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Décisions

CA Versailles, 1re ch. sect. 1, 5 janvier 2017, n° 14/08375

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Palau

Conseillers :

Mme Lelievre, Mme Lauer

TGI Paris, 3e ch. sect. 4, du 26 nov. 20…

26 novembre 2009

Madame Marie L. est une sculptrice connue pour ses créations représentant des personnages de bandes dessinées. Avec son mari, Monsieur Eric D., elle a créé en 1989, la société à responsabilité limitée L. D..

Elle a conclu le 10 octobre 1989 un contrat aux termes duquel elle a cédé à la société ses droits de propriété intellectuelle moyennant le paiement d'une redevance.

La société L.D. est devenue une société par actions simplifiée le 27 mars 2006.

Monsieur B. a émis une lettre d'intention en date du 27 juin 2006 portant sur l'acquisition par lui ou par une société créée à cet effet de 100% des parts de la société L.-D..

Le 30 octobre 2006, les époux ont conclu une promesse unilatérale de vente de leurs actions à Monsieur Laurent B. et à la société LB Créations, constituée pour acquérir les actions et immatriculée le 18 octobre 2006, moyennant le prix de base de 2 240 000 euros, sous réserve d'un complément de prix, dont une partie payable à terme.

L'option a été levée le 14 décembre 2006 et la cession régularisée le 8 janvier 2007.

Le même jour, Madame L. et Monsieur B. ont conclu un pacte d'actionnaires relatif à la société LB Créations.

Sa condition préalable est la souscription par Madame L. à une augmentation de capital de la société LB Créations à hauteur de 230.000 euros conformément au contrat d'acquisition. Madame L. s'engage à y apporter la somme de 100.000 euros en compte courant.

Ce pacte prévoit qu'elle s'engage à demeurer salariée de la société L.-D. jusqu'au 31 décembre 2008 moyennant un salaire annuel brut de 55 000 euros et à démissionner ensuite. Il contient, en outre, une clause d'exclusivité et de préférence au profit de la société L.-D. portant sur les droits d'exploitation de ses oeuvres nouvelles.

Le 8 janvier 2007, Madame L. et Monsieur D., d'une part, et la société LB Créations, d'autre part, ont également signé deux contrats relatifs aux droits de propriété intellectuelle et industrielle nécessaires à l'activité de l'entreprise :

Madame L. a cédé à la société LB Créations ses droits de propriété intellectuelle sur les créations énumérées dans une annexe 1 moyennant le prix symbolique d'un euro. Cette cession ne concerne que les créations actuellement exploitées par la société. L'article 3§2 précise': «'Madame L. déclare par ailleurs être parfaitement remplie de ses droits au titre du contrat du 10 octobre 1989 conclu entre elle et la société. En conséquence, la poursuite de l'exploitation des créations ne donne pas lieu au versement d'une redevance complémentaire et les dispositions du présent contrat remplacent l'ensemble des stipulations du contrat du 10 octobre 1989 en ce qui concerne les créations et ce, à compter de l'entrée en vigueur du contrat'». Le contrat du 10 octobre prévoyait une redevance de 1% du chiffre d'affaires ht et le droit de recevoir à titre gratuit les 10 premiers exemplaires de chaque modèle créé par elle.

Madame L. a cédé à la société LB Créations la marque française «'Baboom'» enregistrée sous le no33 01442 et l'ensemble des droits de propriété intellectuelle sur les dessins et logos utilisés par la marque. Elle s'est également engagée à ne plus utiliser les dénominations B.A-BA et "Libre comme l'air" ainsi que l'ensemble des illustrations de ces dénominations figurant dans une annexe 2. Elle a également cédé l'ensemble des droits intellectuels afférents à la marque, à ces dénominations et à leurs illustrations. Aucun prix de cession n'est stipulé.

Madame L. a cédé ses droits d'auteur sur les dessins et logos utilisés à titre de signe distinctif par la société et notamment ceux utilisés pour les marques figurant dans une annexe I, la marque semifigurative «'Tralala Figurines de collection'»'003034075, les marques semi-figuratives L.-D. figuratives 94 515397, 95 603679, 043280752 et internationale semi-figurative 655722 ainsi qu'une marque figurative représentant un lièvre. Aucun prix de cession n'est stipulé.

Les relations entre les parties se sont dégradées.

La société L.-D. a prononcé le licenciement en août 2007 pour faute grave de Madame L. et elle a adressé une plainte au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Dieppe, qui a donné lieu à I 'ouverture d'une information judiciaire,

De leur côté, les époux L.-D. ont engagé des procédures devant le tribunal de commerce ainsi que devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris.

Par actes du 29 mai2008, Monsieur et Madame D. ont fait assigner la société L.-D., la société LB Créations et Monsieur B. devant le tribunal de grande instance de Paris afin, que soient annulés les contrats de cession des droits de propriété intellectuelle et l'article 6.3 du pacte d'actionnaires, qu'il soit fait interdiction à la société L.-D. d'utiliser, dans certaines circonstances, le nom de Marie L. et qu'il leur soit alloué des dommages et intérêts.

Par jugement du 26 novembre 2009, le tribunal a':

. rejeté la demande de Madame L. et de Monsieur D. tendant à voir écarter des débats les pièces pénales,

. rejeté la demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale,

. rejeté la demande de Madame L. tendant à voir suspendre les effets du contrats du 8 janvier 2007 sur le personnage Baboum, les dénominations "Libre comme l'air" et B.A.BA ainsi que leurs illustrations

. rejeté la demande de Madame L. tendant à voir suspendre les effets contrats du 8 janvier 2007 sur la cession des droits d'auteur attachés aux marques françaises semi-figuratives et figuratives 003034075, 94 515397, 95 603679, 043280752 et internationale semi-figurative 655722,

. rejeté la demande de nullité du contrat du 8 janvier 2007 sur la cession des droits de propriété intellectuelle sur les oeuvres créées par Madame L.

. rejeté la demande en paiement de la somme provisionnelle de 30 000 euros ainsi que la demande d'expertise,

. annulé la disposition de la clause 6.3.1 du pacte d'actionnaires du 8 janvier 2007 liant la perception d'une redevance pour les oeuvres nouvellement créées à la réalisation de recettes égales à 10 % du chiffre d'affaires annuel hors taxe de la société L.D.

