CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 30 mai 2017, n° 16/02964
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Anouche Productions (SARL)
Défendeur :
Editions Raoul Breton (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rajbaut
Conseillers :
M. Peyron, Mme Douillet
Avocats :
Selarl Lexavoue Paris -Versailles, Selarl Recamier Avocats Associés
La cour rappelle que Sami A., auteur de sketches et artiste interprète qui, depuis 2006, s'est fait connaître sous le pseudonymeLe Comte de BOUDERBALA, a conclu avec la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON :
- le 24 avril 2008, pour une durée de 4 ans, un pacte de préférence éditoriale de ses oeuvres futures : sketches, chroniques, billets d'humeur et chansons de variété,
- les 10 et 30 juin 2008, en application du précédent, onze contrats de cession et d'édition portant sur les droits d'exploitation relatifs aux sketches suivants :
- « Des millions de Chinois »
- « Le mariage des rappeurs »
- « Les minorités »
- « Ma ville, Saint-Denis berceau du rap »
- « Meestic (les rencontres sur Internet) »
- « La violence à l'école »
- « Mon Algérie »
- « Nos amis américains »
- « On a tous besoin d'amour »
- « Si y'a un truc qui va me manquer (la lettre de rupture slamée) »
- « Ma famille à moi » ;
Qu'après une demande de résiliation amiable de son avocat du 12 juillet 2013, restée infructueuse, Sami A., par assignation du 3 mars 2014, a fait citer la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON en résolution, subsidiairement résiliation, des onze contrats de cession et d'édition précités, outre des dommages et intérêts à concurrence de 170 000 € en réparation du préjudice matériel et 100 000 € en réparation du préjudice moral ; que par conclusions du 10 septembre 2015 ces demandes ont été étendues au prononcé de la nullité des contrats de cession et d'édition ;
Qu'il a cité aussi Brahim C., qui n'a pas constitué avocat, en sa qualité de coauteur du sketchee le mariage des rappeurs ;
Que la société ANOUCHE PRODUCTIONS a interjeté appel du jugement réputé contradictoire rendu le 20 novembre 2015 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a
- Déclaré prescrites les demandes de Monsieur Sami A. en annulation des contrats de cession et d'édition d'oeuvre musicale des 10 et 30 juin 2008 ;
- Prononcé la résiliation, à compter du prononcé du jugement, des 11 contrats de cession et d'édition musicale conclus entre Monsieur Sami A. d'une part et les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et EDITIONS RAOUL BRETON d'autre part portant sur les oeuvres : « Des millions de Chinois », « La violence à l'école, « Le mariage des rappeurs », « Les minorités », « Ma famille à moi », « Ma ville, Saint-Denis berceau du rap », « Meestic (les rencontres sur Internet) », « Mon Algérie », « Nos amis américains », « On a tous besoin d'amour » et « Si y'a un truc qui va me manquer » ;
- Condamné in solidum les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et EDITIONS RAOUL BRETON à payer à Monsieur Sami A. la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- Condamné les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et EDITIONS RAOUL BRETON à payer à Monsieur Sami A. la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- Condamné les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et EDITIONS RAOUL BRETON aux dépens ;
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
Que la prescription des demandes de nullité n'est plus contestée en cause d'appel ;
Que pour prononcer la résiliation des onze contrats d'édition et de cession de droits, le tribunal a considéré, au regard des éléments contraires produits par les parties, que les coéditeurs, qui ne justifiaient pas d'une exploitation permanente et suivie répondant aux exigences de la profession permettant de donner aux oeuvres concernées toutes leurs chances de succès auprès du public, n'avaient exécuté que partiellement l'obligation principale du contrat ; qu'ainsi, de première part, les présentations de l'artiste à la gérante du cabaret LE RESERVOIR, qui a donné lieu à l'organisation de trois 'Showcase' en 2007, puis au Président de l'Olympia, qui a donné lieu le 7 février 2008 à la conclusion d'un contrat d'engagement d'artiste interprète, étaient antérieurs à la signature des contrats litigieux ; de deuxième part, que les représentations de l'artiste en première partie des concerts de l'artiste GRAND CORPS MALADE entre 2006 et 2009 ne constituaient qu'une exécution très partielle de cette obligation dès lors que l'essentiel des concerts s'étant déroulé avant la signature des contrats litigieux (entre 2006 et juin 2008) et que l'artiste GRAND CORPS MALADE étant un ami d'enfance de Sami A., l'obtention de ces