CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 13 décembre 2013, n° 13/04114
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
B. D., SYNDICAT NATIONAL DES AUTEURS ET DES COMPOSITEURS (SNAC)
Défendeur :
EDITIONS LAROUSSE (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Madame Marie-Christine AIMAR
Conseillers :
Madame Sylvie NEROT, Madame Anne-Marie GABER
Avocats :
Me Géraud BOMMENEL, SCP FISSELIER & Associés, AARPI GALLOT LE LORIER
Monsieur Benoît Delalandre revendique la qualité d'auteur de plusieurs textes d'ouvrages pour la jeunesse nécessitant, selon lui, un véritable travail de conception et d'écriture que publie depuis 2003 la société Editions Larousse.
Il expose que les modalités contractuelles ont évolué au fil du temps puisqu'il a conclu à ce titre, entre 2003 et 2005, sept contrats par lesquels il cédait ses droits d'auteur intitulés 'contrat 'uvre collective' rémunérés sous forme forfaitaire concernant les ouvrages suivants :
- 'Mon premier Larousse des animaux',
- 'Mon premier Larousse des dinosaures',
- 'Mon premier Larousse à la mer',
- 'Mes petites encyclopédies Larousse Les Bobos',
- 'Mes petites encyclopédies Larousse Sorcières et Cie',
- 'La parade des animaux',
- 'Mon Atlas Larousse' (initialement 'Premier Atlas'),
et qu'en 2006 et 2007, il a signé avec cet éditeur quatre contrats intitulés 'contrats d'auteur' portant sur quatre ouvrages, à savoir :
- 'L'incroyable encyclopédie des Dinosaures',
- 'Le grand livre du mercredi',
- 'Mon atlas du corps humain' et
- 'Monstres et dragons',
en vertu desquels il devait percevoir un à-valoir et une rémunération proportionnelle à l'exploitation de ces ouvrages, des contrats de cession portant sur les droits d'adaptation audiovisuelle étant, par ailleurs, signés.
Il allègue également être l'auteur de la première partie d'un ouvrage, paru en 2004 et intitulé 'Mon petit Jardin', qui n'a pas fait l'objet d'un contrat et affirme qu'aucune rémunération ne lui a été versée à ce titre.
Insatisfaits de la position adoptée par la société Editions Larousse à réception d'un courrier du 15 mars 2009 par lequel Monsieur Delalandre, visant l'article L 132- 13 du code de la propriété intellectuelle, demandait à l'éditeur de lui transmettre des redditions des comptes pour neuf de ces ouvrages ainsi que le montant des redevances dues, puis à réception du courrier du 13 novembre 2009 par lequel le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs (ci-après : SNAC) reprenait cette même demande en sollicitant, au visa des dispositions d'ordre public du code précité, la régularisation des contrats prévoyant une rémunération forfaitaire pour lui substituer une rémunération proportionnelle, M. Delalandre et le SNAC l'ont, par acte du 30 mars 2010, assignée au fond aux fins de voir prononcer la nullité des clauses de rémunération forfaitaire prévues dans les contrats qualifiés 'contrat 'uvrecollective' et d'obtenir une rémunération proportionnelle au profit de l'auteur, la communication des redditions de compte, la résiliation des contrats concernant les ouvrages 'Le grand livre du mercredi' et 'Mon atlas du corps Humain' outre la réparation de leurs préjudices.