. condamné la société L.-D. à payer à Madame L. la somme de 62 500 euros au titre du minimum garanti dû pour les oeuvres créées à partir du janvier 2007,

. enjoint à la société L.-D. de remettre à Madame L. un état certifié par le commissaire aux comptes titulaire de la société, relatif aux recettes produites par les oeuvres créées par Madame L. depuis le 1er janvier 2007, ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de deux mois suivant la signification du jugement,

. dit que pour l'exécution de cette disposition, doit être considérée comme oeuvre nouvelle toute oeuvre ne figurant pas sur l'annexe 1 du contrat du 8 janvier 2007 emportant cession des droits de propriété intellectuelle sur les oeuvres créées au 1er janvier 2007,

. enjoint à la société L.-D. de remettre à Madame L. dans les quinze jours suivant la signification du jugement les sculptures originales anciennes et nouvelles réalisées par l'intéressée, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de dix jours suivant la signification du jugement,

. interdit à la société L.-D. l'emploi du seul nom de Marie L. pour la désignation d'oeuvres qu'elle n'a pas créées et qui constituent des adaptations, sous astreinte de 150 € par infraction constatée, passé le délai d'un mois suivant la signification du jugement,

. dit que la société L.-D. devra continuer à faire figurer le nom, la signature ou les initiales de Marie L. sur les oeuvres créées par elle et n'ayant reçu aucune modification par des tiers,

. s'est réservé la liquidation des astreintes,

. rejeté les demandes de Madame L. et de Monsieur D. fondées sur l'atteinte à leur droit à l'image,

.condamné in solidum la société L.-D. la société LB Créations et Laurent B. à payer à Madame L. la somme de 9 000 euros et à Monsieur D. la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

. constaté que la demande reconventionnelle de la société L.-D. tendant à voir prononcer la nullité de la cession des actions de la société L.-D., est sans objet

. ordonné l'exécution provisoire

. condamne in solidum, la société L.-D., la société LB Créations et Monsieur B. aux dépens.

Monsieur et Madame D. ont interjeté appel.

Par jugement du 11 février 2011, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard des sociétés L.-D. et LB Créations et Maîtres P. et B. nommés mandataire judiciaire et administrateur judiciaire.

Par arrêt du 13 avril 2012, la cour d'appel de Paris a':

- rejeté la demande de sursis à statuer ainsi que l'exception qualifiée "d'incompétence et de connexité" formée par les intimés

- rejeté la demande de Monsieur B. tendant à être mis hors de cause

- confirmé le jugement entrepris à l''exception de ses dispositions portant sur la rémunération proportionnelle de Madame L. et, statuant à nouveau et y ajoutant

- fixé à la somme de 20.000 euros (soit 10.000 euros x 2) le montant de la créance de Madame L. au redressement judiciaire de la SAS L.D. assistée de Maître P., ès-qualités de mandataire judiciaire et de Maître B., ès-qualités d'administrateur judiciaire au titre des deux contrats de cession de droits d'auteur conclus sans contrepartie entre elles le 8 janvier 2007

-fait injonction à la société L.-D. assistée de Maître P., ès-qualités de mandataire judiciaire et de Maître B., ès-qualités d'administrateur judiciaire de la procédure de redressement judiciaire, de remettre à Madame L. sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, quinze jours après la signification du présent arrêt, outre les sculptures originales et nouvelles qu'elle a réalisées et qui n'ont pas fait encore l'objet de restitution cinq exemplaires de production crées par elle, ceci en considération de la liste des oeuvres constituant la pièce no 71 datée du 30 mai 2011 visée au pied de ses dernières conclusions et communiquée aux intimés,

- déclaré irrecevable la demande reconventionnelle des intimés tendant à l'annulation de l'acte de cession de la société L.D. à la société LB Créations et mal fondée celle portant sur une demande d'expertise

- condamné in solidum la SAS L.D., la SAS LB Créations assistées de Maître P., ès-qualités de mandataire judiciaire et de Maître B., ès-qualités, ainsi que Monsieur Laurent B. à verser, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à Madame Marie L. la somme complémentaire de 5.000 euros et à Monsieur Eric D. la somme complémentaire de 2.000 euros.

Par arrêt du 9 avril 2014, la cour de cassation a cassé et annulé cet arrêt seulement en':

- ce qu'il fixe à la somme de 20.000 euros le montant de la créance de Madame L. au redressement judiciaire de la société L.-D. au titre des deux contrats de cession de droits d'auteur conclus sans contrepartie,

- ce qu'il annule l'article 6.3.1 du pacte d'actionnaires, condamne la société L.-D. à verser à Madame L. la somme de 62.500 euros et lui enjoint de remettre à cette dernière un état des recettes produites par les oeuvres créées depuis le 1 er janvier 2007.

Elle a renvoyé les parties devant la cour d'appel de Versailles.

La cour a jugé que, pour fixer à la somme de 20.000 euros la créance de Madame L., la cour d'appel avait retenu que le prix de rachat de la société L.-D. correspondait à une «'valorisation'» de la société non ventilée au regard des différents éléments d'actifs que Monsieur B. se proposait d'acquérir aux termes de sa lettre d'intention du 16 octobre 2009 et qu'elle a ainsi violé l'article 7 alinéa 1 du code de procédure civile, les parties ne faisant pas état dans leurs écritures d'une lettre de Monsieur B. à cette date.

Elle a jugé que, pour annuler l'article 6.3.1 du pacte d'actionnaires et condamner la société à verser la somme de 62.500 euros, la cour avait retenu que les oeuvres dénommées «'Barbapapa'», «'Barbamama'» et «'Barbabebe'» constituaient des oeuvres nouvelles alors qu'elles figuraient à l'annexe 1 du contrat de cession portant sur les oeuvres créées au 1 er janvier 2007, la cour dénaturant ainsi les termes clairs et précis de la convention.

Par jugement du 3 octobre 2014, le tribunal de commerce de Dieppe a prononcé la liquidation judiciaire de la société L.-D. et désigné Maître P. en qualité de liquidateur.

Par déclaration du 21 novembre 2014, Monsieur et Madame D. ont saisi la cour d'appel.