premières parties ne pouvait leur être exclusivement attribuée ; de troisième part, que la commercialisation des oeuvres sous forme vidéographique par la société UNIVERSAL PICTURES VIDEO avait été réalisée, non sur leur intervention mais sur celle de la société JFB PROD ; de quatrième part, que la promotion des oeuvres en France s'était limitée à l`ouverture du site internet de l`artiste pour un montant modeste d'environ 1 400 €, à une campagne d'affichage pour un montant de 5.000 € outre une intervention auprès de Laurent R., animateur célèbre d'émissions de grande écoute, conjointe à celle d`un autre producteur de spectacle ; de cinquième part, que la promotion des oeuvres à l'étranger se limiterait à des démarches ponctuelles, à savoir une note d`auteur le 18 novembre 2010 pour une séance de 300 euros pour un travail de 'recherche et développement' du spectacle en anglais, un contact en février 2010 avec un auteur italien à propos d'un projet d`adaptation de deux sketches ainsi qu`un
échange de mails en novembre 2011 relativement à un projet d'acquisition de droits sur des sketches américains, sans obtention d'aucun résultat en termes d'exploitation et de diffusion des oeuvres ; de sixième part, qu'il n'avait été procédé à aucune exploitation graphique des oeuvres ; de septième part, que le travail de suivi des droits d'auteur de Sami A. effectué par la société EDITIONS RAOUL BRETON sur les relevés de la SACEM relevait d'une simple tâche, certes nécessaire de gestion de droit, mais pas de l'obligation d'exploiter les oeuvres ;
Que le premier juge qui a aussi observé, de première part, qu'aucun compte n'avait été établi du mois de juin 2009 date du premier anniversaire des contrats jusqu'au 29 octobre 2013 soit postérieurement a la réception de la lettre recommandée avec accusé de réception du 12 juillet 2013, de deuxième part, que le seul état des redevances produit pour la période du 1er janvier au 30 juin 2013 indiquait qu'aucune redevance autre que celles déjà versées directement par la SACEM n'était due au titre de l'exploitation des oeuvres, en a déduit, en premier lieu, que les éditeurs n'avaient pas exécuté leur obligation de reddition des comptes, en second lieu qu'au cours des six années d'exécution des contrats aucune reproduction des oeuvres sous quelque forme que ce soit susceptible de générer des redevances telles que prévues à l'article XVI du contrat au profit de l'auteur n'avait été entreprise ;
Qu'en revanche, le tribunal a enfin dit que ces manquements justifiaient la résiliation des contrats à compter du prononcé du jugement et non leur résolution ab initio laquelle ne pouvait être prononcée compte tenu de l'impossibilité de remettre les parties en l'état du fait des exécutions successives même imparfaites intervenues au cours des sept années ;
Que dans ses dernières conclusions du 17 janvier 2017, la société ANOUCHE PRODUCTIONS demande à la Cour de :
- Sur la nullité des onze contrats d'édition et de cession de droits :
·
- DIRE ET JUGER que la demande de nullité des onze contrats d'édition et de cession de droits soulevée par Monsieur Sami A. est prescrite ;
- En conséquence,
o
- CONFIRMER le Jugement en ce qu'il a déclaré prescrite la demande de nullité des onze contrats d'édition et de cession de droits soulevée par Monsieur Sami A. ;
- DEBOUTER Monsieur Sami A. de sa demande de nullité des onze contrats d'édition et de cession de droits;
- Sur la résolution / résiliation des onze contrats d'édition et de cession de droits :
·
- CONSTATER que les Coéditeurs n'ont commis aucune faute dans l'exécution des onze contrats d'édition et de cession de droits de nature à justifier la résolution ou la résiliation desdits contrats ;
- En conséquence,
o
- CONFIRMER le Jugement ce qu'il a débouté Monsieur Sami A. de sa demande de résolution des onze contrats d'édition et de cession de droits ;
- INFIRMER le Jugement en ce qu'il a accueilli la demande de résiliation desdits contrats à compter du prononcé du jugement et, statuant à nouveau, débouter Monsieur Sami A. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- A titre subsidiaire, sur l'indemnisation de Monsieur Sami A. :
·
- CONSTATER que Monsieur Sami A. ne démontre pas l'existence et le quantum de son préjudice ;
- En conséquence,
o
- INFIRMER le Jugement en ce qu'il a condamné les Coéditeurs à verser la somme de 10.000 euros en réparation de son prétendu préjudice ;
- Statuant à nouveau, DEBOUTER Monsieur Sami A. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- En tout état de cause :
·
- CONDAMNER Monsieur Sami A. à payer à la société ANOUCHE PRODUCTIONS la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER Monsieur Sami A. aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Alain B..