Par jugement contradictoire rendu le 24 juin 2011, le tribunal de grande instance de Paris a, en substance et avec exécution provisoire, déclaré recevables mais mal fondées les demandes du SNAC, déclaré prescrites les demandes de M. Delalandrerelatives aux cinq ouvrages 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'Mes petites Encyclopédies Les Bobos', 'Parade des Animaux' et 'Mon Atlas Larousse' en le déboutant du surplus de ses demandes, donné acte à la SAS Editions Larousse de ce qu'elle accepte de restituer ses droits à Monsieur Delalandre afférents aux ouvrages 'Le Grand Livre du Mercredi' et 'Mon Atlas du corps humain', en condamnant le requérant à payer à la société Editions Larousse la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Par dernières conclusions signifiées le 22 octobre 2013 , Monsieur Benoît Delalandreet le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs (SNAC), appelants, demandent essentiellement à la cour, au visa des articles 1134 et 1382 du code civil, L.111-1, L.113-1, L.113-2, L.121-1, L.122-10, L.131-2, L.131-4, L.131-5, L.132-5, L.132-6, L.132-12, L .132- 13 , L .132-14, L. 133-1 à L. 133-4, L.335-2 et L.335-3 du code de la propriété intellectuelle d'infirmer le jugement, de débouter l'intimée de ses entières prétentions, et :
- de considérer que les contrats portant sur les ouvrages 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des dinosaures', 'Les bobos', 'La parade des animaux', 'Mon Atlas Larousse', 'Mon premier Larousse à la mer', 'Sorcières et Cie' sont des contrats d'édition au sens de l'article L. 132-1 du code sus-visé,
- de condamner sous astreinte l'intimée à communiquer à Monsieur Delalandre des redditions de compte annuelles comportant le nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice, la date et l'importance des tirages, le nombre des exemplaires en stock, le nombre des exemplaires vendus par l'éditeur, celui des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure, ainsi que le montant des redevances dues à l'auteur, pour 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'Mon premier Larousse à la mer', 'Les bobos', 'Sorcières et Cie', 'La parade des animaux' et 'Mon atlas Larousse', pour les ventes tant en France qu'à l'étranger, et pour toute la durée d'exploitation des 'uvres, jusqu'en 2011,
- de déclarer nulles et de nul effet les clauses de rémunération forfaitaire des contrats conclus pour les ouvrages « Mon premier Larousse à la mer » et « Sorcières et Cie » et de condamner en conséquence pour ces deux ouvrages la société Editions Larousse à verser à Monsieur Delalandre une rémunération pour les ventes des années 2006 à 2011, calculée de la façon suivante :
* 2,5% du prix public de vente HT en librairies et en grandes surfaces jusqu'à 30.000 exemplaires,
* 3% du prix public de vente HT en librairies et en grandes surfaces de 30.001 à 50.000 exemplaires,
* 3,5% du prix public de vente HT en librairies et en grandes surfaces au-delà de 50.000 exemplaires,
* 2% du prix public de vente HT à l'export, DOM TOM inclus, jusqu'à 30.000 exemplaires,
* 2,4% du prix public de vente HT à l'export, DOM TOM inclus, de 30.001 à 50.000 exemplaires,
* 2,8% du prix public de vente HT à l'export, DOM TOM inclus, au-delà de 50.000 exemplaires,
* 1,3% du prix public de vente HT pour les ventes spéciales hors librairie jusqu'à 30.000 exemplaires,
* 1,5% du prix public de vente HT pour les ventes spéciales hors librairie de 30.001 à 50.000 exemplaires,
* 1,75% du prix public de vente HT pour les ventes spéciales hors librairie au-delà de 50.000 exemplaires,
* pour l'édition en poche, la moitié du droit prévu pour l'édition de librairie,
* 2,5% du prix catalogue HT sous forme de livre électronique,
- de dire que, pour 2012 et l'avenir, ces conditions financières seront réputées incluses dans les deux contrats d'auteur signés le 22 avril 2005 pour ces deux ouvrages ;
- de considérer, de plus, que Monsieur Benoît Delalandre est l'auteur d'une partie des textes de l'ouvrage 'Mon Petit Jardin', pour lequel aucun contrat n'a été conclu, et de condamner la société Editions Larousse à lui payer une somme indemnitaire de 10.000 euros réparant le préjudice matériel causé par l'exploitation contrefaisante de cet ouvrage ;
- de condamner, en outre, la société Editions Larousse à verser :
* les sommes de 8.000 et 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de reversement des droits SOFIA et CFC, ceci au profit de Monsieur Delalandre,
* la somme de 60.000 euros réparant l'atteinte portée au droit moral de Monsieur Delalandre pour les ouvrages 'Mon premier Larousse des animaux', 'Les bobos', 'Mon petit jardin', 'Mon Atlas Larousse', 'Mon premier Larousse des dinosaures', 'La parade des animaux', 'Mon premier Larousse à la mer', 'Sorcières et Cie', 'Monstres et dragons', 'Le grand livre du mercredi', 'Mon atlas du corps humain' et 'L'incroyable encyclopédie des Dinosaures',
* la somme de un euro à titre de dommage et intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession d'auteur, ceci au profit de la SNAC,
- d'autoriser, aux frais avancés de l'intimée, la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux ou revues dont Libération et Livre Hebdo, dans la limite de 6.000 euros HT. par insertion ;
- de condamner la société Editions Larousse à payer à chacun d'eux la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Par ses dernières écritures du 25 octobre 2013 , la société par actions simplifiée Editions Larousse prie essentiellement la cour, au visa des articles 1304 et 2224 du Code civil, ainsi que des articles L.113-5, L.131-4 et L.132-6 du Code de la propriété intellectuelle :
' à titre principal
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de M. Delalandre relative aux 'uvres 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'Mes petites encyclopédies, les Bobos', 'Parade des animaux', 'Mon atlas Larousse', dont les contrats ont été signés en 2003 et 2004 ;
- de l'infirmer en déclarant également prescrite l'action de Monsieur Delalandrerelative à 'Mon petit Jardin' et, d'autre part, irrecevable l'intervention du SNAC.