Dans leurs dernières conclusions portant le numéro 4 en date du 28 septembre 2016, Monsieur et Madame D. demandent que soit confirmé partiellementle jugement rendu le 26 novembre 2009 par le Tribunal de Grande Instance de Paris et, le réformant partiellement ou y ajoutant, il soit':

dit et jugé que la liquidation judiciaire de la société L.- D. en cause d'appel constitue la survenance d'un fait nouveau spécialement au regard des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la propriété intellectuelle,

dit et jugé qu'il en est de même de la résiliation des contrats d'édition notifiée en application du même article,

prononcé du fait de la liquidation judiciaire de la société L.-D. et de la résiliation des contrats d'édition, la nullité des deux contrats de cession de droits d'auteur du 8 janvier 2007, l'un relatif au personnage "Baboom", à son appellation et aux dénominations "Libre comme l'air" et "B.A-BA" et leurs illustrations ainsi que celui relatif aux marques "Tralala figurines de collection" et "L.-D." (marques verbales et semi figuratives) ou qu'il soit constaté leur résiliation,

- à titre subsidiaire, fixé le montant de la créance privilégiée de Madame L. à la liquidation judiciaire de la société L.-D. à la somme de 20.000 euros HT au titre de ces deux contrats.

dit et jugé que la société L.-D. était tenue de payer à Madame Marie L. une redevance égale à 1 % hors taxes du montant des recettes réalisées au titre des oeuvres créées par elle et de rendre des comptes.

donné acte à Madame Marie L. de ce qu'elle a notifié la résiliation de l'acte de cession et d'édition du 8 janvier 2007 relatif à ses oeuvres commercialisées au 1 er janvier 2007 en application de l'article L. 132-15 du Code de la Propriété Intellectuelle

en tant que de besoin, soit prononcée cette résiliation,

constaté que la société L.-D. puis l'administrateur judiciaire, Maître B., puis à nouveau la société L.-D., durant la période du plan de continuation, puis enfin Maître P., es qualités, se sont refusés à fournir les comptes détaillés de la reproduction et de l'exploitation des oeuvres de Madame Marie L. et ce, en dépit de l'obligation légale et de l'injonction judiciaire qui leur avait été faite

dit et jugé qu'il s'agit d'une autre cause de résiliation de l'ensemble des contrats et conventions entraînant cession de droits ou autorisation d'exploitation et de reproduction.

En conséquence, ils demandent que soit prononcée la résiliation :

- contrat du 8 janvier 2007 emportant cession des droits d'auteur sur le personnage « Baboom», son appellation et sur les dénominations « Libre comme l'air » et B.A.BA » et leurs illustrations.

- du contrat du 8 janvier 2007 relatif à l'utilisation du nom patronymique de Madame L. et de Monsieur D. et portant cession des droits d'auteur relative aux créations utilisées dans le cadre des marques françaises figuratives et semi-figuratives « Tralala Figurines de collection », «L. D. » et « Lièvre ».

- du contrat du 8 janvier 2007 portant cession des droits de propriété intellectuelle sur les créations (sculptures et autres objets) exploitées et commercialisées à la date du I er janvier par la société L.D., valant contrat d'édition.

soit dit et jugé que cette résiliation prendra effet au 16 janvier 2015.

fixé le montant de la créance privilégiée de Madame L. à la liquidation judiciaire de la société L.-D. à une somme égale à 1 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé au titre des oeuvres exploitées et commercialisées au 1er janvier 2007 et ce jusqu'à la date de vente des stocks par Maître P., ès-qualités,

fixé, par provision, le montant de la créance privilégiée de Madame L. à la liquidation judiciaire de la société L.-D. à la somme de 50.000 euros,

fixé également le montant de la créance privilégiée de Madame L. à la liquidation judiciaire de la société L.-D., au titre des oeuvres nouvelles créées postérieurement au 1 er janvier 2007, à 1 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé,

fixé par provision le montant de cette créance privilégiée à la somme de 10.000 euros,

fait injonction à Maître P. d'avoir, dans les quinze jours de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à communiquer à Madame L. :

- Un état détaillé des ventes réalisées sous son administration à compter du 3 octobre 2014.

- La copie intégrale de l'acte de vente des éléments du fonds de commerce de la société L.-D. à la Société Héritage Patrimoine.

- La liste précise et détaillée des droits et objets mobiliers vendus dans le cadre de la cession de l'entreprise à la société Héritage Patrimoine ou à la filiale de celle-ci.

- L'état des ventes et recettes au titre des trois derniers exercices ainsi qu'au titre de la période du 30 juin 2014 au 3 octobre 2014,

de façon à permettre à Madame L. de chiffrer le montant des droits d'auteur qui lui sont dus, étant rappelé que ceux-ci sont assimilés à des salaires et qu'elle peut être indemnisée à ce titre en vertu des dispositions de l'article L. 131-8 du Code de la propriété intellectuelle.

Ils réclament la condamnation in solidum de Maître P., ès qualité de liquidateur de la société L.-D. et de la société LB Créations, ainsi que de Monsieur B. à payer à Madame Marie L. la somme de 10.000 euros et à Monsieur Eric D. celle de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les époux exposent que la cour de cassation a été abusée.

En ce qui concerne le premier chef de cassation, ils relèvent que les intimés avaient fait référence à la lettre d'intention de Monsieur B. en date du 27 juin 2006, date devenue à la suite d'une erreur matérielle le 16 octobre 2006. Ils déclarent que Monsieur B. ne pouvait ignorer qu'il n'avait signé qu'une lettre d'intention et qu'elle ne pouvait pas être datée du 16 octobre alors qu'il avait déjà constitué la société LB Créations, créée pour acquérir les actions de la société L.-D. et déposé un dossier complet, la société étant immatriculée dès le 18 octobre.

En ce qui concerne le second chef, ils affirment, comme la cour d'appel, que les mots «'Barbapapa'», «'Barbamama'» et «'Barbabebe'» ne constituent pas un objet mais une ligne, une tendance, couvrant des séries successives de créations différentes.

Ils précisent que Monsieur B. a été mis en examen pour contrefaçon et escroquerie.

Ils présentent les parties et soulignent l'importance de l'activité créatrice de Madame L. ainsi qu'il résulte, notamment, d'attestations et de dédicaces. Ils indiquent qu'avant la cession, la société employait une quarantaine de personnes et réalisait un chiffre d'affaires annuel de 3.400.000 euros, relatent ses difficultés postérieures et reprochent à Monsieur B. de l'avoir menée en trois ans à la liquidation judiciaire.

Ils indiquent que Monsieur B. a transmis, le 23 mars 2006, un projet de lettre d'intention devenu lettre d'intention le 27 juin 2006 et rappellent qu'après divers audits et vérifications, il a levé l'option sans réserve.

