Cass. 3e civ., 22 octobre 2003, n° 01-17.183
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Dupertuys
Avocat général :
M. Cédras
Avocats :
SCP Boullez, Me Odent
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 octobre 2001), que la société Florida palace a donné à bail à M. X... une salle dans l'immeuble dont elle est propriétaire pour l'organisation du réveillon du 31 décembre 1991 ; qu'elle a également loué une salle à MM. Y... et Z... ainsi qu'à M. A... qui, après avoir renoncé à sa location, a cédé à ces derniers les places qu'il avait déjà vendues ; qu'en raison du nombre de billets vendus par M. Y... et Z... plus important que celui des places contenues dans leur salle, des personnes n'ayant pu accéder à cette salle ainsi que d'autres, étrangères à leur clientèle, ont envahi les lieux loués par M. X..., y commettant des vols et des dégradations et empêchant ses clients d'accéder à sa soirée ; que M. X... a assigné la société Florida palace pour obtenir la réparation de son préjudice ;
Attendu que la société Florida palace fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme à titre d'indemnité, alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte de l'article 1725 du Code civil que le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun droit sur la chose louée, à la seule exception des troubles provenant des personnes dont le bailleur doit répondre ; qu'il s'ensuit que le bailleur n'est pas responsable des vols et dégradations provoqués par des tiers qui lui sont étrangers, bien qu'ils soient les clients des locataires du bailleur qui ne sont pas des tiers, au sens de ce texte ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions précitées ;
2 / que l'article 1725 du Code civil dispensant le bailleur de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voie de fait à sa jouissance sans prétendre à un droit sur la chose louée, le bailleur n'encourt, en principe, aucune responsabilité en raison du vol commis par un tiers au préjudice du locataire dans les locaux faisant l'objet du bail, en l'absence de toute faute de sa part, à moins qu'il n'ait pris l'engagement univoque de garantir le preneur contre les risques de vol ; qu'il s'ensuit qu'en l'état des diligences requises du preneur qui était tenu de veiller à la sécurité des lieux par le recrutement de vigiles, le seul engagement pris par le bailleur d'organiser la surveillance de son établissement ne lui imposait pas de répondre de plein droit des conséquences du vol commis par un tiers qui est intervenu sans sa faute ; qu'en décidant que l'engagement pris par le bailleur d'engager des vigiles lui imposait de garantir son preneur contre les conséquences du vol commis par un tiers, par dérogation aux dispositions précitées de l'article 1725 du Code civil, du seul fait qu'il s'était engagé à recruter des vigiles pour veiller à la sécurité de l'immeuble, quand l'obligation imposée au preneur de veiller à sa propre sécurité lui interdisait de rechercher la garantie de son bailleur à raison des vols et dégradations dont il avait été victime, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil par refus d'application, ensemble la disposition précitée ;
3 / que le bailleur n'encourt, en principe, aucune responsabilité en raison du vol ou des dégradations commis par un tiers au préjudice du locataire dans les locaux faisant l'objet du bail, à moins qu'ils ne se rattachent par un lien direct à la faute du bailleur ou de ses préposés ; qu'en se déterminant, en dernier lieu, sur la seule considération de la vente par la société Florida palace de treize billets, la cour d'appel ,qui n'a pas expliqué en quoi la faute imputée au bailleur serait la cause immédiate et directe des vols et des actes de vandalisme commis par trois cents émeutiers qui ont débordé le service d'ordre de M. X..., a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1719 du Code civil ;
4 / que la société Florida palace soulignait que la seule vente de treize billets était minime et dérisoire, compte tenu des deux mille participants, et que cette faute n'a pas été déterminante de la survenance du dommage, ainsi qu'en a décidé le juge répressif qui n'a pas retenu la responsabilité du bailleur ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les troubles avaient été occasionnés par des clients de MM. Y... et Z... auxquels s'étaient joints des éléments étrangers à cette clientèle, la cour d'appel, qui a exactement retenu que les clients d'un autre locataire n'étaient pas des tiers au sens de l'article 1725 du Code civil et relevé que la société Florida palace s'était contractuellement engagée à garantir les troubles occasionnés par des tiers en faisant assurer par des vigiles agréés la sécurité de l'établissement et de ses occupants, a, de ces seuls motifs, déduit à bon droit que la bailleresse était tenue de réparer le préjudice subi par M. X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;