' à titre subsidiaire
d'infirmer le jugement en constatant qu'entre le 23 décembre 1998 et le 30 juin 2004, le fonds de commerce d'édition de la société Larousse-Bordas a été confié en location-gérance à la société SEJER qui est donc la société signataire, pendant cette période, des contrats et de mettre par conséquent hors de la cause la société Editions Larousse concernant l'action de Monsieur Delalandre relative aux oeuvres'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des dinosaures', 'Mon Atlas Larousse' et 'Mon petit Jardin' dont les contrats ont été signés respectivement en 2003 et 2004.
' plus subsidiairement
confirmant le jugement entrepris, de :
* considérer que les 'uvres litigieuses appartenant aux collections 'Mon premier Larousse' et 'Mes petites encyclopédies' ainsi que les 'uvres 'Parade des animaux', 'Mon atlas Larousse' et 'Mon petit jardin' sont des 'uvres collectives et que les textes de l'ouvrage rédigés par Monsieur Delalandre ne sont pas un des 'éléments essentiels' des 'uvres ou n'ont qu'un caractère 'accessoire',
* de débouter en conséquence l'appelant de ses demandes de qualification de contrats d'auteur et de reddition de comptes pour les ouvrages 'Mon premier Larousse à la mer', 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'Mes petites encyclopédies les Bobos », 'Mes petites encyclopédies Sorcières & Cie', 'La parade des animaux', 'Mon petit Jardin' et 'Mon atlas Larousse' ;
* de considérer que l'ouvrage 'Mon Petit Jardin' est une 'uvre collective éditée et publiée par SEJER en 2004 et de débouter en conséquence l'appelant de sa demande indemnitaire pour l'exploitation sans contrat de l'ouvrage 'Mon petit Jardin',
* de considérer que sont licites les clauses de rémunération forfaitaire pour les ouvrages 'Mon premier Larousse à la mer' et 'Mes petites encyclopédies Sorcières & Cie' prévues aux contrats signés entre la société Editions Larousse et Monsieur Delalandre et de le débouter en conséquence de ses réclamations financières à ce titre,
* de considérer que Monsieur Delalandre ne justifie en aucune façon des sommes qu'il réclame au titre de ses préjudices, matériel et moral,
* de considérer que le SNAC ne justifie pas de sa demande en paiement de dommages et intérêts,
* de prendre acte de ce que la société Editions Larousse accepte de restituer ses droits à Monsieur Delalandre pour les ouvrages 'Le grand livre du mercredi' et 'Mon atlas du corps humain',
' plus subsidiairement
- de confirmer le jugement entrepris concernant les demandes relatives à la révision de forfait pour lésion en application de l'article L. 131-5 du code de la propriété intellectuelle, abandonnées par Monsieur Delalandre devant la cour et, confirmant le jugement entrepris, de débouter en conséquence Monsieur Delalndre et le SNAC de toutes leurs prétentions à son encontre,
' en tout état de cause
de débouter Monsieur Delalandre et le SNAC de leurs demandes de publication et au titre de leurs frais non répétibles, comme infondées et de condamner Monsieur Delalandre à lui verser la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter tous les dépens.