Ils affirment qu'il a tenté ensuite d'obtenir une baisse du prix, affirmé découvrir de prétendues irrégularités, les a menacés de poursuites pénales et mis à pied le 29 juin 2007 puis licencié Madame L.. Ils indiquent qu'un accord est intervenu entre les parties le 10 juillet 2007 pour réduire les sommes leur restant dues de 730.000 à 310.000 euros -alors que les écarts avaient été chiffrés à 180.000 euros-, le protocole précisant que les instances en cours sont arrêtées et annulées. Ils déclarent qu'ils ont refusé de signer un projet plus détaillé en date du 23 juillet 2007 qui prévoyait la cession gratuite du fonds de commerce de la société MEM, créée par eux pour exploiter une boutique chargée de vendre les productions à la société L.-D..

Ils rappellent les plaintes successives déposées, leur placement sous contrôle judiciaire avec interdiction de tout contact avec les défendeurs, la résiliation par Monsieur B. du contrat existant entre la société L.-D. et la société MEM et les procédures diligentées par eux. Ils affirment n'avoir pu obtenir l'exécution des décisions favorables prononcées. Ils ajoutent que la société L.-D. s'est livrée sous la direction de Monsieur B. à des fabrications contrefaisantes et estiment que Maître P. ès qualités aurait vendu ces objets contrefaisants et les prototypes et moules permettant de les fabriquer.

Ils rappellent les décisions intervenues dans la présente procédure.

Ils décrivent les conventions conclues le 8 janvier 2007, préparées par les conseils de Monsieur B..

Ils rappellent l'article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle, CPI, et la nécessité, résultant de l'article L 131-4 du même code, de prévoir un prix de cession des droits d'auteur, l'absence de rémunération entraînant la nullité de celle-ci sauf si la gratuité est expressément prévue sans ambiguïté.

En ce qui concerne les droits d'auteur relatifs aux marques, aux personnages, appellations et illustrations, Madame L. conteste avoir accepté la gratuité de la cession et souligne qu'elle ne demandait pas à l'origine la nullité des cessions mais une rémunération soit 10.000 euros ht pour chacune de celles-ci. Elle considère que la déconfiture des sociétés conduira à une absence totale de paiement et sollicite donc l'annulation des cessions de droits d'auteur sur le personnage «'Baboom'», son appellation et sur les dénominations «'Libre comme l'air'» et «'BA-BA'» et leurs illustrations ainsi que celle relative aux marques «'Tralala figurines de collection'» et «'L. D.'». Subsidiairement, elle demande que sa créance soit fixée à la somme de 20.000 euros au titre de ces deux contrats.

En ce qui concerne ses créations antérieures au 1 er janvier 2007 toujours exploitées par la société L.-D., elle affirme que la clause prévoyant l'absence «'de redevance complémentaire'» signifie qu'elle est rémunérée sur le taux, ancien, de 1% du chiffre d'affaires. Elle considère qu'à défaut, la cession est nulle. Elle réclame donc la fixation à titre privilégié de sa créance.

Les appelants considèrent que les procédures de redressement judiciaire puis de liquidation judiciaire justifient la modification de leurs demandes.

Ils font état d'un détournement commis par Monsieur B. avant inventaire. Ils exposent que Madame L. a fait établir le 24 janvier 2011 par Maître L., en vertu d'une ordonnance sur requête, un procès-verbal de constat des biens et oeuvres stockés dans les locaux de la société L.-D. et dans un entrepôt loué par celle-ci à la société R.. Ils indiquent que l'inventaire dressé par Maître H. le 28 février 2011 consécutif au redressement judiciaire était plus limité, l'huissier reconnaissant que Monsieur B. ne l'avait pas conduit dans tous les lieux d'entreposage. Ils font état de la découverte, à l'occasion d'une tentative d'exécution, d'objets dissimulés au domicile de Monsieur B. et d'un déménagement clandestin par lui d'objets en octobre 2014. Ils soulignent que l'huissier chargé de l'inventaire s'est rendu dans d'autres lieux et a dressé un procès-verbal les 6 et 7 octobre 2014 permettant de constater la présence d'oeuvres originales dont il a été ordonné la restitution à Madame L. ainsi que des moules de production.

Ils déclarent que Madame L. a notifié à Maître P. ès qualités qu'elle était titulaire des droits d'auteur, l'a mise en garde contre toute vente et l'a sommé et que Maître P. a répondu que les dispositions de l'article L. 13-15 du CPI n'étaient pas applicables dans la mesure où le tribunal avait autorisé la poursuite d'activités de la société jusqu'au 30 janvier 2015.

Ils font valoir que les contrats et conventions conclus par Madame L. avec la société L.-D. sont des contrats d'édition et que Maître P. a, en réalité, fait procéder aux ventes avec le concours du personnel.

Ils déclarent que Madame L. a, en application de l'article L. 132-1 du CPI, usé de son droit de résiliation. Ils en infèrent que le liquidateur aurait dû en application de l'article L. 132-15 du CPI avertir Madame L. de son intention de procéder à la vente des stocks afin de lui permettre d'exercer un droit de préemption et de vérifier l'existence de fabrications contrefaisantes. Ils indiquent que le juge commissaire puis le tribunal de commerce a rejeté sa demande de désignation d'un expert aux fins de distinguer les objets pour lesquels la propriété de l'une des parties n'était pas contestée des autres et que Maître P. a liquidé les stocks puis cédé l'ensemble des éléments à un repreneur avant que le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille puisse examiner la demande de Madame L. qui a, donc, sollicité sa radiation.

Ils reprochent aux organes de la procédure collective d'avoir «'manifesté un profond mépris'» à l'égard des décisions de justice antérieures, des droits de Madame L. en qualité d'auteur et des dispositions du CPI.

Madame L. demande donc que soit constatée, le cas échéant prononcée, la résiliation. Elle estime sa demande recevable en raison d'un fait nouveau postérieur au jugement et ayant une incidence directe sur la procédure.

Les appelants contestent que le prix de cession des actions de la société L.-D. payé aux «'consorts D.'» inclue implicitement un prix forfaitaire de cession des futurs droits d'auteur de «'Madame L.'».

