Cass. com., 10 juin 1960, n° 57-11.524
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lescot
Rapporteur :
M. Monguilan
Avocat général :
M. Come
Avocats :
Me de Ségogne, Me Beurdeley
SUR LE MOYEN UNIQUE, PRIS EN SES QUATRE BRANCHES : ATTENDU QUE, SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS,19 MARS 1957), LA SOCIETE FERMIERE DES MINES DU BLAYMARD AYANT, EN RAISON DE GRAVES DIFFICULTES DE TRESORERIE, CONVOQUE UNE ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE DES ACTIONNAIRES POUR SOLLICITER L'AUTORISATION DE PROCEDER A UNE AUGMENTATION DE CAPITAL, LA BANQUE DE L'INDOCHINE, INTERESSEE PAR CE PROJET, INTERVINT AUPRES DE L'UN DES PRINCIPAUX ACTIONNAIRES, LA BANQUE INDUSTRIELLE DE MONACO, DONT ELLE REDOUTAIT UNE ATTITUDE DEFAVORABLE ET A QUI, SUIVANT LETTRE DU 13 JANVIER 1953, ELLE PROMIT D'ACHETER TOUS SES DROITS DE SOUSCRIPTION, AU PRIX DE 700 FRANCS CHACUN;
QUE LE PRINCIPE DE L'AUGMENTATION DU CAPITAL AYANT ETE, LE MEME JOUR, DECIDE A L'UNANIMITE PAR L'ASSEMBLEE GENERALE, LA BANQUE DE L'INDOCHINE ADRESSA DES LE 19 JANVIER 1953 LE PRIX CONVENU A LA BANQUE INDUSTRIELLE DE MONACO POUR LES 22 485 DROITS PREFERENTIELS AFFERENTS AUX ACTIONS DONT CETTE DERNIERE ETAIT TITULAIRE, MAIS QUE LA SOUSCRIPTION OUVERTE LE 2 FEVRIER 1953 N'AYANT PAS ETE COUVERTE ET LA SOCIETE FERMIERE AYANT, EN CONSEQUENCE, RENONCE A L'AUGMENTATION DE CAPITAL, PUIS DEPOSE SON BILAN LE 30 MARS 1953, LA BANQUE DE L'INDOCHINE ASSIGNA ALORS LA BANQUE INDUSTRIELLE DE MONACO EN REMBOURSEMENT DU PRIX VERSE;
QUE, POUR REJETER LA DEMANDE, LA COUR D'APPEL A CONSIDERE QUE LE CARACTERE A LA FOIS COMPLEXE ET ALEATOIRE DE LA CONVENTION SOUSCRITE PAR LA BANQUE DE L'INDOCHINE INTERDISAIT A CETTE DERNIERE D'AGIR EN REPETITION;
ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA DECISIONDEFEREE D'AVOIR AINSI STATUE, ALORS, D'UNE PART, QU'AYANT ELLE-MEME RECONNU QUE LES CESSIONS DE DROITS DE SOUSCRIPTION SONT, EN REGLE GENERALE, DEPOURVUES DE CARACTERE ALEATOIRE, LA COUR D'APPEL, QUI DECLARE QUE LA BANQUE DE L'INDOCHINE N'ETABLIT PAS LE CARACTERE NON ALEATOIRE DE LA CONVENTION LITIGIEUSE, A RENVERSE LA CHARGE DE LA PREUVE ET COMMIS UNE CONTRADICTION DE MOTIFS, ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'ELEMENT ESSENTIEL INVOQUE EN VUE D'ADMETTRE LE CARACTERE ALEATOIRE A ETE INTRODUIT D'OFFICE ET SANS SAISINE DANS LE DEBAT PAR LA COUR