SUR CE,
Sur la procédure :
Considérant que par conclusions de procédure signifiées 25 octobre 2013 , soit postérieurement au prononcé, le 24 octobre 2013 , de l'ordonnance de clôture, la société Editions Larousse sollicitait du conseiller de la mise en état son rabat afin de lui permettre de répondre aux dernières conclusions des appelants du 22 octobre 2013 , ou, subsidiairement, leur rejet tandis que, par conclusions de procédure signifiées le 29 octobre 2013 , les appelants présentaient cette même demande avec report des plaidoiries prévues le 30 octobre 2013 en raison d'un défaut de réponse à une sommation de communiquer délivrée les 1er puis 18 octobre 2013 , sollicitant subsidiairement le débouté de l'intimée en sa demande de rejet de leurs dernières conclusions;
Mais considérant que cette affaire a déjà été fixée pour être plaidée en novembre 2012, qu'elle a fait l'objet d'un rétablissement à la suite de son retrait du rôle, que le calendrier de la procédure a, à nouveau été notifié aux parties le 08 mars 2013 , que la question de la communication de pièces désormais soulevée apparaît à tout le moins tardive et qu'il importe que les décisions de justice soient rendues dans un délai raisonnable, ce qui suppose, accessoirement, quelque égard pour les contraintes de la cour tenue de gérer dans l'intérêt général son stock d'affaires en cours ;
Qu'en toute hypothèse, la cour a pris acte, en préalable aux plaidoiries du 30 octobre 2013 , que les parties s'accordaient pour que soit prononcé le rabat de l'ordonnance de clôture avec le prononcé d'une nouvelle clôture, rendant régulières les dernières écritures au fond échangées ;
Sur la recevabilité à agir du Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs - SNAC :
Considérant que, formant appel incident, la société Editions Larousse poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré le SNAC recevable en ses demandes alors que les violations invoquées par Monsieur Delalandre au titre de ses droits d'auteur (portant, qui plus est, sur des droits moraux exclusivement attachés à sa personne) ne concernent que son intérêt personnel, qu'il est acquis qu'elle conclut des contrats d'auteur lorsqu'il s'agit d''uvres d'auteur ou de collaboration - ce qui rend inopérant le grief portant sur la mise en place d'un 'système' destiné à priver les auteurs de leurs droits - et que le litige ne tend pas à faire trancher une question de principe touchant à l'intérêt collectif de la profession ;
Mais considérant qu'à juste titre le SNAC lui oppose les termes de l'article 3 de ses statuts (modifiés le 29 mai 2009) selon lequel :
'Conformément à l'article L 2131-1 du code du travail, le syndicat national des auteurs et des compositeurs a pour objet d'assurer, dans tous les domaines, en toutes circonstances et par tous moyens utiles, l'étude et la défense des droits moraux et matériels des auteurs et des compositeurs, tant collectifs qu'individuels et ce, conformément notamment à l'article L 2132-3 du code du travail et L 331-1 du code de la propriété intellectuelle',
l'article L 2131-1 précité disposant :
' Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice.
Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.'