Ils estiment que cette affirmation équivaut à soutenir que la société n'avait, en dehors des droits d'auteur, qu'une valeur symbolique et contestent cette appréciation. Ils rappellent que Monsieur B. a proposé un prix après des audits approfondis et que les actifs corporels de la société étaient valorisés pour 500.000 euros. Ils font état d'un actif immobilier d'une valeur d'1.000.000 euros, de capitaux propres de plus d'1.000.000 euros, de créances sur clients de 630.000 euros, d'un chiffre d'affaires en progression et de bénéfices de l'ordre de 300.000 euros par an. Ils relèvent que Monsieur B. et ses conseils n'ont volontairement pas fait figurer dans les actes une formule de calcul du prix de cession des actions et la valeur des droits d'auteur. Ils contestent donc que celle-ci était incorporée au prix.

Ils ajoutent que les actions de Madame L. ne représentaient que 15,2% du capital social et que ces actions lui ont été payées au même prix à l'unité que celle des autres cédants et soulignent que les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens.

Ils estiment donc justifiées les demandes précitées.

En ce qui concerne l'article 6.3 du pacte du 8 janvier 2007, ils précisent que cette clause concerne les oeuvres nouvelles soit celles créées postérieurement au 1 er janvier 2007 objets d'un droit de préférence durant 5 ans et la citent':

« (6.3.1) La Société L.-D. verse à Madame L., en plus de son salaire, « une redevance annuelle de 1% HT mais charges sociales comprises, du chiffre d'affaires annuel HT afférent à la commercialisation de cette oeuvre nouvelle ou des commandes sous licence de tiers à la condition toutefois que la commercialisation de cette oeuvre nouvelle par la Société L.-D. représente au minimum 10% du chiffre d'affaires annuel HT réalisé par la Société L.-D. », étant précisé que :

« En tout état de cause, la Société L.-D. versera jusqu 'au 31 décembre 2008 une avance globale annuelle sur ces redevances de 50.000 euros (cinquante mille euros) HT, mais charges sociales comprises, valeur minimum garantie, non remboursable. Cette avance sera imputable sur les redevances dues à Madame Marie L. sans limitation de durée pour les oeuvres nouvelles visées au présent article 6.3.1. Cette avance sera payable le 1 er jour de chaque trimestre civil, en quatre règlements de 12.500 euros HT, charges sociales comprises, le premier versement s 'effectuant le I erjanvier 2007 »,

« Enfin, Madame Marie L. se verra attribuer à titre gratuit, selon le nombre total d d'exemplaires produits, les cinq premiers exemplaires de chaque oeuvre nouvelle ».

« (6.3.2) En cas d'exercice par la société L.-D. de son droit de préférence postérieurement au 31 décembre 2008, pour une oeuvre nouvelle, la société L.-D. versera à Madame Marie L.,

(i)une redevance annuelle de cinq pour cent (5%) HT mais charges sociales comprises du chiffre d'affaires annuel hors taxes afférent à la commercialisation de ses oeuvres nouvelles créées après la cessation des fonctions de salarié de Madame Marie L. dans la société L.-D. et ne faisant pas l'objet d'un contrat de licence de tiers.

(ii)une redevance annuelle de deux virgule cinq pour cent (2,5%) mais charges sociales comprises du chiffre d'affaires annuel hors taxes afférent à la commercialisation de cette oeuvre Nouvelle faisant l'objet d'un contrat de licence de tiers créée après la cessation des fonctions salariées de Madame Marie L.'».

Ils soutiennent que le terme «'statut'», titre de l'article 6, couvre le statut de salarié- prévu jusqu'au 31 décembre 2008- et le statut d'auteur, ce dernier et le droit de préférence étant prévus pour 5 ans. Ils en infèrent que le droit de préférence portait nécessairement sur des oeuvres nouvelles ainsi qu'il résulte, également, des articles 6.3.1 et 6.3.2 et de la lettre d'intention du 27 juin 2006 qui distingue statut de salarié et statut d'auteur.

Ils affirment que Madame L. a fourni 74 oeuvres nouvelles du 1 er janvier 2007 à son départ ainsi qu'il résulte du site ou des publications de la société et des courriels échangés et observent que les intimés ne contestent que 4 pièces sur 74.

Ils demandent l'annulation de la clause relative à la condition que l'oeuvre nouvelle représente 10% du chiffre d'affaires annuel, condition impossible et déclarent que le coussin «'Barbapapa'» se décline en 20 oeuvres distinctes.

Ils soutiennent que la cour de cassation a été abusée au motif qu'il n'existe pas un modèle unique de «'Barbapouf'», «'Barbapapa'», «'Barbamama'» et «'Barbabébé'». Ils déclarent avoir fourni une liste de ses créations nouvelles à compter du 1er janvier 2007 avec, «'dans la tendance Barbapapa'», des coussins de dimensions et de couleurs différentes, des nettoyeurs, mètre-ruban, bouchon de baignoire, serviettes' qui constituent des nouveautés.

Ils ajoutent que les intimés n'ont procédé à aucune reddition de comptes due à Madame L. en qualité d'auteur ce qui justifie également la résiliation demandée.

Ils font valoir que la liquidation judiciaire entraîne la résiliation des contrats d'édition et, donc, selon la thèse de la globalité ou de l'unicité des actes soutenue par Maître P., celle des cessions de marques.

En réponse à Maître P., ils lui reprochent de ne pas respecter le CPI.

Ils font valoir que Madame L. est l'auteur pour partie de ses propres créations et, pour partie, d'oeuvres composites, que la société L.D. est intervenue comme éditeur au sens de l'article L. 132-1 du CPI, que l'écrit n'est requis qu'à titre de preuve, que les créations originales (prototypes et moules de création) demeuraient la propriété de Madame L. qui pouvait donc en demander la restitution sur simple demande ce dont il résulte que leur non restitution constitue une faute. Ils affirment que cette faute a été commise et réitérée par Maître P. et que son obligation de restitution est sans lien avec les astreintes.

Ils soutiennent également que la rémunération de l'auteur doit être proportionnelle aux recettes et ne peut dépendre du niveau comparé de ventes ou de chiffres d'affaires.

Ils ajoutent que les dispositions particulières du CPI (article L. 132-15) prévalent sur celles du code de commerce, notamment l'article L. 641.1.1 et qu'il en est ainsi de son droit de résilier le contrat en cas de liquidation judiciaire.

Dans ses dernières écritures en date du 26 septembre 2016, Maître P. en qualité de liquidateur de la société L.-D. conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté Madame L. de sa demande de nullité des contrats de cession de droits d'auteur datés du 8 janvier 2007 et de ses demandes de paiements provisionnels à titre de prix.