D'APPEL, ALORS, DE SURCROIT, QUE, SI LA MANIERE DE VOIR DE L'ARRET ETAIT EXACTE, L'ACCORD LITIGIEUX SERAIT FRAPPE D'UNE NULLITE D'ORDRE PUBLIC, COMME COMPORTANT UNE CONVENTION DE VOTE PROHIBEE, ET ALORS, ENFIN, QUE LES RENONCIATIONS NE SE PRESUMENT PAS ET QU'AUCUN DES FACTEURS RETENUS PAR LA COUR D'APPEL POUR ETABLIR LA RENONCIATION AU DROIT DE REPETITION N'IMPLIQUE LA MANIFESTATION D'UNE VOLONTE D'ABANDON;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QU'APRES AVOIR OBSERVE QUE LES CESSIONS DE DROITS PREFERENTIELS DE SOUSCRIPTION NE PRESENTENT HABITUELLEMENT AUCUN CARACTERE ALEATOIRE, PARCE QU'ELLES ONT POUR BASE BASE LE FAIT CERTAIN DE L'AUGMENTATION DE CAPITAL QUI DONNE SA NAISSANCE ET SA VALEUR AU DROIT CONFERE, L'ARRET RELEVE QU'IL N'EN A PAS ETE AINSI EN L'ESPECE, LA BANQUE DE L'INDOCHINE AYANT ECRIT A LA BANQUE DE MONACO, LE 13 JANVIER 1953, AVANT L'OUVERTURE DE L'ASSEMBLEE GENERALE : NOUS AVONS L'HONNEUR DE VOUS CONFIRMER QUE LA BANQUE DE L'INDOCHINE SE RENDRA ACQUEREUR DES 22 485 DROITS ATTACHES A 22 485 ACTIONS COMPAGNIE FERMIERE DU BLAYMARD QUE VOUS REPRESENTEZ, AU PRIX DE 700 FRANCS L'UN, A LA CONDITION EXPRESSE QUE LES ACTIONS CORRESPONDANTES VOTERONT LES RESOLUTIONS QUI SERONT PRESENTEES PAR LE CONSEIL ET QUI TENDENT A L'AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA SOCIETE ET QUE LESDITES RESOLUTIONS SOIENT ADOPTEES ;
QUE L'ARRET FAIT RESSORTIR LE CARACTERE D'EXCEPTION D'UNE TELLE CONVENTION, QUI PORTE ENGAGEMENT DE PAYER UN PRIX DETERMINE DES DROITS DE SOUSCRIPTION, ALORS QUE CES DROITS N'ETAIENT PAS CERTAINS ET DEFINIS, QUE LEUR VALEUR NE POUVAIT PAS ENCORE ETRE CALCULEE ET ALORS QUE LA SITUATION DIFFICILE DE LA SOCIETE FERMIERE DU BLAYMARD ETAIT NECESSAIREMENT CONNUE DE LA BANQUE DE L'INDOCHINE QUE LES ACTIONS AVAIENT PERDU PLUS DE MOITIE DE LEUR VALEUR DE JANVIER A DECEMBRE 1952, QUE LA DEMANDE D'AUTORISATION D'AUGMENTER LE CAPITAL AVAIT ECHOUE LORS D'UNE PREMIERE ASSEMBLEE GENERALE ET QU'ON NE POUVAIT PAS NE PAS PREVOIR LA POSSIBILITE D'UN AUTRE ECHEC DEVANT LES SOUSCRIPTEURS ALARMES PAR CES EVENEMENTS ;
QU'APRES AVOIR ENONCE, A JUSTE TITRE, QU'UN CONTRAT EST ALEATOIRE QUAND L'AVANTAGE QUE LES PARTIES EN RETIRERONT N'EST PAS APPRECIABLE LORS DE LA FORMATION DU CONTRAT, PARCE QU'IL DEPEND D'UN EVENEMENT INCERTAIN, LA COUR D'APPEL DECLARE QUE TEL ETAIT BIEN LE CAS PUISQUE LE DROIT DE SOUSCRIPTION CEDE N'ETAIT PAS ENCORE DETERMINE DANS SES MODALITES, QUE LA BANQUE DE L'INDOCHINE NE PROUVE NI OFFRE DE PROUVER QUE LESDITES MODALITES ETAIENT ARRETEES DES LE 13 JANVIER 1953, DATE DE LA CONCLUSION DE L'ACCORD;