et l'article L 331-1disposant :
' Les organismes de défense professionnelle régulièrement constitués ont qualité pour ester en justice pour la défense des intérêts dont ils ont statutairement la charge' ;
Que, sans se prononcer sur le fond et sur la pertinence des griefs susceptibles d'être articulés, il y a lieu de considérer que le présent litige concerne, certes, les rapports entre un auteur et un éditeur déterminés relativement à des ouvrages précis, mais que son objet porte sur la question plus générale des pratiques contractuelles dans le secteur des ouvrages documentaires destinés à la jeunesse et qu'il s'agit là d'intérêts dont le SNAC a statutairement la charge ;
Que le jugement doit donc être confirmé sur ce point ;
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de Monsieur Delalandre relatives aux 'uvres 'Mon premier Larousse des animaux', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'Mes petits encyclopédies les Bobos', 'Parade des animaux', 'Mon atlas Larousse' et 'Mon petit Jardin'(paru en 2004)
Sur les cinq premiers de ces ouvrages, objets de contrats signés en 2003 et 2004 :
Considérant que pour voir infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite, sur le fondement de l'article 1304 du code civil, l'action en nullité introduite par Monsieur Delalandre le 30 mars 2010, soit postérieurement à l'écoulement du délai de prescription quinquennal, ce dernier soutient qu'il demande en cause d'appel la requalification de ces contrats, que l'article 1304 du code civil est inapplicable à une telle action et que celle-ci n'est donc pas prescrite, peu important la date de conclusion des contrats ;
Considérant, ceci rappelé, que la requalification sollicitée tend à voir modifier les clauses substantielles des contrats en ce qu'elles constituent, selon les appelants, une violation des dispositions impératives des articles L 131-4 et L 132- 13 du code de la propriété intellectuelle prises dans le seul intérêt patrimonial de l'auteur ;
Que force est cependant de considérer que leur violation ne donne lieu qu'à une nullité relative soumise à la prescription prévue à l'article 1304 de code civil ;
Que Monsieur Delalandre ne pouvant plus invoquer par voie d'action à l'encontre d'un éditeur qui aurait, selon lui, sciemment tenté d'échapper aux obligations des contrats d'édition, la nullité de ces stipulations qui ont pour point de départ la date de la signature des conventions, à savoir :
- pour 'Mon premier Larousse des animaux', les 5 juin 2003, 4 juin 2003 et 16 février 2004,
- pour 'Mon premier Larousse des dinosaures', le 11 mai 2004,
- pour 'Mes petites encyclopédies les Bobos', le 23 juillet 2004,
- pour 'Parade des Animaux', le 2 novembre 2004,
- pour 'Mon Atlas Larousse', les 17 novembre 2003, 16 décembre 2004 et 15 mai 2004,
qui correspond à la date à laquelle il a connu ou aurait dû connaître le vice dont il prétend qu'elles sont affectées, il ne peut, sous couvert d'une demande de requalification, en poursuivre l'annulation dans le cadre de l'action qu'il n'a introduiteque passé l'écoulement du délai de prescription ;
Sur l'ouvrage 'Mon petit Jardin' :
Considérant que si cet ouvrage n'a pas fait l'objet d'une convention écrite, il n'en demeure pas moins que sa date de première parution, en 2004, n'est pas contestée pas plus que l'existence d'une relation contractuelle, pour d'autres ouvrages, entre les parties à cette date ;
Que par mêmes motifs que précédemment, l'action de Monsieur Delalandre se heurte à la prescription quinquennale applicable, de sorte que l'éditeur doit être déclaré fondé en son appel incident sur ce point et que le jugement qui en a autrement décidé sera infirmé de ce chef ;
Qu'il s'en déduit que l'action de Monsieur Delalandre qui tend à voir sanctionner une exploitation contrefaisante de cette 'uvre se trouve prescrite ;
Qu'il résulte enfin de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur la demande subsidiaire de mise hors de cause de la société Editions Larousse en ce que le litige porte sur ces six 'uvres, et que l'éditeur motivait par la situation de location-gérance confiée à la société Sejer ;
Sur la qualification des contrats relatifs aux 'uvres 'Mon premier Larousse à la mer' et 'Mes petites encyclopédies Larousse - Sorcières et Cie' :