Que dans leurs dernières conclusions du 16 janvier 2017, les Éditions Raoul BRETON demandent à la Cour de :
- Confirmer, en tant que de besoin, le jugement du Tribunal en ce qu'il a jugé prescrite la demande de Monsieur Sami A. de nullité des contrats de cession et d'édition le liant aux sociétés EDITIONS RAOUL BRETON et ANOUCHE PRODUCTIONS ;
- Pour le surplus, infirmer le jugement et :
·
- Dire et juger que la société EDITIONS RAOUL BRETON n'a commis aucun manquement dans l'exécution des contrats de cession et d'édition le liant à Monsieur Sami A. ;
- Dire et juger que lesdits contrats de cession n'encourent aucune résiliation ni résolution à ce titre ;
- Subsidiairement, si par extraordinaire, la Cour jugeait que la société EDITONS RAOUL BRETON a manqué à ses obligations contractuelles,
·
- Débouter Monsieur Sami A. de sa demande de résolution des contrats de cession et d'édition ;
- A titre infiniment subsidiairement,
·
- Dire et juger que Monsieur Sami A. ne justifie d'aucun préjudice ;
- En tout état de cause :
·
- Débouter Monsieur Sami A. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
- Condamner Monsieur Sami A. à payer à la société EDITIONS RAOUL BRETON une somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
- Condamner Monsieur Sami A. aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Laurence G. qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure civile.
Que dans ses dernières conclusions du 23 août 2016, Sami A. demande à la Cour de :
- Débouter la société ANOUCHE PRODUCTIONS de son appel.
- Débouter la société LES EDITIONS RAOUL BRETON de son appel incident.
- Vu l'article 1184 du Code Civil, les articles L. 132-12 et L. 132-13 du Code de la Propriété Intellectuelle, confirmer le jugement dont appel dans son principe mais prononcer non la résiliation mais la résolution, avec effet du 10 juin 2008 pour l'un et du 30 juin pour les 10 autres contrats aux torts exclusifs de la société ANOUCHE PRODUCTIONS portant sur la cession des droits des oeuvres suivantes : DES MILLIONS DE CHINOIS », « LA VIOLENCE A L'ECOLE », « LE MARIAGE DES RAPPEURS », « LES MINORITES », « MA FAMILLE A MOI », « MA VILLE SAINT-DENIS, BERCEAU DU RAP », « MEESTIC (LES RENCONTRES SUR INTERNET) », « MON ALGERIE », « NOS AMIS AMERICAINS », « ON A TOUS BESOIN D'AMOUR », « SI Y A UN TRUC QUI VA ME MANQUER »
- Condamner par suite de la résolution des contrats conjointement et solidairement la société ANOUCHE PRODUCTIONS et la société LES EDITIONS RAOUL BRETON à payer à Monsieur S. A. en réparation de son préjudice matériel, la somme totale de 170 000 €.
- Subsidiairement prononcer leur résiliation aux torts desdites sociétés avec effet au jour de l'assignation. Et dans ce cas, condamner conjointement et solidairement la société ANOUCHE PRODUCTIONS et la société LES EDITIONS RAOUL BRETON à lui payer la somme de 80 000 € à titre de dommages et intérêts.
- Les condamner dans tous les cas à lui payer en réparation de son préjudice moral la somme de 100 000 €.
- Ordonner en raison des circonstances la publication du jugement à intervenir sous forme d'extraits dans 5 journaux et magazines culturels ou de divertissement au choix de Monsieur S. A. et aux frais de la société ANOUCHE PRODUCTIONS et de la société LES EDITIONS RAOUL BRETON.