QU'EN ACHETANT DES DROITS DE SOUSCRIPTION QUI N'ETAIENT PAS ENCORE NES ET AU MILIEU DE CIRCONSTANCES DEFAVORABLES , LA BANQUE DE L'INDOCHINE S'EST ENGAGEE AVEC LA BANQUE DE MONACO DANS UNE CONVENTION DONT LE CARACTERE ALEATOIRE EST LE CARACTERE DOMINANT ET QUI DOIT ETRE CONSIDEREE COMME TELLE DANS SON ENSEMBLE ;
D'OU L'ARRET DEDUIT QU'AYANT AINSI CONCLU UNE OPERATION ALEATOIRE SANS DISTINCTION ENTRE LES RISQUES, LA BANQUE DE L'INDOCHINE NE PEUT EN REJETER LES CONSEQUENCES ;
ATTENDU QU'EN REFUSANT, POUR CE MOTIF, A LADITE BANQUE LE DROIT D'AGIR EN REPETITION, LA COUR D'APPEL, QUI N'A COMMIS NI CONTRADICTION NI INTERVERSION DU FARDEAU DE LA PREUVE ET QUI A STATUE DANS LES LIMITES DU DEBAT, NE S'EST NULLEMENT FONDEE, COMME IL EST PRETENDU AU POURVOI, SUR UNE RENONCIATION DE LA BANQUE DE L'INDOCHINE, MAIS N'A FAIT QU'APPLIQUER LES REGLES DECOULANT DU CONTRAT;
QUE, PRIS EN SES PREMIERE ET QUATRIEME BRANCHES, LE MOYEN EST DONC SANS FONDEMENT ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE L'ARRET A, DE SURCROIT, OBSERVE QUE LA CONVENTION N'ETAIT PAS SEULEMENT ALEATOIRE MAIS PRESENTAIT AUSSI UN CARACTERE COMPLEXE;
QU'EN EFFET ELLE AVAIT UN DOUBLE OBJET;
OBTENIR D'ABORD DE LA BANQUE DE MONACO QU'ELLE PRIT UNE POSITION FAVORABLE A L'AUGMENTATION DE CAPITAL, ENSUITE ACQUERIR LES DROITS PREFERENTIELS DEVANT APPARTENIR A CELLE-CI ;
QUE LE PRIX DONT LA RESTITUTION EST DEMANDEE APPARAIT AINSI COMME LA CONTREPARTIE NON PAS SEULEMENT DE LA CESSION DE DROITS PREFERENTIELS MAIS D'UNE OPERATION COMPLEXE INTERESSANT D'ABORD LES DESTINEES DE LA SOCIETE ;
QU'IL S'ENSUIT QUE LE REMBOURSEMENT DEMANDE PAR LA BANQUE DE L'INDOCHINE PORTE, EN VERITE, SUR UN PRIX ACTUELLEMENT INDETERMINE ;
QU'EN STATUANT AINSI, LA COUR D'APPEL, QUI S'EST BORNEE A ANALYSER LE CONTRAT QUI LUI ETAIT SOUMIS, SANS FAIRE APPARAITRE L'EXISTENCE D'UNE CONVENTION DE VOTE PROHIBEE, N'A DONC POINT ENCOURU LES CRITIQUES FORMULEES PAR LE MOYEN EN SES DEUXIEME ET TROISIEME BRANCHES;
D'OU IL SUIT QU'AUCUN DES GRIEFS ARTICULES NE SAURAIT ETRE RETENU ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 19 MARS 1957, PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.