Considérant que M. Delalandre sollicite la requalification en contrats d'auteur des contrats portant sur ces deux ouvrages, intitulés, chacun, 'contrat 'uvre collective' et conclus le 22 avril 2005, en faisant valoir qu'il est mentionné comme auteur des textes sur la couverture et même comme seul auteur dans les déclarations de dépôt légal faites par l'éditeur, sous sa responsabilité, de l'ouvrage 'Mon premier Larousse à la mer' et que ses apports, constitués par les textes qu'il avait le soin de rédiger aux termes des contrats, sont parfaitement individualisables et identifiables du reste des oeuvres, ajoutant qu'il contrôlait les différentes étapes de l'élaboration de ses textes pour ces ouvrages et leur association à des illustrations ;
Qu'il déduit de l'ensemble de ces éléments que les ouvrages précités ne sont aucunement des oeuvres collectives, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal dont la décision conduirait à ne voir les textes, dans ce type d'ouvrage, que comme des commentaires d'illustrations ;
Qu'il fait aussi valoir que cet argument est confirmé par le fait que ces contrats prévoient une cession de droits alors que la personne morale qui publie une oeuvrecollective est investie dès l'origine de ces droits, ou encore par l'insertion, dans ces contrats, d'une clause incompatible avec la qualification d''uvre collective, s'agissant de l'article 5 qui lui permet de retrouver la liberté de ses droits, supposant ainsi qu'ils ne se sont pas fondus dans un ensemble ;
Que la société Editions Larousse réplique qu'elle a été à l'initiative des 'uvresinvoquées publiées sous son nom en sa qualité d'éditeur en observant que Monsieur Delalandre ne conteste pas cette circonstance, qu'elle en contrôle l'élaboration en la divulguant sous son nom, et explique que c'est dans ce cadre qu'elle recrute des écrivains, tel l'appelant, afin d'élaborer, sous sa direction et selon un cahier des charges qu'elle leur fournit, des textes adaptés à la collection envisagée ; qu'il s'agit, en l'espèce, d'ouvrages encyclopédiques (dans deux collections comportant chacune une trentaine d'ouvrages) dans lesquels les textes de Monsieur Delalandre se fondent dans un ensemble plus vaste comprenant notamment les illustrations en fonction desquelles les textes ont été élaborés ;
Qu'elle invoque, elle aussi, l'article 1156 du code civil conduisant le juge à rechercher la commune intention des parties, soutient que celle-ci ressort en particulier des articles 1, 4 et 5 des contrats d''uvres collectives conclus ainsi que des échanges entretenus entre Monsieur Delalandre et ses salariés, en opposant à Monsieur Delalandre le fait qu'il ne démontre pas en quoi il aurait réalisé de manière indépendante les textes pour lesquels il se prévaut de la présomption de titularité bénéficiant à l'auteur ;
Considérant, ceci rappelé, que la société Editions Larousse satisfait à diverses conditions permettant à une personne morale de bénéficier de la présomption prévue à l'article L 113-5 du code de la propriété intellectuelle dans la mesure où, prenant rang, comme d'autres, dans les encyclopédies des collections 'Mon Premier Larousse' et 'Mes Petites Collections', il est constant que les 'uvres litigieuses ont été créées à l'initiative de cette personne morale qui les a éditées, publiées et divulguées sous sa direction et sous son nom et qu'elles répondent, de ce fait, à la définition de l''uvre collective telle que donnée par l'article L 113-1 alinéa 3 du même code ;
Que pour détruire cette présomption, Monsieur Delalandre ne peut valablement prétendre que les stipulations du contrat qui prévoient la cession de ses droits au profit de l'éditeur sont incompatibles avec le régime de l''uvre collective puisque l'article L 113-5 de ce code dispose que la personne morale est 'investie' de ces droits ;
Qu'en effet, les droits dont la personne morale est investie ne concernent que l'oeuvre collective proprement dite, que cette personne morale n'est pas l'auteur de l''uvre et que les contributeurs, désignés par l'article L 131-2 précité sous le nom d''auteurs', conservent des droits sur leurs contributions dont l'éditeur peut avoir intérêt à obtenir la cession ;
Qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que son identification et son individualisation personnelles, notamment sur la page de couverture de ces ouvrages où il est nominativement présenté comme étant l'auteur des textes, est incompatible avec l'exigence d'une fusion des diverses contributions participant à l'élaboration d'une 'uvre collective dès lors que l'article L 131-2 précité évoque 'la contribution des divers auteurs participant à l'élaboration (de l''uvre collective)' mais n'exige pas que les auteurs dont les contributions se fondent ne puissent être identifiables ou individualisables ;