- Les condamner à lui payer la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- Donner acte à Monsieur S. A. de ce qu'il a perçu de la société LES EDITIONS RAOUL BRETON au titre de l'exécution provisoire du jugement dont appel le montant des causes de celui-ci
- Condamner les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et LES EDITIONS RAOUL BRETON aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL RECAMIER, représentée par Maître Chantal Rodène B. C., Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Que Brahim C., cité par acte d'huissier du 22 mars 2016, n'a pas constitué avocat en cause d'appel ;
Que l'ordonnance de clôture est du 17 janvier 2017 ;
Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;
I - Sur la prescription des demandes en annulation des 11 contrats de cession et d'édition d'oeuvre musicale des 10 et 30 juin 2008
Considérant que, dans leurs conclusions, les parties ne critiquent pas le jugement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes en annulation des contrats de cession et d'édition d'oeuvre musicale des 10 et 30 juin 2008 ; que ces dispositions de la décision entreprise qui ne sont pas remises en cause seront confirmées ;
II - Sur la résiliation, à compter du prononcé du jugement, des 11 contrats de cession et d'édition d'oeuvre musicale des 10 et 30 juin 2008
Considérant que dans leurs conclusions la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON estiment n'avoir manqué ni à leur obligation d'exploiter les oeuvres de manière permanente et suivie ni à celle de reddition de comptes ;
Qu'ils soutiennent, de première part, s'agissant de la représentation publique des oeuvres, que c'est grâce à leur intervention que Sami A. a pu le 7 février 2008 signer un contrat avec l'OLYMPIA pour la production de son spectacle ; que la société ANOUCHE PRODUCTIONS a permis l'exploitation de ses oeuvres en première partie des spectacles de GRAND CORPS MALADE, à raison de 120 dates en 2006 - 2008 et 140 dates en 2008 - 2010 ; qu'il en est de même, à compter de la fin de l'année 2009, dans le cadre des soirées du collectif 'Ça Peut Chemar' dans la salle parisienne LE RESERVOIR ; que si les démarches ont été entamées antérieurement à la signature des contrats, les exploitations qu'elles ont permises ont eu lieu pour leur grande majorité postérieurement à cette signature ;
De deuxième part, s'agissant de l'exploitation vidéographique des oeuvres, obligation de moyens et non de résultat, qu'ils ont joué un rôle actif dans la négociation et la conclusion avec la société UNIVERSAL MUSIC, du contrat d'exploitation sous forme de vidéogrammes ; que si en définitive une exploitation vidéographique est intervenue avec une société distincte UNIVERSAL PICTURES VIDEO, c'est parce que Sami A. a préféré confier l'exploitation vidéographique de son spectacle à sa propre société et à celle de son ami Jean-Philippe B. ;
De troisième part, s'agissant de la promotion et de la publicité, que la société ANOUCHE PRODUCTIONS a permis à Sami A. d'assurer la première partie des représentations de l'artiste GRAND CORPS MALADE ; qu'elle a organisé trois showcases au RESERVOIR ; qu'elle a fait réaliser des vidéos promotionnelles ; que les éditions Raoul BRETON a financé l'ouverture du site officiel de l'artiste ainsi qu'une campagne d'affichage pour un montant de 5 000 € ;
De quatrième part, s'agissant de l'exploitation à l'étranger, que les éditions Raoul BRETON a entrepris de nombreuses démarches aux fins notamment de trouver un sous-éditeur aux États Unis, d'adapter et traduire les sketches en anglais et en italien et d'acquérir les droits sur des sketches américains repérés par Sami A. ;
De cinquième part, s'agissant de l'exploitation graphique, qu'il ne s'agissait que d'une obligation accessoire dont Sami A. ne prouve pas avoir demandé l'exécution ;
De sixième part, s'agissant la reddition des comptes, que les éditions Raoul BRETON a adressé à Sami A. le 29 octobre 2013 un état des redevances ;
De septième part, que les éditions Raoul BRETON a déposé chaque oeuvre auprès de la SACEM, y ayant aussi déclaré les oeuvres musicales préexistantes ; qu'elle s'est livrée à un travail minutieux de répartition des droits d'auteur et de réclamation ;
De huitième part, que les éditions Raoul BRETON a inscrit Sami A., à sa demande, à une formation sur les scénarios intitulée Masterclass John Truby ;
De neuvième part, que les éditions Raoul BRETON a proposé à Sami A. d'adresser une mise en demeure au producteur de l'artiste Kev A. dont le spectacle comportait des ressemblances avec le sien ;
Que la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON demandent que Sami A. soit débouté de ses demandes, et subsidiairement que soit prononcée la résiliation et non la résolution des contrats ;
*
Considérant que Sami A., qui demande la confirmation du jugement dans son principe, sollicite que soit prononcée la résolution et non la résiliation des contrats compte tenu du défaut d'exécution de leurs obligations par les éditeurs ; qu'il sollicite subsidiairement leur résiliation ;
*