Elle demande, vu l'ouverture d'une procédure de redressement Judiciaire le 11 février 2011 et d'une liquidation Judiciaire le 3 Octobre 2014, de':

- constater que Madame L. a déclaré sa créance à hauteur de 60.000 euros, tous préjudices confondus, au titre de sa rémunération complémentaire pour les ventes réalisées depuis le 1er janvier 2007

- fixer au passif de la Société L.D. la créance de Madame L. à hauteur de 60.000 euros au titre du minimum annuel garanti,

- dire n'y avoir lieu à ordonner la remise d'un état certifié des recettes sur les ventes réalisées depuis le 1er janvier 2007 sous astreinte.

Elle demande le rejet des autres demandes de Madame L. et le paiement par elle d'une somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement,

Pour le cas où, par extraordinaire, la cour jugerait recevable la demande formulée par Madame L. tendant à voir annuler les contrats de cession de droit d'auteur, elle demande que soit prononcée la nullité du contrat de cession de parts sociales consenti pour un prix de 2.240.000 euros avec toutes conséquences de droit.

Elle demande qu'il soit ordonné à Madame L. et à Monsieur D. de lui restituer ès qualités, la somme de 2.240.000 euros.

Elle réclame le paiement d'une somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître P. rappelle les procédures engagées et le jugement et les arrêts intervenus. Elle considère que la cour d'appel a confondu les notions de cession de fonds de commerce et de cession d'actions mais relève qu'elle a rejeté la demande d'annulation.

Elle souligne que Monsieur B. n'a pas acquis un fonds de commerce mais des actions anciennement détenues par les «'consorts L.'» soit des titres d'une société elle-même propriétaire de différents éléments d'actifs et tenue à des dettes.

Elle indique que c'est parce que la société L.-D. n'était pas propriétaire des droits d'auteur de Madame L. qu'une clause de reclassement, incomprise par la cour, a été insérée. Elle soutient qu'il ressort des contrats signés le 8 janvier 2007 que Monsieur B. n'a accepté d'acquérir la société qu'à la condition préalable que les droits d'auteur appartenant à Madame L. soient «'reclassés'» dans le patrimoine de la société. Elle considère, comme le tribunal, qu'il a été convenu que les droits de propriété intellectuelle de Madame L. seraient préalablement transférés dans le patrimoine de la société L.D. afin qu'ensuite, la valorisation des parts soit fixée à 2.240.000 euros. Elle fait valoir que dans la mesure où la cession est intervenue après ce reclassement des droits personnels de Madame L. dans le patrimoine de l'entreprise, il n'y avait pas lieu de prévoir un prix représentant spécifiquement le prix offert à Madame L. pour céder ses droits. Elle souligne qu'en apportant ses droits d'auteur avant la cession, elle a augmenté la valeur des parts dont elle et sa famille étaient propriétaires.

Elle rappelle que la lettre d'intention du 27 juin 2006 est relative à la cession des actions et non d'un fonds de commerce ou d'actifs isolés et qu'il en est de même de la promesse unilatérale de vente souscrite par les appelants.

Elle invoque l'irrecevabilité de la demande d'annulation des contrats de cession de droits d'auteur rejetée par la cour d'appel dont l'arrêt n'a pas été cassé de ce chef.

Elle réfute sa nouvelle motivation et souligne que les contrats précisent que la cession des droits d'auteur est l'une des conditions de la réalisation de la cession des actions ce dont il résulte que l'annulation des contrats de cession entraînerait celle de l'acte de cession des parts sociales avec obligation pour les cédants de restituer le prix de 2.400.000 euros.

En ce qui concerne la clause 6 du pacte d'actionnaires, elle fait valoir qu'elle exclut sans ambiguïté toute rémunération complémentaire pour la poursuite de la commercialisation des oeuvres existantes à la date de la cession et estime qu'à défaut, se poserait la question de ce qui a été réellement cédé au prix de 2.240.000 euros. Elle rappelle les articles 1, 2, 3 et 3.2, relève que la cour d'appel a elle aussi dénié tout droit à rémunération complémentaire pour la poursuite de la commercialisation des oeuvres de la collection en cours et indique qu'elle a octroyé l'avance minimale garantie à titre de rémunération pour les recettes générées par les oeuvres créées par elle pendant les six mois qu'aura duré son contrat de travail.

Elle fait valoir que c'est sur ce point qu'est intervenue la cassation.

Elle souligne que, compte tenu de la procédure collective ouverte, seule la fixation de la créance est possible et que Madame L. a limité sa déclaration de créance à 60.000 euros ttc montant qui ne pouvait donc être dépassé.

Elle se prévaut de l'arrêt de la cour de cassation, les personnages concernés figurant à l'annexe 1 soit au rang des collections dont les droits ont été cédés. Elle conteste que ces personnages soient des oeuvres nouvelles au motif qu'ils ont été déclinés en d'autres couleurs, dimensions et matières et indique que la déclinaison d'un personnage existant en d'autres variantes est expressément autorisée par le contrat ainsi qu'il résulte de ses articles 2, 2.2, 2.3 et 2.4. Elle soutient que Madame L. n'a façonné aucun personnage entre janvier et juin 2007. Elle relève qu'elle a réclamé successivement 29 pièces en 2010,74 fin 2010, 2011 le 30 mai 2011 puis 124 le 16 janvier 2015.

En ce qui concerne l'astreinte assortissant la remise de l'état des recettes, elle rappelle que la cour de cassation a cassé l'arrêt en ce qu'il a enjoint la société à remettre un état certifié des recettes produites par les oeuvres créées depuis le 1 er janvier 2007.

Elle en conclut que, quelle que soit la décision sur l'existence de créations nouvelles depuis le 1 er janvier 2007, la cour ne pourra confirmer le prononcé de cette injonction sous astreinte.

Elle rappelle que l'astreinte était, en application de l'article L. 622-21 du code de commerce, prohibée compte tenu de la procédure collective et prétend que tel est le cas compte tenu de la liquidation judiciaire prononcée.

Elle ajoute que cette astreinte st doublement inutile, la clause du pacte ayant été annulée au motif que le seuil de ventes de 10% était impossible à réaliser et ce chef de créance n'ayant pas été déclaré, la somme de 60.000 euros étant absorbée par la demande d'inscription du minimum annuel garanti.

En ce qui concerne les demandes de résiliation, elle soutient qu'elles sont irrecevables car nouvelles en cause d'appel.