Que, par ailleurs, rappelant les termes finaux de ce même article selon lequel 'la contribution des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'entre eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé', Monsieur Delalandre s'attache aux conditions dans lesquelles ces ouvrages ont été réalisés en soutenant que son apport personnel est parfaitement identifiable et individualisable et qu'il disposait d'une entière liberté pour concevoir et écrire chaque livre dans le seul respect du format de la collection et de la ligne éditoriale ;
Que s'il affirme, pour le démontrer, avoir été seul à écrire le chemin de fer de ces ouvrages, autrement dit le conducteur et la trame de l'oeuvre, et produit une attestation dans ce sens (pièce 75), il peut être toutefois relevé que la directrice éditoriale qui en est la rédactrice précise que cette élaboration donnait lieu à validation ;
Qu'il laisse, de plus, sans réponse l'argumentation de l'intimée qui met en exergue la complexité de cette tache - le plan d'un ouvrage nécessitant, par exemple, l'indication du nombre de ses pages, son concept, le but à atteindre, son calibrage ainsi que le ton et le style à suivre - en faisant valoir que l'appelant est dans l'incapacité de démontrer qu'il est seul à l'origine de son élaboration alors qu'elle produit une attestation de la directrice éditoriale du département jeunesse selon laquelle ce chemin de fer était soumis à l'appréciation des différents contributeurs, lors d'une réunion préparatoire, dans le but de définir leur travail et de leur présenter le principe de maquette retenu pour la collection ;
Que les courriels et attestations que produit Monsieur Delalandre tendent, certes, à prouver qu'il a été interrogé, consulté, sollicité pour obtenir son aval au cours de l'élaboration de l'ouvrage ;
Que, toutefois, elles ne lui permettent pas d'affirmer qu'il a eu un rôle prépondérant dans l'élaboration de ces ouvrages, en particulier pour ce qui concerne la validation des illustrations, et de conclure que les ouvrages litigieux ne sont pas, selon ses termes, des 'ouvrages collectifs standardisés' mais bien des livres qui sont 'le reflet de sa personnalité', exprimée 'librement et pleinement', dès lors que la société Editions Larousse démontre (en pièces 8,9, 10, 10bis) qu'elle a eu un rôle prépondérant du début du processus de création jusqu'à la commercialisation de ces ouvrages (qu'il s'agisse de l'idée de départ, de l'élaboration du plan, de l'intégration des textes et des illustrations à la maquette, de la relecture et de l'assemblage final), encadrant, ce faisant, la liberté de création des contributeurs et harmonisant leurs créations ;
Qu'il suit que Monsieur Delalandre n'est pas fondé à poursuivre la requalification des contrats intitulés 'contrats oeuvres collectives' qu'il a signés le 22 avril 2005 en contrats d'auteur et qu'il doit être débouté de cette demande et de ses prétentions subséquentes portant, en particulier sur les clauses de rémunération, l'obligation de rendre compte ou la mesure de publication ;
Que le jugement mérite sur ce point confirmation ;
Sur les demandes indemnitaires présentées par les appelants :
Considérant que, visant les articles L 133-1 à L 133-4 du code de la propriété intellectuelle, Monsieur Delalandre sollicite le versement des sommes de 8.000 et de 1.000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'absence de reversement des droits d'auteur par la Société Française des Intérêts des Auteurs de l'écrit et par le Centre Français d'exploitation du droit de Copie (SOFIA et CFC) imputable, selon lui, à l'éditeur à qui il appartenait de percevoir ces droits et de lui reverser les sommes lui revenant ;
Mais considérant que ces sociétés de gestion collective ont pour mission de percevoir des redevances auprès des utilisateurs pour les répartir ensuite entre les titulaires de droits ; que la rémunération d'un contributeur à une 'uvre collective, comme au cas de l'espèce, n'ayant pas la nature d'une redevance de droit d'auteur, Monsieur Delalandre doit être débouté de sa demande à ce titre ;
Considérant que Monsieur Delalandre poursuit également la réparation du préjudice que lui a causé l'atteinte à son droit moral pour les ouvrages 'Mon premier Larousse des animaux', 'Les bobos', 'Mon petit jardin', 'Mon Atlas Larousse', 'Mon premier Larousse des Dinosaures', 'La parade des animaux', 'Mon premier Larousse à la mer', 'Sorcières et Cie', 'Monstres et dragons', 'Le grand livre du mercredi', 'Mon atlas du corps humain' et 'L'incroyable encyclopédie des Dinosaures' en faisant valoir que ce droit est perpétuel, inaliénable et imprescriptible, qu'il jouit du droit au respect dû à son nom et que la société Editions Larousse lui a dénié sa paternité sur ces douze 'uvres ;