Considérant, ceci exposé, que c'est par de justes motifs que la cour adopte expressément que le tribunal a prononcé la résiliation, à compter du prononcé du jugement, des 11 contrats de cession et d'édition d'oeuvre musicale des 10 et 30 juin 2008 ;
Qu'il sera précisé, de première part, que la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON ont totalement manqué à deux de leurs obligations essentielles ; qu'en premier lieu, pendant plus de cinq ans, ils ont omis d'établir les comptes annuels imposés par l'article L. 132-13 du code de la propriété intellectuelle et par l'article XVII des contrats, ne s'y soumettant que le 29 octobre 2013, après mise en demeure du 12 juillet 2013 ; qu'en second lieu, il n'ont fait procéder à aucune reproduction graphique des oeuvres, alors que l'article X des contrats prévoyait qu'elle serait effectuée à un minimum de cent exemplaires ;
De deuxième part, que pour certaines autres obligations, les diligences, minimales, qu'ils prétendent avoir effectuées ont été totalement inopérantes ; qu'en premier lieu, concernant la reproduction vidéographique, les démarches qu'ils soutiennent avoir engagées auprès de la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE ne s'étant pas concrétisées, Sami A. a été contraint de signer le 18 juin 2014, avec l'aide de la société JF PROD, une convention avec une société distincte UNIVERSAL PICTURES VIDEO, pour une exploitation commerciale qui a commencé le 24 novembre 2014 ; qu'en second lieu, il n'est pas non plus contesté que les démarches ponctuelles pour la promotion des oeuvres à l'étranger ne se sont traduites par aucun résultat en termes d'exploitation et de diffusion des oeuvres ;
De troisième part, que pour d'autres obligations, leur conclusion est intervenue avant celle des conventions des 10 et 30 juin 2008, même si leur exécution a pu se poursuivre postérieurement ; qu'en premier lieu, les représentations en première partie de l'artiste GRAND CORPS MALADE ont commencé en 2006, même si elles ont continué jusqu'en 2010 ; qu'en deuxième lieu, l'organisation de trois 'showcase' au cabaret LE RESERVOIR date de 2007 ; qu'en troisième lieu, le contrat d'engagement auprès de l'OLYMPIA date du 7 février 2008, même s'il s'est poursuivi au-delà ;
Que comme le tribunal, la cour estime que ces manquements graves et réitérés à leurs obligations contractuelles justifient la résiliation des conventions aux torts de la société ANOUCHE PRODUCTIONS et des éditions Raoul BRETON, mais non leur résolution ; qu'en effet, s'agissant de conventions à exécution successive, la cour ne peut que constater aussi que ces éditeurs ont accompli, même très partiellement et imparfaitement, certaines de leurs obligations, comme déjà examiné ci-dessus, ou encore au titre de la promotion des oeuvres en France ou du suivi des droits d'auteur auprès de la SACEM ;
Que le jugement sera dès lors totalement confirmé de ce chef, sauf à rappeler que la résiliation prendra effet à compter du prononcé du jugement, le 20 novembre 2015 donc ;
III - Sur les mesures réparatrices
Considérant que le tribunal a attribué en réparation du préjudice matériel une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en raison de ce que Sami A. a été privé de la possibilité de s'adresser à un autre éditeur aux fins notamment d'assurer plus vite la production et la commercialisation d'un DVD ;
Que la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON soutiennent que Sami A. ne justifie d'aucun préjudice ; que ce dernier demande que l'évaluation de son préjudice soit portée à 80 000 € au titre du préjudice matériel et 100 000 € au titre du préjudice moral, outre la publication de l'arrêt dans des journaux ;
Que la cour confirmera le jugement des chefs du préjudice matériel et de la non publication pour les motifs qu'il contient, sauf à l'infirmer partiellement en ce qu'il n'a pas accordé de réparation au titre du préjudice moral ; qu'en effet, l'obligation de se séparer de ses éditeurs et d'engager à leur encontre une procédure judiciaire a nécessairement occasionné à ce titre un préjudice que la cour évaluera à la somme de 10 000 € ;
IV - Sur les frais et dépens
Considérant que la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON ayant succombé en première instance et en appel, le jugement sera confirmé de ces chefs ; qu'ajoutant, la cour les condamnera aux dépens d'appel et, en ce qui concerne les frais irrépétibles d'appel ainsi qu'il est dit au dispositif ;
La cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté Sami A. de ses demandes au titre du préjudice moral,
Infirmant très partiellement de ce seul chef,
Condamne in solidum la société ANOUCHE PRODUCTIONS et les éditions Raoul BRETON à payer à Sami A. une somme de 10 000 € en réparation de son préjudice moral ;
Ajoutant,
Condamne les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et LES EDITIONS RAOUL BRETON aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la SELARL RECAMIER, représentée par Maître Chantal Rodène B. C., Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile,
Condamne in solidum les sociétés ANOUCHE PRODUCTIONS et LES EDITIONS RAOUL BRETON à payer à Sami A. une somme de 5 000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.