troublaient la tranquilité des occupants du premier étage de l'immeuble et que la situation ne s'était pas modifiée depuis que la procédure avait été introduite, les juges du fond, qui n'avaient pas à répondre à des conclusions que leur décision rendait inopérantes, ont retenu souverainement que ces manquements étaient suffisamment graves pour justifier la résiliation du bail; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé; Sur le second moyen: Attendu que les époux Le Brenner font grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à M. Tanguy 10.000 francs de dommages-intérêts alors, selon le moyen, que "en statuant ainsi, sans préciser la nature du préjudice qu'elle entendait réparer, la Cour d'appel, qui consacre un cumul de réparation pour les mêmes infractions au bail, a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile";

Mais attendu que l'arrêt décide qu'il doit être fait droit aux demandes additionnelles présentées par M. Tanguy en cause d'appel en raison du préjudice qu'il a subi depuis le jugement, à titre d'indemnité d'occupation et en remboursement des frais de constat engagés après la citation et qui ont été utiles; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé. 

PAR CES MOTIFS:

REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 17 mars 1983, par la Cour d'appel de Rennes.