Qu'il ajoute, s'agissant de l'ouvrage 'Mon petit Jardin', que la paternité ne lui en est pas attribuée mais l'est faussement à Messieurs Didier Willery et Remi Saillard ;
Qu'il soutient enfin que le défaut de reddition de comptes du fait de contrats improprement intitulés 'oeuvre collective' alors qu'il aurait dû s'agir de contrats d'auteur ne lui permet pas d'avoir accès à des informations nécessaires pour valoriser son travail et son succès auprès du public ;
Qu'il convient de considérer, ceci étant rappelé, que ce dernier chef de préjudice invoqué à ce titre ne saurait prospérer, eu égard à ce qui précède sur la qualification des contrats ;
Que si l'appelant reproche, par ailleurs, à l'éditeur de n'avoir mentionné son nom que 'de façon variable', 'souvent en pages intérieures', de ne pas utiliser 'systématiquement' le terme auteur mais, pour 'd'autres ouvrages' les termes 'conception et rédaction de ...', 'rédaction ...', 'écrit par...', 'texte...', force est de relever qu'il se montre singulièrement imprécis quant aux 'uvres exactement concernées par chacun de ces griefs, qu'en toute hypothèse, l'intimée lui oppose justement l'absence d'obligation de faire apparaître en couverture le nom des contributeurs à l''uvre collective et qu'il n'est pas démontré que l'emploi de termes ou d'expressions synonymes du mot 'auteur' à destination du public concerné puisse être considéré comme une cause de préjudice ;
Qu'en outre, à supposer même que les impressions d'écran issues de sites internet aient une valeur probante, le contenu des sites tiers dont Monsieur Delalandre fait état ne ressort pas de la responsabilité de la société Editions Larousse, comme elle le soutient ;
Qu'enfin, les réclamations de l'appelant relatives à l''uvre 'Mon petit Jardin' et qui tendent à se voir reconnaître des droits d'auteur sur cette 'uvre se heurtent à une fin de non-recevoir, comme il a été dit précédemment ;
Que Monsieur Delalandre doit, par voie de conséquence, être débouté de sa demande et le jugement confirmé à ce titre ;
Considérant que le SNC sollicite, de son côté, l'allocation d'une somme de un euro venant réparer l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession d'auteur ;
Qu'outre le fait qu'elle présente sa demande de façon lapidaire, sans caractériser l'atteinte et le préjudice précis qui en serait résulté, il semble ressortir de son argumentation sur sa recevabilité à agir qu'elle incrimine le fait que 'la société Editions Larousse a mis en place un système destiné, en qualifiant a priori d'oeuvrecollective l''uvre d'un auteur, à éviter le paiement de toute rémunération proportionnelle' ;
Mais considérant que la cour n'a pas retenu la fausse qualification imputée à faute à l'éditeur, de sorte que cette autre demande indemnitaire doit être rejetée ;
Sur les autres demandes :
Considérant que l'équité conduit à condamner in solidum Monsieur Delalandre et le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs - SNAC à verser à la société Editions Larousse une somme complémentaire de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que, déboutés de ce dernier chef de prétentions, les appelants qui succombent supporteront les dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS,
Vu l'ordonnance de rétractation de l'ordonnance de clôture du 24 octobre 2013 et la nouvelle clôture, selon ordonnance rendue le 30 octobre 2013 , fixant à la date du 30 octobre 2013 la date des plaidoiries et la décision de la cour retenant, en accord avec les parties, les dernières conclusions par elles mutuellement signifiées les 22 et 30 octobre 2013 ;
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Monsieur Delalandre au titre de ses demandes relatives à l'ouvrage 'Mon petit jardin' et, statuant à nouveau en y ajoutant ;
Déclare Monsieur Benoît Delalandre irrecevable à agir du chef de l'ouvrage 'Mon petit Jardin';
Déboute Monsieur Delalandre de ses entières prétentions ;
Condamne in solidum Monsieur Benoît Delalandre et le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs - SNAC à verser à la société par actions simplifiée Editions Larousse une somme complémentaire de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel, avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code civil.