Elle fait que l'existence de circonstances nouvelles les justifiant n'est pas démontrée. Elle rappelle que le litige relatif au droit pour elle de percevoir une rémunération supplémentaire au titre de ses oeuvres nouvelles a été engagé alors que la société était in bonis et estime que la liquidation judiciaire ne constitue pas une circonstance nouvelle apparue postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel.

Elle affirme qu'elle n'a pas d'intérêt à demander la résiliation d'un contrat qu'elle prétend avoir résilié.

Elle affirme également qu'elle ne peut demander de constater l'existence d'une lettre de résiliation qu'elle ne verse pas aux débats.

Elle se prévaut en outre de l'article L. 641-11-1 du code de commerce. Elle fait valoir qu'il est d'ordre public et que seul le juge commissaire peut constater ou prononcer la résiliation.

Elle invoque l'irrecevabilité des demandes de fixation au passif des créances non déclarées.

Elle déclare enfin que la reddition de comptes à laquelle est tenu le mandataire doit avoir lieu dans les deux mois de la clôture du dossier ce qui n'est pas d'actualité.

Les dernières conclusions des appelants ont été signifiées par huissier à Monsieur B..

Le pli a été remis à l'étude après vérification de son domicile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2016.

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Sur la cassation

Considérant qu'aux termes de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé «'sur les points qu'elle atteint'»'; qu'en application de l'article 638 du même code, l'affaire est «'à nouveau jugée'à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation'»';

Considérant que, toutefois, l'autorité de chose jugée des chefs du dispositif non atteints par la cour de cassation ne peut être invoquée que lorsque la chose ultérieurement demandée est la même et que la demande est fondée sur la même cause';

Considérant que les appelants peuvent également invoquer l'évolution du litige soit la liquidation judiciaire ouverte étant précisé que la cour d'appel a écarté leur moyen fondé sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire';

Sur les contrats de cession de droits d'auteur

Considérant que la rémunération de l'auteur qui cède ses droits peut résider dans l'économie générale de l'opération dont il est partie';

Considérant qu'il convient de souligner que la cession porte sur des actions notamment détenues par Madame L. et non sur un fonds de commerce'ou des éléments d'actifs ; que l'évaluation par les appelants des seuls actifs de la société n'est donc pas pertinente';

Considérant qu'aux termes de sa déclaration d'intention, Monsieur B. envisageait l'acquisition des parts et précisait que tout élément de propriété intellectuelle appartenant à la société faisait partie intégrante de la cession soit les marques déposées et les droits patrimoniaux portant sur des dessins et modèles précisés et sur des créations exploitées à la date de la cession';

Considérant qu'aux termes de la promesse de cession d'actions, la cession est soumise notamment à la cession des droits de propriété intellectuelle et des droits patrimoniaux litigieux'; qu'à la date de la réalisation de la promesse, les cédants devront avoir remis ainsi tout document montrant que la société L.-D. est titulaire des droits précités';

Considérant qu'il résulte donc de l'acte de cession d'actions que les droits de propriété intellectuelle et les droits patrimoniaux doivent faire partie, à la date de la cession, du patrimoine de la société'; que le prix de cession des actions prend en considération cette acquisition';

Considérant que les contrats litigieux rappellent tous la décision de cession d'actions et la volonté de la société de continuer à jouir de ses droits sur ces marques et produits alors même que Monsieur D. et Madame L. ne prendront plus part à sa direction';

Considérant que le contrat portant sur les oeuvres de Madame L. indique expressément dans la clause "prix de cession" que la "présente cession des droits d'auteur est l'une des conditions de la réalisation de la cession de l'intégralité des actions de la société par les actionnaires de celle-ci à la société LB Créations conformément à la promesse unilatérale de cession d'actions conclue le 30 octobre 2006'», que ''les parties prennent acte de ce que la cession de droits d'auteur s'analyse comme un reclassement desdits droits dans le patrimoine de la société préalablement à la cession de celle-ci" de telle sorte qu'elles "décident en conséquence de fixer le prix de la cession à un euro symbolique"';

Considérant que ce «'reclassement'» était une condition de la cession'; qu'il a été accepté sans ambiguïté par Madame L. pour valoriser l'ensemble de la société'; qu'il est donc sans incidence compte tenu de cet accord exprès qu'elle n'ait détenu qu'une participation minoritaire dans celle-ci;

Considérant ainsi que, comme l'a exactement jugé le tribunal, l'achat des actions était subordonné à l'inclusion dans le patrimoine de la société des droits de propriété intellectuelle, que le «'reclassement'»-expressément stipulé dans un des contrats- a pour effet d'accroître la valorisation de la société et donc des actions détenues par les appelants'; que le prix du travail créatif de Madame L. a dès lors été pris en compte non dans une cession particulière mais dans la cession des titres de la société'; qu'il existe donc une contrepartie sérieuse à la cession de ses droits d'auteur';

Considérant que la demande des appelants tendant à l'annulation de la cession pour défaut de prix ou au paiement de la somme de 20.000 euros sera donc rejetée';

Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition que la mise en liquidation judiciaire de la société à laquelle Madame L. a cédé ses droits puisse entraîner l'annulation de cette cession';

Considérant que sous réserve de l'examen du moyen tiré de la résiliation des contrats d'édition, invoquée à l'appui de la demande d'annulation de ces contrats, ceux-ci ne seront pas annulés';

Sur le contrat d'édition emportant cession des droits de propriété intellectuelle sur les créations antérieures au 1er janvier 2007

Considérant que la cour d'appel a rejeté les demandes de Madame L. à ce titre'; que ce chef n'a pas fait l'objet de cassation'; que la demande de Madame L. tendant à percevoir une rémunération au titre des recettes réalisées par ces oeuvres et à obtenir la reddition de comptes est donc irrecevable';

Considérant qu'en raison des conditions de cette cession, sa demande tendant à constater ou prononcer la résiliation fondée sur l'article L. 132-15 du CPI ou sur l'absence de reddition de comptes sera rejetée'; que la demande d'annulation des contrats de cession de droit d'auteur fondée sur cette résiliation sera donc également rejetée';

Sur les créations postérieures au 1er janvier 2007

Considérant que les parties ont convenu d'une rémunération minimale garantie pour Madame L. en cas d'exercice par la société de son droit de préférence portant sur les «'oeuvres nouvelles'» créées par elle à compter du 1er janvier 2007';

