Cass. 1re civ., 1 mars 2023, n° 22-10.361
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Rapporteur :
Mme Champ
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Boutet et Hourdeaux, Me Occhipinti
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 9 septembre 2021), M. et Mme [Y] (les acquéreurs) ont conclu hors établissement avec la société Eco environnement (le vendeur) un contrat de fourniture et d'installation de panneaux photovoltaïques, lequel a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Invoquant diverses irrégularités du bon de commande, les acquéreurs ont assigné le vendeur et la banque en annulation des contrats de vente et de crédit.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Le vendeur fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du contrat de vente, de constater la nullité du contrat de crédit affecté, de dire qu'il est tenu de rembourser le prix payé aux acquéreurs, d'ordonner la reprise du matériel et de condamner les acquéreurs à rembourser le capital emprunté à la banque, sous déduction des sommes réglées par leurs soins, en exécution du contrat de prêt, alors « que s'il résulte des articles L. 121-18-1, L. 121-17 et L.111-1 du code de la consommation dans leur version applicable en la cause que les contrats conclus hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté comportant notamment, à peine de nullité, le prix du bien ou du service, aucune disposition réglementaire ou légale n'interdit la stipulation d'un prix global et n'impose de décomposer, lorsque la vente porte sur une installation photovoltaïque, les coûts respectifs des différents matériels et de la main d'oeuvre pas davantage qu'ils n'imposent au contrat de fixer un calendrier prévisionnel et de préciser les coordonnées du démarcheur, que pour dire que le bon de commande du 2 janvier 2017 était entaché d'irrégularités dès lors que n'étaient pas distingué le coût du matériel et celui de la main d'oeuvre et que le contrat ne comportait pas de calendrier prévisionnel des prestations, ni les coordonnées du démarcheur ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi des conditions qu'elle ne comporte pas, a violé l'article L. 121-18-1 du code de la consommation, ensemble les articles L. 121-17 et L. 111-1 du même code dans leur version applicable en la cause »
Réponse de la Cour
4. Ayant relevé qu'il n'existait pas de calendrier prévisionnel des prestations promises, alors que le contrat conclu impliquait des opérations à la fois matérielles de livraison et d'installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives, et que rien ne permettait de déterminer à quelles prestations correspondait la date de livraison indiquée sur le bon de commande, la cour d'appel en a exactement déduit que le bon de commande litigieux présentait des irrégularités susceptibles de justifier son annulation.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
6. Le vendeur fait le même grief à l'arrêt, alors « subsidiairement, que l'exécution volontaire d'un contrat de vente conclu lors d'un démarchage, en connaissance des vices affectant le bon de commande, vaut confirmation du contrat et prive l'acquéreur de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles invoquées, et que la reproduction intégrale des articles du code de la consommation, dès lors qu'ils figurent en caractères parfaitement lisibles dans les conditions générales de vente, suffit à permettre à l'acquéreur d'avoir connaissance des irrégularités formelles affectant les mentions du bon de commande ; qu'en retenant au contraire que « le seul fait que les conditions générales figurant au verso sur le bon de commande dont l'acquéreur a déclaré avoir pris connaissance se bornent à reprendre les dispositions du code de la consommation est insuffisant à lui révéler les vices affectant ce bon », la cour d'appel a violé l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
7. Il résulte de ce texte que la confirmation d'un acte nul procède de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l'affecte.
8. La reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à ce type de contrat permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions.
9. Pour écarter la confirmation des contrats de fourniture et d'installation litigieux, l'arrêt retient que le seul fait que les conditions générales figurant au verso du bon de commande reprennent les dispositions du code de la consommation est insuffisant à révéler aux consommateurs les vices affectant ce bon, de sorte qu'aucun des agissements des acquéreurs antérieurs à la saisine de la juridiction de première instance ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les dispositions du code de la consommation reproduites sur le bon de commande n'étaient pas précisément celles qui fixaient les règles dont l'inobservation fondait la demande d'annulation formée par les consommateurs, de sorte que ceux-ci avaient exécuté volontairement le contrat en connaissance du vice qu'ils invoquaient, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
11. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt relatives à l'annulation du contrat principal entraîne la cassation du chef de dispositif relatif à la constatation de la nullité du prêt affecté, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 septembre 2021 par la cour d'appel de Douai ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée.