Cass. com., 9 janvier 2019, n° 17-17.141
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Avocats :
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Lyon-Caen et Thiriez
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 22 février 2017), que MM. Y... et D... , associés de fait pour l'exercice de leur activité d'infirmiers, ont constitué, le 27 mai 2009, une société civile de moyens dont ils étaient associés à parts égales ; qu'à la suite de dissensions, un administrateur judiciaire a été désigné en référé, le 14 mars 2012, avec pour mission de réunir l'assemblée générale des associés et de procéder aux démarches nécessaires à la liquidation des sociétés ; que contestant le refus de son associé d'approuver les comptes définitifs de liquidation, M. Y... l'a assigné ainsi que le liquidateur aux fins d'obtenir la validation et la clôture des comptes ;
Attendu que M. D... fait grief à l'arrêt d'approuver les comptes définitifs de la société civile de moyens établis par le liquidateur au 19 novembre 2012, de constater la clôture de la liquidation de la société de fait et de la société civile de moyens, et de rejeter ses autres demandes alors, selon le moyen :
1°/ que la société civile de moyens a pour objet la mise en commun de moyens utiles à l'exercice de la profession de ses membres, dont ceux-ci bénéficient en échange d'une contribution aux frais communs ; qu'en cas de liquidation, les comptes définitifs de liquidation ne doivent prendre en compte que les éléments d'actif et de passif réellement imputables à l'activité particulière de la société civile de moyens, ce qui suppose de persister à faire bénéficier ses membres des moyens communs auxquels chacun contribue financièrement ; qu'en approuvant les comptes définitifs de liquidation de la société civile de moyens Y... - D... établis par M. Z... au 19 novembre 2012, lesquels mettaient à la charge de la société l'ensemble des frais de fonctionnement et les salaires exigibles entre décembre 2011 et juillet 2012, tandis que la société avait cessé de fonctionner dès le mois de décembre 2011 et que M. D... ne bénéficiait plus des moyens mis en commun, dont seul M. Y... tirait profit, la cour d'appel a violé l'article 36 de la loi du 29 novembre 1966, ensemble l'article 10 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 ;
2°/ que la cour d'appel a constaté que « les comptes sociaux en 2012 ne présentaient aucun actif, il n'y avait donc aucun actif à partager » et que « dès fin 2011, les associés avaient cessé de mettre en commun leur activité », ce dont il ressortait que la société civile de moyens Y... - D... avait cessé de fonctionner et ne mettait plus en commun aucun moyen permettant l'exercice de la profession de M. D... ; qu'en approuvant cependant, les comptes de liquidation présentés par M. Z... au 19 novembre 2012, qui imputaient à la société civile de moyens Y... - D... l'ensemble des frais de fonctionnement et les salaires dus en 2012, tandis qu'ils n'avaient nullement concouru à assurer le fonctionnement normal de la société, mais avaient bénéficié à M. Y... exclusivement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 36 de la loi du 29 novembre 1966, ensemble l'article 10 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 ;
3°/ que l'associé reprend en nature et avant tout partage les apports en jouissance et les biens mis à la disposition de la société, dès lors qu'il en a conservé la propriété ; qu'en revanche, le partage de l'actif social entre les associés ne peut intervenir qu'après paiement des dettes et remboursement du capital social ; qu'en se bornant à affirmer que les aménagements et matériel attribués à M. Y..., avant tout apurement du passif et tout partage, avaient été mis à la disposition de la société par ce dernier en vertu du contrat de collaboration de 2007, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, s'il ressortait des éléments comptables produits par M. D... (factures et tableaux d'amortissement) que ces aménagements avaient été réalisés et ce matériel acquis par la société elle-même lorsqu'elle a pris à bail son local d'activité en 2011, de sorte qu'ils appartenaient à la société et ne pouvaient être attribués à M. Y... avant tout apurement du passif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1844-9 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que MM. Y... et D... s'étaient accordés sur la dissolution anticipée de la société civile de moyens à la fin de l'année 2011, sans pour autant formaliser cette décision dans le cadre d'une assemblée générale ou décider d'un retrait simultané, l'arrêt déduit à bon droit du procès-verbal de l'assemblée générale du 19 juillet 2012 que la dissolution de la société a été arrêtée à la date de cette assemblée générale et qu'à cette date seulement, la société était en liquidation ; qu'il ajoute que rien ne démontre que les salariés de la société civile de moyens aient été transférés, avant le 19 juillet 2012, dans la nouvelle structure de M. Y... ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a exactement déduit que les associés étaient tenus aux dettes sociales liées aux contrats de travail et aux frais de fonctionnement jusqu'au jour de la liquidation de la société, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les conséquences légales de ses constatations, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, qu'effectuant la recherche prétendument omise, la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que le matériel et les aménagements qui existaient au jour de la dissolution étaient la propriété de M. Y... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.