Considérant qu'il appartient donc à Madame L. de rapporter la preuve de ces créations'; qu'elle invoque les oeuvres «'Barbapapa, Barbamama et Barbabebe'»';

Considérant que l'annexe 1 du contrat de cession des droits d'auteur portant sur les oeuvres créées au 1er janvier 2007 inclut ces «'créations'» dans la cession'; que ses termes sont clairs et précis';

Considérant, d'une part, que leur déclinaison ne peut constituer des créations différentes et, donc, nouvelles';

Considérant, d'autre part, que la déclinaison de ces personnages fait partie des droits cédés';

Considérant, enfin, que Madame L. ne justifie pas avoir «'façonné'» un nouveau personnage';

Considérant que Madame L. ne rapporte ainsi pas la preuve qu'elle a créé des «'oeuvres nouvelles'» et, donc, qu'elle a droit à la rémunération précitée'; que ses demandes tendant à la fixation de sa créance de ce chef et à la remise de l'état des recettes produites par ces «'oeuvres nouvelles'» seront rejetées';

Sur la résiliation de l'ensemble des contrats

Considérant que cette demande est nouvelle en cause d'appel';

Considérant que, postérieurement au jugement, la société a été placée en liquidation judiciaire';

Considérant que le prononcé de la liquidation judiciaire permet à l'auteur de demander la résiliation du contrat';

Considérant que compte tenu de cet élément nouveau, la demande tendant en raison de cette liquidation judiciaire à constater ou à prononcer la résiliation de l'ensemble des contrats est recevable';

Considérant que la résiliation prévue à l'article L. 132-15 du CPI n'est pas une résiliation de plein droit du fait de la liquidation judiciaire mais une faculté offerte à l'auteur';

Considérant que Madame L. ne verse aux débats aucun courrier aux termes duquel elle aurait sollicité la résiliation des contrats';

Considérant que, dans le corps de ses écritures devant le juge commissaire en vue de l'audience du 9 décembre 2014, elle a indiqué qu'elle «'pouvait opter pour la résiliation 'du fait de la liquidation judiciaire'» et déclaré « expressément pouvoir user 'de sa faculté de résiliation des contrats d'édition'»'; qu'elle n'a toutefois nullement réclamé cette résiliation dans le dispositif de celles-ci';

Considérant que Madame L. n'a donc sollicité cette résiliation ni par courrier adressé au liquidateur ni par conclusions dans le cadre de cette procédure antérieure';

Considérant que celle-ci doit donc être judiciairement prononcée'; que Madame L. qui n'a pas résilié ces contrats a un intérêt à voir cette résiliation prononcée'; que l'intention qui lui est prêtée par le liquidateur de «'lui causer les pires ennuis'» ne justifie pas l'irrecevabilité de sa demande';

Considérant que l'article L. 131-15 du CPI prévoit une cause de résiliation spécifique en cas de liquidation judiciaire'; que ses dispositions prévalent sur celles du code de commerce, notamment sur l'article L. 641-11-1 de celui-ci ;

Mais considérant, d'une part, que la cession des droits de Madame L. est effective'; que les contrats font état d'une cession irrévocable et d'un droit exclusif pour la société d'exploiter les créations concernées';

Considérant, d'autre part, qu'elle s'est inscrite dans une opération globale'; qu'elle a été prise en compte dans la fixation du prix d'acquisition des actions'; qu'aucune rémunération distincte n'a été convenue'; que la résiliation demandée porterait atteinte, rétroactivement, à l'économie générale de l'opération';

Considérant que compte tenu de la spécificité des conventions litigieuses et de leur indivisibilité avec la cession d'actions, la liquidation judiciaire ne justifie donc pas cette résiliation';

Considérant, par ailleurs, que le non-respect invoqué de l'article L. 132-15 du CPI aux termes duquel Madame L. aurait dû être informée de la cession de ses oeuvres et en mesure d'exercer un droit de préemption ne justifie pas une résiliation des contrats litigieux';

Considérant, enfin, qu'il en est de même des prétendus détournements commis ou, compte tenu des modalités des cessions, de l'absence de reddition de comptes ;

Considérant que la demande de ce chef sera rejetée';

Sur les autres demandes

Considérant que, statuant dans les limites de la cassation intervenue, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de paiement au titre des contrats de cession et infirmé en ce qui concerne la condamnation au paiement de la somme de 62.500 euros et la demande de remise d'un état certifié relatif aux recettes produites par les oeuvres créées par Madame L. depuis le 1er janvier 2007';

Considérant que les demandes nouvelles formées par Madame L. et Monsieur D. ou fondés sur des faits nouveaux seront rejetées';

Considérant que conformément à la demande de Maître P. ès qualités, sera fixée au passif de la société L.-D. la créance de Madame L. à hauteur de la somme de 60.000 euros «'au titre du minimum annuel garanti'»';

Considérant qu'en équité, les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel seront rejetées'; que les dépens d'appel seront à la charge des appelants';

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de la cassation,

Déclare irrecevable la demande de paiement de redevances au titre des créations antérieures au 1er janvier 2007,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la somme provisionnelle de 30 000 euros,

Infirme le jugement en ce qu'il a':

- condamné la société L.-D. à payer à Madame L. la somme de 62 500 euros au titre du minimum garanti dû pour les oeuvres créées à partir du janvier 2007,

- enjoint à la société L.-D. de remettre à Madame L. un état certifié par le commissaire aux comptes titulaire de la société, relatif aux recettes produites par les oeuvres créées par Madame L. depuis le 1er janvier 2007, ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de deux mois suivant la signification du jugement,

- dit que pour l'exécution de cette disposition., doit être considérée comme oeuvre nouvelle toute oeuvre ne figurant pas sur l'annexe 1 du contrat du 8 janvier 2007 emportant cession des droits de propriété intellectuelle sur les oeuvres créées au 1er janvier 2007

Statuant de nouveau de ces chefs':

Rejette les demandes fondées sur le minimum garanti dû pour les oeuvres créées à partir de janvier 2007,

Rejette la demande de remise d'un état relatif aux recettes produites par ces oeuvres

Y ajoutant':

Rejette les demandes de Madame L. et Monsieur D.,

Fixe au passif de la Société L.D. la créance de Madame L. à hauteur de 60.000 euros «'au titre du minimum annuel garanti'»

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne in solidum Madame L. et Monsieur D. aux dépens,

Autorise Maître R. à recouvrer directement à son encontre les dépens qu'elle a exposés sans avoir reçu provision.